L’ancien Président du Kazakhstan, Noursoultan Nazarbaïev, a fait part de la volonté de son pays de favoriser le développement du potentiel économique des nouvelles routes de la soie lors du One Belt, One Road International Cooperation Forum les 14 et 15 mai 20171. Il a annoncé pour cela être prêt à baisser ses barrières douanières avec le soutien des investissements chinois au travers de la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII)2.
Ainsi, le Kazakhstan, plus grand pays enclavé du monde, accueille de nombreux projets de construction d’infrastructures afin d’acquérir une plus grande maîtrise de son territoire et d’améliorer ses liaisons terrestres comme aériennes avec les autres pays du monde. En effet, l’enclavement éloigne le pays des principales routes commerciales mondiales, qui depuis le XVIe siècle sont maritimes. La conteneurisation des échanges a accentué cette disparité terre-mer dans le transport de marchandises, isolant d’autant plus la masse continentale eurasiatique des échanges mondiaux.
Néanmoins, l’enclavement dans son acception géo-économique se définit comme « l’isolement dans lequel se trouve une aire plus ou moins étendue, souvent dans un milieu montagneux ou désertique, du fait de l’absence, ou de l’insuffisance, des moyens de communication »3. L’absence d’accès à la mer condamne donc un État à l’isolement des échanges internationaux. Plusieurs acteurs internationaux ainsi que les pays d’Asie centrale4 ont ainsi pensé, financé et mis en œuvre des projets de développement d’infrastructures.
Le Kazakhstan constitue souvent un point clé de ces projets en raison de sa centralité et de la faiblesse de ses reliefs. Océan terrestre, pont entre l’Europe et l’Asie, le Kazakhstan souhaite renouer avec un destin géographique dromocratique5 perdu durant la période soviétique. Ainsi la construction du Kazakhstan en tant que pays cohérent sur le plan national et central dans son ouverture internationale se doit de passer par le développement d’axes Est-Ouest. En effet, les principales voies de communication au Kazakhstan sont structurées par le réseau en étoile datant de l’époque soviétique6. Ce réseau construit dans une logique « centre-périphérie », entre Moscou/Saint-Petersbourg et l’Asie centrale7, laisse le Kazakhstan indépendant avec des voies dans un axe Nord-Sud alors que sa physionomie territoriale s’étend sur un axe Est-Ouest. La construction de nouvelles routes est donc nécessaire pour améliorer la cohérence interne du pays comme pour faciliter le commerce international transitant par son territoire. Dans ce cadre, les partenaires asiatiques et européens appellent aussi de leurs vœux le développement de ces voies permettant au Kazakhstan de devenir un pays-pivot du transport continental. Les autorités kazakhstanaises accueillent donc favorablement toutes les initiatives en ce sens, au premier rang desquelles la Belt and Road Initiative (BRI)8 chinoise.
Cependant, la construction d’infrastructures par des États étrangers n’est pas anodine. « La construction et le contrôle des infrastructures de transport ont, en effet, toujours représenté des enjeux de puissance »9. Cette assertion concerne le projet chinois dans lequel la Chine possède des intérêts stratégiques. Or ces derniers ne sont pas nécessairement en adéquation avec les priorités kazakhstanaises10.
C’est pourquoi cet article est centré sur les motivations chinoises derrière les nouvelles routes de la soie et sur les probables externalités négatives suscitées au Kazakhstan.
OBOR : un projet chinois répondant aux intérêts stratégiques de la Chine
Les intérêts stratégiques de la Chine dans le développement du projet OBOR peuvent se décliner en un volet de politique intérieure et des enjeux d’exportations.
La priorité du projet chinois : garantir sa sécurité intérieure
Si le projet des nouvelles routes de la soie est présenté comme un moyen pour la Chine de sécuriser et de diversifier ses voies d’exportation, son but est principalement d’assurer l’adaptation de son économie dont la croissance décline et l’unité de son territoire. Ce second objectif de politique intérieure est central dans le cadre de la Ceinture économique de la route de la soie11. En effet, le développement d’infrastructures terrestres vers l’Ouest de son territoire a d’abord pour but de sécuriser la région du Xinjiang en la développant sur les plans commerciaux et industriels et en la reliant au poumon économique côtier chinois. Les dirigeants chinois souhaitent ainsi affaiblir les mouvements séparatistes ouïghours au Xinjiang par le biais du développement économique.
Le projet OBOR s’étend au-delà du territoire chinois en appliquant la même vision, de sécurisation par le développement économique et le resserrement des liens commerciaux, aux pays d’Asie centrale. Ce point est stratégique pour la Chine car cette région, partie intégrante de « l’étranger proche » chinois, jouxte le Xinjiang. Par conséquent, toute crise ou opposition centrasiatique pourrait par contagion toucher la Chine. En outre, le développement d’infrastructures en Asie centrale fait partie de la stratégie d’investissements chinoise dans ces pays en échange de leur soutien au gouvernement chinois face aux mouvements séparatistes ouïghours12. Étant donné la proximité ethnique entre les kazakhs et les ouïghours13 et la présence d’une population kazakhe dans le Xinjiang, les dirigeants chinois craignent effectivement un rapprochement et appui kazakhs aux revendications ouïghoures.
Cette priorité chinoise pour son développement intérieur, par contraste avec son discours « gagnant-gagnant », s’illustre dans l’étude de la zone frontière de Khorgos conduite par Isabella Damiani et Victoria Bachelet14. Le projet d’aménagement de cet espace-frontière, border en anglais, « est souvent présenté comme la représentation d’un projet collaboratif et transfrontalier » par la Chine comme le Kazakhstan. Cependant, l’analyse diachronique de ce territoire frontalier par les deux chercheuses révèlent la « forte asymétrie du développement territorial »15 entre les côtés chinois et kazakhstanais de la frontière. En effet, le Kazakhstan a concentré ses efforts de construction dans cet espace sur des infrastructures de transport favorisant ses échanges avec la Chine (ligne ferroviaire Khorgos-Almaty, gare d’Altynkol, port sec de Khorgos, autoroute Europe occidentale – Chine occidentale). De son côté, la Chine a connu un essor urbanistique marqué16 avec la mise en place d’une zone d’échange et de commerce17. Ainsi, la construction de l’espace-frontière de Khorgos se veut bilatéral dans les discours mais se manifeste par un développement économique unilatéral jusqu’à présent. « Cette frontière crée donc une asymétrie structurelle dans le développement du territoire de Khorgos, et ce phénomène est à l’image des asymétries démographiques ou de pouvoir déjà présentes entre Pékin et Astana. »18.
L’exemple de Khorgos résume la primauté du projet de politique intérieure pour Pékin sur l’établissement de partenariats « gagnant-gagnant » dans la construction des nouvelles routes de la soie. Il rappelle au demeurant le différentiel de pouvoirs démographique, économique et financier entre les deux pays. Ce dernier donne un poids diplomatique et une capacité d’influence importante à la Chine sur son voisin. Quelles en sont les conséquences pour le Kazakhstan dans le cadre du développement des routes continentales de la BRI traversant son territoire ?
Les nouvelles routes de la soie : voies de communication construites pour le rimland
« Le projet OBOR tend à unifier le rimland de Spykman tout en désenclavant le heartland de Mackinder »19. Cette affirmation met en exergue que l’objectif déclaré de la BRI, favoriser les échanges entre la Chine et l’Europe (Rimland20), prime sur sa conséquence directe : le désenclavement de l’Eurasie (Heartland21). En effet, cette initiative suit en premier lieu les intérêts stratégiques chinois, comme nous avons pu le voir pour sa politique intérieure. Toutefois, l’un des enjeux du projet OBOR pour la Chine est de diversifier ses voies d’importation de matières premières et d’exportation de produits manufacturés. En effet, ce pays-usine, premier exportateur mondial en volume, dépend de la voie maritime pour ses échanges. Or cette dernière comporte des points de resserrement, détroits et canaux internationaux, qui sont autant de vulnérabilités critiques22 pour les États qui en dépendent. Hu Jintao l’évoque plus précisément en 2003 concernant le détroit de Malacca pour l’approvisionnement énergétique de la Chine. Ce « dilemme de Malacca »23 symbolise l’enjeu stratégique du contrôle des routes pour une puissance. Du point de vue maritime, la Chine dépend des États-Unis pour la sécurisation des routes commerciales aussi longtemps qu’elle ne possédera pas des moyens de projection capables de contrôler des accès24. La Chine de Xi Jinping a développé le projet OBOR (« One Belt, One Road ») précisement pour renforcer les voies maritimes existantes par l’acquisition et la construction de ports tout en développant des voies terrestres. Ces routes continentales concourent au contournement du détroit de Malacca soit en rejoignant l’Océan Indien par le Pakistan soit en traversant l’Eurasie pour atteindre directement l’Europe. L’ensemble du projet semble donc répondre à la volonté chinoise de sécuriser ses échanges en diversifiant les routes maritimes et terrestres qu’elle peut emprunter.
Néanmoins, un des avantages des routes terrestres promus par les partenaires sino-européens est la diminution du temps de transport que permettent ces routes par rapport aux voies maritimes. Cet avantage comparatif compense l’importance du coût de ce transport dans le cas des produits à haute valeur ajoutée ou dont la date de renouvellement peut être rapide (produits de luxe, haute technologie). En outre, la construction de ces routes trans-continentales permettant d’améliorer le désenclavement du Heartland est accueillie favorablement dans les pays eurasiatiques.
Cependant, cette promesse de désenclavement mérite d’être nuancée dans son envergure comme dans ses effets.
Des externalités nuancées pour le Kazakhstan
Un financement chinois des infrastructures limité au Kazakhstan
L’importance des sommes investies25 par la Chine dans la Belt and Road Initiative contribue à une surmédiatisation de ce projet. Cependant, il ne faut pas oublier l’échelle globale des investissements chinois. Par voie de conséquence, les investissements par pays peuvent être bien plus faibles que ce que nos représentations26 autour de ce projet veulent nous faire croire. Les montants différent selon l’intérêt stratégique des pays. A ce titre, le Kazakhstan se situe au cœur de deux des six corridors terrestres définis dans le projet OBOR et devrait pour cette raison faire partie des priorités d’investissement chinoises.
Cependant, la Chine, aux dirigeants pragmatiques, utilise dès qu’elle le peut les infrastructures pré-existantes à son projet. Ainsi, dans le cadre du « nouveau pont intercontinental eurasiatique »27, voie traversant le Kazakhstan et la Russie avant de rejoindre l’Europe centrale puis occidentale, les infrastructures utilisées datent en grande partie de la période soviétique. La seule nouveauté sur cette ligne est la construction de la liaison avec la Chine par Dostyk en 1991 et Khorgos depuis décembre 201228. Or, cette route est particulièrement mise en valeur dans les médias pour évoquer la Ceinture économique de la route de la soie car c’est le corridor euro-asiatique le plus court et le plus utilisé actuellement29. Cependant, cette dernière, en utilisant les infrastructures de l’époque soviétique, ne permettent pas au Kazakhstan de sortir de son déterminisme Sud-Nord hérité de l’URSS.
En outre, le gouvernement kazakhstanais a développé un programme national de construction d’infrastructures, Nurly Zhol, sur lequel s’appuie la BRI. En effet, le projet phare du programme kazakhstanais concerne la construction d’une portion de l’autoroute internationale « West Europe-West China ». Celle-ci a été déclarée achevée en 201830. Cependant, des stations service doivent encore être bâties pour rendre cette voie parfaitement opérationnelle31. Ces coûts de mise en service et d’exploitation s’ajoutent au coût de construction de la route et de rénovation des portions déjà présentes. L’importance des frais engagés pose la question du financeur de ces projets.
Question d’autant plus cruciale si les nouvelles infrastructures profitent plus à la Chine qu’aux pays qu’elles traversent en raison de leur tracé. La coopération entre la BRI et le programme Nurly Zhol amène un doute sur la source des fonds qui seront employés. Ainsi, certains projets cruciaux, comme la ligne de chemin de fer en direction d’Aktau ou l’autoroute internationale sus-mentionnée, pourraient bénéficier d’apports du New Silk Road Fund ou de la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII). Cependant le manque de transparence du premier ne permet pas d’éclaircir cette supposition. La BAII, quant à elle, ne finance aucun projet directement, au Kazakhstan. Elle accorde toutefois des prêts au pays pour la réalisation de certain d’entre eux32.
La Chine peut cependant utiliser ces prêts comme des leviers d’influence. Ils peuvent donc lui permettre d’influencer le tracé des nouvelles infrastructures selon ses intérêts stratégiques… et parfois au détriment du Kazakhstan.
L’importance stratégique du tracé des nouvelles routes
L’intérêt stratégique chinois se situe dans la rapidité du trajet en direction de l’Europe en utilisant ainsi les routes les plus directes possibles. Cet objectif peut ne pas être en accord avec les priorités du Kazakhstan qui, au-delà du besoin de raccorder son territoire aux flux mondiaux, a besoin d’en améliorer la maîtrise par le développement d’infrastructures le quadrillant et reliant ses grandes villes.
Ainsi, la partie nord du corridor « Chine – Asie centrale – Asie de l’Ouest » raccordant les rails venant de Chine au port caspien d’Aktau passe par le centre désertique du Kazakhstan sans desservir les villes essentielles de Noursoultan (Astana)33 ou d’Aktobe, plus au nord. Cette voie illustre parfaitement que les nouvelles routes de la soie, loin d’être construite dans une volonté de servir au territoire kazakhstanais dans un principe « gagnant-gagnant », sont avant tout développées pour les intérêts chinois.
Ce constat peut aussi s’illustrer dans la volonté de construire une ligne à grande vitesse (LGV) entre la Chine et l’Europe, selon les standards internationaux en terme d’écartement des voies34. En outre, elle est annoncée comme passant seulement par la capitale du Kazakhstan. Cette LGV va donc permettre de relier Noursoultan à des pôles économiques mondiaux : Pékin, Moscou, Berlin. Mais l’absence de nombreuses villes comme Almaty, plus grande ville du Kazakhstan, sur ce trajet prouve que ce type de ligne sert à relier la capitale au monde et non à développer les infrastructures internes.
Notre propos peut néanmoins être nuancé par le tracé de l’autoroute intercontinentale évoquée précédemment. En effet, cette voie dessert une grande partie des villes du sud du pays avant de rejoindre Aktobe et de traverser la frontière en direction de la Russie.
Outre, le manque de pertinence pour le développement structurel du Kazakhstan, l’utilisation de ces routes évitant les grandes villes kazakhstanaises pourraient engendrer des externalités négatives pour le pays. Ainsi, la construction de routes privilégiant la rapidité des échanges depuis la Chine vers l’Europe pourrait créer un effet-tunnel à l’échelle du Kazakhstan. Ce dernier ne profiterait alors que très peu des retombées économiques que semblent promettre le passage de ces nouvelles routes de la soie.
Plusieurs questions se posent donc sur les bénéfices apportés au territoire kazakhstanais par ces nouvelles infrastructures. Une dichotomie entre les villes sur les routes de la soie et les autres villes risque de se créer. Dans ce cadre, il est difficile de déterminer quelles sont les retombées économiques de la croissance des flux passant par le Kazakhstan. Cependant, cette expansion des échanges a pour conséquence directe de favoriser l’essor du trafic illégal à travers le pays et avec lui l’augmentation de l’insécurité et des dépenses de police.
Conséquence du désenclavement : l’essor du trafic illégal
Situé entre la principale zone de production mondiale d’opium, l’Afghanistan, et un pôle important de consommation mondiale d’héroïne35, la Russie, le Kazakhstan se retrouve au cœur d’un réseau de trafic de drogue. L’augmentation rapide de la production d’opium en Afghanistan de 2016 à 201736 ainsi que la croissance de la consommation d’opiacés en Asie centrale et en Russie renforce le potentiel d’exportation par la « route nord » centrasiatique. Or le développement du trafic et de la consommation de drogues fragilisent les États concernés car ce phénomène s’accompagne généralement d’une augmentation des violences et de la corruption. Le Kazakhstan est déjà un pays particulièrement touché par la corruption, en partie à cause de la « malédiction du pétrole »37. A ceci s’ajoute donc les manœuvres des trafiquants soudoyant des fonctionnaires pour faciliter leur passage. Le Kazakhstan a ainsi condamné en janvier 2014 seize personnes, dont dix ex-policiers, à des peines de prison pour corruption38.
Comme le souligne le rapport de juin 2018 de l’United Nations Office on Drugs and Crime (UNODC), les trafiquants de drogues au Kazakhstan tendent à avoir des entreprises légales pour cacher leurs marchandises de contrebande dont les drogues. Ils utilisent pour cela majoritairement les axes routiers et ferroviaires (86 % des saisies au Kazakhstan de 2011-201539). Or, l’augmentation des flux transfrontaliers en Asie centrale permet aux trafiquants de passer par les voies internationales en profitant de la quantité des échanges pour dissimuler la contrebande. Contrairement au début des années 2000 où l’utilisation de routes secondaires pouvait être privilégiées dans un soucis de discrétion. Le Kazakhstan a mis en lumière ce problème fin mars en limitant fortement le nombre d’entrées sur son territoire en provenance du Kirghizstan. Ces mesures ont été motivées par le besoin de vérifier la légalité des marchandises transportées selon Kuat Rakhimov, représentant du Kazakhstan lors d’une conférence de presse le 5 avril dernier40. Néanmoins, le but de ce contrôle à grande échelle est vraisemblablement plus diplomatique que sécuritaire. En effet, une inspection des marchandises de cette envergure ne peut être envisagée sur le temps long en termes de personnels, de coût et de difficultés diplomatiques, notamment dans le cadre de l’Union économique eurasiatique.
Ainsi, la multiplication des flux terrestres entre la Chine et l’Europe va considérablement faciliter la dissimulation de la contrebande si des mesures supplémentaires de contrôle ne sont pas établies. Or, la mise en place de ces mesures signifient des allocations de budget supplémentaires à la police aux frontières. Le Kazakhstan a-t-il conscience de ce besoin et compte-t-il débloquer les fonds nécessaires ? Outre l’opium d’Afghanistan, le rapport de l’UNODC rappelle que de nombreux produits manufacturés et alimentaires sont aussi exportés illégalement de Chine vers l’Europe41.
Conclusion : les coûts cachés d’OBOR
La politique d’ouverture aux investissements étrangers des dirigeants kazakhstanais pourrait ne pas avoir les conséquences positives escomptées dans le cadre la BRI. Le développement économique et d’infrastructures risquent d’être contrebalancées par les externalités négatives du projet. Le tracé des routes n’est pas pensé pour le Kazakhstan en priorité et peut donc généré un effet-tunnel en donnant la priorité à la rapidité du transport trans-continental sur la vocation de ces voies à desservir un territoire. Le financement de ces routes incombant en outre majoritairement à l’État kazakhstanais qui emprunte auprès des banques d’investissement et de la Chine pour cela. Enfin, les coûts et les conséquences sécuritaires de la facilitation et de l’augmentation du flux de marchandises sont rarement évoqués et difficilement calculables. Ils pourraient cependant devenir un enjeu de poids pour la stabilité et la sécurité du pays.
En outre, l’impact à long terme du volume d’investissements chinois, au travers d’OBOR comme d’autres projets, pourrait déséquilibrer la politique multi-vectorielle kazakhstanaise en l’inscrivant dans une sino-dépendance.
Un article pour le Prix Geolinks, par Lucie Claeys
1M. Orazgaliyeva, « Kazakh President attends One Belt, One Road forum, meets with leaders in China », The Astana Times, 16 mai 2017. URL :
Kazakh President attends One Belt, One Road forum, meets with leaders in China
2Banque créée par la Chine en 2014 pour financer des projets de développement.
3G. Raballand et M.-J. Zins, « La question de l’enclavement en Asie centrale », Cahiers d’études sur la Méditerranée orientale et le monde turco-iranien, no 35, 1er juin 2003.
4Kazakhstan, Kirghizistan, Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan.
5Le concept de dromocratie correspond à ce que l’on définirait aujourd’hui comme une État transit. Il a été développé par J. Ancel dans son ouvrage Géographie des frontières en 1938.
6D. Teurtrie, « Les nouvelles routes de la soie : quel rôle joue la Russie ? », Conférence organisée par le Cercle Kondratieff, Lyon, 24 avril 2019.
7S. Carcanague, « Désenclaver pour mieux régner ? Rivalité des grandes initiatives régionales en Asie centrale », Revue internationale et stratégique, 2017/3 (N° 107), p. 123.
8Le projet a été annoncé en 2013 sous le nom « One Belt, One Road » (OBOR) L’initiative a longtemps été désignée par la formule « One Belt, One Road » (OBOR) mais le nom a officiellement changé pour Belt and Road Initiative (BRI) en 2016. Nous utiliserons les termes BRI, OBOR et Nouvelles routes de la soie comme des synonymes dans cet article par facilité de langage.
9S. Carcanague, E. Hache, « Les infrastructures de transport, reflet d’un monde en transition », Revue internationale et stratégique, 2017/3 (N° 107), p. 57.
10L’adjectif « kazakhstanais » sera privilégié à celui de « kazakh » pour évoquer les projets et actions étatiques car le second terme correspond à l’ethnie kazakhe et non à l’ensemble du pays.
11Volet terrestre du projet OBOR présenté par Xi Jinping lors d’un discours en 2013 dans la capitale du Kazakhstan.
12T. Kellner, « La Chine et l’Asie centrale vingt-cinq ans après… De la marginalité au centre de la scène régionale » », Outre-Terre, N° 48, no 3, 2016, p. 268-304.
13Les kazakhs et les ouïghours sont tous deux des peuples de langue et de culture turciques.
14I. Damiani,V. Bachelet, « Représentations géopolitiques sur la Route de la Soie, une étude à l’aide de l’analyse cartographique et du traitement d’images satellites », L’Espace Politique, 22 juin 2018.
15Ibid.
16La zone frontière chinoise de Khorgos a vu sa surface urbanisée multipliée par vingt en vingt ans. Dans I. Damiani,V. Bachelet, op.cit.
17I. Damiani,V. Bachelet, op.cit.
18Ibid.
19O. Zajec, Introduction à la géopolitique: histoire, outils, méthodes, Monaco, Éditions du Rocher, 2018, p.226.
20Concept développé par N. Spykman sur la base du terme Coastlands de H. Mackinder pour désigner la ceinture d’États côtiers entourant le Heartland.
21Concept formalisé en 1943 par H. Mackinder pour désigner la masse continentale eurasiatique.
22Les vulnérabilités critiques sont définies par Joseph Henrotin comme « les points faibles les plus à même de réduire l’efficacité au combat de l’adversaire » dans J. Henrotin, Précis de stratégie militaire, Paris, Institut de stratégie comparée, 2018.
23Terme apparu suite au discours de Hu Jintao en 2003 sur la dépendance chinoise vis-à-vis du détroit de Malacca concernant les importations énergétiques. Voir à ce sujet : L. Amelot, « Le dilemme de Malacca », Outre-Terre, n° 25-26, no 2, 16 novembre 2010, p. 249-271.
24L. Amelot, « Le dilemme de Malacca », Outre-Terre, n° 25-26, no 2, 16 novembre 2010, p. 249-271.
25La Chine finance le projet OBOR par le Silk Road Fund et la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures a hauteur de plusieurs centaines de milliards de dollars. Pour plus de détails, voir : Kevin G. Cai, « The One Belt One Road and the Asian Infrastructure Investment Bank: Beijing’s New Strategy of Geoeconomics and Geopolitics », Journal of Contemporary China, 2018, p. 831-847.
26« Le concept de représentation est défini par Yves Lacoste comme l’ensemble des idées et des perceptions qui animent les groupes sociaux et qui structurent leur vision du monde. » dans I. Damiani,V. Bachelet, art. cit.
27« New Eurasian Landbridge », nom du corridor de la BRI allant de Lianyungang en Chine à Rotterdam en passant par le Kazakhstan, la Russie, la Biélorussie, la Pologne et l’Allemagne.
28T. Kellner, « « La Chine et l’Asie centrale vingt-cinq ans après… De la marginalité au centre de la scène régionale » », Outre-Terre, N° 48, no 3, 2016, p. 268-304.
29D. Teurtrie, op. cit.
30Auteur anonyme, « Western Europe-Western China highway fully opens to traffic », State council information office of the People’s Republic of China, 9 octobre 2018. URL : http://english.scio.gov.cn/videos/2018-10/09/content_65404328.htm
31A. G. Bitabarova, « Unpacking Sino-Central Asian engagement along the New Silk Road: a case study of Kazakhstan », Journal of Contemporary East Asia Studies, vol. 7, no 2, 3 juillet 2018, p.164.
32S. Kushkumbayev, « Kazakhstan’s Nurly Zhol and China’s Economic Belt of the Silk Road: Confluence of Goals », sur The Astana Times, https://astanatimes.com/2015/09/kazakhstans-nurly-zhol-and-chinas-economic-belt-of-the-silk-road-confluence-of-goals/, 22 septembre 2015.
33Noursoultan est le nouveau nom de la capitale du Kazakhstan. Il a été approuvé par le Parlement kazakhstanais le 20 mars 2019. Néanmoins, la plupart des cartes utilisées ici étant plus anciennes, le terme d’Astana reste fréquent.
34L’écartement des voies dans les États post-soviétiques diffère de l’écartement standard des rails utilisés en Europe et en Chine.
35Dérivé d’opium.
36Passage de 4800 tonnes de production en 2016 à 9000 tonnes en 2017, dans Auteur anonyme, « Afghan opiate trafficking along the Northern route », UNODC (United Nations Office on Drugs and Crime) Research, juin 2018, p. 3.
37Concept développé par Richard Auty dès 1990 dans son livre Resource-Based Industrialization: Sowing the Oil in Eight Developing Countries.
38Auteur anonyme, « Afghan opiate trafficking along the Northern route », op. cit., p. 135-136.
39Ibid., p. 99.
40А. Мамашулы, « «Без конца и без края». Что происходит на границе с Кыргызстаном », sur Радио Азаттык, https://rus.azattyq.org/a/kazakhstan-kyrgyzstan-border-report/29864757.html, 6 avril 2019.
41Auteur anonyme, « Afghan opiate trafficking along the Northern route », op. cit., p. 122.
Bibliographie
Rapports
Auteur anonyme, « Afghan opiate trafficking along the Northern route », UNODC (United Nations Office on Drugs and Crime) Research, juin 2018, 164 pages.
Ouvrages
Joseph Henrotin, Précis de stratégie militaire, Paris, Institut de stratégie comparée, 2018, 236 pages.
Olivier Zajec, Introduction à la géopolitique: histoire, outils, méthodes, Monaco, Éditions du Rocher, 2018, 270 pages.
Articles de revues
Laurent Amelot, « Le dilemme de Malacca », Outre-Terre, n° 25-26, n°2, 16 novembre 2010, p. 249-271.
Assel G. Bitabarova « Unpacking Sino-Central Asian engagement along the New Silk Road: a case study of Kazakhstan », Journal of Contemporary East Asia Studies, 2018, p. 149-173.
Samuel Carcanague, « Désenclaver pour mieux régner ? Rivalité des grandes initiatives régionales en Asie centrale », Revue internationale et stratégique, 2017/3 (N° 107), p. 123-131.
Samuel Carcanague, Emmanuel Hache, « Les infrastructures de transport, reflet d’un monde en transition », Revue internationale et stratégique, 2017/3 (N° 107), p. 53-60.
Isabella Damiani,Victoria Bachelet, « Représentations géopolitiques sur la Route de la Soie, une étude à l’aide de l’analyse cartographique et du traitement d’images satellites », L’Espace Politique, 22 juin 2018. URL : http://journals.openedition.org/espacepolitique/4663
Kevin G. Cai, « The One Belt One Road and the Asian Infrastructure Investment Bank: Beijing’s New Strategy of Geoeconomics and Geopolitics », Journal of Contemporary China, 2018, p. 831-847.
Gaël Raballand et Max-Jean Zins, « La question de l’enclavement en Asie centrale », Cahiers d’études sur la Méditerranée orientale et le monde turco-iranien, no 35, 1er juin 2003. URL: http://journals.openedition.org/cemoti/759, [consulté le 22 novembre 2018].
Conférences
David Teurtrie, « Les nouvelles routes de la soie : quel rôle joue la Russie ? », organisée par le Cercle Kondratieff, Lyon, 24 avril 2019.
Articles de presse
Sanat Kushkumbayev, « Kazakhstan’s Nurly Zhol and China’s Economic Belt of the Silk Road: Confluence of Goals », The Astana Times, 22 septembre 2015. URL : https://astanatimes.com/2015/09/kazakhstans-nurly-zhol-and-chinas-economic-belt-of-the-silk-road-confluence-of-goals/,
Malika Orazgaliyeva, « Kazakh President attends One Belt, One Road forum, meets with leaders in China », The Astana Times, 16 mai 2017. URL : https://astanatimes.com/2017/05/kazakh-president-attends-one-belt-one-road-forum-meets-with-leaders-in-china/
Didi Tang, « China completes new silk road to Europe », The Times, 10 octobre 2018. URL : https://www.thetimes.co.uk/article/china-completes-new-silk-road-to-europe-highway-is-part-of-belt-and-road-initiative-n89q0ll3f
А. Мамашулы, « «Без конца и без края». Что происходит на границе с Кыргызстаном », sur Радио Азаттык, 6 avril 2019. URL : https://rus.azattyq.org/a/kazakhstan-kyrgyzstan-border-report/29864757.html
Sitographie
Auteur anonyme, « Western Europe-Western China highway fully opens to traffic », State council information office of the People’s Republic of China, 9 octobre 2018. URL : http://english.scio.gov.cn/videos/2018-10/09/content_65404328.htm OBOReurope. URL : https://www.oboreurope.com/fr/belt-road/onebelt/