Si l’on devait douter de la place qu’occupe la cuisine dans la diplomatie, la présence du chef Antoine Carême aux côtés de Talleyrand, lors du congrès de Vienne de 1814, devrait dissiper ce doute. Si ce fin négociateur avait d’avantage besoin de casseroles, que de consignes politiques[1], c’est bien qu’il avait conscience que, les négociations diplomatiques se faisaient mieux autour d’un repas, qu’autour d’un pupitre. Carême lui-même tirait de sa longue expérience, aux côtés des ambassadeurs et chefs d’Etat, le constat suivant : « L’art culinaire sert d’escorte à la diplomatie européenne »[2]. Et cette escorte culinaire est la manifestation du soft power étatique.
Si la puissance consiste, pour un Etat, en la faculté de faire faire, empêcher de faire et refuser de faire[3], le soft power en est la composante « douce », celle qui permet d’exercer une influence et une attraction sans contrainte coercitive, qui est le propre du hard power et de la force armée. Selon Joseph Nye[4], à l’origine de la notion, le soft power est le nouveau fondement de la puissance, puisqu’il permet de séduire et persuader, tant les Etats que leurs habitants et diffuser un modèle culturel par delà les frontières, c’est ce qu’il appelle le pouvoir « diffus »[5] ou diffusion du pouvoir.
Séduire et persuader pour acquérir du poids sur la scène internationale, telle est la vocation de l’outil soft power et certains Etats l’ont très vite compris et appliqués. Ainsi, la Chine a développé un véritable arsenal du soft power, avec sa célèbre « diplomatie du panda », qui consistait à offrir un panda géant aux Etats amis ou encore avec l’utilisation du ballet comme outils de promotion de la culture chinoise[6]. Le Japon a également un soft power redoutable, par sa Kawaii Diplomacy, qui utilise le personnage Hello Kitty, pour s’inviter dans chaque pays, et même chaque foyer, pour y rependre une culture japonaise contemporaine, fondée sur ce qui est mignon[7].
Dès lors, s’il existe une diplomatie du panda ou du Kawaii, pourquoi n’y aurait-il pas une diplomatie du burger, du croissant au beurre ou des bortsch ? C’est le pari que s’est lancé la gastro diplomatie, qui souhaite mettre la cuisine au centre de la conquête culturelle. Cette dernière se veut plus large que son homologue diplomatie culinaire, qui se concentre sur des rapports d’Etat à Etat. Pour autant, la gastro diplomatie et la diplomatie culinaire, ont en commun d’introduire la cuisine dans les relations internationales et sont tous deux des instruments utiles aux Etats pour affirmer ou étendre leur soft power.
Ainsi, dans un univers mondialisé, qui voit se développer la lutte d’influence sur la scène internationale, où en est la diplomatie du goût aujourd’hui ? Quels en sont les ingrédients et quels Etats mettent véritablement leur main à la pâte ?
Plus généralement, il est intéressant de se demander, quel Etat utilise au mieux sa cuisine pour se faire une place dans ce monde multipolaire ?
Si, de prime abord, il est tenant d’affirmer que, en terme de gastronomie, la France n’a pas son pareil, cette affirmation est à nuancer depuis l’arrivée de nouveaux acteurs sur la scène gastronomique, qui ont pris conscience de l’importance des goûts dans la diffusion du pouvoir.
Le monopole français sur la gastronomie ; une réputation connue et reconnue dans le monde.
Lorsque l’on parle de gastronomie, le premier pays qui nous vient en tête est bien évidemment la France. Berceau des cuisiniers de renoms, la France a porté la cuisine au rang d’institution, avec ses propres codes, ses notations et ses concours d’excellence. Cette réputation française en matière culinaire dépasse les frontières, d’abord par la qualité de ses formations, que viennent chercher les apprentis du monde entier. En suite, par sa capacité à fédérer l’excellence autour d’une initiative française, comme l’illustre le très sélect Club des Chefs des Chefs
La notoriété de la cuisine française et de son savoir-faire.
L’influence française sur la scène gastronomique mondiale est, comme évoqué précédemment, incontestable. En 2016, la gastronomie rapportait plus de 87 milliards d’euros de chiffre d’affaires et les touristes, venant séjourner en France, dépensaient plus de 13% de leur budget dans la bonne cuisine[8]. Ces dépenses sont motivées par une attractivité culinaire, fondée sur l’excellence gustative et sur la qualité quasi incontestée du savoir-faire français.
L’excellence gustative se traduit, en France, par les classement internes présentés sous forme de guides et le plus célèbre d’entre eux est le guide que l’on ne présente plus ; le Guide Michelin.
C’est en 1926, qu’André Michelin crée le guide des bonnes tables en provinces et instaure le système de notation sous forme d’étoiles, qui sera par la suite adopté internationalement. A l’époque, l’idée était novatrice et elle a fait du chemin depuis, puisque qu’en 2018, plus de vingt-deux mille restaurants européens figurent dans le guide. De plus, l’Amérique du Nord, du Sud, l’Asie, et même l’Afrique[9]ont intégrés la carte culinaire du Guide Michelin, adhérant tacitement au système de notation instauré par la France.
La technique culinaire française jouit également d’une excellente réputation et participe à ancrer le pays dans la gastro diplomatie. Celle-ci s’arbore fièrement au col des cuisiniers ; c’est le col tricolore des Meilleurs Ouvriers de France ; abrégés MOF. Et n’est pas MOF qui veut, car si la Société Nationale des Meilleurs Ouvriers de France a organisé son premier concours en 1925, celui-ci n’a rien perdu en exigences. Le concours est difficile et n’admet que l’excellence, il n’y a pas de podium, soit le candidat est lauréat, soit il ne l’est pas[10]. Ainsi, revêtir ce col, c’est envoyer un signal visuel et un message fort, celui d’une maîtrise irréprochable.
Et cette maîtrise, c’est ce que les apprentis du monde entier viennent chercher en France depuis plus de 100 ans, depuis la création de la première école hôtelière à Thonon. Ce savoir-faire français se perpétue dans les nombreux établissements du territoire et certains noms font échos dans tous les esprits. Portant le nom de l’illustre chef lyonnais qui en est à l’origine, l’Institut Paul Bocuse se classe comme le meilleur établissement français pour l’obtention d’un Bachelor « Arts Culinaires », internationalement reconnu[11]. Et pour accentuer l’aspect universel de la formation, l’Institut s’est armée de partenariats internationaux, rassemblés en une Alliance qui fédère 22 établissements sur 4 continents[12]. Si cela ne suffit pas à prouver le rayonnement de la technique française, il faut alors mentionner que la Worldwide Hospitality a reconnu, en 2016, le Groupe VATEL comme meilleure école hôtelière du monde, avec ses 5 langues d’enseignement et plus de 50 nationalités différentes en son sein[13].
Ainsi, la France est la destination par excellence pour découvrir la haute gastronomie et pour se former, quitte à venir de loin, comme Virgilio Martínez, chef péruvien ou bien Vladimir Mukhin, chef russe. Mais si la France, sait attirer les futurs talents culinaires, elle tente également les fédérer dans des organisations dont elle a l’initiative.
L’initiative française au coeur d’organisations culinaires internationales
Si la France a une si bonne réputation en matière de cuisine, c’est parce qu’elle cultive un idéal d’excellence, voulant fournir, mais aussi réunir ce qu’il y a de meilleur. Cette image d’excellence porte ses fruits et les cuisines et cuisiniers français s’exportent, il ne faut pas oublier que le premier chef cuisiner de la Maison Blanche fût un Français, appelé au poste en 1961 par la Première Dame en personne, Jackie Kennedy. Petit à petit, les acteurs de la gastronomie française ont poussés l’excellence toujours plus loin, voulant fédérer les cuisiniers nationaux et internationaux.
Pour ceux qui souhaitent prouver la valeur de leur technique, Paul Bocuse a créé, à Lyon, en 1987 le Bocuse d’Or, véritable championnat du monde de la gastronomie, qui est remis tous les deux ans lors du Salon International de la Gastronomie. Ce concours fédère les cuisiniers des quatre coins du globe, qui reçoivent leur prix à Lyon et en 2017, les lauréats issus des Etats-Unis, de Norvège ou d’Islande, ont fait le déplacement jusqu’à Eurexpo pour brandir fièrement leur trophée[14].
Mais, là où l’élitisme culinaire français s’illustre le mieux, c’est dans le très sélect Club des Chefs des Chefs. Cette organisation culinaire internationale doit également son existence à Paul Bocuse qui a eu l’idée de rassembler en un même lieu, lors d’un même dîner, les chefs de différents Etats, mais aussi leurs chefs cuisiniers. L’année suivante, en 1978, Gilles Bragard transforma ce dîner en organisation, qui se réunit tous les ans, invitée dans différents pays, afin de promouvoir la gastronomie dans le monde.
Selon les mots de son fondateur, le Club des Chefs des Chefs (CCC) est aujourd’hui le club gastronomique le plus exclusif du monde[15] et pour en être membre, il faut impérativement être le cuisiner d’un Président, d’un Roi ou d’une Reine. Le but diplomatique du CCC est assez clair, il se retrouve dans la devise du club : « La politique divise les Hommes, la bonne table les réunit[16]». Il s’agit donc de réunir, par la cuisine, des intérêts divergents et amener différents interlocuteurs politiques sur le chemin de l’entente, par leur commune appréciation des bons mets.
Cette double toque de diplomate des chefs du Club des Chefs, s’est illustrée lors du Dîner pour la Paix, organisé à Tel Aviv, en 2012 où la Fondation Shimon Peres a fait appel au CCC[17]. Ce dîner a réuni les représentants des communautés israéliennes et palestiniennes, afin d’apaiser le conflit entre les deux acteurs géopolitiques. L’événement fut un succès et le fondateur a promis de réitérer cette initiative, avec d’autres acteurs, toujours dans le but de promouvoir la paix par la gastronomie.
Le CCC semble donc être un bel exemple de l’influence de la cuisine dans le processus diplomatique et du soft power qui émane de la gastronomie.
Il apparait donc, après ce premier examen, que la France est la championne en matière de gastro diplomatie. Sa cuisine et son savoir-faire exercent une attraction notable sur les citoyens du monde, tandis que se réunit suite à une initiative française, un club gastronomique exclusif.
Pourtant, la France n’est pas la seule à compter sur sa cuisine pour se faire une place sur la scène internationale. Par l’arrivée d’internet, de nouvelles cuisines se font connaître, orientant le tourisme gastronomique vers de nouveaux pays et provoquant une prise de conscience politique essentielle : diffuser sa cuisine, c’est diffuser sa culture.
La propagation de la gastro diplomatie à l’heure de la mondialisation des goûts.
Si la France pensait être au sommet de l’art gastronomique, la mondialisation du goût et des pratiques va lui donner tort. Elle voit alors que de nouveaux acteurs prennent sa place dans les classements internationaux, que de nouvelles écoles hôtelières la talonnent et que les recrues étrangères formées en France, choisissent une cuisine qui leur est propre, une cuisine identitaire. La dernière décennie à été celle d’une prise de conscience, celle que la cuisine pouvait être un outil de projection de la culture nationale et les Etats semblent d’être pris au jeu de la gastro diplomatie.
Mondialisation du goût et enjeux identitaires
En 2002, la France, se croyant championne incontestée de la gastronomie, prend une claque monumentale. Le journal britannique Restaurant Magazine, crée un classement des meilleurs restaurants du monde, intitulé The Worlds 50 Best, où la première place revient à El Bulli, restaurant Espagnol[18]. Le restaurant français, lui, figure à la 6ème place et cette 6ème place va longtemps être occupé par différents établissements français qui figureront au classement. Le coup de grâce sera donné en 2010, où l’entrée française tombera à la 11ème place, voyant passer devant 4 concurrents espagnols ; dont El Bulli à la seconde place et 3 concurrents américains. Voilà qui malmène la réputation française sur la scène internationale. La mondialisation des goûts est des pratiques a soufflé un vent de changement dans les cuisines, où la formation française se fait talonner par la formation anglaise[19] et ce changement s’est ressenti au niveau du tourisme culinaire.
C’est ce que montre un sondage réalisé par la World Food Travel Association, en 2016, auprès de 2527 voyageurs gastronomes. Il apparaît qu’il y a désormais plus de milennials (52 %) que de baby-boomers[20] (42 %) dans le tourisme culinaire[21] et ce qui est privilégié dans leur voyage, c’est une expérience mémorable (73%). En terme de motivation dans le choix du lieu de restauration, c’est l’aspect régional ou local (72%) qui prime sur le côté haute gastronomie (34%)[22]. Enfin, la tendance au partage des expériences sur les réseaux sociaux où 74% des voyageurs partagent les photos de leurs plats, avec le nom de restaurant où celui-ci a été préparé.
Bien que ce sondage date de 2016, une nouvelle tendance très claire en émane, qui ne peut que se confirmer aujourd’hui. Si l’on se tourne du côté d’Instagram, réseau essentiel à la promotion par l’image, on peut constater à quel point les photographies culinaires inondent le média. Or, ceux qui maîtrisent ce réseau sont bien les 25-35 ans, qui représentent 35% des utilisateurs, contre 17% pour les 36-44 ans, enfin les 45 et plus, représentent seulement 8%[23].
Face à ce changement, les jeunes cuisiniers ont su s’adapter, et proposer des expériences nouvelles et inoubliables, comme le dessert fumé au cigare de Havane, de Jordi Roca, du Celler De Can Roca ; second meilleur restaurant du monde en 2018. Tandis que d’autres, pourtant formés en France, se tournent vers des recettes et des goûts issus directement de leur culture.
C’est le cas de la pâtissière américaine Christina Tosi[24], qui, formée à Paris, préfère les gâteaux gras et truffés de confettis sucrées, aux desserts trop léger et minimalistes que l’on sert dans les palaces.
Ses pâtisseries s’inscrivent dans la tendance de la confort food américaine, traduite nourriture réconfort, qui se sert en portions généreuses ; très généreuses et qui visent d’avantage le coeur que les papilles.
C’est aussi le cas du cuisiner russe Vladimir Mukhin[25], lui aussi formé à Paris et qui participe aujourd’hui au renouveau de la gastronomie « à la russe », mettant les plats populaires tels que le salo[26] ou le chachlik[27] à sa carte gastronomique.
Aussi, jouer sur la particularité de son pays, c’est se faire remarquer sur la scène internationale et sur les réseaux sociaux, par les touristes gastronomes. Mais c’est surtout une affirmation identitaire qui se retrouve dans la cuisine locale, Patrick Rambourg, historien des pratiques culinaires et alimentaires, parle de cuisine identitaire[28]. Une cuisine qui permet au profane voyageur de s’associer à l’identité du pays qui le reçoit et qui permet à l’expatrié de se sentir toujours en lien avec sa culture natale.
Dès lors que le lien est fait entre cuisine et affirmation identitaire, les acteurs politiques en prennent conscience et utilisent la cuisine comme un tremplin pour leur politique étrangère.
La cuisine nationale comme outil de projection à l’international.
Si, en 1994, Hillary Clinton, Première Dame à l’époque, a congédié de la Maison Blanche, le chef français, en place depuis plus de 30 ans, c’est qu’elle comptait bien le remplacer. Et le remplacer par un chef américain ! Ce remplacement, qui peut paraître anecdotique, est en fait la prémisse de l’affirmation culinaire américaine. En 2012, alors secrétaire d’Etat, c’est toujours Hillary Clinton, qui appelle au Partenariat Diplomatique Culinaire, visant à accroître le rôle de la cuisine américaine dans ses relations diplomatiques[29]. L’initiative proposée ici est peu ou proue celle du CCC évoqué précédemment. Il s’agit de réunir un corps de chefs, américains, afin de présenter lors des réceptions officielles, aux Etats-Unis et là où la délégation américaine pourrait se rendre, tout l’étendu de la richesse et du savoir-faire culinaire des USA. Dans son discours, la secrétaire d’Etat illustre, par ces expériences passées, comment un bon repas aide à parlementer dans les négociations diplomatiques et affirme que la nourriture est un atout aux mains des négociateurs.
La démonstration est ainsi faite que la cuisine est un outil politique et la prise de conscience de cet état de fait à donné, depuis 2002, la multiplication des initiatives politiques pour promouvoir l’alimentation locale :
La Suède, la Norvège et la Finlande ont lancé en 2006 le New Nordic Food Programm, le Pérou, s’est attelé à La Cocina Peruana Para El Mundo en 2009, la Thaïlande a mis en place le programme Global Thai en 2002 et la Malaisie s’est culinairement affirmé en 2010, avec Malaysian Kitchen for The World. Enfin, Taiwan s’est lancé dans la diplomatie des raviolis vapeur ; Dim Sum Diplomacy et la Corée du Sud, dans celle du chou épicé, Kimchi Diplomacy[30].
Celle-ci, voyant se multiplier les affirmations gastronomiques, a fait inscrire, en 2010, le repas gastronomique à la Française au patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO[31]. À cela s’ajoute le projet Goûts de France/ Good France, qui propose, en partenariat avec plusieurs restaurants en France et dans le monde, de partager un dîner à la française. En 2019, le projet fêtera sa cinquième année d’existence et la date de ce repas à partager est fixée pour le 21 mars.
Pour compléter cela et conquérir le monde avec un plat typique, la France peut compter sur l’Académie Universelle du Cassoulet[32], implantée jusqu’au Japon et qui a réussi à convaincre la ville de New-York d’avoir une journée nationale dédiée au plat[33].
Mais la France peut-elle réellement rivaliser avec les initiatives étrangères et notamment avec les initiatives asiatiques ? Le cassoulet peut-il battre dans le coeur et les esprits le désormais incontournable sushi japonais ? Ce plat à base de riz vinaigré et de poisson cru s’est si rapidement popularisé, que l’on comptait, en 2010, plus 1580 restaurants de sushis en France[34].
Aujourd’hui, on peut retrouver le sushi dans une majorité de pays, que ce soit aux Etats-Unis, en Afrique du Sud ou même en Ukraine, rares sont ceux qui n’ont jamais entendu au moins le nom de cet aliment. Tout comme Hello Kitty, le sushi promeut une valeur culturelle japonaise, celle d’une alimentation saine, destinée à être mangé de façon raisonnée et à l’heure de la surconsommation, la sagesse du sushi séduit de plus en plus, faisant ainsi la promotion tacite de l’art de vivre à la japonaise.
Ainsi, le constat actuel sur la gastro diplomatie est celui d’une matière vivante, partagée par de nombreux pays, qui désirent se faire une place dans un monde multipolaire grâce à leur cuisine.
La nourriture a été, et reste toujours, le meilleur moyen d’apaiser les hommes, de les réunir, malgré leurs différences et si l’on peut refuser les relations diplomatiques avec un Etat, on peut continuer à manger sa cuisine, pour preuve, beaucoup d’Ukrainiens mangent toujours des pelmenis[35].
Aussi, avec de telles possibilités, quoi de plus normal que d’user de la gastronomie pour exporter son modèle culturel, vanter les mérites de son Etat et de son art de vivre ?
Au vu des éléments présentés ci-dessus, on peut affirmer que la gastronomie est un élément considérable du soft power, qu’elle a sa place en diplomatie et de beaux jours devant elle.
Mais comment gérer toutes les revendications culinaires exhibées par les Etats aujourd’hui ?
Ne risque-t-on pas une guerre gastronomique, une guerre autrement, où la spécialité culinaire serait en jeu et en proie à l’appropriation des Etats ?
Il semble effectivement que la conquête des spécialités soit à l’ordre du jour, comme en témoigne l’interêt croissant des investisseurs Chinois pour les vignes françaises.
L’avenir aura peut-être à répondre à la question suivante : la guerre culinaire aura-t-elle lieu ?
Par YANOVA Valeriya
[1]Phase célèbre prêtée à Talleyrand issue de sa correspondance avec Louis XVIII en 1814.
[2] CAREME A, L’art de la cuisine française au XIXème siècle, traité élémentaire et pratique, Paris, 1833.
[3] ARON Raymond., « Qu’est-ce qu’une théorie des relations internationales », Revue Française de Science Politique, vol. 17, nº 5, 1967, pp. 837–861.
[4] NYE Joseph, Bound To Lead: The Changing Nature Of American Power, 1991.
[5] Traduction du power diffusion de Joseph Nye, voir conférence TEDGlobal 2010 | July 2010.
[6] DANTO Isabelle, « Le ballet chinois, outil de soft power », Esprit, Paris, Août – Septembre 2013, p. 209 à 211.
[7] Voir conférence de Christine R. YANO, à l’Université de Hawaii, « Hello Kitty and Japan’s Kawaii Diplomacy », 10 octobre 2015.
[8] Source : Portail de l’Economie, des Finances, de l’Action et des Comptes Publics, voir https://www.economie.gouv.fr/economie/chiffres-cles-gastronomie-en-france-infographie.
[9] Source : Guide Michelin ; Carte des restaurants, voir https://www.viamichelin.fr/web/Recherche_Restaurants.
[10] Société Nationale des Meilleurs Ouvriers de France, voir http://www.meilleursouvriersdefrance.info/index.php.
[11] Classement Eduniversal 2017-2018, voir https://diplomeo.com/actualite-classement_ecoles_hotelieres_monde_france.
[12] Réseau Alliance par l’Institut Paul Bocuse, voir https://www.institutpaulbocuse.com/international/reseau-alliance/.
[13] Worldwide Hospitality Awards 2016, voir http://hospitalityawards.com/les-candidats/hospitality-school-awards/2016/meilleure-ecole-hoteliere/.
[14] Annexe 1 : Photographie des gagnants du Bocuse d’or 2017: Etats-Unis (or), Norvège (argent) et bronze (Islande), par Arnold Jerocki, article de l’Express, voir https://www.lexpress.fr/styles/saveurs/la-france-remporte-le-bocuse-d-or-2013_1215447.html.
[15] Annexe 2 : Photographie des membres du Club des Chefs des Chefs, voir http://www.chefs-des-chefs.com/members/.
[16] Le Club des Chefs des Chefs, voir http://www.chefs-des-chefs.com/.
[17] Résumé de l’évènement sur http://www.chefs-des-chefs.com/a-dinner-for-peace-in-tel-aviv/.
[18] Liste de 2002 sur le site The Worlds 50 Best, voi https://www.theworlds50best.com/.
[19] Classement 2016 de la Worldwide Hospitality, où la 3ème place de la meilleure école hôtelière du monde revient à la Oxford Brookes University, voir http://hospitalityawards.com/les-candidats/hospitality-school-awards/.
[20] Milennials : terme anglais se référant à la génération née entre la fin de 1980 et 1990, soit les 20 – 35 ans.
Baby-boomers : terme anglais se référant à la génération née entre 1960 et 1970, soit les 45 – 50 ans.
[21] Sondage de la World Food Travel Association, réalisé en 2016, voir http://veilletourisme.ca/2017/02/08/profil-des-touristes-culinaires/.
[22] Ibid.
[23] Chiffre du Global Web Index entre 2014 et 2016, voir GWI Infographic: Instagram Users, https://blog.globalwebindex.com/chart-of-the-day/gwi-infographic-instagram-users/.
[24] Annexe 3 : Photographie de Christina Tosi, voir https://www.instagram.com/p/BnzVX7thwKR/.
[25] Annexe 4 : Photographie de Vladimir Mukhin dans son restaurant, voir : http://whiterabbitmoscow.ru/en/restoraunt-en/about
[26] Gras du lard, conservé dans le sel.
[27] Viande marinée, cuite à la broche.
[28] Patrick Rambourg, intervention pour les Géopolitiques de Nantes du 2 et 3 octobre 2015, voir https://www.youtube.com/watch?v=j83SXu4Lt6w.
[29] Hillary Rodham Clinton delivers a video message to the Diplomatic Culinary Partnerships Initiative, voir https://www.youtube.com/watch?v=yv0XPeIU0ms.
[30] Annexe 5 : Carte présenté lors de la table ronde franco-suisse « Géopolitique du goût : de la bataille des terroirs à la diplomatie culinaire » animée par CCI France, pour la 7ème édition du Festival de Géopolitique de Grenoble, organisée du 12 au 15 mars 2015.
[31] Voir site de l’UNESCO, https://ich.unesco.org/fr/RL/le-repas-gastronomique-des-francais-00437.
[32] Académie Universelle du Cassoulet, voir http://www.academie-du-cassoulet.com/.
[33] Auteur inconnu, « Le cassoulet veut défendre sa tradition et conquérir la gastronomie mondiale », L’Obs, Paris, édition du 30 mars 2016, voir https://www.nouvelobs.com/culture/20160330.AFP1528/le-cassoulet-veut-defendre-sa-tradition-et-conquerir-la-gastronomie-mondiale.html.
[34] Etude menée en 2010 par le cabinet Gira Conseil, voir http://www.giraconseil.com/.
[35] Spécialité russe, petits raviolis ronds, farcis à la viande.