La République d’Abkhazie

” Comment l’Abkhazie peut-elle s’autoproclamer comme indépendante alors qu’elle semble être sous l’égide de la Russie ? “

“Pourquoi les organisations internationales ont-elles reconnu l’indépendance du Kosovo alors que dans le même temps elles ne reconnaissent pas celle de l’Abkhazie ? “

Introduction

 

Tout d’abord, la République d’Abkhazie est un état de facto situé au Nord du Caucase entre la Russie et la Géorgie.

Après la chute de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques ( URSS ) en 1991, l’Abkhazie proclame son indépendance, sans grand succès, et rentre par la suite en conflit direct avec la Géorgie qui ne souhaite lui accorder qu’une simple autonomie partielle. Le manque de reconnaissance diplomatique a poussé le jeune «État» dans les bras de la Russie qui, le 25 août 2008, reconnaît son indépendance.

I) Carte d’identité de la République d’Abkhazie.

 

A) Données démographiques.

 

République d’Abkhazie :
Superficie totale : 8653 km²
Population : 240 705 Hab ( 2011 )
Capitale : Soukhoumi
Monnaie : Lari et Rouble Russe
Président : Raul Khadjimba
Premier Ministre : Leonid Lakerbaia

Depuis les années 1990, la population Abkhaze a connu des changements profonds au sein de sa population.

En effet, du temps de l’URSS, la République socialiste soviétique autonome au sein de la République socialiste soviétique de Géorgie comptait une population de 500 000 habitants dont 48% étaient Géorgiens et seulement 17% d’Abkhazes.

En 1992, un conflit majeur a mené l’Abkhazie a faire sécession de la Géorgie. Lors de cette période de trouble, la quasi totalité de la population géorgienne soit environ 250 000 personnes (la moitié de la population) sont expulsés du pays. On a appelé ça la « campagne de purification ethnique ».

S’en est suivi que les Abkhazes sont devenus majoritaires et représentent 45% de la population en 2006 contre 25% de géorgiens, les autres ethnies étant des Russes, Arméniens ou bien encore des Grecs.

Tableau Démographique

 

B) Géographie

 


La République d’Abkhazie dispose d’une superficie d’environ 8600 Km². C’est donc un Etat minuscule.

Pour être plus précis, il est situé à l’extrême ouest de la Géorgie, sur la côte Nord de la Mer Noire, On peut donc en conclure que c’est une position géographique très stratégique et tr��s favorable puisque cette proximité des côtes lui permet une ouverture commerciale maritime considérable ; et son climat subtropical humide, fait du pays un point de passage idéal pour les touristes Russes.

Le pays est très montagneux (75% de sa superficie).C’est pourquoi la population est concentrée et regroupée sur une partie minime du territoire soit la côte ainsi qu’au sein des vallées bien irriguées.

Par sa petite taille, et en raison de sa proximité avec des anciens empires russes et ottomans, la population a été amenée à s’allier et coopérer de tout temps avec les diverses puissances voisines.

Abkhazie

 

II) Histoire de l’Abkhazie

A) Dates Importantes

 

1992

Les Abkhazes, habitants de l’autre région autonome de Géorgie, proclament leur indépendance. L’intervention à Soukhoumi des troupes du ministère de l’Intérieur géorgien déclenche un nouveau conflit armé.

1992-1994

Le conflit abkhazo-géorgien, fait 10 000 morts et 250 000 déplacés, pour la plupart d’origine géorgienne.

1994

Cessez-le-feu, déploiement de la Mission d’observation des Nations unies en Géorgie (MONUG) et des forces russes de maintien de la paix sous l’égide de la CEI.

2006

Regain de tension après l’intervention des forces géorgiennes dans la vallée de Kodori.

B) Conflit Abkhazo-Géorgien

 

La distinction entre les 2 peuples est simplement ethnique car ces derniers sont très proches historiquement.En effet, leur langue et leur culture les différencient, même si l’abkhaze est très peu utilisée et que le russe demeure la langue courante.

L’Abkhazie dispose de tous les attributs d’un Etat : soit, un drapeau, une hymne national, un gouvernement, une armée, des uniformes.Au delà de ça, l’Abkhazie se doit d’être reconnue par d’autres pays et organisations internationales.

C’est en 1992, après l’entrée des troupes géorgiennes en Abkhazie que le conflit a débuté, où celles-ci se sont heurtées à une résistance armée.

Comme on l’a vu précédemment, leurs relations n’ont jamais été bien amicales mais celles ci se sont dégradées et sont devenues tendues plus particulièrement au début de l’époque soviétique. En effet, lorsque l’Abkhazie a décrété son statut de république autonome,, les autorités géorgiennes ont opté pour la “transmigration” de leur peuple vers le territoire abkhaze. Cela a eu les conséquences suivantes : Le pourcentage d’abkhazes a diminué à plusieurs reprises dans la république. Au cours des années 60-70, des manifestation massives de la part des Abkhazes ont eu lieu, réclamant le retrait de leur république de la Géorgie, en vain sans effet.

Ce conflit Abkhazo-Georgien éclate lors de l’implosion de l’URSS. Craignant la perte de l’autonomie de la république Abkhaze devant la poussée de nationalisme Georgien, les Abkhazes votent en masse en faveur du maintien de l’URSS, et boycottent le referendum en faveur de l’indépendance de la Géorgie. Des affrontements en fait dès 1989 entre étudiants Géorgiens et Abkhazes.

Accusant l’Abkhazie d’héberger les partisans du président déchu Zviad Gamsakhurdia, le gouvernement Géorgien envahit la république autonome et en prend le contrôle en une semaine, dissolvant immédiatement l’assemblée Abkhaze.

A la suite de cette victoire, débute le vrai conflit Abkhaze : aux côtés des séparatistes Abkhazes s’engagent des volontaires de diverses minorités caucasiennes, soutenues en sous-main par la Russie qui engage aussi quelques troupes régulières. Le chef de guerre Chamil Bassaev, futur guérillero Tchétchène, fait partie des para-militaires engagés contre la Géorgie.

Lien Vidéo Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=mSFAl4aBeJo

III) Pourquoi la Russie s’intéresse t’elle autant à l’Abkhazie ?

 

Suite à la chute de l’URSS, le pays se retrouve sous l’emprise de la Géorgie, malgré un souhait d’indépendance. L’histoire aurait pu en rester là : une Abkhazie de petite taille, techniquement rattachée à la Géorgie, à autonomie partielle. Sans compter l’expansion européenne et celle de la Communauté des États Indépendants (CEI).

A) L’Abkhazie sous l’aile de la Russie

 

Le rapprochement de la Géorgie avec l’UE inquiète la Russie privilégiant la protection de ses propres intérêts et use par conséquent du souhait d’indépendance abkhaze pour justifier son intervention de 2008, qui consistait à déstabiliser le Géorgie ainsi qu’à conserver le plus de poids possible en positionnant ses troupes sur leur territoire.

C’est alors que l’Abkhazie retourne sa veste et change de camp en passant sous le contrôle de la Russie. Contrairement à l’ex URSS, cette dernière semble plus favorable à la protection et au développement de l’identité abkhaze, ce qui lui confère une bonne image sur fond de mauvais souvenir de russification. Toutefois, la population abkhaze n’est pas aussi naïve et a bien conscience sur leur territoire se livre une lutte entre les Russes et les Européens. Les habitants restent par conséquent sceptiques quant à sur la protection de leur culture nationale (la population russe représentant plus de 11% des habitants), ce qui revient pour la Russie à protéger sa population hors de ses frontières, un des arguments d’ailleurs présent lors de la campagne électorale de Vladimir Poutine. Sans oublier que les intérêts russes s’opposent objectivement à une extension de l’OTAN et de l’Union européenne dans le Caucase.

Il faut savoir également, que l’économie abkhaze vit actuellement sous subsistance russe. Ce qui lui permet clairement de survivre dans l’attente d’un retour à l’attractivité de son secteur touristique et donc de ses stations balnéaires. Ces derniers sont principalement russes, leur nombre ne cessant d’aller à la hausse, à terme la langue abkhaze pourrait bien prendre la seconde place. De plus, on recense des intérêts pétroliers alimentant le scepticisme des habitants et des politiques.

La situation du jeune Etat ne connait donc pas d’évolution et ne semble pas prête à en connaitre selon les priorités et intérêts des russes ou, au contraire, ceux de la Géorgie. Ce qui compromet fortement son indépendance en période de confrontation avec la CEI ou même l’UE.

Lien Vidéo Youtube : https://www.youtube.com/watch?v=ZUOSQlUDseQ

 

B) L’Abkhazie : Lieu Touristique

 

L’Abkhazie n’est certainement pas le lieu rêvé et paradis venant à l’esprit des Occidentaux. Cependant, le petit « pays » regorge de ressources et de lieux magiques à découvrir.

Sa géographie lui confère dans un premier temps un climat favorable au tourisme, mais également propice à la culture (thé, tabac, oranges et, naturellement, du vin de bonne qualité tel que le Lykhny). Une richesse qui témoigne de son passé mais également de ses compétences et de son savoir-faire ancestral.

Sa capitale, Soukhoumi, dissimule de nombreuses richesses. Depuis la fin de la guerre de 2008, on assiste à un accroissement du taux démographique, à une hétérogénéité culturelle ainsi qu’à une linguistique importante. Ses anciennes stations balnéaires, réservées aux soviétiques dans le temps, redeviennent au goût des citoyens russes. De plus, on trouve en Abkhazie le gouffre de Krubera-Voronja (celui le plus profond du monde), ainsi que d’anciens et nombreux sites médiévaux, tel que le Nouvel Athos.

Cette valeur pose dorénavant problème puisque les Européens de l’Ouest ont progressivement oublié cette partie de leur héritage en raison de la distance géographique qui les séparent. A contrario des Russes qui depuis plusieurs années, semblent exploiter totalement ces richesse et sont les seuls à soutenir le développement économique et politique du pays. Cependant, cette influence de la Russie ne donne pas vraiment une bonne perception puisqu’il contribue malheureusement à la disparition de la culture abkhaze s’adaptant aux intérêts russes et ne disposant d’aucun allié international aussi puissant pour dialoguer.

Sans oublier que l’Abkhazie a bénéficié sur son territoire de la préparation des Jeux de Sotchi, ce qui lui a été nettement profitable au niveau de la médiatisation mais également au niveau économique.

 

 C) Reconnaissance Diplomatique

 

Pour résumer, le territoire abkhaze est riche en histoire, en ressources naturelles mais tiraillé entre la Russie et la Géorgie. D’où la question de reconnaissance diplomatique et de ses avantages. Toujours considérée comme un État de facto (tout comme la Transnistrie, l’Ossétie du Sud ou encore du Haut-Karabakh), elle dispose néanmoins d’une particularité essentielles comparé à la Transinitrie. En effet, celle-ci dispose de sa propre langue distincte des autres et est tout de même reconnu officiellement sur le plan international par la Russie, le Nicaragua, le Venezuela, Nauru et Tuvalu.

La reconnaissance d’un nouvel État, tel que l’Abkhazie, inclut un certain nombre de problématiques :

–      la subsistance économique,

En effet, le pays est fortement dépendant des investissements russes démontrant un rapport de force inégal sur le plan économique mais aussi linguistique puisque cette omniprésence des russes fait qu’elle est devenue une des langues d’apprentissage au sein des écoles et des universités, mais ce n’est pas tout, puisqu’on assiste également à un double affichage dans les lieux publics. Un déséquilibre des revenus non pas sans conséquences car il amènerait certainement le pays à voir le nombre de résidents russes vivant sur son sol national augmenter.

–      la normalisation des relations avec le pays voisin et à l’affiliation nationale des Abkhazes résidents en Géorgie et vice-versa, problème, une large partie de la population, sur le sol national, n’a pas d’origines Abkhazes…

Enfin, la reconnaissance amènerait à un choix primordial ayant de lourdes conséquences pour la Russie : le rapprochement de la Géorgie avec l’Union européenne et l’OTAN.

Si l’Abkhazie dispose d’une reconnaissance, nul doute que la Géorgie inapte à récupérer ce qu’elle considère comme son territoire national, prendra la décision de se rapprocher de l’Union européenne. L’Abkhazie fait donc là outil de pression pour la Russie sur la Géorgie quant à son avenir européen. En effet, une normalisation ainsi qu’une reconnaissance internationale ne laisseraient plus du tout la même marge de manœuvre à l’armée russe. Il est également très probable que la Géorgie décide également de se rapprocher de l’OTAN et donc des Etats-Unis, comme le témoigne les récentes élections.

La reconnaissance diplomatique, en ce sens, poserait problème pour les habitants vivants de chaque côté de la « frontière » et accentuerait les tensions dans la région et l’Abkhazie, une nouvelle fois, ne servirait ni plus ni moins les intérêts de la Russie face à ceux de l’Union européenne, laissant peu d’autonomie réelle aux dirigeants abkhazes.

Conclusion

L’Abkhazie tout comme l’Ossétie du Sud désirent une reconnaissance de leur indépendance. Ce sont des états de facto et disposent donc des critères fondamentaux afin d’être un Etat à part entière.

Seule une reconnaissance de la part des institutions internationales leur manquent. On a donc deux “Etats” qui sont en quête d’indépendance.

Dans le même temps, on a le quid en ce qui concerne l’indépendance du Kosovo. En effet, l’Abkhazie se demande : ” Pourquoi pas elle ? “

En conclusion, l’avenir de la région est tout aussi incertain que durant la dernière décennie.

 

Actualités

  • Mise en garde de Moscou par la Géorgie concernant la signature d’un accord entre la Russie et l’Abkhazie visant à approfondir l’intégration politique et économique du territoire du Caucase mais également à la création d’un espace économique et douanier commun. Le Figaro

 

  • Ce que réfute le président géorgien ainsi que le ministère des affaires étrangères déclarant ce texte comme « un nouvel acte contre la souveraineté et l’intégrité territoriale de la Géorgie (…) menaçant les capacités défensives du pays » ainsi qu’ « un pas vers l’annexion de l’Abkhazie avec toutes les conséquences légales » Le Figaro

 

Affaire à Suivre…

 

Vincent Gall, Clementine Dal Pont

Sources

 

http://www.lexpress.fr/actualite/monde/l-abkhazie-ce-pays-qui-n-existe-pas_557761.html

http://www.lemonde.fr/europe/article/2014/05/28/le-president-de-l-abkhazie-denonce-un-coup-d-etat_4427478_3214.html

http://french.ruvr.ru/2014_08_18/La-guerre-entre-lAbkhazie-et-la-Georgie-longue-histoire-du-conflit-6579/

http://echogeo.revues.org/10890

http://geopolis.francetvinfo.fr/ossetie-abkhazie-crimee-quelles-frontieres-pour-la-russie-de-poutine-32449

http://www.lefigaro.fr/flash-actu/2014/10/15/97001-20141015FILWWW00317-abkhazie-la-georgie-met-en-garde-la-russie.php

http://www.slate.fr/story/83403/abkhazie-nulle-part

http://www.lejournalinternational.fr/Abkhazie-volonte-d-independance-et-autonomie-reduite_a1641.html

Des Etats de Facto de Maurico Bonnot.

 

 

 

 

1 Commentaire

  1. Une analyse intéressante mais pas toujours exacte, par exemple, l’Ossétie du Sud ne tient pas tant que cela à son indépendance contrairement à l’Abkhazie et rêve de s’unifier avec l’Ossétie du Nord et d’intégrer la fédération de Russie.
    Depuis la guerre russo-géorgienne de 2008, les relations UE-Géorgie se sont quand même distendues et la Géorgie est aujourd’hui un protectorat américain ce qui explique le soutien important apporté par la Russie à l’Abkhazie.

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