Dictionnaire de Géopolitique

LE DJIHADISME

«930 ressortissants français ou étrangers résidant habituellement en France sont aujourd’hui impliqués dans le djihad en Syrie et en Irak» déclare le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve. Le djihadisme devient donc un problème majeur en France et en Occident, plus généralement. Difficile à endiguer, ce phénomène inquiète d’autant plus qu’il est mal connu.

Mais s’il constitue une menace dans les pays occidentaux, le djihadisme est à l’origine d’un véritable bain de sang au Moyen-Orient, réalisé au nom d’une vision politico-religieuse.

Mais alors qu’est-ce que le djihadisme exactement? Quels sont ces enjeux ? Quelles sont les problématiques qu’il pose ? 

Pour y répondre, il s’agira, dans un premier temps,  de définir le djihadisme et ses revendications religieuses. Dans un second temps,  nous ferons le lien avec les idées politiques qu’il met en avant par la force. Enfin, nous nous intéresserons au cas de ces jeunes français qui partent faire le djihad et qui reviennent ensuite au pays.

 

I. Salafisme et djihadisme, deux notions liées : le combat pour imposer  le radicalisme religieux.

 

Le terme arabe Djihad signifie “exercer une force”, il renvoie à une expression dans le Coran : “l-jihad bi anfousikoum” : Lutter avec votre âme. C’est un effort : celui que doit faire les musulmans pour être davantage fidèles à leur religion. Il doit conduire à plus de paix et de partage. C’est donc un effort sur soi-même pour atteindre le perfectionnement moral ou religieux. Le djihad peut s’effectuer par  le cœur, la langue, la main ou l’épée.

Le djihad le plus courant aujourd’hui est celui par l’épée. Mais plus que ça, le mot est détourné par des groupes musulmans extrémistes voulant imposer leurs idées religieuses par le combat. Ainsi, on qualifie aujourd’hui de djihadiste tout groupe ou individu prônant la violence en se revendiquant de l’islam.

Ils mènent des actions armées pour dominer le monde en répandant leur vision radicale de l’Islam : le salafisme, notamment. Les djihadistes salafistes promulguent une « régénération » de la foi et une réislamisation de la société : un retour à l’âge d’or de l’Islam du temps des salafs. En somme, le salafisme prône le retour à l’islam des origines par l’imitation de la vie du Prophète et le respect aveugle de la sunna (tradition islamique, comprenant le Coran, les hadiths et la sira). Il condamne donc toute interprétation théologique et toute influence occidentale, comme le mode de vie et la société de consommation, mais également la démocratie et la laïcité.

Le salafisme djihadiste constitue donc la base intellectuelle du terrorisme et des opérations suicide, encourageant des actions violentes contre les Occidentaux. Ce mouvement a été inspiré par les Frères musulmans égyptien Sayyed Qotb et Jordanien Abou Mohamed Al Maqdissi, affirmant que tout musulman a l’obligation de se battrecontre tous ceux qui oppriment les « musulmans pieux ».

II. Djihadisme et politique : vers la construction d’un djihadistan

Certains groupes djihadistes veulent aller encore plus loin en combattant pour imposer un système politique dans lequel la religion serait au cœur. C’est l’islamisme. Ces extrémistes veulent faire de l’Islam, non plus essentiellement une religion, mais une véritable idéologie politique par l’application rigoureuse de la charia et la création d’États islamiques intransigeants.

LEtat Islamique (EI), groupe djihadiste transnational, précédemment connu sous l’appellation Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL ou ISIS), a pris le contrôle depuis plusieurs mois d’une partie des territoires syrien et irakien dans le but d’y établir un califat. Le califat correspondrait à un grand Etat musulman dirigé par un calife, successeur de Mahommet, qui maintiendrait l’unité du monde islamique, assurerait sa défense et son extension, préserverait le dogme contre toute innovation, veillerait au respect de la Loi, gouvernerait et administrerait l’empire.

C’est ainsi que Kobané a été assiégé en octobre dernier. La prise de la vile permettrait au groupe djihadiste de se mouvoir d’ouest en est alors qu’il contrôle déjà le tiers de la frontière nord avec la Turquie.  Mais les Kurdes occupant le territoire sont décidés à mener la bataille jusqu’au bout pour ne pas voir mourir leur rêve de création d’un Kurdistan. Le combat est donc sanguinaire d’autant plus que la Turquie est complice du massacre des Kurdes par les djihadistes puisqu’elle n’intervient pas en espérant ainsi éviter la création d’une région autonome kurde.

Le combat et la violence du djihadisme constitue donc un moyen pour atteindre des fins politico-religieuses. Telle est donc la problématique djihadiste au Moyen-Orient. Outre les enjeux géopolitiques, elle est également au cœur des débats français.

 

III. Actions djihadistes, endiguement des jeunes et problématique en France

Le djihadisme constitue également une menace dans les pays occidentaux. En effet, nous avons pu voir précédemment que les djihadistes, notamment salafistes, se battaient contre la société occidentale et les valeurs qu’elle porte. Cela a pu mener à des actions terroristes comme l’attaque des tours jumelles aux Etats-Unis, le 11 septembre 2001.

Mais le djihadisme prend également une autre forme, de plus en plus présente. Il s’agit de l’endiguement des jeunes occidentaux, d’origine musulmane ou non, via Internet pour les pousser à aller faire le djihad en Syrie. Un jeune normand de 22 ans faisait encore l’actualité ce matin pour être devenu djihadiste de l’Etat Islamique et reconnu comme ayant participé à l’exécution de l’otage américain Peter Kassig.

Le djihadisme peut s’envisager comme l’expression sociopolitique du désespoir d’individus qui se sentent opprimés, et qui trouvent dans un discours extrémiste et simpliste, de quoi nourrir leur sentiment d’appartenir à une communauté d’exclus. Un sentiment qui peut aller jusqu’à la constitution de petits groupes terroristes « spontanés ». Or, les pays occidentaux semblent dépassés et incapables de déceler ces microcellules djihadistes internes au pays.

Enrôlés sur Internet, où la communication des extrémistes est la plus forte, ces jeunes finissent par partir pour l’Irak ou la Syrie sans qu’il n’y ait de contrôle efficace des autorités nationales pour les en empêcher.

D’abord, en camp d’entrainement, ils sont ensuite combattants sur les fronts syriens ou irakiens. Ils n’ont qu’un objectif : « le chahib », c’est-à-dire tomber en martyre. S’ils ne tombent pas au front, leur retour peut constituer un véritable risque pour leur pays d’origine. Transformés par l’horreur de la guerre, les djihadistes peuvent mener ensuite des actions terroristes dans leur pays. C’était le cas de Mohammed Merah, auteur des tueries de Toulouse et de Montauban après être parti en Syrie.

D’autant que le droit français semble silencieux à l’évocation de cette question car en l’état du droit, le simple fait d’être parti en Syrie ne suffit pas pour justifier une condamnation et réunir des preuves de leur culpabilité peut être compliqué. Généralement incarcérés à leur retour en France, la plupart sont donc relaxés au moment de leur jugement. Il semble donc nécessaire que la loi évolue afin de résoudre cette problématique et protéger l’Etat de ce phénomène.

 

Pour conclure, nous pouvons affirmer que le djihadisme constitue une problématique majeure du XXIème siècle. Il consiste à combattre tous ceux qui ne partagent une vision radicale de l’Islam. Les pays occidentaux, tout comme les musulmans moins fondamentalistes, deviennent alors une cible à abattre.

Par ailleurs, la plupart font la guerre pour rétablir le califat qui permettrait la création d’un grand empire musulman régi par la charia et dirigé par un calife successeur de Mahommet.

La barbarie et la terreur de plus en plus forte du djihadisme montrent l’impuissance de la coalition à y mettre un terme, que ce soit en Occident ou au Moyen-Orient. D’autant que, désormais, de plus en plus de français partent faire le djihad ce qui génère une menace terroriste qu’il est nécessaire de prendre en compte au moment du retour de ces jeunes dans leur pays.

Mais alors comment les Etats peuvent-il endiguer ce phénomène pour protéger leurs citoyens ?

Delphine GAUTHERET

 


SOURCES: 

http://www.lemonde.fr/proche-orient/article/2014/09/25/c-est-le-djihadisme-qui-provoque-la-guerre_4494255_3218.html

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/10/06/01016-20141006ARTFIG00355-l-epineuse-gestion-du-retour-des-djihadistes-en-france.php

https://antoinesfeir.wordpress.com/decryptages/salafisme/

http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orient/syrie-premiers-combats-entre-kurdes-et-djihadistes-au-poste-frontiere-de-kobane_1627309.html

http://www.lefigaro.fr/international/2014/06/12/01003-20140612ARTFIG00311-qui-sont-les-djihadistes-de-l-etat-islamique-en-irak-et-au-levant.php

http://www.scienceshumaines.com/qu-est-ce-que-le-jihadisme_fr_15447.html

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *