Relation actuelle
• Réchauffement
A partir de 2010, dès que le président Ukraine a signé l’accord, avec son homologue russe, Dmitri Medvedev, un traité portant d’une part sur le prolongement pour vingt-cinq ans du bail de la Flotte russe de la mer Noire basée à Sébastopol16 en Crimée, et d’autre part sur la diminution du prix du gaz russe livré à l’Ukraine de de 30 %. Cependant, suite à la déclaration d’indépendance du Parlement de Crimée, le gouvernement ukrainien affirme qu’il n’enverra pas de troupes en Crimée, par crainte de dégarnir les frontières orientales de l’Ukraine, où la Russie a déployé d’importantes troupes. En 18 Mars 2014, à cause de l’annonce issue de gouvernement Russe sur l’affirmation de la République de Crimée et la ville de Sébastopol comme deux nouveaux sujets fédéraux de la Fédération de Russie, les tensions restent fortes entre les deux pays. Ainsi, les deux pays rétablissent le contrôle total de la frontière russo-ukrainienne.
• Retrait d’armes lourdes
Selon les accords Minsk 2, les deux parties doivent retirer “toutes les armes lourdes” afin d’établir une zone tampon d’une profondeur de 50 kilomètres à 140 kilomètres en fonction du type d’armes lourdes. Pour mettre en place cette zone, l’armée ukrainienne doit retirer ses pièces d’artillerie par rapport à la ligne de front actuelle, située plus à l’ouest par rapport à celle qui était accordée en septembre dans le cadre des précédents accords de paix de Minsk étant donné que les rebelles ont gagné du terrain depuis.
De leur côté, les rebelles doivent se retirer par rapport à la ligne de front de l’époque, celle de septembre. Les territoires nouvellement conquis sont ainsi de facto intégrés à la zone tampon élargie par rapport aux précédents accords qui prévoyaient une zone de 30 kilomètres de largeur.
• Echange des prisonniers
La veille un échange de prisonniers à également eu lieu entre les deux camps. 139 soldats ukrainiens et 52 combattants rebelles retenus prisonniers ont été échangés samedi à Jolobok, un village situé sur la ligne de front dans la région de Lougansk, a constaté un journaliste de l’AFP sur place. Des soldats étaient blessés et certains se déplaçaient difficilement, bien qu’ils aient dû marcher plusieurs kilomètres dans une campagne ukrainienne frappée par les tirs d’artillerie pour arriver au lieu de l’échange.
Il s’agit du plus important échange de prisonniers depuis le début de l’année. Les accords de Minsk 2 prévoient qu’Ukrainiens et rebelles libèrent “tous les prisonniers et les otages” retenus depuis le début du conflit en avril dernier. Les séparatistes ont précisé que plusieurs prisonniers avaient été capturés à Debaltseve. Environ 2500 soldats ukrainiens avaient réussi mercredi à s’extirper de ce verrou stratégique, quasiment encerclé et soumis à des bombardements quotidiens des rebelles depuis un mois.
Vingt soldats sont morts au cours de cette retraite, et la bataille a causé en un mois la mort de 179 soldats ukrainiens, a annoncé vendredi Iouri Birioukov, un proche conseiller du président ukrainien Petro Porochenko. Il a ajouté que 81 soldats étaient toujours portés disparus. Malgré la signature des accords de Minsk 2 prévoyant l’instauration d’un cessez-le-feu à partir du 15 février, les rebelles avaient continué leur offensive autour de Debaltseve, dont la prise leur permet de relier les deux “capitales” séparatistes de Donetsk et Lougansk.
La définition du statut de ces deux fiefs fait d’ailleurs partie des autres points qu’exigent les accords de Minsk 2. Voici ce qu’il reste donc à accomplir aux deux camps pour répondre aux exigences de ces accords.
• Définition du statut des régions de Donetsk et Lougansk
Minsk prévoit de promouvoir un dialogue pour l’organisation d’élections locales conformément à la législation ukrainienne et pour définir le futur statut des régions de Donetsk et de Lougansk. Une amnistie doit également être décrétée pour les combattants impliqués dans le conflit.
Kiev avait déjà voté en septembre une loi sur le “statut spécial” des territoires aux mains des rebelles qui leur donnait davantage d’autonomie, garantissait le libre usage du russe et fixait au 7 décembre l’organisation d’élections locales. Une autre loi prévoyait l’amnistie d’une partie des combattants séparatistes.
Les rebelles ont cependant rejeté cette offre et ont organisé le 2 novembre leurs propres élections présidentielles et législatives, condamnées par Kiev et les Occidentaux. L’Ukraine a fini par annoncer l’annulation des deux lois et a coupé à la mi-novembre le financement budgétaire des territoires sous le contrôle des séparatistes. Les insurgés dénoncent dès lors un “blocus économique” imposé par Kiev.
• Rédaction d’une nouvelle constitution en Ukraine
Le texte prévoit la mise en place d’une nouvelle Constitution ukrainienne d’ici à fin 2015, prévoyant une “décentralisation” des régions de Donetsk et de Lougansk, en accord avec les représentants de ces zones.
A ces points s’ajoute également la mise en place d’un cessez-le-feu effectif. Celui-ci devait entrer en vigueur le 14 février mais les combats ont continué dans certaines villes notamment à Debaltseve. Ces violations du cessez-le-feu ont provoqué les foudres de Washington qui réfléchit à des sanctions “graves” contre la Russie, accusée de soutenir les séparatistes. Et beaucoup en Ukraine craignaient par ailleurs une nouvelle offensive séparatiste, cette fois sur le port de Marioupol, derrière grande ville de l’Est située dans le sud de la ligne du front, que les rebelles avaient déjà dans le passé désigné comme leur prochain objectif.
• Renforcement de la présence militaire Russie
La Russie a déployé des systèmes de défense antiaérienne supplémentaires dans l’est de l’Ukraine et contribue à entraîner les forces séparatistes pro-russes en violation de l’accord de cessez-le-feu de Minsk.
“Il n’y a pas eu autant d’équipement de défense antiaérienne russe dans l’est de l’Ukraine depuis le mois d’août” 2014 a déclaré dans un communiqué la porte-parole de la diplomatie américaine, Marie Harf. L’armée russe aurait aussi renforcé sa présence à la frontière avec les territoires contrôlés par les rebelles séparatistes, où elle n’avait pas déployé autant d’hommes et de matériel depuis octobre dernier.
Perceptives prises par Ukraine en 2015
A) De la nécessité des réformes politiques et économiques
L’application des réformes par le gouvernement. Parmi les plus importantes, on trouve :
• La réforme des retraites, point focal des mécontentements sociaux possibles en 2015 ;
• La structuration d’un Etat de droit et la réforme du secteur public : réforme de la police, du système pénal, de l’administration publique, approfondissement de la loi anti-corruption, lustration, etc.
• La refonte totale du système judiciaire, qui traine depuis l’ère Ianoukovitch et qui représente un point majeur de la pérennité de l’Accord d’Association avec l’UE. L’Ukraine aurait déjà dû effectuer la réforme pour obtenir la signature du document par Bruxelles ;
• La modernisation des forces armées : la coalition parlementaire prévoit que 3% du PIB soit attribué à la défense, ce qui semble insuffisant pour un pays en “guerre” et une armée exsangue. A noter que les derniers équipements militaires ont été fournis en novembre par les Etats-Unis lors de la visite de Joe Biden ;
• Les mesures clés de la coalition : la décentralisation, le retour de la Crimée (qui ne sera même pas discutée par Moscou en 2015) et l’accession à l’OTAN (qui ne sera pas à l’ordre du jour, du moins tant que la question du Donbass n’est pas réglée).
Le gouvernement est donc attendu au tournant en 2015 et devra faire ses preuves, sous peine de provoquer une vague de mécontentement des activistes civils issues de Maïdan. Le rythme des réformes va en réalité surtout dépendre de la capacité de la Rada à faire son travail correctement sans entraves de l’opposition, qui risque de déchaîner le peu de ressources administratives qui lui reste pour casser la coalition et entraver la majorité constitutionnelle. Ralenties par ces nombreux facteurs d’incertitude, les réformes se feront de manière progressive, lente et pas à pas. Or les réformes sont intrinsèquement liées entre elles et doivent être coordonnées de manière concomitante : c’est justement là où des problèmes apparaitront en 2015, dans le sens où il va être difficile de déterminer lesquelles réaliser en premier. Une forme de “compétition aux réformes” prioritaires, selon les intérêts des gouvernants et la répartition des tâches au sein de la coalition, risque de voir le jour l’année prochaine.
Par rapport au côté économique, c’est purement et simplement le sauvetage de l’économie ukrainienne, et le retour sur le chemin de la croissance, qui sont en jeu pour l’année 2015. Depuis 9 mois, la communauté internationale fournit à Kiev le minimum nécessaire en termes de prêts et de financement pour éviter un inévitable défaut de paiement et l’effondrement total du pays. Le FMI a d’ailleurs annoncé le 9 décembre que 15 milliards de dollars supplémentaires seraient nécessaires pour renflouer l’économie ukrainienne, en plus des 17 milliards d’aide initialement prévus dans le plan d’action d’avril 2014. Début décembre 2014, l’Union Européenne avait également déclenché l’enveloppe de 500 millions d’euros sous forme de prêts, inclue dans le programme d’aide d’1,6 milliards d’euros signé en mars dernier.
2015 sera une année charnière en termes de choix économiques. D’intenses réformes sont donc nécessaires, sur fond d’austérité provoquée par la conditionnalité de l’aide du Fonds Monétaire International (FMI) et de la Banque Mondiale ainsi que concernant le respect des critères de convergence de la partie économique de l’Accord d’Association de l’Union Européenne (DCFTA). On s’attend à ce que l’Ukraine connaisse au moins 5 ans de marasme économique, les critères macro-économiques du pays étant aujourd’hui au niveau de ceux années 1990.
L’Ukraine a besoin de plus de 40 milliards de dollars d’assistance pour sortir la tête de l’eau, alors même que les prêteurs internationaux demandent des conditions d’austérité qui risquent de provoquer des vagues de mécontentement social l’année prochaine. Les points de crispation se cristalliseront sur la question du gel des augmentations de salaire et des aides sociales, de la réforme des retraites, de la montée du chômage et l’absence d’investissements étrangers pour relancer l’économie.
De plus, l’année 2015 risque de connaître une nouvelle crise gazière entre Kiev et Moscou après mars 2015, date officielle de la fin de l’accord gazier du 30 octobre dernier signé entre les deux états sous la bienveillance de l’Union Européenne. En l’échange du remboursement immédiat de 1,45 milliards de dettes à Gazprom, Moscou avait convenu de la reprise de fourniture de gaz à Kiev sous condition de prépaiement (comme c’est toutefois le cas pour tous les états européens). Ce faisant, Kiev avait déboursé les deux tiers de son enveloppe d’aide du FMI et de l’UE pour rembourser Moscou, représentant ainsi un camouflet sévère pour les autorités européennes et internationales. Pour rappel, les livraisons de gaz russe avaient repris le 9 décembre, après 6 mois d’arrêt. En plus du chantage sur les futures livraisons, Moscou pourrait également tenter de renégocier à la hausse le prix du gaz, déjà élevé pour Kiev. En effet, l’Ukraine paye aujourd’hui entre 378 et 375 dollars pour 1 000 mètres cubes de gaz russe, comparé à 304 dollars en moyenne en UE.
B) Entre le Donbass et Moscou, l’avenir sécuritaire de l’Ukraine dans la balance
Les enjeux stratégiques de l’année 2015 sont primordiaux pour Kiev, d’autant plus que le président Poroshenko a fait du retour de la Crimée une de ses priorités. Mais dans la perspective où la Crimée est désormais belle et bien russe, perdre définitivement les deux territoires de l’est représenterait un premier échec politique et un facteur supplémentaire de crispation pour la population. Cette stratégie est à double tranchant pour Poroshenko, dont le côté “va-t’en guerre” pourrait provoquer des mécontentements et la perte du soutien populaire en cas d’incapacité de l’armée de récupérer le Donbass. L’impossibilité totale d’infléchir Moscou sur la question de la Crimée va donc pousser le gouvernement de Kiev à se concentrer en 2015 uniquement sur la récupération du Donbass dans une logique jusqu’au-boutiste. Au final, Kiev va devoir gérer la partition de facto de son territoire.
Le contexte sécuritaire dans l’est va devenir de de plus en plus précaire en début d’année 2015. Autour de Donetsk, les échanges de tirs et les bombardements étaient encore quotidiens début décembre, ce en raison des tentatives d’incursions des forces armées et des tirs d’obus sur les points stratégiques tenus par les rebelles. Malgré l’organisation d’une “Journée du Silence” le 9 décembre -sorte de test de cessez-le-feu- les combats vont continuer dans les mois à venir.
Quoi qu’il en soit, la phase active des combats est donc terminée pour le moment : l’hiver 2014 va littéralement “geler” le front sur les positions actuelles et Moscou s’oriente maintenant sur une bataille diplomatique pour la reconnaissance des territoires de l’est. Le 19 novembre, le Cabinet des ministres adoptait un décret présidentiel prévoyant la démarcation unilatérale de la frontière entre l’Ukraine et la Russie : la création d’une ligne de front fortifiée pérennise encore plus le “gel” du conflit et son inscription dans la durée. Les prochains mouvements de troupes auront lieu, si c’est le cas, au printemps 2015. Cette situation d’attentisme entraîne malgré tout un large potentiel de déstabilisation envers les forces armées ukrainiennes, ce étant donné que les deux parties au conflit sont rentrées dans une logique de guerre de position. En cela, les “opérations anti-terroristes” (ATO) ont échoué dans leur objectif de reprendre rapidement les positions dans l’est et mettre fin aux velléités séparatistes.
La situation dans le Donbass reste un fait accompli pour le Kremlin, qui va désormais devoir gérer les appels des deux “Républiques” à un rattachement au territoire de la Fédération de Russie en 2015. Leur indépendance, fictive, n’aura pas duré longtemps. Les leaders séparatistes appellent désormais à la création d’un “nouveau statut” négocié sur une base égale et bilatérale avec Kiev dans le cadre du groupe de contact de Minsk ainsi que la révision du protocole d’armistice du 5 septembre dans un sens qui pousserait Kiev à reconnaitre de facto l’existence des entités du Donbass. En 2015, La Russie va par conséquent chercher à renforcer le rôle diplomatique officiel des leaders rebelles, présents à la table des négociations depuis juin dernier, et sur la nécessité d’un dialogue direct entre Kiev et les séparatistes – de préférence sous médiation russe.
Toutefois Moscou n’est pas dans l’optique d’un règlement rapide du conflit, préférant voir la situation dans l’est se détériorer et “pourrir” tout en créant des conditions de vie telles qu’il sera quasi-impossible de réintégrer le Donbass à l’Ukraine territoriale sans le sacrifice économique de Kiev et un travail pluri-générationnel de “confidence-building” entre les populations. La logique de guerre civile prenant de plus en plus le dessus, Kiev aura du mal à recréer un climat de confiance avec les populations de l’est, meurtries par les frappes indiscriminées de l’armée et l’appellation de “terroristes”. La logique jusqu’au-boutiste du Président, qui a même déclaré être prêt à livrer une “guerre totale” dans l’est, s’accommode mal avec les perspectives d’une reconstruction post-conflit et la réintégration des territoires à l’Ukraine. Le Kremlin en est conscient, le temps jouera en la défaveur de Kiev, dans un scénario similaire aux territoires séparatistes de Géorgie (Abkhazie et Ossétie du Sud), ou dans une autre logique la Corée du Nord.
Kiev et Moscou n’étant au final pas sur la même longueur d’onde – volonté de récupérer les territoires d’un côté contre nécessité de temporiser de l’autre – les négociations de paix dans le cadre du processus de Minsk se sont déjà enlisées.
Grande perdante dans l’histoire, l’Ukraine devra s’accommoder de négocier avec la Russie l’année prochaine, et donc forcément consentir à faire des concessions. De son côté Moscou jouera la carte de l’apaisement mais sans réels avancées diplomatiques, tout en plaçant progressivement ses hommes sur la scène diplomatique et en poussant pour la reconnaissance des territoires.
Pour résumer :
Sur le plan politique, l’année 2015 sera marquée par le rythme des réformes structurelles, et en premier lieu la décentralisation, sous le contrôle de la société civile issue de Maïdan. Des craquements pourraient toutefois apparaître dans la coalition “pro-européenne” majoritaire au Parlement ainsi que dans le duopole entre le Président Poroshenko et le Premier ministre Iatseniouk.
Sur le plan économique, 2015 sera comme un couperet en termes de survie même d’un pays en défaut de paiement virtuel et sa capacité à gérer à entamer des réformes, conditionnées à l’obtention des prêts internationaux. Il s’agira de relancer la croissance, dont les moteurs restent à définir, et gérer la probable crise gazière au printemps 2015.
Sur le plan stratégique et sécuritaire, Kiev va devoir gérer à la fois le “gel” du conflit dans le Donbass et la pression accrue de Moscou. Si la Crimée semble s’éloigner définitivement, la question des “Républiques” de l’est reste ouverte et l’Ukraine devra forcément faire face à son voisin russe pour éviter la perte totale de contrôle sur ses territoires.
Comment l’Union Européenne fait la face à la cette tension forte ?
Premièrement, l’Union européenne doit s’engager dès à présent pour l’avenir de l’Ukraine, qui risque de plonger sous peu dans un chaos économique et politique. L’Ukraine nécessite d’urgence une assistance financière massive dès le début de l’année 2015 pour lui permettre d’éviter le défaut de paiement et lui donner une chance d’en finir avec une économie politique inefficace et corrompue. Elle se doit de relever le défi – au moyen d’instruments nationaux, européens et multilatéraux (FMI) – en lui offrant, autant que possible, des subventions plutôt que des prêts, afin de ne pas alourdir le poids déjà considérable de la dette ukrainienne. En échange, elle pourrait demander à Kiev de mettre en œuvre un plan de réformes afin d’améliorer, entre autres, son efficacité énergétique, ce qui dynamiserait la croissance du pays tout en le rendant moins vulnérable aux chantages économiques russes.
En dépit des restrictions auxquelles sont actuellement soumises les opérations de l’OSCE dans l’est de l’Ukraine, l’Union européenne pourrait contribuer à la sécurité du pays en déployant une mission chargée d’observer le respect du tout nouveau cessez-le-feu avec les séparatistes ainsi que les sections de frontières russo-ukrainienne non-contestées. Même si ces observateurs se trouvaient démunis face à un assaut militaire, leur présence pourrait dissuader la Russie d’intensifier ses incursions.
Toutefois, le succès ou l’échec d’une politique européenne vis-à-vis de la Russie ne peut pas dépendre uniquement de la question ukrainienne. Le renforcement de la solidarité entre les Etats-membres constitue, en effet, une deuxième priorité. Poutine pense qu’il peut diviser les Etats membres et il tentera certainement de le faire. Pour cette raison, il est souhaitable que, à l’avenir, aucun Etat membre ne soit contraint d’affronter seul les pressions économiques de la Russie. Il en va de même pour la sécurité européenne. Lors du sommet de l’OTAN de Newport, des Etats européens membres de l’Alliance atlantique ont pris des engagements à propos de la sécurité de leurs alliés situés en Europe centrale et orientale, ce qui constitue une étape positive. A présent, les Etats européens doivent assurer leur contribution financière au nouveau plan de réactivité (Readiness Action Plan) de l’OTAN. Ils doivent également préparer des plans d’action détaillés prévoyant l’éventualité d’une escalade du conflit en Ukraine et dans d’autres régions ou pays d’Europe de l’Est. Il est souhaitable que les Etats évaluent les scénarios qui pourraient justifier la vente d’armes au gouvernement ukrainien.
Troisièmement, en tenant compte du fait que la Russie utilise l’approvisionnement énergétique à des fins stratégiques, l’Union européenne doit établir une ” union énergétique ” prévoyant un rôle pour la Commission européenne lors d’accords énergétiques avec des pays tiers. De même, les décisions concernant les grandes infrastructures de transport d’énergie, telles que le gazoduc South Stream, devraient être prises en veillant à préserver la sécurité énergétique à long terme de l’Union européenne, et non pour satisfaire les intérêts particuliers de quelques Etats membres.
Quatrièmement, les entreprises et les investisseurs russes qui opèrent dans l’Union européenne devraient faire l’objet d’une attention accrue de la part des autorités régulatrices européennes. Une forte dépendance à l’égard du gaz russe a poussé certains gouvernements à tolérer des niveaux d’opacité contractuelle et tarifaire qui sapent les progrès vers une intégration énergétique européenne. Accepter que des entreprises contrôlées par l’Etat russe pénètrent davantage dans les marchés européens peut porter atteinte à l’approche réglementée de la gouvernance économique de l’Union européenne et favoriser l’expansion de la corruption, particulièrement dans les systèmes politiques nationaux les plus vulnérables du sud-est de l’Europe. Les structures de gouvernance des entreprises russes devraient être prises en compte avant d’autoriser leur accès aux marchés et aux investissements.
Cinquièmement, les gouvernements européens doivent aider à consolider les Etats membres tels que la Bulgarie, la Roumanie et les pays baltes, qui sont les plus vulnérables à la pression ” hybride ” exercée par la Russie. Ce qui implique la création d’initiatives communes afin de renforcer le contrôle de leurs frontières, de professionnaliser leurs forces de police, de protéger leurs minorités, d’assurer la transparence et le pluralisme des médias, d’améliorer la cybersécurité et de mieux lutter contre la corruption. La même attention doit être accordée aux Etats candidats à l’adhésion à l’Union européenne, comme la Serbie et le Monténégro, où la Russie espère à présent accroître son influence. Dans ce contexte, les dirigeants européens devraient admettre que l’Union économique eurasiatique joue le rôle d’un cheval de Troie pour l’influence politique russe et qu’ils ne devraient pas accorder à cette institution plus de crédit qu’elle n’en mérite. Par ailleurs, l’Union européenne ne gagnerait rien à retarder les échéances convenues pour la signature des traités d’adhésion ou d’association.
Les cinq points décrits ne visent pas à sanctionner la Russie. Ils constatent plutôt qu’une épreuve de force s’est engagée entre les idées et valeurs de l’Union européenne qui souhaite apporter la sécurité et la prospérité à travers l’expansion et l’approfondissement de l’état de droit dans toute l’Europe, et les convictions du président russe, qui pense que les idées européennes doivent être mises à l’épreuve avant qu’elles ne menacent le système de contrôle qu’il exerce sur la Russie et ses pays voisins. Les dirigeants russes utiliseront leurs acteurs économiques, autant que leur force militaire ou leurs services de renseignement, pour tenter de gagner le bras de fer qui s’est engagé. L’Union européenne doit imposer de manière systématique et cohérente des limites à la puissance russe.
Vladimir Poutine n’est pas intéressé par une intégration de la Russie dans l’Union européenne ou dans l’Occident. Il souhaite plutôt que l’Europe accepte les différences fondamentales qui la séparent de la Russie en matière de gouvernance politique et économique. Par-dessus tout, il désire que la Russie soit internationalement reconnue comme une grande puissance et qu’elle ait le droit d’exercer cette puissance sur ses pays voisins sans tenir compte des aspirations de leurs populations. L’existence d’une telle ” sphère d’influence ” est inacceptable d’un point de vue européen.
Sachant que l’Europe n’accepte pas cette perspective, les relations bilatérales resteront tendues à l’avenir, et particulièrement en Europe centrale et orientale. Malgré cela, les deux parties peuvent tirer des bénéfices économiques de leurs relations, si les gouvernements européens ne perdent pas de vue qu’ils ont affaire non à un partenaire mais à un concurrent. Indépendamment du comportement de Moscou à l’égard de l’Ukraine, l’Union européenne doit donc limiter sa dépendance économique vis-à-vis de la Russe.
Les dirigeants européens peuvent dès à présent mettre à profit le court laps de temps dont l’Ukraine dispose pour que ce pays puisse envisager un avenir européen. En attendant de savoir à quel point l’Ukraine désire cet avenir, l’Europe doit se préparer à gérer des relations tendues sur le long terme en espérant que la prochaine génération de dirigeants russes aura pour le pays des ambitions autres que les maigres consolations offertes par le << révisionnisme historique >> qui anime le président russe.
Source
http://news.sina.com.cn/w/zg/hwgc
http://fr.wikipedia.org/wiki/Relations_entre_la_Russie_et_Ukraine
http://www.huffingtonpost.fr/2015/02/22/ukraine-accord-retrait-armes-lourdes-echange-prisonnier-minsk2
http://www.huffingtonpost.fr/mathieu-boulegue/quelles-perspectives-pour-lukraine-en-2015
http://www.lemonde.fr/europe/article
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