La crise politique en Crimée doit être distinguée de la crise Ukrainienne. Cette dernière ne cesse d’enfler au niveau national comme à l’international. Elle prend toutefois une tournure un peu plus délicate que les autres crises diplomatiques récemment vécues, avec un déploiement des forces de la part des russes et des menaces militaires de part et d’autre de ce pays ancré historiquement dans la tradition soviétique de l’est, et séduit aujourd’hui ouvertement par ” the western dream”.
La crise de Crimée mérite un traitement distinct et non séparé de la crise Ukrainienne. D’une part parce que la Crimée n’est intégrée à l’Ukraine qu’en 1954 lorsque Kroutchef annexa cette Ile à sa terre natale et d’autre par car les populations sont très différentes. La Crimée est peuplée de tatars et de Russe déplacés par le régime soviétique. La Crimée est une presque île qui donne sur la mer noire, et c’est autour du contrôle des accès aux mers mer que réside la clef du conflit.
La Crimée fût d’une importance capitale pour l’empire russe puis l’union soviétique, et elle l’est de même pour la Russie contemporaine, car son contrôle est synonyme de contrôle des zones littorales de la mer noire. L’empire russe n’a pu devenir une puissance mondiale qu’après avoir mis la main sur ces terres au milieu de 18 ème siècle pendant le règne de Catherine II.
Entre 1856 et 1857 les français et les britanniques, en collaborations avec les ottomans, ont effectué l’un des plus grands débarquements marins sur la côte de Crimée pour affaiblir les russes et prendre contrôle de la base Sébastopol installé par la marine russe. Ils n’ont pas osé s’aventurer plus loin dans le territoire russe mais cette opération a affaibli l’empire pendant deux décennies et l’a empêché, entre autre, de jouer un rôle majeur sur la scène européenne. La Russie a réussi, en fin des années 1870 de reprendre le contrôle sur cette zone après la guerre turco-russe.
En effet le but russe était à cette époque de mettre la main sur les étroits de Bosphore et Dardanelles pour assurer à sa flotte basée en mer noir un accès sure vers la méditerrané et elle aurait pu l’avoir si elle aurait continué la première guerre mondiale avec ses alliées (la France, la grande Bretagne et les états unis) mais la révolution d’Octobre 1917 est venu mettre fin à l’implication russe dans cette guerre.
Après la deuxième guerre mondiale et la défaite de l’Allemagne nazie, La Crimée redevient russe La base militaire Sébastopol redevient une grande base militaire soviétique, mais avec l’intégration de la Turquie dans l’OTAN en 1952 cette base a perdu son importance et en 1954 la Crimée est, pour la première fois, Ukraine après une décision politique de l’état centrale de Moscou.
Sur le plan démographique, la Crimée est de majorité russe, surtout après la décision de Staline de punir les tatares, une communauté originaire de la Crimée, en les envoyant à Kazakhstan sous prétexte d’avoir soutenu les nazis pendant la guerre. en 1944 les russes représentaient 75% de la population cependant que les ukrainiens ne constituaient que 21% durant la même année.
Après la chute de mur de Berlin et la dislocation de l’URSS, la Crimée fait automatiquement partie de l’Ukraine et pendant les vingt dernières années, la Russe a dû faire des manœuvres politiques auprès des différents gouvernements ukrainiens pour garder sa flotte à Sébastopol, et le dernier accord signé date d’avril 2010 à Kharkov en Ukraine entre le président russe Medvedev et son homologue ukrainien Ianoukovitch ( juste après sa victoire dans les présidentielles ukrainiennes). Cet accord consiste à la permanence de la flotte russe dans la presque île de la Crimée jusqu’en 2042 contre 10 million de dollars versés annuellement par la Russie et une exonération de 30% sur l’exportation du gaz russe vers l’Ukraine.
Il faut avouer à ce stade que les puissances ” occidentales” représentées en l’OTAN et les états unis précisément, espèrent toujours cloisonner la flotte russe dans la mer noir et limiter sa marge de manœuvre, et vu que la légitimité de cette flotte sur les territoires ukrainiens dépend fortement de la direction politique du pays, les “occidentaux” voient de bon œil les mouvements de protestation politique en Ukraine, même si cela est accompagné d’une montée fulgurante de l’extrême droite dans ce pays.
Il est judicieux de rappeler aussi que sur les deux dernières décennies, la flotte russe dans cette zone est devenu moins puissante que celle turque, état membre de l’OTAN. Toute fois l’équilibre stratégique demeure stable pour des compromis historiques (les accords signés après la deuxième guerre mondiale) et conflictuelles contemporaines (la deuxième guerre d’Ossétie du sud qui opposa la Géorgie à la Russie et la crise syrienne récemment).
Cependant le retournement dans la situation politique en Ukraine a relevé des vives inquiétudes dans le camp russe car l’annulation de l’accord de Kharkov est quasi certaine*, il a donc soutenu les courants indépendantistes de la Crimée (tant étouffés par la Russie elle-même pendant les années 1990) et organisé un référendum en l’espace de deux mois pour que la population locale décide de son autodétermination, une population à 70% d’origine russe. Autant dire que l’exercice démocratique est de très peu d’utilité**.
(*) Même si la Russie a pris cette initiative d’une manière unilatérale après la destitution d’Ianoukovitch de ses fonctions.
(**) Dans ce scrutin il n’y avait que des bulletins pour (pour la réunification de la Crimée avec la Russie et adoption du droit de la Fédération de Russie 96% & pour Rétablissement de la constitution de la république de Crimée de 1992 et maintien du statut de la Crimée dans le cadre de l’Ukraine)
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