Organisations Internationales – Geolinks Observatoire en Géostratégie de Lyon Thu, 08 Jun 2017 17:25:51 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.6.1 Géopolitique de l’eau : La désertification /grands-enjeux/les-enjeux-geopolitiques/geopolitique-de-leau-la-desertification/ /grands-enjeux/les-enjeux-geopolitiques/geopolitique-de-leau-la-desertification/#respond Wed, 16 Nov 2016 16:33:40 +0000 /?p=8943 La Géopolitique de l’eau : désertification

 

 

Qu’elle soit naturelle ou produit de l’activité humaine, la désertification des sols pose des problèmes auxquels nous devrons faire face dans un futur proche. La Convention des Nations Unies définit la désertification comme la dégradation des terres dans les zones arides, semi arides et subhumide sèche, par suite de divers facteurs liés au climat ou à l’activité humaine.

Le problème grandissant depuis plusieurs décennies déjà, a poussé l’ONU en 1992 à proposer une convention mondiale sur la lutte contre la désertification.

Quels sont les enjeux géopolitiques de la désertification et comment lutter contre ce phénomène ?

Nous étudierons cela au cours de cet exposé en nous intéressant à une zone particulièrement touchée qui est le Sahel, cette bande qui longe le sud du Sahara qui était autrefois composée de pleines verdoyantes.

Nous nous pencherons dans une première partie sur les causes de la désertification, cela nous amènera à nous demander pourquoi la désertification est un enjeu géopolitique contemporain et enfin nous verrons qu’il y a des moyens de lutte contre ce phénomène.

 

Les scientifiques s’accordent à penser que la désertification est causée d’une part par le réchauffement climatique et d’autre part par l’activité humaine sur les zones concernées.

Le changement climatique global que connaît notre planète est un cercle vicieux où de nombreux facteurs rentrent en jeu, concrètement l’augmentation de CO2 dû à l’activité humaine en parallèle avec une déforestation massive à pour effet d’intensifier l’effet de serre et donc d’augmenter la température moyenne de la Terre. Les conséquences sont des dérèglements climatiques et dans notre cas les sols sont exposés à des brulures dues aux UV solaires, à l’érosion provoquée par le vent et l’écoulement de pluies rares et violentes. La terre devient érodée et stérile et forme des plaques désertiques appelées « zipelés ».

L’activité humaine locale est une autre composante importante de la désertification. Il est intéressant de noter qu’il n’y a pas seulement des causes modernes. Des indices laissent à penser que les humains, depuis près de 3000 ans, participent à ce phénomène en coupant le bois des forêts et en exploitant les terres. L’aggravation est cependant beaucoup plus importante au cours des deux derniers siècles. En effet, dans la zone du Sahel, la poussée démographique a eu pour conséquence une surexploitation des terres et du bois. Les terres sont surexploitées afin de produire plus de nourritures, la jachère n’est plus respectée et les sols deviennent stériles. La déforestation fragilise aussi les sols qui ne sont plus tenus par les racines des arbres et ceux ci ne peuvent pas repousser car les ruminants mangent sans cesse les jeunes pousses.

La désertification est donc un cycle qui “s’auto entretient” et qui est aggravé par l’activité humaine.

 

La désertification est en grand défi qui touche environ deux milliards de personnes de nos jours, sans compter que les prévisions démographiques prévoient qu’il faudra nourrir neuf milliards d’êtres humains d’ici 2050. Il n’est pas difficile d’imaginer que la géopolitique de l’eau sera donc un enjeu principal de notre futur. Les régions les plus touchées se situent en Afrique, au Nord et au Sud du Sahara, une grande partie de l’Asie orientale et centrale mais aussi en Amérique pour la partie Sud.

La conséquence majeur est une entrave au développement durable pour plusieurs raisons: la pauvreté des peuples qui tirent de moins en moins de ressources de l’exploitation des terres et  la réticence des investisseurs à investir dans ces zones sèches. Ces facteurs contribuent à la marginalisation de ces zones qui restent à l’écart du développement économique des pays.

Les populations de ces zones sont donc particulièrement affectées et il est difficile pour elles de relever leur niveau de vie. Un communiqué de la journée mondiale de la lutte contre la sécheresse et la désertification, en 2009 (du 17 juin), indique d’ailleurs que « la désertification, la dégradation des terres et la sécheresse menacent la sécurité humaine en privant des personnes de leurs moyens de vie ».

Ces populations sont confrontées à des situations de migration climatique que l’on peut qualifier d’exil forcé et il en découle des situations conflictuelles non négligeables sur la scène internationale. Nous allons maintenant voir comment la désertification des sols du Sahel peut être reliée à des conflits touchant l’ensemble de la planète.

Les peuples du Sahel, se trouvant dépourvus de leurs droits à la sécurité alimentaire, sanitaire et de l’accès à l’eau potable sont plus enclins à se tourner vers des organisations criminelles ou terroristes afin de profiter de la protection de ces groupes et des retombés économiques qui découlent des différents trafics organisés. La zone du Sahel qui s’étale sur plusieurs pays est maintenant contrôlée par les différents groupes terroristes et rebelles qui s’en servent d’arrière base pour leurs activités transnationales, avec le soutient consenti des populations.

Nous voyons ici que la désertification à des conséquences mondiales et que de lutter contre ce phénomène permettrait d’atténuer des chocs géopolitiques grandissants.

 

Il y a cependant des moyens de lutter contre la désertification et la France a mis en place certaines actions pour prendre part à ces projets. Par exemple cent millions d’euros par an sont dédiés aux actions de lutte contre la désertification dans les pays affectés. De plus de nombreuses ONG travaille à éduquer les populations afin de changer leur mode de travail de la terre, par exemple des systèmes de culture fondé sur le semis direct sous couverture végétale permet de stopper l’érosion des sols et de faciliter l’infiltration de l’eau.

Il y également le Comité Inter-Etat de Lutte contre la sécheresse dans le Sahel qui permet à des acteurs locaux d’accéder à des financements internationaux pour mettre en place des techniques simples et peu couteuses comme le zaï (les semis sont mis en place dans des trous remplis de compost).

Les objectifs de la lutte contre la désertification sont l’amélioration de la gouvernance locale, la diversification des activités pour relâcher la pression sur les ressources, la gestion de l’eau agricole et la conservation et l’amélioration de la qualité des sols. Ceci est détaillé en annexe dans le document « L’action extérieure de la France contre la dégradation des terres et la désertification »

Les  autres organisations luttant contre la désertification sont (liste non exhaustive) :

  • L’ONU
  • Le comité scientifique Français de la Désertification
  • Le Groupe Travail désertification : plateforme Française regroupant des ONG, scientifiques et collectivités locales
  • Réseau Désertification Sahel : Initiative Nord-Sud regroupant Burkina-Faso, Mali, Niger et France

 

Conclusion

 

Le processus de désertification qui caractérise la dégradation des zones arides, semi arides et subhumides sèches pour causes climatiques et humaines ont donc un impact géopolitique important sur les zones concernées. Comme dans la zone du Sahel où la pauvreté et la faim, dû à l’impossibilité d’extraire des ressources de la terre, poussent les populations à migrer ou à chercher de l’aide au niveau d’organisations rebelles ou terroristes. Cependant ce phénomène n’est pas irréversible et certains états dont la France participent à faire changer la situation. Une étude plus large pourrait consister à étudier les migrations de populations pour causes climatiques et les problèmes géopolitiques qui les accompagne.

 

Sources :

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Le TPP : Une mesure de « containment » ? /sans-categorie/le-tpp-une-mesure-de-containment/ /sans-categorie/le-tpp-une-mesure-de-containment/#respond Thu, 29 Sep 2016 09:54:53 +0000 /?p=12402 « A l’âge de la mondialisation et des guerres asymétriques, la réponse américaine aux enjeux du moment est fort différente (par rapport aux années 1970) : les nécessités du désengagement militaire les poussent à privilégier une stratégie géoéconomique afin de conserver leur ascendant géopolitique. Concrètement, Washington identifie aujourd’hui deux rivaux à encadrer : la Chine et la Russie. Il est frappant que les deux vastes traités de libre-échange négociés actuellement (le TAFTA et le TPP) réactualisent dans l’ordre économique et commercial l’ancienne logique du containment. Dans les deux cas, les rivaux sont non seulement exclus des négociations mais menacés par elles ». C’est en ces termes que Frédéric Munier, enseignant en géopolitique en classes préparatoires au lycée Saint Louis de Paris, qualifie la stratégie Américaine pour conserver son statut de puissance hégémonique à l’échelle mondiale dans le 7ème numéro du magazine « Conflits ».  « Containment », le mot est fort : c’était en effet le terme utilisé pour décrire la stratégie Américaine qui visait à stopper l’extension de la zone d’influence soviétique au-delà de ses limites atteintes en 1947, et à soutenir tous les États non communistes. Dès lors, en quoi l’accord de partenariat Trans pacifique (TPP), traité multilatéral de libre-échange  visant à intégrer les économies des régions Asie-Pacifique et Américaine, obéit-il à une mesure de « containment » ?

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Les Etats-Unis sont sur le déclin, économiquement et géopolitiquement, et ils en sont conscients. Le centre de l’économie mondiale bascule de l’Ouest, de l’Atlantique, vers l’Est, le Pacifique, l’Asie. L’obtention du « fast track » par Barack Obama, voté par le Sénat après de nombreuses réticences, lui octroyant un pouvoir de négociation accru dans la négociation du TPP, témoigne de l’empressement de ce dernier de redistribuer les cartes en sa faveur . En effet, les multiples échecs militaires (Afghanistan, Irak), les déficits abyssaux (La dette publique Américaine s’élève en 2015 à 18 milliards de dollars), la perte de l’hégémonie économique et la montée en puissance de rivaux menaçants (BRICS) sont autant de facteurs qui poussent les Etats-Unis à consolider leurs blocs géopolitiques en Europe et surtout en Asie, nouveau moteur de la croissance économique mondiale, dont ils entendent bien tirer profit. Cette focalisation sur l’Asie-Pacifique se traduit aussi par la présence militaire : actuellement, 60% de l’US Navy est présente dans le pacifique, contre 50% il y a quelques années. Le partenariat militaire avec le Japon, ennemi héréditaire de la Chine, a été renouvelé, tout comme les bases militaires à Guam, dans les Philippines ainsi qu’en Australie, à Darwin. Aux yeux de la Chine, une telle situation est interprétée comme une volonté d’endiguement de son territoire…

Le TPP est aujourd’hui le plus grand traité économique jamais réalisé : il représente en effet 40% du PIB mondial. En plus d’être un accord de libre-échange, il vise également à établir des normes communes entre les Etats signataires. Dès lors la Chine a tout à perdre face à un basculement des échanges en faveur des membres du TPP en Asie : selon le PECC, les pertes en termes de recettes pour la Chine pourraient s’élever à 34,8 milliards de dollars. Pourquoi un basculement des échanges aurait-il lieu ? Car le TPP inclut 12 des 21 membres de l’APEC, Etats avec lesquels Xi Jinping souhaite créer un traité de libre-échange concurrent, baptisé le FTAAP, traité qui avance à tâtons vu qu’il ne contient pas de calendrier de fin de négociations… Surtout, le TPP vise expressément les membres de l’ASEAN, pré-carré Chinois en termes d’exportations : il faut savoir que bien que les gains potentiels de la Chine, si le FTAAP venait à voir le jour, seraient moindres (+0,27% de PIB, toujours selon le PECC), l’économie Chinoise est extrêmement dépendante des exportations. Du point de vue des économistes Américains, le TPP n’est pas une mesure agressive, bien au contraire. Elle vise simplement à rééquilibrer les forces dans cette région du monde car, selon l’économiste Français Jean-Michel Quatrepoint : «Les Américains et leurs multinationales considèrent que le marché chinois n’est pas suffisamment accessible à leurs entreprises, que les chinois copient allègrement —ils n’ont pas tort —, ne versent pas de redevances quand ils copient, que, en plus, ils ne donnent pas un accès suffisant à leurs marchés aux groupes américains, et qu’ils privilégient les entreprises chinoises pour leur marché». En résumé, l’objectif des Etats-Unis est de un de réduire leur dépendance commerciale vis-à-vis de la Chine, en créant un réseau de partenaires en pleine croissance, et de deux d’étouffer les velléités Chinoises dans le Pacifique et en Asie… Du « containment » à l’état pur.

 

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La stratégie d’endiguement américaine trouve ses origines au XIXème siècle, sous la plume d’Alfred Mahan. Dans son livre intitulé «Géopolitique, constantes et changements dans l’histoire », le géopoliticien Aymeric Chauprade explique sa pensée comme suit : « En 1897, (…) Mahan définit la doctrine qu’il entend voir défendue par son pays. Elle recommande de : s’associer avec la puissance navale britannique dans le contrôle des mers, contenir l’Allemagne dans son rôle continental et s’opposer aux prétentions du Reich sur les mers, mettre en place une défense coordonnée des européens et des américains destinée à juguler les ambitions asiatiques ». On retrouve le même conflit terre/mer, et la même volonté d’étouffer les ambitions des puissances continentales qu’aujourd’hui. On peut aussi trouver ici les germes de l’OTAN et du TAFTA. Dans le même ouvrage, Mr Chauprade explique en quoi les puissances maritimes étreignent le « heartland » à défaut de l’atteindre, ce qui est aujourd’hui l’objectif du TPP : « La thèse centrale de Mackinder définit l’épicentre des phénomènes géopolitiques à partir du concept de centre géographique. C’est autour du pivot, du « heartland », que s’articulent toutes les dynamiques géopolitiques. Ce pivot de la politique mondiale est l’Eurasie, que la puissance maritime ne parvient pas à atteindre et son cœur intime est la Russie, qui occupe dans l’ensemble du monde la position stratégique qu’occupe l’Allemagne en Europe (…) Autour de cet épicentre des secousses géopolitiques mondiales, (…) s’étendent les terres à rivages. Au-delà des coastlands, deux systèmes insulaires viennent compléter l’encadrement du heartland : la Grande-Bretagne et le Japon ». Ce qui explique les relations étroites qu’entretiennent les Etats-Unis avec ces deux nations, qui peuvent être vues comme les « gendarmes » des Américains autour du bloc continental. L’ancien conseiller du président Carter et éminence grise du TAFTA, Zbigniew Brzezinski, s’inscrit lui aussi dans cette pensée. Toujours selon Mr Chauprade : «Brzezinski défend la logique d’endiguement par les Etats-Unis de la masse Eurasiatique :  les Etats-Unis ne pourront rester la superpuissance unique et globale que s’ils parviennent à isoler la Russie. Le leadership mondial des Etats-Unis passerait par une maîtrise américaine des zones occidentales, méridionales et orientales de l���Eurasie, autour du heartland. L’alliance Atlantique serait la garantie de contrôle de la zone occidentale (…) quant à l’influence Américaine dans la zone orientale, elle aurait fortement décru en Chine, au Viêt-Nam et dans les pays de l’Indochine mais resterait forte en Corée du Sud et au Japon. ». Il a conscience de la vulnérabilité Américaine et voit dans l’alliance du heartland une menace. Il faut isoler la Russie, via une alliance Atlantique et une alliance avec le Japon. Prise en étau à l’Ouest par le TAFTA et à l’Est par le TPP, La Russie se trouve bel et bien dans la position décrite précédemment, et lorsque l’on regarde les membres des deux traités sur une carte, l’isolement du bloc continental saute aux yeux.

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Mais les BRICS, et particulièrement la Chine et la Russie, premières victimes du containment, n’entendent pas se laisser abattre : Sous l’égide de la Russie, les BRICS se donnent les moyens de rivaliser contre les Américains. Cette année, la Russie a réussi à organiser le sommet de l’organisation de coopération de Shanghai et celui des BRICS. L’adhésion de l’Inde et du Pakistan à l’OCS a été acceptée et se concrétisera en 2016, et celle de l’Iran, normalement, suivra. Au-delà de l’économie, c’est un front anti hégémonique qui se construit. C’est une réaction à l’hégémonie américaine, et comme le précise Pascal Marchand dans « Conflits » : « Ce double et même triple sommet constitue un véritable tournant : les BRICS se donnent les moyens de résister à la puissance américaine et de se mettre à l’abri des sanctions économiques qu’elle peut décréter à tout moment, comme elle l’a fait en Crimée. Un véritable front anti-hégémonique serait en cours de constitution pour faire de « l’espace eurasiatique […] notre maison », selon la formule de Vladimir Poutine, à l’abri des intrusions étrangères ».   Les BRICS se donnent les moyens de riposter sur trois fronts : la finance, les nouvelles technologies, et surtout l’énergie. Ainsi en 2014, lors du sixième sommet des BRICS à Fortaleza, la création d’un fonds de réserve monétaire a été décidée, ainsi que celle d’une nouvelle banque de développement, concurrente de la banque mondiale de Washington. En cause, le refus du congrès Américain de valider la réforme du FMI de 2010 qui aurait augmenté les quotes-parts de la Chine, de l’Inde et du Brésil. Elle pourrait accorder ses premiers crédits cette année. Aussi, au sommet d’Oufa, la mise en place d’une station orbitale commune aux BRICS  a été décidée. Mais c’est surtout au niveau de l’énergie que la riposte s’articule : « En s’installant au Moyen-Orient, réservoir pétrolier de la planète, les États-Unis sont en train de contrôler la dépendance énergétique de la Chine. Pékin doit donc diversifier ses approvisionnements. C’est le sens des rapprochements que les Chinois tentent avec La Russie, l’Iran, L’Arabie Saoudite, le Venezuela et les pays Africains du golfe de Guinée. » C’est en ce sens qu’Aymeric Chauprade, dans son ouvrage « Chronique du choc des civilisations », nous décrit la nouvelle inflexion de la Chine en faveur de la Russie. En Mai 2014, par exemple, Pékin et Moscou se sont mis d’accord pour construire le gazoduc force de Sibérie à partir de gisements orientaux déconnectés des bassins travaillant actuellement pour l’Europe. Il explique aussi que bien que « La Chine pourrait être tentée par les immenses richesses de Sibérie Orientale, elle y investit de façon importante (…) mais pour l’instant la Chine a tout intérêt à ne pas assumer les frais d’aménagement et de gestion d’un espace naturellement difficile (…) de toute façon le seul débouché rationnel des matières premières de cette région est l’extrême –orient (…) par ailleurs la complémentarité entre Pékin et Moscou est forte en ce qui concerne la haute technologie ». Malgré des intérêts parfois divergents, les BRICS se rejoignent dans leur volonté d’émancipation vis-à-vis du pôle Atlantiste. Toujours dans le même numéro du magazine « Conflits », Pascal Gauchon explique que « Lors des récents sommets des BRICS et de l’OCS, (…) Xi Jinping a présenté les grandes lignes de sa réponse stratégique : soutenir la Russie, histoire de détourner l’oncle Sam de l’Asie-Pacifique, et s’assurer de la neutralité de l’Inde, cette dernière étant indispensable à la stratégie Américaine d’endiguement » car en effet « Les USA travaillent depuis des années à un rapprochement avec l’Inde. (…) en retour la Chine poursuit une politique de bon voisinage afin d’éviter un partenariat trop solide entre l’Inde et les USA. » La forte diaspora Indienne présente aux Etats-Unis en fait un partenaire naturel, mais l’Inde a conscience de l’intérêt qu’elle a de se rapprocher des pays membres de l’OCS, futur poids lourd de la scène économique mondiale. Mais ceci n’est pas sans intention, cette nation a conscience qu’à l’avenir elle pourra disputer le rôle de leader asiatique à la Chine, c’est pourquoi elle ne regarde pas forcément dans la même direction que cette dernière : « L’Inde travaille aussi avec ses voisins de l’est, notamment le Japon, espérant construire un triangle Inde-Japon-Etats-Unis capable de rivaliser avec La Chine (…) parallèlement les USA sont en train de déposséder l’allié traditionnel Russe de sa place de premier fournisseur d’armement ». Dans la culture Indienne, d’après «la théorie du Mandala» de Kautilya «Votre voisin est votre ennemi naturel et le voisin de votre voisin est votre ami» La question dès lors est de connaître la priorité de l’Inde : l’indépendance vis-à-vis de l’Occident ou voler le titre de leader Asiatique à la Chine ? Une telle situation pourrait faire voler en éclats la stratégie de bloc continental orchestré par la Chine et la Russie… Et les Etats-Unis le savent pertinemment… Quand la Chine et la Russie gardent une rancune historique envers l’Occident, l’une pour les « Traités inégaux » et l’autre pour la Guerre froide, l’Inde doit son rayonnement à l’influence Britannique, par la langue Anglaise.

En conclusion, on peut dire que cette stratégie, ce conflit qui ne dit pas son nom, s’inscrit dans la lignée des conflits entre les paysans (Heartland) qui pensent le temps et les marins (Les Etats-Unis) qui pensent l’espace, pour reprendre la terminologie du penseur Tunisien Ibn Khaldoun. Néanmoins, avec le recul, on peut citer plusieurs incohérences, voire des erreurs dans la stratégie Américaine : premièrement il faut noter qu’une des constantes géopolitiques de la Chine est qu’elle a toujours privilégié la terre au détriment de la mer… Alors que le propre du containment est de bloquer les puissances continentales en leur bloquant leur accès aux mers chaudes voire aux mers tout court (réf : Grand Jeu). Première incohérence. Ensuite, on peut se demander si, à long terme, la Chine et la Russie seront les principaux rivaux des Etats-Unis. C’est vite oublier que le continent affichant les plus gros taux de croissance ces dernières années est l’Afrique, malgré, évidemment, un retard énorme. On peut aussi se demander si l’ingérence brutale des Etats-Unis à l’étranger ne peut pas entraîner un effet boule de neige contre eux, et ainsi perdre de précieux alliés en plus d’affaiblir son Soft Power… Mais surtout, il convient de souligner un bouleversement majeur en Chine qui pourrait contrarier la stratégie Américaine : Les Etats-Unis souhaitent faire diminuer les exportations Chinoises en leur coupant l’herbe sous le pied en Asie du sud-est. C’est ne pas savoir que la crise actuelle en Chine résulte d’un déséquilibre : les prix des exportations Chinoises ont augmenté ces dernières années en raison de l’augmentation des salaires dans l’empire du milieu, elles sont donc moins compétitives sur le marché mondial. Les entreprises Chinoises elles-mêmes délocalisent au Vietnam. Or la demande interne ne suffit pas à compenser le déficit d’exportation. C’est pourquoi, depuis quelques temps, la politique économique Chinoise s’oriente de plus en plus vers une économie de la demande, au détriment des exportations, une demande d’un milliard quatre-cent millions d’individus, soit plus de quatre fois la population Américaine… en plus du projet Chinois de nouvelle route de la soie, autre moyen de contrer l’interventionnisme Américain au Moyen-Orient, visant à développer ses transports et ses apports énergétiques vers l’Europe, l’Asie centrale et l’Afrique. Le containment Américain ne fait qu’accélérer ce processus. Le grand défaut des marins est de trop s’éloigner pendant que les paysans continuent de cultiver…

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Petit Adrien

Janvier 2016

 

Sources

Numéro 7 du magazine Conflit

Chroniques du choc des civilisations, Aymeric Chauprade, édition Chroniques

Géopolitique, constantes et changements dans l’histoire, Aymeric Chauprade, éditions Ellipses

http://www.latribune.fr/economie/international/tpp-le-japon-et-les-etats-unis-confirme-la-signature-d-un-large-accord-510833.html

http://www.revueconflits.com/

http://blog.realpolitik.tv/

http://www.lexpress.fr/actualite/l-inquietude-de-l-inde-face-aux-actions-de-la-chine_1702886.html

http://www.chinausfocus.com/finance-economy/tpp-or-ftaap-what-it-means-for-us-and-the-asia-pacific-region/

http://chine.blogs.rfi.fr/category/tag-pour-votre-blog-encres-de-chine/apec-chine-zone-de-libre-echange-asie-pacifique-

http://www.latribune.fr/economie/international/asie-pacifique-pour-contrer-le-tpp-la-chine-relance-son-projet-de-plus-grande-zone-de-libre-echange-du-monde-521258.html

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ONU: 68 ans d’opérations de maintien de la paix : Quel bilan ? /risques-menaces-opportunites/12394/ /risques-menaces-opportunites/12394/#respond Mon, 26 Sep 2016 11:25:12 +0000 /?p=12394 Kofi Annan a déclaré que l’Organisation des Nations Unies est « la seule brigade de pompiers au monde à devoir attendre que le feu se déclare avant de demander un camion de pompiers ». En effet l’ONU ne disposant pas de forces propres, elle est, dans chacune de ses action, tributaire de ses Etats membres.

 

Les opérations de maintien de la paix ont, depuis leurs origines, connu un développement original. Issues du blocage du Conseil de sécurité, elles se sont développées de manière autonome et improvisée, toujours dans le but de préserver la paix partout où celle-ci était menacée. La première mission de maintien de la paix fut envoyée dès 1948 lors de la première guerre israélo-arabe (mission UNTSO), et était composée principalement d’observateurs militaires. Il ne s’agissait pas encore d’une intervention militaire, mais cette première opération établit l’un des principes fondateurs des OMP : l’importance du rôle du Secrétaire général dans la conduite des OMP. Elle est aussi considérée par l’ONU comme la première opération de maintien de la paix. Elle sera suivie par la mise en place du Groupe des observateurs des Nations unies entre l’Inde et le Pakistan (UNMOGIP, 1949), et de la Force d’urgence des Nations unies (FUNU I, 1956) qui formeront ce que Jocelyn Coulon et Michel Liégeois appelleront la « triade fondatrice des opérations de maintien de la paix ».

 

 

Le secrétaire général des Nations Unis, Dag Hammarskjöld s’appuya sur l’expérience dégagée de cette triade afin de théoriser la première doctrine du maintien de la paix, qui fait émerger trois concepts de base qui guideront alors les interventions onusiennes en matière de maintien de la paix : le consentement des parties au conflit, l’impartialité de la force déployée et un usage de la force coercitive strictement limité à la légitime défense.

 

 

Ce développement à tâtons a été renforcé par l’élaboration de documents successifs (Agenda pour la paix, Rapport Brahimi, Doctrine Capstone…), qui à l’issu se sont constitué comme véritable doctrine du maintien de la paix.

 

L’élaboration de cette doctrine par la pratique a eu comme avantage de donner une relative autonomie dans les buts et les moyens d’actions des OMP. En effet le Secrétaire général, et le DOMP restent les acteurs principaux et quasiment exclusifs du maintien de la paix au sein de l’ONU. Cette doctrine, bien qu’encore en constante évolution, a su établir un cadre aux opérations de maintien de la paix, leurs faisant ainsi quitter leur tradition d’improvisation pour une mise en œuvre plus structurée.

 

Pourtant la marge de manœuvre du DOMP reste extrêmement limitée. Les premières réussites des OMP, l’élargissement et la diversification des menaces après la guerre froide, ainsi que la volonté des Etats membres d’utiliser les opérations de paix dans de nombreuses situations différentes, ont conduit à un accroissement progressif des missions de maintien de la paix, sans que la doctrine ou les ressources leur étant allouées ne soient revues à la hausse.

 

En effet, si le DOMP est relativement indépendant, il ne dispose néanmoins pas de ressources propres. Son budget est réduit et dépend exclusivement du bon vouloir des Etats membres et ses troupes et matériels sont mis à disposition par les Etats contributeurs, sur la base du volontariat. Ce faisant, il lui est impossible d’adapter sa doctrine sans prendre en compte les recommandations des Etats qui lui fournissent ses moyens d’actions. Il existe une relation directe entre le conseil de sécurité et le secrétaire général, qui lui permet d’influer

 

largement sur l’élaboration de la doctrine, notamment dans les buts qu’elle poursuit. Les contributeurs financiers, pour la grande majorité des pays occidentaux, font également partie du conseil de sécurité et peuvent ainsi avoir un contrôle direct sur les opérations de maintien de la paix, et ainsi imposer leur vision du maintien de la paix. Un retard, volontaire ou non, de paiement, et une diminution des contributions sont d’autres outils à la disposition de ces Etats pour se faire entendre.

 

 

Au-delà de la participation financière, les Etats contributeurs en contingents exercent eux aussi une influence certaine. Celle-ci se présente de manière détournée du fait du manque de liens directs entre les contributeurs, le plus souvent des pays en voie de développement, et les autres acteurs du maintien de la paix : Conseil de sécurité, secrétaire général et DOMP. Ainsi une véritable lutte d’influence s’est installée au sein de ces institutions, entre les Etats contributeurs, sous représentés, et les Etats membres du Conseil de sécurité et payeurs. Il s’agit en effet pour les contributeurs en troupes de posséder une voix, ou du moins un droit de regard sur le déroulé des opérations dans lesquelles leurs hommes seront déployés et pourraient potentiellement trouver la mort. Actuellement les contributeurs en contingents ne prennent pas part aux prises de décisions, alors même qu’ils restent responsables des résultats de ces opérations devant leurs opinions publiques nationales, et qu’ils sont souvent les mieux informés sur les difficultés que rencontrent leurs contingents sur le terrain.

 

Cette rivalité est aussi alimentée par le fait qu’elle s’inscrit aussi dans une lutte entre pays occidentaux dominants, et pays en voie de développement, désireux de se faire une place sur l’échiquier international. Il arrive bien souvent que ces conflits parasitent l’action du DOMP, réduisant l’efficacité des opérations de maintien de la paix, et remettant en cause la vocation universelle au cœur du maintien de la paix. Le manque de dialogue entre les décideurs des OMP et les contributeurs incite également ces derniers à faire pression sur les troupes qu’ils mettent à disposition et sur tous les acteurs du maintien de la paix, afin d’obtenir des garanties quant à l’usage qui est fait de leurs hommes

 

 

L’influence exercée par les contributeurs se rapproche de celle que possèdent les armées nationales. Le désir de conserver un certain contrôle sur ses troupes, la réticence vis à vis des mandats relativement contraignants des OMP, le doute dans les capacités d’un Etat-major disparate et inexpérimenté de mener à bien ces opérations conduisent bien souvent les armées nationales à tenter de conserver une certaine influence sur les hommes déployés dans les OMP. Cette influence, facilitée par l’essor des moyens de communication en temps réels, réduit considérablement la marge de manœuvre des commandants onusiens et impacte l’efficacité des opérations.

 

Il n’est alors pas rare de voir les armées les plus développées tenter d’imposer des modèles qui leur sont propres à l’ensemble des contingents onusiens. Cela est justifiable par volonté d’accroitre l’efficacité opérationnelle des casques bleus, mais entraine aussi le risque de voir l’armée la plus puissante et la plus expérimentée influencer, par le biais d’une organisation qui se veut universelle et égalitaire, les doctrines et moyens des armées d’autres Etats, souvent bien moins développées. Par extension c’est toute la doctrine onusienne de maintien de la paix qui va subir les conséquences de cette lutte d’influence.

 

Nous avons donc vu que la doctrine onusienne est le théâtre de conflits et de luttes d’influences entre Etats membres qui agissent au nom de leurs intérêts propres. Bien qu’elles aient su se développer dans une relative autonomie, les OMP sont aujourd’hui encore largement tributaires de ces Etats. Ces derniers peuvent utiliser le maintien de la paix comme d’un outil stratégique de plus sur la scène internationale pour imposer leur puissance, au détriment des objectifs propres au maintien de la paix, qui connaît aujourd’hui une certaine désillusion.

 

L’ONU, si elle veut pouvoir atteindre ses objectifs de manière optimale, délivrée des frictions qui opposent les différents acteurs étatiques du maintien de la paix, doit apprendre dépasser les visions réalistes des Etats qui la composent, et développer une réflexion totale sur la doctrine à mettre en place, sous peine de connaître les mêmes travers que la Société des Nations.

Elle doit alors continuer son évolution vers une plus grande autonomie et professionnalisation de sa doctrine, notamment sur les moyens mis à disposition pour les OMP. De nombreux acteurs réfléchissent aux meilleurs moyens d’atteindre cette autonomie. Il en ressort un besoin de redéfinir strictement les missions laissées à l’ONU, et d’agir en coopération avec d’autres acteurs, notamment les alliances régionales, ou autres coalitions, afin d’atteindre aux mieux ses objectifs, tout en respectant les limites inhérentes au maintien de la paix onusien. Pour certains, l’externalisation par la privatisation des OMP serait l’une des pistes de réflexion à creuser afin de se libérer au mieux de l’influence étatique.

 

Toutefois une doctrine du maintien de la paix reste nécessairement contrainte par le caractère purement diplomatique des Nations Unies, qui repose entièrement sur le principe du consentement des parties. Ainsi toute évolution ne pourra se faire que lentement, étape par étape, après de longues discussions et d’âpres négociations.

 

Ainsi l’action de l’ONU sera toujours prisonnière des critiques qui condamnent son inefficacité et sa lenteur. A celles-là il faut rappeler que le maintien de la paix a le mérite d’exister, de se développer, et d’agir pour permettre l’achèvement d’une paix mondiale.

Loïc Balayn

Février 2016

 

Travaux cités :

 

1             Site officiel des opérations de maintien de la paix de l’ONU. URL : http://www.un.org/fr/peacekeeping/issues/military.shtml.

 

2             COULON Jocelyn, LIÉGEOIS Michel, « Qu’est-il advenu du maintien de la paix ? L’avenir d’une tradition », Institut Canadien de la Défense et des Affaires Etrangères, 2010, pp. 1-58.

 

URL : http://www.psi.ulaval.ca/fileadmin/psi/documents/Documents/Documents/QU_EST-IL_ADVENU_DU_MAINTIEN_DE_LA_PAIX.pdf

 

3             BOUTROS GHALI, L’Agenda pour la Paix, A/47/277, S/24111, 17 Juin 1992. URL : http://www.un.org/fr/documents/view_doc.asp?symbol=A/47/277

 

4             BRAHIMI, Lakhdar, Rapport du groupe d’étude sur les opérations de paix de l’ONU, A/55/305-S/2000/809,Aout 2000.

URL : http://www.un.org/fr/peacekeeping/sites/peace_operations/

 

5             DEPARTEMENT DES OPERATION DE MAINTIEN DE LA PAIX, DEPARTEMENT DE L’APPUI AUX MISSIONS, Opérations de maintien de la paix : Principes et orientations, 18 janvier 2008. pp. 8.

 

URL : http://www.un.org/fr/peacekeeping/documents/capstone_doctrine_fr.pdf

 

6             TARDY Thierry. « Chapitre 3. L’Organisation des Nations unies : l’éternel recommencement ? p. 80-83.

 

7             LIEGEOIS Michel, « Quel avenir pour les Casques bleus et le maintien de la paix ? », Politique étrangère 3/2013 (Automne), p. 65-71.

URL : www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2013-3-page-65.htm

 

8             GUEHENNO Jean-Marie, « Maintien de la paix : les nouveaux défis pour l’ONU et le Conseil de sécurité », Politique étrangère N°3-4 – 2003 – 68e année pp. 689-700.

URL: home/prescript/article/polit_0032-342x_2003_num_68_3_1247.

 

 

9             BEIGBEDER Yves, « La crise financière des Nations Unies et les travaux du Comité des Dix-huit », Annuaire français de droit international, volume 32, 1986. pp. 426-438.

URL : home/prescript/article/afdi_0066-3085_1986_num_32_1_2727.

 

10           TRINQUAND Dominique (Général), « L’Organisation des Nations Unies et les influences qui s’y exercent dans la gestion des crises », Lettre de l’IRSEM n°3, 2013.

URL : http://www.defense.gouv.fr/irsem/publications/lettre-de-l-irsem/les-lettres-de-l-irsem-2012-2013/2013-lettre-de-l-irsem/lettre-de-l-irsem-n-3-2013/dossier-strategique/l-organisation-des-nations-unies-et-les-influences-qui-s-y-exercent-dans-la-gestion-des-crises

 

11           VOELCKEL Michel, « Quelques aspects de la conduite des opérations de maintien de la paix », Annuaire français de droit international, volume 39, 1993. pp. 75.

URL : home/prescript/article/afdi_0066-3085_1993_num_39_1_3122

 

12           Voir l’exemple de la FINUL.

MICHEL Benoît, « Maintien de la paix robuste : le cas de la FINUL renforcée », Politique étrangère /2, 2011, pp. 403-408.

URL : www.cairn.info/revue-politique-etrangere-2011-2-page-403.htm

 

  • MADONNA Pascal, « Vers l’externalisation du maintien et de la consolidation de la paix ? », Etudes géostratégiques, 22 janvier 2013.

 

  • BANEGAS Richard, « De la guerre au maintien de la paix : le nouveau business mercenaire », Critique internationale, no 1, automne 1998, p. 179-194.
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La Finlande et l’OTAN: la problématique adhésion /grands-enjeux/les-enjeux-geopolitiques/la-finlande-et-lotan-la-problematique-adhesion/ /grands-enjeux/les-enjeux-geopolitiques/la-finlande-et-lotan-la-problematique-adhesion/#comments Fri, 02 Jan 2015 15:31:49 +0000 /?p=10921  

Le 19 décembre 2014, le premier ministre de la Finlande Alexander Stubb a fait un discours devant les médias dans lequel il a estimé indispensable l’organisation d’un référendum portant sur la question de l’adhésion du pays à l’OTAN. D’après lui, cette mesure sera largement soutenue par le peuple finlandais de par le fait qu’elle s’inscrit pleinement dans le cadre de la politique extérieure de la Finlande (avec la Suède, son pays voisin qui va suivre le même chemin de l’adhésion).

En revanche, le président Sauli Niinistö, soutenu par le ministre des affaires étrangères Erkki Tuomioja, a remarqué que l’adhésion de la Finlande à l’Alliance atlantique ne fera qu’amplifier les tensions dans la région.

Nous allons nous pencher sur les origines et les subtilités de la politique finlandaise actuelle afin de tenter de répondre à la question suivante, à savoir quelles sont les perspectives de l’adhésion de la Finlande à l’OTAN.

 

Historique

La longue histoire des relations russo-finlandaises est tout sauf un long fleuve tranquille. A l’époque, le Grand Duché finlandais faisait partie de l’Empire russe et bénéficiait des droits très élargis : les Finlandais avaient leur propre Constitution, monnaie et calendrier. La tentative de Nicolas II de «russifier» la Finlande a suscité une vive opposition de la part des patriotes locaux : désigné par les autorités russes, le gouverneur Nicolaï Bobrikov a été tué. En décembre 1917, la Finlande proclame son indépendance ; c’était le premier pays qui a reconnu le pouvoir du nouveau gouvernement bolchévique.

Depuis l’acquisition de l’indépendance, la Finlande a été en guerre avec la Russie quatre fois. En 1918-1920, pendant les péripéties de la guerre civile russe, les Finlandais ont profité du moment et ont lancé une offensive de grande envergure en Carélie, allant jusqu’à Petrozavodsk. Conformément au traité de paix de Tartu, la Russie soviétique a accepté de nombreuses concessions territoriales importantes. Malgré cela, les nationalistes finlandais considérent ce traité de «honteux» même aujourd’hui.

Un autre conflit est survenu en hiver 1921-1922 : les Finlandais ont soutenu les séparatistes de Carélie, mais ont dû subir une défaite au final.

En 1920-1930 l’extrême-droite finlandaise a fait la propagande massive du concept de la «Grande Finlande», les partisans les plus ardents proposaient de redéfinir la frontière entre les deux pays, la traçant le long du fleuve de l’Ienisseï.

Durant la Guerre d’Hiver (1939-1940), l’armée soviétique a subi plusieurs pertes humaines, mais a finalement remporté la victoire, en arrachant 11% du territoire finlandais. La tentative de revanche durant la guerre-suite (la Seconde Guerre mondiale) s’est avérée encore par un échec. En 1944, au moment où l’armée rouge a repoussé les Finlandais de Léningrad et les pays de l’Axe (Berlin-Rome-Tokyo) pnt pris la retraite sur tous les fronts, la Finlande a choisi de se retirer de la guerre en concluant un pacte de paix avec des alliés.

 

Finlandisation

Pour la Finlande, la Seconde Guerre mondiale s’est terminée le 10 février 1947, la date à laquelle le traité de Paris a été signé. Le mauvais choix des alliés, ainsi que des tentatives de revanche militaire ont coûté au pays des territoires perdus et d’importantes indemnités à verser aux vainqueurs.

L’après-guerre pour la Finlande est une période de réflexion amère. Après l’échec du pays dans la Seconde Guerre mondiale, le ministre de la Justice et le futur président Urho Kekkonen a trouvé le courage pour parler au peuple : «Nous ne pourrons jamais avoir la même situation que nous avions eu avant la guerre».

Dans les années qui suivent, la politique finlandaise de voisinage a été définie par la ligne Paasikivi-Kekkonen dont le but était de démontrer l’esprit pacifique envers l’Union soviétique. Le 6 avril 1948 l’URSS et la Finlande ont conclu un traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle, selon lequel Helsinki reconnaissait les intérêts stratégiques de l’URSS et promettait de garder la neutralité, ayant en retour la possibilité de garder la démocratie parlementaire, l’économie de marché et surtout sa souveraineté. Cette politique aura le nom de «finlandisation».

Le président finlandais Juho Kusti Paasikivi voulait rassurer Moscou que la Finlande ne présentait pas la menace pour l’URSS, et que le risque d’une attaque militaire en provenance du territoire finlandais était impossible. Paasikivi a contribué au renforcement des relations de bon voisinage avec l’Union soviétique, tout en gardant pourtant une certaine distance avec Moscou. La Finlande restait une partie du monde occidental et n’envisageait pas la possibilité de devenir un jour un pays-satellite de l’URSS.

La «finlandisation» était largement utilisée par les Finlandais pour satisfaire les besoins de leur économie, ravagée par de nombreux conflits militaires. Les relations ont été construites selon le principe «donnant donnant» : les commandes sovétiques ont contribué au développement de l’industrie finlandaise, Helsinki obtenait des matières premières soviétiques à des prix inférieurs à ceux du marché ; de son côté, la Finlande se montrait loyale, en supprimant des films et des livres anti-communistes et en extradant des citoyens soviétiques qui ont voulu quitter l’URSS.

La propagande des relations amicales russo-finlandaises a fini par payer : les dirigeants finlandais ont enfin gagné la confiance de Moscou.

 

Neutralité perdue

La chute de l’URSS a donné à Helsinki un large éventail d’opportunités : trop occuppée par sa situation interne, l’Union soviétique n’était pas en mesure de défendre ses propres intérêts. Mais les autorités finlandaises ont priviligié une approche sobre : ayant cessé d’être une superpuissance, la Russie demeurait toujours un acteur majeur sur l’échiquier international, même si elle était en train de vivre un moment difficile de son histoire. En 1991 la Finlande a résilié la traité d’amitié, de coopération et d’assistance mutuelle dans le seul but de conclure le même mais avec la Russie qui a succédé à l’Union soviétique. En matière de la sécurité, le point 4 du traité prévoyait une obligation pour les deux Etats de ne pas fournir le libre accès à son territoire dans le cadre de l’agression armée contre l’autre partie et de ne pas accorder une assistance militaire à l’agresseur.

En 1995, la Finlande a rejoint l’Union européenne. Cette adhésion siginifiait l’abandon réel du statut de neutralité, la politique étrangère finlandaise dépendant désormais de la volonté de Bruxelles. Parallèlement à l’approbation de l’inclusion de l’armée finlandaise dans les forces armées européennes, la Finlande se rapproche de l’OTAN en rejoignant en 1994 le «Partenariat pour la paix », un programme de l’Alliance. La Finlande a envoyé ses casques bleus en Bosnie, Kosovo et Afghanistan, mais le Parlement finlandais insiste toujours sur son statut du pays non-aligné.

Si la question de l’appartenance à l’OTAN a toujours été présente sur l’arène politique finlandaise, elle devient pour la première fois un point abondamment abordé pendant les élections présidentielles de 2006. Le candidat Sauli Niinistö a déclaré que la Finlande fera inévitablement partie de l’OTAN, mais la victoire aux élections a été remportée par Tarja Halonen qui s’exprimait contre l’adhésion à l’Alliance.

L’opinion politique finlandaise, majoritairement bienveillante vis-à-vis de son voisin oriental, n’était pas perturbée par la guerre entre la Russie et la Géorgie en 2008. Bien au contraire, la Finlande prend le côté de la Russie : le premier ministre à l’époque, Matti Vanhanen, a souligné que la Finlande n’avait pas l’intention d’adhérer à l’OTAN et que la principale leçon à tirer de ce conflit est la nécessité de tisser les liens plus étroits avec les Russes.

 

La crise en Crimée

La donne change avec la crise en Crimée. Le 2 mars 2014, le président Niinistö a rassemblé une union en urgence de la Commission gouvernementale sur la politique étrangère et de sécurité. Malgré de nombreux reproches des autorités finlandaises vis-à-vis des actions de Moscou, la Finlande exprime sa volonté de servir de médiateur dans le dialogue entre l’Union européenne et la Russie. Le ministre des affaires étrangères Erkki Tuomioja a remarqué qu’il faudra « de longues négociations impliquant la participation du Conseil de l’Europe et de l’OSCE, et en aucun cas la décision finale ne devra signifier la victoire de uns et l’échec des autres ».

Aujourd’hui en Finlande on observe une certaine « mise à jour » dans la conscience du peuple finlandais concernant l’adhésion à l’OTAN dans la lumière de la situation en Ukraine. On se demande si c’est raisonnable de garder le statut du pays non-aligné, étant donné que la situation géopolitique internationale a radicalement changé.

En avril 2014, la Finlande a signé un accord d’entente avec l’OTAN mais le ministre de la Défense Carl Haglund a souligné que ce document ne représente en aucun cas un pas vers l’adhésion à l’Alliance. Ainsi, il n’y a pas eu de transition politique concernant ce sujet : le gouvernelent a reporté ce débat aux élections législatives qui auront lieu en 2015.

 

Fraction sur tous les fronts

D’après les experts, malgré le prognostic, la question sur l’adhésion à l’OTAN ne va pas essentiellement alimenter les débats pendant les élections législatives : « Elle est trop sensible, la plupart des partis (voire tous) ne voudront pas la mettre au centre de leurs programmes de campagne de peur de froisser l’électeur ».

En effet, les sondages effectués en septembre 2014, montrent que le peuple finlandais ne voit pas son pays parmi les membres de l’OTAN. 57% de la population se sont prononcés contre l’adhésion, 26% – pour, et 17% n’ont pas exprimé leur opinion. De même, aucun grand parti politique n’avait d’opinion claire à ce sujet.

La fermeté parlementaire est très importante, car même si le président Niinistö se prononce prudemment en faveur de l’adhésion, la décision finale ne lui appartient pas. En effet, depuis 2000, les questions de la politique étrangère sont adoptées conjointement avec le gouvernement, d’après la nouvelle Constitution.

En même temps, les Finlandais sont méfiants par rapport à la politique menée par l’OTAN. La plupart de la population finlandaise ��tait contre l’intervention en Irak en 2003. On peut y ajouter le scepticisme croissant vis-à-vis de l’Union européenne, surtout dans la lumière des sanctions décidées par Bruxelles qui ont beaucoup nui à l’industrie finlandaise.
A l’heure actuelle, la Finlande ne veut pas irriter son voisin, mais il est très important de comprendre que les autorités finlandaises vont agir en fonction de la position de la Russie qui devra soigneusement calculer les conséquences de sa politique étrangère. Bien évidemment, la Russie n’est pas intéressée de remplacer un Etat neutre et les frontières tranquilles par des bases militaires de l’OTAN à sa porte, mais tout faux pas stratégique peut donner un espoir aux partisans de l’adhésion de la Finlande à l’OTAN.

 

Bibliographie :

Henrik Meinander «Histoire de la Finlande » (« Finlands historia. Linjer, strukturer, vändpunkter »), Editions Tout le monde, 2008, 248 pages.

I.Jurgens, S.Kulik « Sur les perspectives du développement des relations entre la Russie et l’OTAN ». –  Editions de l’Institut du Savoir Contemporain, octobre 2010, 71 pages.

Reynolds David « The Origins of the Cold War in Europe: International Perspectives ». — Yale University Press, 1994.

Nadejda Ermolaieva « Quelle adhésion de la Finlande à l’OTAN ? », Rossijskaia Gazeta, 24 juin 2014.

Jonathan Marcus « Nato faces up to crises on its borders », BBC Europe, 3 septembre 2014.

Andrei Malyshkine « La Fédération de Russie encerclée d’ « amis » : la Finlande et la Suède prévoient d’adhérer à l’OTAN », RIA Novosti, le 3 septembre 2014.

Aleksei Kuprianov « La chaude neutralité finlandaise : la Finlande, va-t-elle adhérer à l’OTAN ? », Lenta.ru, 28 novembre 2014.

 

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La Supranationalité /institutions/organisations-internationales/la-supranationalite/ /institutions/organisations-internationales/la-supranationalite/#comments Fri, 19 Dec 2014 15:19:34 +0000 /?p=8117 « L’Europe est un Etat composé de plusieurs provinces. »

Montesquieu annonçait déjà au XVIIIe siècle le principe de supranationalité dont l’Union Européenne est aujourd’hui l’exemple le plus abouti.

« La Supranationalité » se situe au-dessus des Etats. On parle « d’organisme supranational » pour désigner une organisation qui regroupe plusieurs nations et qui exerce un pouvoir supranational, supérieur à ceux des Etats-nations membres, sur certains sujets.

Le concept de supranationalité s’oppose au principe de « souveraineté » d’un Etat, décrit dans l’article 3 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, et selon le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation, qui exerce un pouvoir suprême.

Quelles sont les conditions requises pour qu’une organisation puisse être considérée comme un ordre supranational ? La supranationalité est-elle vraiment réalisable à long terme ?

a.   Les niveaux d’intégration des Etats dans les organisations internationales

L’objectif d’une institution supranationale est d’affirmer l’unité de différents Etats sur certains sujets. Les Etats peuvent être plus ou moins intégrés au sein de l’organisation.

Certains sont d’ordre économique, et mettent en place des accords de libre-échange commerciaux. C’est le cas par exemple de la communauté économique Mercosur crée en 1991, qui établit un marché commun entre les pays d’Amérique du Sud ; et de l’ALENA (Accord de Libre-Echange Nord-Américain) datant de 1994, qui crée une zone de libre-échange et assouplit les barrières douanières entre les Etats-Unis, le Canada et le Mexique. D’autres organisations supranationales, comme l’Union Africaine, ont des objectifs plus étendus et l’intégration des Etats est plus forte. Etablie en 2002, l’organisation a des objectifs économiques, politiques et législatifs, comme par exemple de promouvoir la démocratie et le respect des droits de l’homme,  et de créer une union solidaire entre les Etats d’Afrique.

A ce jour, l’Union Européenne est considérée comme la seule organisation reconnue comme disposant d’un pouvoir supranational officiel. C’est le système le plus intégré à ce jour, à la fois d’ordre politique, législatif, économique et monétaire, avec une zone de libre échange et de libre circulation garantie par les Accords de Schengen. L’organisation est souveraine par rapport à ses Etats membres : les Etats-nations renoncent à une partie de leur souveraineté, qu’ils délèguent à l’organisation supranationale. Contrairement aux organisations intergouvernementales – où chaque Etat et institution disposent de pouvoirs souverains égaux entre eux –, le pouvoir supranational est supérieur aux pouvoirs souverains des Etats-membres.

Le concept de « l’Europe supranationale », a été évoqué pour la première fois par Robert Schuman le 9 mai 1950, lors de la création d’une nouvelle forme de coopération politique européenne, la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier (CECA). Son but, d’ordre économique, était de mettre en place une liberté de circulation du charbon et de l’acier dans un marché unique, afin d’établir une solidarité et de relancer les économies européennes d’après-guerre. Cette organisation visait aussi à intégrer politiquement et économiquement les pays d’Europe de l’Ouest, afin de rétablir la stabilité. En 1957, à la suite du Traité de Rome, la CECA est remplacée par la Communauté Economique Européenne (CEE) et élargit le marché commun, à l’ensemble des échanges économiques en général. La Communauté européenne de l’énergie atomique « Euratom », sera aussi créé par ce même traité. En 1967, ces trois organisations supranationales vont être remplacées par la Communauté Européenne. L’Europe s’intègre de plus en plus politiquement et économiquement, jusqu’au Traité de Maastricht de 1991 et la fondation de l’Union Européenne. L’organisation fondée sur un accord interétatique : les Etats membres sont égaux en droit. Les Etats-membres de l’UE délèguent certains pouvoirs de décision.

Par ailleurs, on peut relever que l’ONU n’est pas une organisation supranationale : elle a seulement un avis consultatif et ne représente pas un gouvernement, mais les pays et les peuples. Son but est la résolution de conflits internationaux et le maintien de la paix.

b.   La question particulière de la législation

Le droit supranational s’impose sur le droit constitutionnel des Etats membres de l’organisation supranationale. Si aucune règle supranationale ne s’applique à une situation donnée, on applique par défaut le droit constitutionnel de l’Etat.

Au niveau de l’Union Européenne, l’organisation exerce le droit communautaire, qui s’applique à tous les Etats membres et aux institutions. Ce droit s’impose aux Etats membres de l’UE et rassemble les traités et textes communs établis au sein de l’organisation. La Cour de Justice de l’Union Européenne CJUE est un organe juridique indépendant des Etats-membres, et garantit des règles de droit communautaire. Les Etats membres ont pour obligation de faire appliquer la législation de l’Union Européenne au sein de leurs juridictions nationales. Lorsqu’une loi est votée à la majorité, tous les Etats-membres sont obligés de l’appliquer au niveau national, même pour ceux qui l’on rejetée.

Dans la pratique : La supranationalité est-elle vraiment réalisable à long terme ?

a.   Une construction longue et difficile de l’UE

L’UE est le résultat d’un long processus de changement des mentalités au sein de l’Europe. La question de la supranationalité et la mise en place d’un ordre supra-étatique ont souvent été délicates à faire accepter, et le terme lui-même de supranationalité a parfois disparu des discours politiques. L’idée d’un ordre politique placé au-dessus d’une entité nationale a été dans le passé difficile à accepter dans les mœurs. En France, le général De Gaulle était le principal acteur contre la construction supranationale de l’Europe, et défendait son idée de «  l’Europe des patries », où la souveraineté nationale des Etats était primordiale. De même, le gouvernement britannique de Margaret Thatcher s’y est aussi opposé, refusant de transférer sa souveraineté à un ordre supranational, jugeant que cela réduirait sa puissance et son influence à l’échelle internationale. Aujourd’hui encore, la tentation est grande de remettre en cause la supranationalité de l’Union Européenne.

b.   La supranationalité ou plus simplement, une convergence d’objectifs ?

La construction de la supranationalité en Europe a finalement réussi, grâce à la conjonction de certains critères. Tout d’abord, une expérience commune de la guerre, et une nécessité de se reconstruire ensemble. Ensuite, la concentration de l’union sur des petits territoires nationaux, de tailles équivalentes. La répartition des richesses naturelles est également relativement homogène et les Etats membres sont économiquement stables. Une condition fondamentale est d’avoir affaire à un groupe de nations démocratiques. Enfin, une convergence de points de vues sur l’évolution de la société, par exemple, relatif au droit de la famille, droit de vote, égalité des chances, ou religion.

Ces critères sont rarement tous réunis. Le modèle européen pourrait-il s’appliquer à d’autres régions du monde ? La première limite est le refus d’une autorité supérieure à la souveraineté des Etats-nations membres. En effet, appartenir à une organisation supranationale implique d’abandonner partiellement l’autorité d’un Etat membre sur certains sujets. Cette contrainte pourrait être inconcevable pour certaines nations, qui n’admettraient pas d’ingérence dans leur gouvernance.

D��autre part, la prise de décision supranationale doit être basée sur la majorité des votes, et s’imposer aux membres, même s’ils se sont opposés à certaines décisions.  De plus, les territoires doivent être bien délimités et stables, à l’abri de revendications de la part des pays voisins. La disparité des situations économiques des éventuels Etats-membres peut être un frein à l’établissement d’une organisation supranationale, sans parler des conflits ethniques, religieux, sociaux, qui agitent régulièrement les régimes politiques.

 

Face aux difficultés de la mise en place d’une supranationalité, on peut se demander s’il ne serait pas plus simple d’avoir recours à des organisations internationales non étatiques telles que le G20 ou l’OMC, qui ont des rôles ciblés, ou de mettre en place des plans d’intervention à durée limitée sur des sujets ponctuels, tels que l’énergie ou la santé, auxquels pourraient participer des Etats de tailles et de moyens très différents.

 

 

BIBLIOGRAPHIE

« Conflits de nationalités: plurinationalité et apatridie », Michel Verwilghen, Martinus Nijhoff Publishers, 2000.

« Penser et construire l’Europe : (1919-1992) », Dominique Barjot, Editions Sede, 2007.

« Le Conseil constitutionnel et le droit supranational », Christine Maugüé, « Pouvoirs » 2003/2 (n° 105), Le Seuil, 2003.

Dictionnaire « Le Robert ». (Définition de « Supranationalité » et « Souveraineté ».

Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, Art. 3, 1789

 

AUTRES SOURCES

http://europa.eu/legislation_summaries/institutional_affairs/treaties/treaties_introduction_fr.htm

http://www.au.int/fr/about/nutshell

http://evene.lefigaro.fr/citations/theme/europe-union-europeenne-ue.php

Photographie : le Journal « La Croix »

 

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Fiche – Principe d’ingérence /grands-enjeux/fiche-principe-dingerence/ /grands-enjeux/fiche-principe-dingerence/#respond Sat, 13 Dec 2014 20:46:39 +0000 /?p=10535 le droit d'ingérence

 

Le principe d’ingérence

« Nous assistons aujourd’hui – lentement, mais je le crois, surement- à l’émergence d’une norme internationale prohibant les formes de répressions violentes à l’encontre d’une catégorie ou d’un peuple. Cette norme doit prendre – et prendra- le pas sur les souverainetés des Etats » [1]. Cette citation de Kofi Annan, ancien Secrétaire Général des Nations Unies, révèle bien le contexte dans lequel le principe du droit d’ingérence a évolué. Le droit d’ingérence a ainsi pu émerger comme un principe du droit international par la rencontre d’une démarche humaniste et d’une volonté politique.

Ainsi, l’ingérence se définit comme étant une « intervention non désirée dans les affaires d’une tierce partie. L’ingérence peut s’effectuer au niveau individuel, organisationnel, ou international. Elle peut aussi prendre diverses orientations : politique, économique, sociale, culturelle, religieuse, et humanitaire »[2] (Définition Perspective Usherbrooke).

Dans le cadre de ce dossier nous nous concentrerons essentiellement sur l’ingérence humanitaire qui est la forme d’ingérence la plus développée aujourd’hui et la seule qui est plus ou moins tolérée par la communauté internationale.

Nous pouvons alors définir l’ingérence humanitaire, que nous généraliserons sous le terme d’ingérence, comme étant la « faculté d’intervention sur le territoire d’un Etat, que le Conseil de Sécurité des Nations Unies s’attribue ou autorise, lorsque des violations graves du droit humanitaire ou des droits de l’Homme s’y commettent »[3] (Définition Encyclopédie Universalis).

Cependant il paraît important de différencier deux notions qui se ressemblent beaucoup : le « droit d’ingérence » et le « devoir d’ingérence ». Ainsi, le droit d’ingérence est le droit des États de violer la souveraineté nationale d’un autre État, en cas de violation massive des droits de la personne, tandis que le devoir d’ingérence, plus contraignant, fait référence à l’obligation morale faite à un État de fournir son assistance en cas d’urgence humanitaire.

De ce fait, afin de mieux comprendre le développement de l’ingérence au cours des dernières décennies et les enjeux qui lui sont associés, nous allons diviser la présentation en trois parties. Tout d’abord, nous reviendrons sur l’historique du concept de droit d’ingérence ; puis nous réaliserons un panorama du droit d’ingérence afin d’en connaitre les caractéristiques, les évolutions et les différentes formes qu’elle peut prendre ; enfin, nous ferons un point sur les enjeux actuels liés à l’ingérence humanitaire

Historique du concept de « droit d’ingérence »

L’ingérence humanitaire est un concept ancien, même si à l’époque il n’était pas connu sous cette dénomination.

Au XVIIème siècle, Hugo Grotius, juriste à l’origine des fondements du droit international, parlait déjà « d’un droit accordé à la société humaine pour intervenir dans le cas où un tyran ferait subir à ses sujets un traitement que nul n’est autorisé à faire »[4]. Au XIXème siècle, on évoquait désormais la notion « d’intervention d’humanité », qui autorisait déjà une grande puissance à agir dans le but de protéger ses ressortissants ou des minorités (ethniques ou religieuses) qui seraient menacées. Ensuite, s’est vu développer l’« intervention humanitaire », c’est-à-dire toute action humanitaire mise en place ou acceptée par la communauté internationale en faveur d’une population dont les droits fondamentaux sont violés. Il peut s’agir soit de la protection des nationaux de l’Etat qui intervient, soit la protection des nationaux de l’Etat dans lequel l’intervention a lieu, soit une protection mixte qui protège les minorités. C’est donc dans le prolongement de « l’intervention humanitaire » que s’est développée la notion « d’ingérence humanitaire », concept qui a été théorisé seulement dans les années 1980.

Ainsi c’est au cours du XXème siècle qu’est née l’appellation « ingérence humanitaire��».  Monsieur Bernard KOUCHNER, médecin et cofondateur de Médecins Sans Frontières et Médecins du Monde, a joué un rôle important dans l’émergence de cette notion.

De ce fait, en 1967, a eu lieu ce que l’on pourrait considérer comme la première manifestation d’ingérence. Le Nigéria était dans une situation quelque peu controversée. Le pays venait de découvrir du pétrole dans la région du Biafra, cependant les habitants de cette région demandent leur indépendance. Indépendance que le Nigéria refuse d’accorder car le pays ne veut pas perdre cette zone riche. Le gouvernement décide donc d’imposer un embargo sur sa propre population, qui entrainera 2 millions de morts et d’affamés. KOUCHNER décide donc de dénoncer l’immobilité des chefs d’Etats face à cette situation en raison du principe de non-ingérence, inscrit dans les textes de l’ONU. Il décide alors d’intervenir au Nigéria avec son ONG, Médecins Sans Frontières, pour apporter des soins au peuple. C’est alors qu’a eu lieu la première ingérence. Par cette intervention KOUCHNER a voulu montrer que la violation massive des droits à la personne engendrait une remise en cause de la souveraineté de l’Etat en question et que ceci autorisait de facto l’intervention d’acteurs extérieurs.

Suite à cela le concept a été formalisé dans les années 1980 par Jean-François REVEL qui fut le premier à parler de « devoir d’ingérence » dans un article du magazine « L’Express » en 1979. Le terme fut repris un an plus tard par Bernard-Henry LEVY au sujet de la situation au Cambodge (génocides du régime Khmer rouge). Enfin, c’est en 1988, lors d’une conférence de Mario BETTATI et Bernard KOUCHNER, qu’apparait pour la première fois la formulation « Droit d’ingérence ». Ce concept a alors été fortement promu au sein de l’ONU par ses deux « auteurs ».

Depuis, deux résolutions ont été votées par l’Assemblée Générale des Nations Unies afin de préciser l’application du droit d’ingérence : la résolution 43/131, adoptée le 8 décembre 1988, qui introduit « l’assistance humanitaire aux victimes de catastrophes naturelles et de situation d’urgence de même ordre » ; et la résolution 45/100, adoptée le 14 décembre 1990 qui rend légitime le droit d’ingérence : « Le temps de la souveraineté absolue et excessive est révolu » a alors lancé le secrétaire général de l’ONU en activité, Boutros Boutros-Ghali. De même, on retrouvait déjà cette idée dans le Chapitre 7 de la Charte des Nations Unies, qui permet d’intervenir dans les affaires internes d’un pays en cas de menace « contre la paix ». Le droit d’ingérence vient donc appuyer et illustrer ce chapitre 7. La formule « droit d’ingérence » a donc été consacrée, dès1991, avec l’opération « Provide Comfort » qui avait pour but de porter secours aux Kurdes d’Irak. En décembre 1992, c’est également au nom du « droit d’ingérence » qu’a été engagée l’opération « Restore Hope » qui visait à mettre fin à la situation tragique de la Somalie.

Enfin, depuis le 16 septembre 2005, le droit d’ingérence bénéficie d’une nouvelle dénomination qui est « La responsabilité de protéger ». Cette nouvelle appellation, renvoie à la notion de « devoir d’ingérence ». Ainsi, le droit d’ingérence va au-delà de la souveraineté des Etats pour imposer un « devoir d’assistance au peuple en danger ». Il s’agit ici de placer la souveraineté des Etats sous la subordination d’une « morale de l’extrême urgence » dans le but de protéger les droits fondamentaux de la personne.

 

Un panorama de l’ingérence humanitaire

Les éléments du droit d’ingérence 

Mario BETTATI a lieu identifier seuls deux éléments caractéristiques de l’ingérence :

  •  L’atteinte à la compétence nationale de l’Etat
  • La contrainte

Cependant, nous pouvons identifier cinq éléments constitutifs du « droit d’ingérence » :

  • Le principe de libre accès aux victimes de catastrophes naturelles et politiques, pour les organismes porteurs de secours
  • Un usage éventuel de la force pour protéger les convois humanitaires
  • Une intervention armée possible pour protéger les victimes
  • Dans ces deux derniers cas, seule une résolution du Conseil de Sécurité de l’ONU peut autoriser l’usage de la force militaire
  • Des poursuites judiciaires internationales à des fins préventives et de répression se développent progressivement (ex : Cour Pénale Internationale)

L’évolution de l’ingérence dans le temps

Nous pouvons identifier quatre périodes dans la construction de l’ingérence humanitaire :

  • L’ingérence immatérielle (1948-1968) : période caractérisée par l’universalité des Droits de l’Homme et il s’agit donc d’une ingérence qui autorise un Etat ou la communauté internationale à prendre position sur la situation interne d’un autre Etat. Il s’agit donc d’un « droit de regard » sur la situation interne d’autres pays.
  • L’ingérence caritative (1968- 1988) : sur cette période, les opérations transfrontalières se déroulent soit avec l’accord de l’Etat touché soit par des franchissements de manière illégale des frontières de l’Etat par des ONG qui agissent sans mandats. La sécurité des acteurs n’était donc pas garantie.
  • L’ingérence matérielle (depuis 1988, après l’affirmation du principe de droit d’ingérence)
  •           Ingérence forcée : intervention à des fins d’assistance mais jamais consentie par l’Etat, ou alors le consentement est le fait de pressions préalables. Ici, la sécurité des ONG et des autres intervenants est assurée par la communauté internationale (Etats, agents de l’ONU…) Ce type d’ingérence met en jeu la force militaire ou la diplomatie pour parvenir, par la pression, à la cessation des manquements aux droits de l’Homme.
  •          Ingérence dissuasive : nécessiterait la mise en place d’un dispositif dissuasif et de prévention des drames humanitaires donc des conflits.

Les types et formes d’ingérence

Nous pouvons identifier deux grands types d’ingérence humanitaire :

  • L’ingérence humanitaire non armée
  • L’ingérence humanitaire armée, qui est l’encadrement de l’aide humanitaire avec des opérations d’usage de la force. C’est le type d’ingérence le plus discuté, en raison de l’article 2.4 de la Charte de l’ONU qui prohibe le recours à la force armée.

Il existe aussi trois formes d’ingérence applicables à l’ingérence humanitaire :

  • L’ingérence avec l’accord de l’Etat qui subit l’ingérence
  • L’ingérence en dehors de tout accord de l’Etat concerné
  • L’ingérence en cas d’inexistence de structure étatique

Il convient de noter que l’ingérence humanitaire peut être le fait d’un ou plusieurs gouvernements ou celui de la communauté internationale.

 

Les enjeux actuels de l’ingérence

Le droit d’ingérence engendre de nombreux questionnement tant au niveau de sa licéité et de sa légitimité, qu’au niveau de ses motivations.

Ainsi, ni le droit d’ingérence ni le devoir d’ingérence n’ont d’existence dans le droit humanitaire international. Les partisans du droit d’ingérence considère que l’intervention est légale parce qu’elle tire sa légitimité de l’adjectif « humanitaire ». Ses opposants, quant à eux, refusent de reconnaitre cette légitimité car il n’y a aucun fondement légal puisque aucune définition précise du droit d’ingérence ou des conditions de son utilisation n’est donnée dans les textes des Nations Unies. Ils avancent aussi l’argument que l’ingérence s’est construite en totale imposition avec les principes fondamentaux de souveraineté des Etats et du principe de non-ingérence dans les affaires intérieures de ces derniers qui sont inscrits dans le Traité de Westphalie de 1648 et dans l’article 2.7 de la Charte des Nations Unies. Les opposants craignent alors que l’acceptation et la légitimation du droit d’ingérence entrainent un développement des interventions unilatérales.

Cette crainte est d’autant plus renforcée par une application sélective du droit d’ingérence, d’une vision « deux poids- deux mesures ». Le droit d’ingérence n’est-il pas un moyen de donner bonne conscience à l’Occident en lui donnant, une nouvelle fois, la possibilité de s’instaurer en modèle et de qualifier de « barbares » ceux qui refusent d’adopter leur modèle ? Nous pouvons remarquer que ce sont les pays développés qui interviennent dans les pays les moins développées et non l’inverse. Les USA et la France se positionnent comme des pays à vocation universaliste et s’autorisent, à ce titre, d’intervenir dans d’autres pays au nom du droit d’ingérence. Cependant, une question importante se pose : les Etats, en dehors de tout mandat de l’ONU, sont-ils légitimes d’intervenir seuls ? En effet, la légitimité d’une intervention au nom du droit d’ingérence vient du fait que ce soit le Conseil de Sécurité de l’ONU qui ait autorisé ou demandé à certains pays d’intervenir. Cependant, ceci n’empêche pas certains Etats d’intervenir sans l’accord du Conseil de Sécurité et d’être, par la suite, légitimé par la communauté internationale.

De plus, beaucoup craignent que le droit d’ingérence soit l’outil d’une nouvelle forme d’impérialisme. Ils voient dans l’ingérence humanitaire un outil de « l’ingérence démocratique », c’est à dire la volonté de traduire les idéaux de la démocratie occidentale. C’est justement en prévision de ces comportements qu’avait été créé le principe de non-intervention qui avait pour avantage de protéger les pays les plus faibles contre les interventions d’Etats plus puissants. C’était alors un moyen de mettre fin au colonialisme et à l’impérialisme occidental qui avait pris comme prétexte l’humanité civilisatrice afin de pouvoir mener leurs conquêtes territoriales. Aujourd’hui la négation du principe de non-ingérence par l’établissement du droit d’ingérence, laisse penser à une fausse « bonne morale ». Les opposants du droit d’ingérence ont ainsi peur que, sous des prétextes humanitaires (« bonne morale »), les pays cherchent à justifier des formes d’ingérence démocratique, écologique ou judiciaire. Par exemple, l’intervention des USA en Irak en 2003 soulève des débats à savoir si cette intervention n’était pas faite pour la promotion des intérêts nationaux.

Enfin, en raison de la forte médiatisation des questions humanitaires, et notamment celles liées à l’ingérence, il y a un risque que les zones d’intervention soient essentiellement des zones bénéficiant d’une couverture médiatique importante et de la compassion de l’opinion publique, tout en occultant l’aspect humanitaire de l’intervention.

 

 

Ainsi, pour conclure, nous avons pu voir à travers ce dossier que le principe d’ingérence n’est pas une idée nouvelle, elle était déjà développée au XVIIème siècle mais ce n’est qu’au XXème siècle que le droit d’ingérence fut véritablement reconnu. L’ingérence peut vêtir plusieurs noms selon la fonction qu’elle vise, mais l’ingérence la plus répandue et surtout la seule tolérée, est l’ingérence humanitaire. Nous avons pu voir qu’au cours de son évolution l’ingérence humanitaire a évolué jusqu’à la forme que nous connaissons aujourd’hui : l’ingérence matérielle. Cependant, ses applications contemporaines soulèvent quelques questionnements notamment au niveau de la légitimité et de la légalité ; mais aussi au sujet de l’usage de la force dans le cadre d’une ingérence humanitaire.

Nous pouvons donc dire que le droit d’ingérence s’inscrit dans un nouvel ordre mondial, plus large, et régi par des principes démocratiques, d’Etat de droit et de respect de la personne humaine. Ce droit d’ingérence tend donc à instaurer une moralisation des relations internationales.

 

 

Bibliographie – Sitographie

  • Bibliographie :

 

–          M.BELANGER – Droit international humanitaire général – 2e édition, Edition GUALINO (2007), (156p)

 

  • Sitographie :

 

–          Définitions :

 

–          Contenu :

http://doc.sciencespo-lyon.fr/Ressources/Documents/Etudiants/Memoires/Cyberdocs/MFE2001/demaugebosta/these_body.html

 


[1] Kofi Annan, « Droits de l’homme et intervention au XXIème siècle », contribution spéciale au Rapport mondial sur le développement humain 2000, Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), www.undp.org.

[2] Université de Sherbrooke – Perspective monde – Définition de « Ingérence »,

[3] Mario BETTATI, « INGÉRENCE DROIT D’INGERENCE», Encyclopædia Universalis

[4] Hugo Grotius- De Jure Belli ac Pacis (1625)

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God bless Poutine /geopolitique/russie-caucase/god-bless-poutine/ /geopolitique/russie-caucase/god-bless-poutine/#comments Tue, 23 Sep 2014 11:56:25 +0000 /?p=7013

 

Bernard Largillier, ancien collaborateur en géopolitique de Patrick Louis à Lyon 3 nous a fait parvenir une correspondance qu’il a eu à la suite d’une rencontre avec un diplomate représentant l’Union européenne à Kiev. Cet article est une partie de son échange avec son interlocuteur. Il nous semble intéressant car il pose un certains nombres de problèmes que le discours commun semble ne pas vouloir déceler. Nous espérons qu’il ouvrira un débat au sein de la communauté Geolinks.

« Aux questions « qui a tiré sur la police légale d’un gouvernement légal soutenu par un parlement légalement élu », ou encore sur « la division d’une population qui ne demande qu’à vivre en paix », je n’ai eu droit qu’à la réponse officielle du représentant de Bruxelles payé pour un discours officiel qui ne prête pas à discussion. Bref, il ne m’a pas convaincu.»

 

Le camp des saints

Nous vivons durant cet été 2014 des évènements à haut risques, et l’appel aux sanctions contre la Russie y apparaissent non seulement injustes pour les populations concernées, mais de nature à ajouter des problèmes évitables à ceux qu’on ne peut hélas éviter du fait des évènements, et complètement décalés par rapport à la réalité des faits économiques, sociaux et politiques réels du moment. Voilà plus de quarante ans que nous élaborons des scénarios dans lesquels la plupart des observateurs voient s’amplifier les risques de conflits Nord Sud, et on veut nous y ajouter un conflit Est Ouest d’un autre temps !

Voilà plus de trente ans Jean Raspail publiait le Camp des saints, roman de fiction dans lequel des masses de populations venaient s’échouer sur les côtes méditerranéennes de la Provence : le camp des saints se réalise en cet été 2014.

Les populations chassées par la misère, par l’incurie de nos intellectuels et de nos politiques, par la cupidité des opérateurs économiques, et par la conquête islamique qui s’est réveillée, trouvent en face d’eux les nations du camp des saints en pleine apostasie. Elles arrivent depuis des années, mais le phénomène s’est amplifié, et depuis des mois l’Italie nous alerte et appelle à l’aide. Le camp des saints ne veut pas voir et appelle à sa propre division en excitant contre Poutine. Quelle erreur, quelle ineptie !

Et quelle mauvaise foi de surcroit, dans laquelle s’engouffrent parfois les meilleurs des nôtres ou dans laquelle ils se laissent mollir. Le droit international est bafoué par Poutine… mais de qui se moque-t-on ? Les USA entretiennent ce manque de respect du droit au Proche Orient depuis un demi siècle, droit des peuples autant que disposition de l’ONU dont ils n’ont que faire derrière des simagrées de tentatives de paix qui n’ont jamais abouties. Les USA n’ont que faire de l’ONU qu’ils mettent derrière eux si elle ne leur est pas soumise. Que ce soit entre Israel et Palestine, en Irak, en Lybie du temps de Kadhafi, en Ukraine ou ailleurs.

Plus grave, ils cristallisent une opposition hélas bien souvent légitime contre l’occident qu’ils prétendent représenter mais qu’ils ne représentent pas. Les esprits simples et incultes, embrigadés par des propagandistes qui veulent abolir l’occident autant que l’orient chrétien, sont bien incapables de faire la distinction entre l’américain honni et le chrétien, entre l’occidental dépravé qui fait l’apologie de l’homosexualité et l’occident chrétien sur le terreau duquel les sciences et les arts, l’amour et la sagesse ont grandi et se sont développés depuis des siècles.

Les interventions intempestives des USA partout dans le monde nous conduisent non seulement à une confusion entre un occident qui se renie et une civilisation chrétienne occultée, mais à des risques de guerre bien réels qui atteindront les faubourgs de Marseille avant les salons parisiens et bruxellois. Cette confusion pourrait bien s’accentuer encore par une intervention en Irak du nord, et c’est avec discernement que le Pape François justifie aujourd’hui même une intervention en Irak, pas des USA, mais sous l’égide de l’ONU, ce qui est tout à fait différent. Avec le même discernement, son prédécesseur Jean-Paul II s’était vivement opposé à l’intervention des USA en Irak en 2002 dont les évènements actuels sont une suite logique.

Les cérémonies du centenaire de la guerre de 14 ont été beaucoup commentées, avec notamment le regret de ne pas avoir eu d’organisation internationale pour endiguer la folie des gouvernants avant un massacre des populations. La SDN a été incapable d’arrêter la folie nazie, notamment parce que les USA ne prenaient pas la dimension du problème posé par Hitler et ne s’alarmaient pas de théories en rupture complète avec l’héritage chrétien auquel ils appartenaient.

L’ONU peut encore jouer son rôle aujourd’hui… à condition que les dirigeants US et les dirigeants européens jouent le jeu de l’ONU avant celui de leurs égo, à condition qu’ils veuillent bien prendre la mesure du conflit de civilisation dont il s’agit.

Le Puy du Fou à Moscou et dans toutes les Russies !

La nouvelle est excellente, et elle est d’excellent augure. Nulle part ailleurs qu’en Vendée une telle aventure mêlant spectacle et vie populaire n’aurait pu exister, ni en Provence, ni exportable aux USA. Et vous savez pourquoi ; aucun peuple autre que la Vendée n’a la même histoire faite de souffrance et de massacres ! On ne renie pas son passé ! Vous qui avez lu Tolstoï, Romain Rolland et bien d’autre encore, vous savez que ces spectacles historiques réussiront en Russie, avec des gens qui ont une histoire riche d’évènements douloureux qu’ils assument aujourd’hui. Ils reconstruisent leurs églises détruites sous la dictature communiste qu’ont vécu leurs parents, ils n’y vont pas nécessairement ensuite, mais ces églises sont leur histoire, leur héritage, leur patrimoine, comme Tolstoï Dostoïevski Tchekhov et Pouchkine, qu’ils ne lisent pas tous les matins, mais qui sont leur culture et une part d’eux-mêmes.

L’âme russe est bien vivante, et on ne peut l’écarter et se satisfaire d’informations superficielles et inexactes sur l’économie actuelle de la Russie, surtout quand on va faire payer au contribuable européen un embargo sensé gêner la Russie mais qui se retourne contre nous et contre nos producteurs.

Il est clair que les sanctions réclamées contre la Russie porteront préjudice à sa population d’abord, et à notre économie européenne ensuite. C’est donc déjà le cas ces jours-ci sur l’agro-alimentaire en cette fin d’été, avec des ministres européens qui décident de subventionner nos productions agricoles : ils font davantage penser au régime soviétique qu’à la construction européenne de Schuman et Monnet. Si les USA et l’UE continuent, ce sont des usines, dont nos propres usines de sociétés françaises qui seront en chômage technique faute d’approvisionnement dans les banlieues de Moscou.

Cette politique aberrante a de fortes chances de pousser les russes à ne compter que sur eux, ce qu’ils vont faire et tant mieux pour eux, sauf que c’est nous qui nous affaiblissons. Mais que veulent donc les fous de Bruxelles ? Sanctionner des ouvriers à Moscou ? Mais que leur ont-ils fait ? Faire chuter le chiffre d’affaire de nos propres sociétés ? En plaidant hypocritement pour la croissance ? Ils ne font en fait qu’étaler leur ignorance économique et leur stupidité d’irresponsables.

Et quelle mauvaise foi encore ! En violation de l’ONU, du droit international et des autorités internationales, des autorités américaines accusent une de nos grandes banques de violation d’embargo, pour quelques milliards d’amendes sans aucun fondement juridique international, et on obtempère… les petits européens vont payer. Et comme ça a marché, les même autorités américaines accusent à nouveau une autre banque… les européens sont tellement anesthésiés que ça pourrait marcher à nouveau… Or, sur la même période, la situation a changé en Iran. Du coup, les américains y passent tous les contrats qu’ils peuvent, sous embargo, discrètement. Lorsque l’embargo sera levé, il ne restera que les miettes à prendre en Iran pour les autres pays. Quelle hypocrisie et quel scandale ? Est-ce que Poutine se comporte ainsi avec nous ?

Les américains sont nos alliés et nos amis.

Certes, mais il est clair depuis toujours que les USA ne veulent pas de l’Europe parce qu’elle leur portera un ombrage politique et que sa monnaie pourrait détrôner la leur. Nos amis ne se satisferont que d’une Europe faible et soumise à leur ligne politique. Ce n’est pas du tout le cas de la Russie qui a besoin d’une Europe forte, d’une Europe constituée, d’une Europe fidèle à ses racines, comme la Russie d’aujourd’hui elle même.

Qui est allé dire à la Turquie qu’elle devait intégrer l’Europe, ce qui l’affaiblirait à coup sûr en la rendant encore plus ingérable qu’à vingt cinq Etats, et sans unité culturelle ? Poutine ? Non, Madame Clinton. Qui nous a mis notre économie au plus mal avec une crise financière ? Que dis-je ? Une crise morale aberrante et honteuse ? Poutine ? Non, Wall Street et les banques américaines. Qui a dit qu’il attaquerait l’Euro en septembre 2008 et qui l’a fait en 2009 ? Poutine ? Non, une officine bancaire US, agence de notation payée par les mêmes banques. Qui est allé conseiller et trafiquer les comptes publics de la Grèce ? Poutine ? Non, encore les mêmes.

Qui se permet de noter la gestion de nos pays ? Poutine ? Non, les même officines bancaires faites de jeunes collaborateurs sortis des universités, et qui n’ont jamais mis les pieds en Europe (sauf en touristes peut-être) ni dans une entreprise multinationale. Il faut tout de même savoir comment fonctionnent ces institutions US, avec de jeunes universitaires brillants mathématiciens et manipulateurs de concepts et de statistiques, sur les objectifs politiques et stratégiques de leurs clients les banques US. Dès que ces brillants opérateurs commencent à penser et à réfléchir, ils partent ou sont mis dehors et remplacés par de jeunes arrivants.

Qui nous a financiarisé l’économie à outrance depuis vingt cinq ans ? Poutine ? Non, intellectuels et banquiers US. Les conséquences économiques et politiques en sont incalculables, et nos intellectuels européens ont stupidement suivi. Qui a phagocyté nos sociétés de bourses pour les intégrer dans un système mondial qui crée des masses financières artificielles considérables au détriment des économies locales et nationales, et au détriment des familles d’entrepreneurs ? Poutine ? Non, les mêmes.

Qui nous a acheté des pans entiers de nos industries avec cet argent contrôlé par aucune autorité, pour les délocaliser et créer du chômage chez nous ? Pour priver nos familles d’entrepreneurs de leurs entreprises en les séduisant par l’argent ? Poutine ? Non, des sociétés US pour la plupart.

Qui s’est mis à noter nos écoles de management pour en faire des business du diplôme ? Qui enseigne depuis plus de vingt ans l’effet de levier et la titrisation dans nos meilleures écoles ? Pas Poutine, il semble avoir des préoccupations d’un autre ordre. Qui encore dans les mêmes écoles nous a envahi par une culture de l’argent et du profit, en lieu et place d’une culture de service et de respect du client, rupture culturelle avec des siècles de tradition chrétienne ? Poutine ? Non, toujours les mêmes.

Sur qui je tombe lorsque je veux acheter sur le Net du vin dans une coopérative française de province en difficulté ? Sur une publicité pour un manager US. Qui me porte tous les jours atteinte dans mon travail à travers le fonctionnement d’internet ? Poutine ? Non, des sociétés américaines et leurs opérateurs français payés pour cela. Le discours de l’une des nôtres lors de l’affaire Alstom au printemps dernier afin de nous rassurer sur les américains de GE était assez pitoyable. Comme notre ami diplomate à Kiev, elle était certes payée pour cela, mais rappeler le rôle des américains en 1944 faisait tout de même un peu décalé par rapport à notre vécu actuel.

Enfin sur le plan culturel, l’essentiel auquel il faut revenir en définitive car tous les comportements en dépendent : Qui nous apporte une révolution culturelle sans précédent avec le mariage homo et avec la théorie du genre ? Poutine ? Non, la culture libertaire et révolutionnaire US. Qui est venu dire en Europe qu’il fallait accepter le mariage homosexuel ? Poutine ? Non John Kerry voilà à peine quelques mois.

Qui se permet d’attaquer notre héritage culturel à travers le Pape ? Poutine ? Non, des influences occultes, anonymes, sans signature venues de New York et qui utilisent abusivement l’ONU à cet effet. Qui veux tuer tous nos libraires et même nos éditeurs ? Poutine ? Non, une société de distribution américaine.

Qui nous fait encore l’apologie de l’homosexualité dans laquelle se sont effondrées toutes les sociétés antiques, Rome comme Athènes ? Des sociétés américaines de l’internet. Qui ne veut pas entendre parler des racines chrétiennes de l’Europe ? Poutine ? Non, le président du Conseil Constitutionnel français. Tiens, celui-ci n’est pas de nos amis américains ! Nous devons compter aussi avec nos propres trahisons.

Qui laisse passer depuis des années les réformes éducatives qui ont conduit nos enfants à ne plus savoir lire et écrire ? A ne plus connaître la géographie ? A ne retenir de l’histoire que les ragots et propagandes anti-françaises, anti-européennes, inscrites en clair dans les livres d’histoire de nos enfants ? Ces mensonges conduisent à une confusion volontaire entre notre culture chrétienne et nos erreurs ou errements politiques passés. Encore nos propres trahisons ou négligences coupables, soutenues par des gens de l’UE, celles-là même qui ont justifié des adolescents de nos collèges et de nos lycées pour aller faire le Djihad tranquilles dans leur tête !

Qui plaide incessamment pour une nouvelle rupture radicale avec notre héritage judéo- chrétien fait de morale et de transcendance naturelles ? Les mêmes lobbies venus du monde anglo-saxon dans sa décadence, et qui opèrent depuis des années à Bruxelles sans que celle-ci réagisse.

Qui s’inquiète du mariage homo en Europe ? De l’abandon du calendrier chrétien en Europe ? Poutine ? Oui, cette fois c’est bien lui ! Tiens donc ! Et c’est justement ce qui lui est reproché, comme il lui est reproché d’avoir mené un combat Nord Sud en Tchétchénie contre la montée du totalitarisme islamique, comme il lui est reproché d’avoir soutenu Bachar El Assad, dans le cadre du même combat, et pour les mêmes raisons, fait qui apparaît plus clairement aujourd’hui.

Arrêtons les hypocrisies et mensonges publiques. Roland Dumas n’a pas été démenti lorsqu’il a publiquement dit que c’était Israël qui avait mis le feu en Syrie, soutenu comme toujours par des diplomates londoniens et par les USA qui, comme toujours, n’ont jamais rien compris à l’islam ni aux pays musulmans, ils en ont fait la preuve en Afghanistan, en Irak et en Iran, et ils continuent, comme ils continuent à intervenir en gendarmes du monde sans aval de l’ONU.

Il leur a fallu dix ans pour comprendre Hitler, espérons, ou plutôt, à nous de faire en sorte qu’ils (nos amis) comprennent plus rapidement les enjeux actuels en Europe, et que les islamistes ne sont pas de simples terroristes, ni les immigrés des mexicains qui ont faim.

Un enjeu de civilisation

Comme la plupart des observateurs le constatent, l’enjeu actuel est un enjeu de civilisation, pas un simple enjeu de populations déplacées, ni de frontières ni de territoires. En 1914, on n’a pas vu l’orgueil et la stupidité des grands, des diplomates, des chefs et de leurs conseils, et on a regretté de ne pas avoir eu pour cela la SDN ou l’ONU. En 1940, on n’a pas vu assez tôt la rupture de civilisation qui s’opérait avec Hitler. Nous sommes à nouveau sur une rupture plus que millénaire de civilisation avec le mariage homo, avec l’éternelle guerre sainte de l’islam qui profite de la situation pour s’imposer dans une lutte qui dépasse la situation Nord – Sud.

Philippe de Villiers a raison lorsqu’il dit que l’Amérique veut imposer son modèle de société en Russie et partout dans le monde. Sauf que ce ne sont pas les USA, mais plutôt le Léviathan, avec le concours de diplomates aux USA et en Europe qui se trompent lourdement, et qui feraient bien de changer d’avis avant des évènements plus graves. En effet, pour qui se donne la peine de regarder de plus près, le mariage entre homme n’est pas acquis aux USA, loin s’en faut.

« Le 14 juillet ouvre tous les possibles par la geste révolutionnaire, et le 15 août rappelle que tout n’est pas entre nos mains » a écrit récemment Louis Manaranche, au sujet du Vœux de Louis XIII qu’il rapprochait du « God bless the Queen » des anglais, et du « God bless America » qui conclue les discours officiels US.

Il me semble que la sagesse nous dit qu’on n’y arrivera pas seuls, qu’on ne peut s’abstenir de la transcendance et de la Providence. Aidons nous et le ciel nous aidera. Alors, « God bless Poutine »,  la France, l’Europe et nous tous.

Bernard Largillier

Marseille le 20 août 2014

God bless Poutine

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La politique en Erythrée /grands-enjeux/les-enjeux-geopolitiques/la-politique-en-erythree/ /grands-enjeux/les-enjeux-geopolitiques/la-politique-en-erythree/#respond Mon, 14 Apr 2014 10:14:36 +0000 /?p=6009 Exposé géopolitique : seconde partie (Cliquez ici pour la première partie)

Introduction

L’Érythrée est un pays de la corne de l’Afrique située à l’est du continent. Sa capitale est Asmara est située sur un plateau à 2300 mètres d’altitude (également la plus grande ville du pays, deuxième capitale la plus élevée d’Afrique, cinquième au rang mondial). Elle s’étend sur une superficie de 117 600 km² (121 300 km² en incluant l’Archipel de Dahlak). On estime la population de ce pays à ��6 233 682 habitants en juin 2013 (dont 21,3% de population urbaine). Concernant les langues, on en compte huit utilisées par les différentes ethnies. Celles officielles restent le tigrinya, l’arabe et l’anglais (cette dernière n’est quasiment plus utilisée par les habitants). Le drapeau érythréen actuel a été adopté le 5 décembre 1995. Il est inspiré de celui du mouvement de la Force populaire de libération de l’Érythrée (FPLE). Il est composé de trois triangles (vert, rouge et bleu), de branches d’olivier et une couronne dorés. Le triangle vert représente l’agriculture, le bleu quant à lui, la mer Rouge et le rouge le sang versé pour l’indépendance de l’Érythrée et pour la patrie. Les branches d’olives dorées symbolisent la richesse en minerai du pays. La couronne s’inspire du drapeau des Nations Unies et symbolise la paix. Les formes géométriques auraient différentes significations selon diverses personnes. Pour certains la forme isocèle du triangle rouge représente en quelques sortes la forme du pays, tandis que pour d’autres, elle est disposée de telle sorte que sa taille diminue de gauche à droite exprimant ainsi la volonté de ne plus devoir verser de sang dans le futur.

 

I – L’histoire politique

 

L’Érythrée est une république à régime présidentiel à parti unique. Le Front populaire pour la démocratie et la justice (FPDJ) détient seul le pouvoir. L’Assemblée nationale, formée en 1993 peu après l’indépendance, est un parlement monocaméral et est composée de 150 sièges dont  33 femmes, soit 22% du nombre total des sièges. Des élections dans cette assemblée devaient se tenir en 2001. Celles-ci ont été repoussées, apparemment en raison du conflit territorial persistant avec l’Ethiopie. Son dernier renouvellement a eu lieu le 1er février 1994.

Les différents types de pouvoir

 

Le pouvoir exécutif

Le Président est à la fois chef de l’État et chef du gouvernement. Il est élu par l’Assemblée nationale en place depuis 1993. Le président actuel, Issayas Afeworki, qui dirige son pays d’une main de fer, est à la tête du pays depuis l’indépendance du pays. Il nomme les chefs des différents ministères (autorités, commissions et offices) puis les soumet à l’Assemblée nationale pour ratification. Issayas Afeworki est donc à la tête du pays depuis 1993 sans élections. Le Front populaire pour la démocratie et la justice (FPDJ), qui détient seul le pouvoir est fondé en 1994 par Issayas Afeworki. Ce parti est issu du Front Populaire de libération de l’Erythrée (FPLE) qui mena la lutte pour l’indépendance de l’Erythrée. Il est le seul parti légal en Erythrée. Tout régime utilisant le multipartisme est refusé par celui-ci.

Le pouvoir législatif

L’Assemblée nationale compte 75 membres du FPDJ (Front Populaire pour la Démocratie et la Justice) et 75 membres élus. L’Assemblée définit la politique intérieure et extérieure du pays, approuve le budget et élit le Président. Des assemblées régionales sont élues dans chacune des six subdivisions de l’Érythrée (Maekel, Anseba, Gash-Barka, Debub, Semien-Keih-Bahri, Debub-Keih-Bahri).

Le pouvoir judiciaire

Le pouvoir judiciaire est indépendant du pouvoir législatif et exécutif. Il existe trois niveaux d’instances judiciaires, les cours de village, les cours régionales et la Haute cour nationale. Les 683 cours de village sont composées de trois juges élus. Le droit local et coutumier y tient une place importante.

 

Relations avec pays voisins

 

La politique étrangère de l’Érythrée est caractérisée par des conflits et tensions avec les pays voisins. Pour certains analystes, l’Érythrée déstabilise le système de sécurité de la Corne de l’Afrique, en menant une politique à tendance impérialiste dans la région.

  • Relations avec l’Ethiopie : Entre 1998 et 2000, l’Érythrée et l’Éthiopie se sont affrontées au sujet d’une zone frontalière, dans les régions de Badmé et de Bure (en tout390 km² contestés). Après des avancées initiales de l’Érythrée en 1998, l’Éthiopie mène en 2000 une offensive qui lui permet de reprendre le terrain perdu, au prix de nombreux morts des deux côtés (Érythrée à 19 000 morts et 650 000 réfugiés ; Éthiopie à 34 à 123 000 morts) et d’importantes pertes économiques. La Cour internationale de justice a délimité la frontière contestée entre les deux belligérants, mais l’Éthiopie refuse de rétrocéder le village de Badme qui a été attribué à l’Érythrée.
  • Relations avec Djibouti : Des tensions avec Djibouti ont débouché sur des affrontements armés en juin 2008.
  • Relations avec la Somalie : L’Érythrée est accusée de soutenir des mouvements armés en Somalie, en particulier le groupe Al-Shabbaab.
  • Relations avec le Soudan : En 1994, l’Érythrée a rompu ses relations avec le Soudan, suite à une incursion de rebelles islamistes soudanais en Érythrée, en décembre 1993 (20 morts).
  • Relations avec le Yémen : En décembre 1995, l’Érythrée a envahi les Îles Hanish dans le but d’annexer ce territoire yéménite qu’elle revendiquait. La Cour internationale de justice a finalement attribué les iles au Yémen, hormis quelques ilots, au Sud, attribués à l’Érythrée. Le bilan des affrontements fut de 3 à 12 morts côté érythréen et 15 côté yéménite.

 

Situation géographique

 

  • Bab-el-Mandeb littéralement la « porte des lamentations » en arabe — est le détroit séparant Djibouti et le Yémen, la péninsule arabique et l’Afrique et qui relie la mer Rouge au golfe d’Aden, dans l’océan Indien. C’est à la fois un emplacement stratégique important et l’un des couloirs de navigation les plus fréquentés au monde.
  • Perim : île du Yémen. « détroit d’Alexandre » ou « Bab Iskender », est large de 3.2 kilomètres tandis que celui la séparant de l’Afrique, le Dact-el-Mayun, est large de 25.6 kilomètres.
  • Mokka : l’un des plus importants ports du monde arabe lors du XVIIème siècle, connu suite aux fameux grains de café du Yémen. C’est alors l’apogée d’Al-Mukha, qui détient le monopole du commerce du café et peu après celui des livraisons vers l’Europe.

 

Colonisations et annexion

 

L’Érythrée italienne a été la première colonie italienne en Afrique. La présence italienne en Érythrée s’est étendue de 1869  jusqu’à l’occupation du territoire par le Royaume-Uni en 1941, mais à partir de 1936 le territoire est intégré dans l’Afrique orientale italienne.

Après 30 ans de lutte armée contre Addis Abeba, l’ancienne province de l’Erythrée est devenue indépendante en 1993. Cette indépendance est reconnue par l’Ethiopie, pourtant les deux pays entrent à nouveau en guerre en 1998 pour le tracé de leur frontière commune, notamment pour la ville de Badmé. En 2002, une commission internationale d’arbitrage donne raison à l’Erythrée et place Badmé en territoire érythréen. Or Addis-Abeba refuse ce tracé, et empêche depuis toute fixation définitive de la frontière. En fait, derrière ce contentieux se cache pour l’Ethiopie l’amertume d’avoir perdu son seul accès à la mer.

II – Le gouvernement d’aujourd’hui

 

Issayas Afeworki, dirigeant totalitaire

 

Comme dit précédemment, c’est Issayas Afeworki qui est à la tête de l’Erythrée. Avant d’être président, Issayas Afeworki a participé au Front de Libération de l’Erythrée qui mène la lutte pour l’indépendance de l’ancienne colonie italienne fédérée à l’Ethiopie en 1952 par l’ONU, puis, annexée en 1962. Il rejoint en 1970 le Front Populaire de libération de l’Erythrée, qui est plutôt dominée par la religion chrétienne. Celle-ci s’oppose aux FLE, dominée plutôt par les musulmans. On parle alors de « double guerre civile ». En 1987, il est nommé secrétaire général du FPLE, avant d’en être nommé président le 24 mai 1993, à l’obtention de l’indépendance de l’Ethiopie. Les deux objectifs prioritaires du gouvernement aujourd’hui sont la mise en place sur les versants montagneux 40 000 km² de terrasses cultivables ainsi que de planter vingt millions d’arbres afin de fixer les eaux et de pouvoir garder la main sur le contrôle du port d’Assab situé sur la mer rouge dans le but d’encaisser les revenus de sa raffinerie de pétrole.

Issayas Afeworki est celui qui a instauré le régime à parti unique, sans élections et une économie centralisée avec rôle prépondérant de l’État. En 2001, des protestations ont eu lieu pour demander au Président l’application de la Constitution ratifiée en 1997, ainsi qu’une plus grande ouverture politique et sociale. Sa réponse fut rapide ; en effet, il a fait emprisonner ses contestataires, dont son vice-président, Mahmud Ahmed Sherifo (qui serait mort en détention en 2003), ainsi que les journalistes ayant fait part de leur mécontentement quant à sa décision.

Dans un rapport publié en 2013, Amnesty International décompte plus de 10 000 prisonniers politiques arrêtés arbitrairement et détenus sans jugement dans des conditions « atroces ». Le gouvernement en place est accusé d’« autoritarisme ». La Constitution n’est aujourd’hui pas totalement en vigueur malgré sa ratification. Depuis 2002, l’Assemblée nationale ne s’est pas réunie et aucune élection générale ne fut organisée suite à l’adoption d’une loi électorale en 2002.
« Bien que l’Érythrée soit signataire des principaux instruments internationaux de défense des droits humains, les droits humains sont sévèrement restreints ». La RFI (Radio France Internationale), dans une de ses publications surnomme l’Erythrée comme « la Corée du Nord africaine ». Le gouvernement français indique quant à lui que le régime érythréen interdit les partis politiques. Ce n’est pas le seul fait refusé par le régime érythréen puisque de nombreuses libertés ont été supprimées. De plus, la situation des droits de l’homme y est très préoccupante. Outre le fait que les partis politiques sont interdits, ce régime ne dépend pas de la justice. Les prisonniers politiques y sont de plus en plus nombreux. La liberté de la presse et les libertés syndicales y sont également restreintes. L’indice international de la liberté de la presse des Reporters Sans Frontières classe l’Erythrée au dernier rang mondial (180ème), et ce, pour la 5ème fois en 6 ans.

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De plus, depuis quelques années, tous les groupes religieux, à l’exception des quatre principaux (églises orthodoxe d’Érythrée, église luthérienne d’Érythrée, église catholique, Islam) ont été interdits afin de lutter contre l’influence politique pro-américaine principalement. Toutes ces interdictions poussent les habitants à quitter le pays. Ces derniers deviennent principalement réfugiés dans les pays voisins (Soudan, Ethiopie, Egypte, Libye) au risque d’être arrêtés et incarcérés sans jugement pour désertion. Les plus courageux d’entre eux essaient même d’atteindre des pays lointains (Europe). Il n’y a quasiment pas d’opposition au sein de pays même. Elle se trouve principalement en Ethiopie, aux Etats-Unis et en Europe. Durant le mois de novembre 2011, elle s’est réorganisée à Hassawa (ville éthiopienne) avec la création d’une Assemblée Nationale pour le changement Démocratique constituée de 126 membres provenant de l’ensemble des forces d’opposition érythréenne au régime d’Issayas Afeworki. À la tête de cette opposition se trouve Yusuf Berhanu. Nous pouvons alors parler des récents conflits de l’Erythrée avec ses pays voisins, dont principalement, l’Ethiopie. Selon une décision rendue par une commission internationale de La Haye, l’Érythrée aurait violé la loi internationale et déclenché la guerre en envahissant l’Éthiopie.

 

Quelques données

 

Les forces de défense érythréennes sont divisées en une armée de terre, une armée de l’air ainsi qu’en une marine de guerre. Elles comprennent 300 000 personnels actifs et 250 000 réservistes. La part du PNB allouée à la défense était de 20,9 % en 2006. L’infrastructure y est relativement développée – routes et ports principalement –, mais ces derniers sont sous-utilisés. La principale source de revenu du pays est le transfert de fonds de la diaspora des érythréens immigrés. L’agriculture fournit 11% du PIB. Les produits exportés sont bétail, de la viande et de la gomme arabique. Dans les années à venir, l’Erythrée compte sur l’exploitation des minerais de cuivre, d’or, mais aussi  du pétrole, du gaz, du coton, de la potasse, du fer et du café afin de se développer.

 

III – Les relations internationales

 

Relations politiques avec :

L’ONU et les ONG

En décembre 2011, l’Erythrée a décidé de mettre fin à l’aide financière de l’Union européenne. Le gouvernement érythréen a également décidé que les dernières ONG étrangères ainsi que les agences de l’ONU présentes dans le pays devraient cesser leurs activités. Le gouvernement érythréen est finalement revenu sur ses deux décisions en juillet 2012 et demandé la reprise de la coopération européenne et des Nations Unies. Malheureusement, il est trop tard, l’Etat est  sous sanctions du Conseil de sécurité des Nations Unies.

 

Les États-Unis

Les États-Unis disposent d’une ambassade à Asmara tandis que l’Érythrée dispose d’une ambassade à Washington DC. Le gouvernement américain a reconnu l’indépendance de l’Érythrée vis-à-vis de l’Éthiopie le 27 avril 1993 et a établi des relations formelles le 11 juin 1993 avec la désignation d’un chargé d’affaires. Les intérêts américains en Érythrée comprennent la consolidation de la paix avec l’Éthiopie, des progrès encourageants vers l’établissement d’une véritable démocratie en soutenant les efforts de l’Érythrée dans la résolution des problèmes régionaux, et la promotion du développement de l’économie érythréenne.

 

Le Canada

Les relations entre le Canada et l’Érythrée sont limitées. Mais celui-ci est toujours préoccupé de la situation des droits de la personne en Érythrée, surtout en ce qui concerne le respect des principes démocratiques et de la primauté du droit, l’emprisonnement ou le mauvais traitement des opposants politiques et des journalistes et la protection des libertés civiles. Le Canada aspire à une paix durable entre l’Érythrée et l’Éthiopie et est intervenu en qualité de médiateur dans le différend frontalier entre ces deux pays. Le Canada soutient l’Accord de paix d’Alger conclu en 2000, qu’il considère comme étant l’unique plan pour la paix entre les deux pays. Cet accord prévoyait la présence d’une mission de maintien de la paix de l’ONU dans la région frontalière (MINUEE) et la création de la Commission du tracé de la frontière entre l’Éthiopie et l’Érythrée chargée de la délimitation de celle-ci. Le commerce bilatéral avec l’Érythrée a toujours été limité. Toutefois, ce commerce de marchandises a bondi de 2,92 millions de dollars en 2010 à 325,8 millions de dollars en 2011. Les nouvelles importations canadiennes d’or en provenance de l’Érythrée expliquent cette augmentation, faisant de ce pays la principale source d’or du Canada.

 

La Chine

Le ministre chinois des Affaires étrangères Yang Jiechi s’est entretenu avec Osman Saleh Mohammed (ministre des affaires étrangères de l’Erythrée. Lors de leur rencontre, Yang Jiechi a salué les importantes réalisations entre la Chine et l’Erythrée depuis l’établissement des relations diplomatiques depuis environ 20 ans, mettant en avant le renforcement de la confiance politique mutuelle et la bonne coopération dans divers domaines. Il a apprécié le soutien ferme de l’Erythrée à la Chine sur les questions concernant les intérêts fondamentaux du pays, s’engageant à faire des efforts conjoints pour promouvoir les relations bilatérales. La Chine joue un rôle important dans les affaires internationales, et l’Erythrée est prête à renforcer encore davantage la coopération mutuellement bénéfique avec ce dans tous les domaines.

 

 

 La France

La France : les liens franco-érythréens se sont beaucoup développés : Bernard Kouchner, alors ministre de la santé et de l’action humanitaire, est le premier ministre européen a s’être rendu en Érythrée en août 1992. Il y a eu la visite à Paris du ministre des Affaires étrangères érythréen, Ali Said Abdallah, en octobre 2004. De plus la visite à Asmara de la ministre déléguée à la Coopération et à la Francophonie en septembre 2006.

 

 

La Libye

 

Mouammar Kadhafi reçoit Issayas Afeworki, président de l’Érythrée, venu assister au sommet des cinq pays consacré à la recherche d’une solution à la crise du Darfour. Cette photo a été prise à Tripoli en mai 2005. Kadhafi fournir des armes à l’Érythrée et du carburant.

 

 

Conclusion

Le fait que le pays soit une dictature présidentielle pose problème puisque l’homme à la tête du gouvernement depuis l’indépendance du pays cherche depuis la guerre d’indépendance à renforcer son armée par tous les moyens afin de faire face aux problèmes avec les pays frontaliers. La communauté internationale n’est pas favorable aux décisions prises par le gouvernement érythréen. En effet, celles-ci ne respectent principalement pas les droits de l’homme. De plus, le président a déjà financé et soutenu des activités terroristes. Le président craint que son pays perde son indépendance et met donc tout en oeuvre pour que ses opposants ne soient pas présents sur son territoire. C’est également l’un des pays où le taux de corruption est l’un des plus élevés au monde. Malgré une croissance importante, l’IDH est aussi un des plus faible au monde. Le gouvernement qui se veut donc être une République n’est en réalité dénommée ainsi afin de faire distraction sur les nombreux problèmes à l’échelle internationale du pays.

 

Sitographie

http://fr.wikipedia.org/wiki/Érythrée

http://www.ipu.org/parline-f/reports/1103_A.htm

http://www.frontlinedefenders.org/fr/eritrea

https://rsf.org/index2014/fr-index2014.php#

http://fr.rsf.org/erythree-rsf-denonce-la-situation-25-06-2013,44849.html

http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/erythree/presentation-de-l-erythree/

http://www.rfi.fr/afrique/20140204-erythree-severement-critiquee-rapport-onu-droits-homme-afewerki-disparitions-forcees-torture-repression-censure/

http://www.parismatch.com/Actu/International/Kadhafi-Soudan-Erythree-Afeworki-149193

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Journée des Droits de l’Homme : les Nations Unies rendent hommage au militantisme et à la Déclaration de Vienne /geopolitique/journee-des-droits-de-lhomme-les-nations-unies-rendent-hommage-au-militantisme-et-a-la-declaration-de-vienne/ /geopolitique/journee-des-droits-de-lhomme-les-nations-unies-rendent-hommage-au-militantisme-et-a-la-declaration-de-vienne/#respond Fri, 14 Feb 2014 02:46:19 +0000 /?p=3600

Commémoration des 20 ans du Bureau des Nations Unies pour les Droits de l’Homme)

Cet article est un communiqué officiel des Nations Unies publié le 10 décembre 2013 à l’occasion du 20ème anniversaire de la Déclaration et du Plan d’action de Vienne (1993). Cette déclaration est divisée en deux volets. L’un portant sur les fondamentaux des Droits de l’Homme, l’autre portant sur les droits et la structure même des Nations Unies. L’ONU recommande à la suite de cette déclaration, que les Etats Membres élaborent un plan d’action national, détaillant les étapes qu’ils comptent suivre pour améliorer le respect et l’application de ces droits pour leurs populations.
A cette occasion, est célébrée partout dans le monde la création du Bureau des Nations Unies pour les Droits de l’Homme. A travers cette publication, nous avons un panorama non exhaustif des domaines d’intervention de l’ONU depuis sa création. Cette organisation recense aujourd’hui 193 pays membres dont le dernier est le Soudan du Sud depuis le 14 juillet 2011, soit 5 jours après son indépendance. L’ONU œuvre, comme nous le voyons dans cet article, à promouvoir et défendre les droits de chaque Homme sur la planète en luttant contre tout ce qui peut violer leur dignité et leur liberté. L’organisation sait reconnaitre le rôle de tous les acteurs, et estimer la valeur de leur travail, comme celui de Mandela.

– Traduction française à partir de la version originale, en anglais –

Journée des Droits de l’Homme : les Nations Unies rendent hommage au militantisme et à la Déclaration de Vienne

Honorer l’activisme pour les droits de l’Homme, y compris l’héritage de Nelson Mandela : les hauts fonctionnaires des Nations Unies marquent aujourd’hui la Journée des Droits de l’Homme en appelant à une plus grande volonté politique et de plus importantes ressources, pour appliquer les lois et les standards destinés à promouvoir et protéger les droits et la dignité de tous les peuples.
« Promouvoir les Droits de l’Homme est une des raisons d’être des Nations Unies, et l’Organisation a toujours mené cette mission à bien depuis sa création », a déclaré le Secrétaire Général Ban Ki-Moon dans son discours pour cette Journée. « A l’avenir comme aujourd’hui, la clef du succès reste la volonté politique des Etats Membres ». Il ajoute que ceux-ci ont le devoir fondamental de protéger les Droits de l’Homme, de prévenir les violations à l’échelle nationale, ainsi que d’intervenir quand d’autres Etats n’arrivent pas à tenir leurs engagements. « Ce n’est pas toujours facile », observe Ban Ki-Moon, ajoutant que sur les 20 dernières années, le monde a été témoin de génocides, et de beaucoup d’autres violations épouvantables, à grande échelle, du droit international humanitaire et des Droits de l’Homme.

Le thème de cette année est “20 ans à Œuvrer pour Vos Droits », célébrant le 20ème anniversaire de la Déclaration de Vienne et du Plan d’Action, adoptés à la Conférence Mondial des Droits de l’Homme, tenue dans la capitale autrichienne en 1993. Celle-ci a cristallisé le principe de l’universalité des Droits de l’Homme et l’engagement des Etats à les promouvoir et les défendre, pour les tous les peuples -indépendamment des systèmes nationaux politiques, économiques et culturels.

« La Déclaration de Vienne doit être considérée comme la base directrice d’un fabuleux projet qui demeure toujours en construction », affirme le Haut Commissionnaire des Nations Unies pour les Droits de l’Homme Navi Pillay, soulignant également que cette déclaration a ouvert la voie à la création de son bureau connu sous l’acronyme OHCHR (Office of the High Commissioner for Human Rights). Elle insiste sur l’importance des nouvelles technologies qui impactent la façon dont le travail est effectué en lien avec les Droits de l’Homme. Elles facilitent aussi leurs violations, reconnait la fonctionnaire des N.U., notant que l’usage des systèmes de surveillance de masse et de sauvegarde de données, autant que l’usage de systèmes d’armes autonomes communément appelés « robots tueurs », posent de profonds problèmes éthiques et légaux. Navi Pillay résume le fait qu’à l’échelle internationale, il y a encore une énorme quantité de travail à réaliser « pour que les Droits de l’Homme ne soient plus d’abstraites promesses mais de réelles améliorations dans la vie quotidienne », plus particulièrement parmi des groupes marginaux ou exclus.
Dans le cadre des événements marquants de cette journée, l’OHCHR honorera six lauréats du Prix des Droits de l’Homme 2013, une récompense décernée aux individus et aux organisations en reconnaissance de leurs réalisations exceptionnelles en matière des Droits de l’Homme.

Les gagnants de cette année sont :

      • Biram Dah Abeid, fils d’esclaves affranchis, ayant œuvré pour l’éradication de cette pratique

 

      • la kosovare Hiljmnijeta Apuk, une militante des droits des peuples ayant une croissance réduite et disproportionnelle

 

      • la finlandaise Liisa Kauppinen, Présidente émérite de la Fédération Mondiale des Sourds

 

      • Khadija Ryadi, ancienne Présidente de l’Association Marocaine des Droits de l’Homme

 

      • la Cour Suprême de Justice du Mexique (Tribunal Constitutionnel)
      • Malala Yousafzai, élève pakistanaise sur qui les Talibans ont tiré, et qui prône le droit à l’éducation

Parmi les anciens récompensés figure Nelson Mandela, qui a été salué dans le discours des officiels de l’ONU, et dont l’héritage est honoré aujourd’hui lors du service commémoratif tenu à Johanesbourg, où seront présents M. Ban et plus de 90 Chefs d’Etats et de Gouvernements.
Le travail de Mandela et l’esprit de la Journée des Droits de l’Homme ont aussi été célébrés au Soudan du Sud, où Hilde Johnson, chef de la mission des Nations Unies de maintien de la paix sur place, a fait le parallèle entre les combats menés contre l’Apartheid en Afrique du Sud, and les conflits politiques au Sud-Soudan, incluant le référendum de 2011 sur la question de l’indépendance de la région vis-à-vis du Soudan. « Madiba a reconstruit une nation, une nouvelle Afrique du Sud, et il s’est assuré qu’elle serait bâtie sur le respect de la dignité humaine et des droits de l’Homme », a déclaré Hilde Johnson, en témoignant à Mandela une distinction toute particulière. « Que vos droits se fondent sur ces principes – pour tous-, soyez la plus importante des pierres fondatrices ».

La demande des hommes et des femmes la plus répandue est certainement l’opportunité de pouvoir travailler en toute dignité, selon l’Organisation Internationale du travail. Quelques 20,9 millions de personnes ont été soumises au travail forcé durant la période 2002-2011, et l’on recense encore 168 millions d’enfants subissant le même sort, selon les chiffres des Nations Unies. En plus de cela, 870 millions de travailleurs et leurs familles vivent dans la pauvreté sous le seuil de 2$ par jour, dont 400 millions dans une pauvreté extrême. « Un travail décent, avec les droits et principes qu’il incombe, est une voie durable pour sortir de la pauvreté », selon Guy Ryder, directeur général de l’O.I.T. « La création de postes décents est, et demeurera, l’une des plus grandes priorités de développement à l’échelle mondiale ». Le bureau des Nations Unies met en avant le fait que le droit de travailler est un droit humain fondamental, et que son déni met en danger des vies, la liberté, la dignité humaine, la sécurité et la santé des travailleurs ou bien même encore maintient des foyers dans des conditions de pauvreté extrêmes.

La santé et les Droits de l’Homme sont intimement liés, a affirmé Michel Sidibé, le Chef Exécutif d’ONUSIDA, dans son message, en soulignant les luttes de certaines populations contre le VIH et le SIDA.
« Nous avons besoin de protéger et de respecter le droit humanitaire et d’être suffisamment courageux pour affronter les erreurs de la société » dit-il. « Comment le monde peut-il accepter que des personnes aient accès à la sécurité et aux services alors que d’autres en sont exclus à cause de leur statut social et juridique, leur revenu, ou bien même leur orientation sexuelle ? » « Tout le monde a la même valeur, la même dignité, et tout le monde mérite le droit à la santé et à la vie » ajoute Sidibé, précisant que l’éradication du virus du SIDA est une question de droit humanitaire.
La Journée des Droits de l’Homme ne permet pas l’aboutissement de la compagne mondiale « 16 jours d’activisme contre la violence faite aux femmes », qui commence chaque année lors de la « Journée Internationale contre la violence faite aux femmes » le 25 novembre. « La responsabilité, le renforcement du pouvoir des femmes, et les mutations sociétales sont des facteurs clefs pour défier la norme de l’impunité et le manque de réponses durables et pertinentes contre les actes de violence à leur encontre », affirme Rashida Manjoo, Rapporteur Spéciale sur la violence contre les femmes. Dans son discours, elle implore les gouvernements d’intervenir pour empêcher et répondre à ce type de violence, en disant que l’échec des Etats à répondre de manière efficace à de tels traitements infligés aux femmes et jeunes filles, constitue par ailleurs une autre forme de violence contre elles.
Dans son discours en cette journée, la Cour Pénale Internationale a exprimé sa plus profonde sympathie à tous les peuples dont les droits humains fondamentaux ont été violés, et particulièrement à ceux situés en zones de conflits. La CPI ajoute que pour la première fois dans l’Histoire, les victimes peuvent désormais participer activement dans les procédures judiciaires devant le Tribunal, et demander réparations.

La Journée des Droits de l’Homme découle de l’adoption, par l’Assemblée Générale, de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme le 10 décembre 1948. Cette déclaration établit une large série de libertés et de Droits de l’Homme fondamentaux auxquels ont droit tous les hommes et les femmes du monde entier sans exception. Parmi les célébrations tenues dans le monde en cette journée, l’UNESCO organise un événement culturel à Paris, proposant des musiques traditionnelles, du jazz, des tango et autres danses. « Pour assurer la liberté et la dignité dans les droits de chaque homme et de chaque femme, nous nous devons de tout faire pour aider les pays à atteindre les Objectifs du millénaire pour le développement d’ici 2015 » a déclaré le Directeur Général de l’UNESCO Irina Bokova en référence aux 8 objectifs anti-pauvreté universellement adoptés.

Au siège de l’ONU à New-York, la légende du Tennis Martina Navratilova and le joueur professionnel de basket de NBA Jason Collins prennent part à une manifestation spéciale, intitulée « Le sport fait son coming-out contre l’homophobie ». Dans le même temps à Oslo, en Norvège, l’Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques recevra le Prix Nobel de la Paix pour « ses efforts considérables en vue d’éradiquer les armes chimiques ».

Source : http://www.un.org/apps/news/story.asp?NewsID=46702&Cr=human+rights&Cr1=#.Uq8kevTuJIE

En conclusion :
Ce communiqué officiel des Nations Unies aborde plusieurs thèmes très importants à l’échelle mondiale pour tous les Hommes. En passant par le sujet de la pauvreté, de la violence, de la discrimination ou encore de l’exploitation au travail – en citant l’œuvre de Mandela suite à sa tragique disparition – nous pouvons nous rendre compte des tensions historiquement établies entre les différentes nations au sein même de l’ONU (Soudan et Soudan du Sud), et dans le monde. Nous nous rendons compte que depuis la création de l’ONU en 1945, beaucoup de travail a été fourni mais qu’à l’heure actuelle il reste encore de nombreux efforts à fournir pour garantir l’équité entre les peuples et pour assurer le respect des Droits de l’Homme. De nombreux acteurs sont mobilisés outre les chefs d’Etats ou de gouvernements. Les organisations non-gouvernementales, des sportifs de grande notoriété, des activistes ayant subi des persécutions, etc. Cela nous donne à réfléchir sur la réelle influence des Nations Unies dans le monde et à son pouvoir d’intervention dans les pays qui échouent à protéger leurs peuples.

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Comment marche l’immunité diplomatique ? /geopolitique/comment-marche-limmunite-diplomatique/ /geopolitique/comment-marche-limmunite-diplomatique/#respond Fri, 14 Feb 2014 00:25:20 +0000 /?p=3628

Voiture de police devant le bâtiment de la mission permanente de L’ONU en Inde de New-York, 18 dec. 2013

India Real Time est un blog communautaire alimenté et animé par des reporters, travaillant pour le Wall Street Journal et le Dow Jones Newswires en Inde.  Le WSJ a été crée par Dow Jones ans Company en 1889. C’est un quotidien économique et financier. Il appartient à Rupert Murdoch depuis 2007. IRT est un blog rattaché au WSJ, dont les articles publiés traitent de différentes thématiques : économie, politique, culture, sports et loisirs. Ils abordent l’actualité quotidienne du pays.

Vibhuti Agarwal a rejoint l’agence d’Asie du Sud du  Wall Street Journal en 2007 et s’occupe de traiter tout type de sujet pour le blog. Dans cet article précis, elle aborde l’immunité diplomatique qui est remise en cause dans certains cas en prenant pour illustration un fait d’actualité. La diplomate indienne Devyani Khobragade a été arrêtée le 11 décembre dernier pour contrefaçon de visa afin de faire rentrer sur le territoire américain une ressortissante indienne. Celle-ci était supposée travailler comme domestique, et à un salaire bien en dessous des seuils américains légaux (3,31$ de l’heure au lieu de 9,75$). La controverse autour de cette affaire demeure celle de la façon dont a été arrêtée la diplomate sur le territoire américain. Beaucoup d’articles présentent et confrontent les points de vue des pays impliqués. Celui-ci a la particularité d’expliquer les spécificités en matière de législation diplomatique pour mieux comprendre l’affaire.

 

– Traduction française à partir de la version originale, en anglais –

De Vibhuti Agarwal, publié le19 décembre 2013

 

Comment marche l’immunité diplomatique

 

Les allégations de mauvais traitement et l’arrestation d’une diplomate indienne, accusée de fraude sur visa et de sous-payer sa femme de ménage à New-York, ont plongé sous les projecteurs le système complexe de l’immunité diplomatique.

Devyani Khobragade, agent consulaire de 39 ans, a été menottée devant l’école de sa fille à New York et emprisonnée  avant d’être rapidement libérée sous-caution jeudi dernier. Elle a subi une fouille au corps à nu, et a du partager une cellule avec des toxicomanes durant sa brève arrestation.

Le procureur américain l’accuse de violation de visa, et de fausses déclarations à propos de la somme d’argent qu’elle a versée, pour une ressortissante indienne qui travaillait pour elle comme aide domestique, de façon à obtenir un visa pour qu’elle puisse entrer sur le territoire américain. Si elle est condamnée, Khobragade risque une peine maximale de 10 ans pour la fraude, et de 5 ans pour ses fausses déclarations.

Elle va devoir contester l’accusation sur la base de l’immunité diplomatique, a déclaré son avocat Daniel N. Arshack. « Elle est protégée de toute accusation en vertu de son statut diplomatique », a écrit Arshack dans un email.

A contrario, pour les procureurs du Département d’Etat américain, elle ne bénéficie pas de l’immunité totale. Il est dit que, sous la Convention de Vienne des Nations Unies à propos des relations consulaires, en tant qu’agent consulaire et non en tant qu’agent diplomatique, elle est seulement protégée des arrestations pour crimes commis en lien avec son travail.

Selon le règlement du Département d’Etat en matière d’application de la loi et des autorités légales, les agents consulaires, comme D. Khobragade, ne bénéficient pas du même niveau d’immunité que ceux qui travaillent sur des missions diplomatiques.

Les diplomates et les agents consulaires sont protégés par deux traités différents des Nations Unies – la Convention de Vienne sur les Relations Diplomatiques de 1961, et la Convention de Vienne sur les Relations Consulaires de 1963.

Les agents diplomatiques, composés d’ambassadeurs, secrétaires, chefs de bureau et certains membres du personnel de sécurité jouissent « de l’invulnérabilité totale de leur personne », ce qui signifie qu’ils ne peuvent pas être menottés (sauf circonstances exceptionnelles), arrêtés ou détenus ni même voir leur domicile perquisitionné, selon le règlement du Département d’Etat sur l’application de la loi et les autorités judiciaires. Les membres de la famille composant le foyer de l’agent diplomatique jouissent des ces mêmes privilèges et immunités.

Les agents diplomatiques sont également à l’abri de procès criminels et civils, excepté dans certains cas, et ne peuvent être poursuivis, même en cas d’infraction grave, à moins que l’immunité soit levée par le pays d’origine.

A l’inverse, les agents consulaires – ceux qui produisent les documents de voyages, et gèrent les problèmes des ressortissants de leur pays – sont protégés de cette même façon tant qu’ils vaquent à leurs fonctions officielles. Dans l’affaire Khobragade, « elle tombe sous ce type d’immunité spécifique, et serait susceptible d’être arrêtée provisoirement en attendant le procès, en vertu d’un mandat d’arrêt pour crime », affirme Marie Harf, porte-parole du Département d’Etat.

Afin de la protéger contre des poursuites, l’Inde l’a réaffectée mercredi à la mission permanente des Nations Unies dans le pays pour s’assurer qu’elle bénéficie de l’immunité diplomatique rétroactive, qui lui donnerait de plus grandes garanties légales, incluant l’immunité pour des actes commis avant ou après son assignation, dont elle bénéficie à présent.

« L’immunité criminelle s’oppose à l’exercice de la juridiction des tribunaux sur un individu, que l’incident ait eu lieu avant ou pendant la période durant laquelle existe une telle immunité » affirme le Département d’Etat. Toutefois, celui-ci a l’autorité de refuser le transfert de Khobragade aux Nations Unies. On ignorait encore jeudi s’il elle allait finalement bénéficier de cette immunité ou non.

 

Source : http://blogs.wsj.com/indiarealtime/2013/12/19/how-diplomatic-immunity-works/

 

En conclusion :

Cet article met le doigt sur la complexité des relations diplomatiques à l’heure actuelle. Les traités en vigueur, bien qu’universellement reconnus, ne permettent pas de trancher aisément dans des affaires comme celle de Khobragade. Il relance le débat sur l’impunité des diplomates qui peut scandaliser. Bien que le statut diplomatique permette d’être blanchi en cas d’erreurs liées aux fonctions diplomatiques, certains accusés, comme Dominique Strauss-Kahn en 2011, tentent de faire jouer leur statut dans des mœurs d’ordres privés. Ils se sentent « intouchables », et imaginent pouvoir ne pas respecter la loi par des comportements répréhensibles. Ici, Khobragade tente de faire jouer son statut pour s’en sortir indemne alors que, même si les visas rentrent en compte dans son domaine d’intervention, il s’agit ici d’un fait d’ordre privé, et elle ne devrait pas jouir de l’immunité complète en tant qu’agent consulaire.En outre, nous pourrions éventuellement réfléchir au fait que l’ONU, qui œuvre à faire respecter les Droits de l’Homme et l’égalité des peuples, adopte paradoxalement des traités stipulant l’immunité de certaines personnes face à la loi en cas d’infraction.

 

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