La subversion
« Etre réactionnaire c’est justifier et accepter la réforme sans y faire fleurir la subversion », slogan de mai 68.
La subversion est un terme largement utilisé, malheureusement, son usage est souvent abusif et hors contexte. Il s’agira ici de répondre à la problématique suivante : quel est le but de la subversion et comment est-elle utilisée dans le milieu politique et militaire ?
Le mot subversion vient du latin subvertere signifiant « renverser ». Il désigne un processus par lequel les valeurs et principes d’un système en place sont contredits ou renversés. On entend ici par principe les règles définissant une manière type d’agir et correspondant le plus souvent à une prise de position morale. Le terme de valeur peut être défini comme ce qui est posé comme vrai, beau, bien, d’un point de vue personnel ou selon les critères d’une société et qui est donné comme un idéal à atteindre, comme quelque chose à défendre. Contredire signifie ici être en opposition avec quelque chose, aller à l’encontre d’une évolution, d’une tendance. Enfin, renverser signifie éliminer quelque chose, le réduire à néant. Le mot « subversion » peut avoir comme antonyme « la construction », « l’appui », « l’établissement ».
Il s’agit ici de mettre en place des actions organisée afin de bouleverser, de détruire les institutions, de renverser l’ordre établi. La subversion peut être appliquée dans de nombreux domaines. En effet, elle peut être mise en place partout où l’on réclame des valeurs et des normes. Ainsi, on est susceptible de la retrouver au niveau politique, militaire, social, culturel, artistique, religieux, moral, sexuel, etc. Dans le cadre de cette étude, nous analyserons la subversion dans les milieux politiques et miliaires uniquement, ces deux aspects étant très liés.
La subversion est utilisée dans les zones qui sont militairement ou politiquement convoitées. « Elle vise à susciter un processus de dégénération de l’autorité pendant qu’un groupe désireux de prendre le pouvoir s’engagera dans une guerre “révolutionnaire”. »[1]. Ce moyen est le fondement des guérillas et du terrorisme. Cependant, un Etat peut également se servir de la subversion afin de perturber un pays étranger, de l’affaiblir de l’intérieur et ce, à des fins militaires et/ou politiques.
Les objectifs principaux de la subversion sont les suivants :
- Démoraliser et diviser la population
- Discréditer l’autorité établie
- Neutraliser les masses pour empêcher toute intervention en faveur de l’ordre établi[2]
Afin d’atteindre ces objectifs, la subversion est mise en place grâce à des moyens psychologique. Il s’agit ici de manipuler l’opinion publique via l’utilisation des médias de masses tels que la publicité, la propagande ou encore, la désinformation. Le but étant de provoquer une forte réaction chez l’auditeur qui le mène à s’identifier à l’agresseur et donc à se positionner contre le pouvoir établi.
De plus, d’autres moyens sont aussi utilisés en parallèle. Il s’agit d’intensifier les revendications, les besoins ou l’idéologie des groupes afin de forcer un sous groupes à mener des actions directes. De ce fait, les groupes se mobilisent plus facilement si une attaque vise un membre des leurs.
La technique dite de « provocation-répression-appel à l’unité contre la répression » (Mucchielli, voir Volkoff, 1986) est largement utilisée au niveau politique et militaire. Elle consiste à mettre en place des actes de banditismes afin de forcer l’autorité à être répressive, puis à utiliser cette répression pour qu’elle soit perçue comme une menace collective pour le groupe.
Ensuite, il s’agit d’augmenter le niveau de violence des actions afin d’augmenter la répression. Face à cette répression, un appel au front commun est lancé en accusant l’autorité et en justifiant les actes de banditismes de départ.
De par sa nature, la subversion est souvent l’objet de censure et de répression. Des actions sont mises en place afin de contrer la subversion. On peut citer par exemple, des actions dites de guerre psychologique telles que la désinformation, la propagande, les interrogatoires utilisant la torture. On retrouve également le retournement de membre de la guérilla, la mise en place de couvre-feux qui permet de pratiquer des arrestations à domicile. La formation de groupe spécialisé de par la création de patrouilles mobiles, opérant en dehors de tout cadre judiciaire, la création de groupes armés antiguérilla au sein de la population…
Chacun peut attribuer au mot subversion un sens positif ou négatif, en fonction de son opinion à l’égard des valeurs du système établi. De plus, la subversion n’implique pas constamment une intervention armée. En effet, cette dernière peut aussi servir à l’évolution des valeurs en les remettants en cause.
La subversion est contingente, elle renvoie à une notion d’histoire. L’histoire à vu naitre de nombreux cas de subversion. Il semble intéressant ici d’analyse certains d’entre eux afin d’illustrer l’analyse faite précédemment.
Exemples :
L’un des cas les plus célèbres de subversion est répertorié en Afrique du Nord et à directement impliqué la France.
Au Maghreb, la guerre d’Algérie (1954-1962) qui a opposé la guérilla algérienne à l’armée française semble être un exemple très illustratif de subversion. En effet, à l’époque, la lutte organisée que mène le Front de Libération National (FLN) contre l’institution française en place depuis plus de 100 ans repose sur deux tactiques bien distinctes. La première prend place sur le terrain militaire, et a pour objectif de venir à bout de l’armée française. La deuxième, toute aussi indispensables dans cette situation, est l’usage d’une guerre psychologique, à base de propagande, arme psychologique à part entière, ayant pour but d’avoir l’appuie et le soutien de la population. Grâce aux actions de propagandes menées, la population a été démoralisée et divisée face à la présence française.
De plus, les crimes orchestrés par l’armée française durant cette guerre à été un outil supplémentaire pour discréditer l’ordre français et appuyer la légitimité du FLN. Enfin, la justesse de la cause du FLN ainsi que la proximité des révolutionnaires avec la population a permit de neutraliser les masses afin de limiter un maximum, toute intervention en faveur de l’ordre établi. Ainsi, les objectifs principaux de la subversion ont été remplis.
Cet exemple peut également être rapproché au cas Indochinois (1946-1954) et bien d’autres. En effet, un grand nombre de guerre d’indépendance peuvent être qualifiée de subversion.
L’arrivée au pouvoir du parti nazi semble ici encore être un exemple de subversion.
Après un coup d’Etat raté en 1923, Hitler est emprisonné. Son livre « Mein Kampf », qui décrit la philosophie nazi et qu’il a écrit durant son incarcération se vendra à quelque 80 millions d’exemplaires.
Il est libéré et revient sur le terrain politique en décembre 1924. Aidé par un cadre économique catastrophique : chômage, amendes lourdes du traité de Versailles entre autres, il réussit grâce à son charisme et son élocution à semer le désordre au sein de la population allemande.
Le crash boursier de Wall Street en 1929, l’antisémitisme, sont autant d’éléments sur lesquels le parti nazi va baser son argumentaire afin de séduire les foules. De nombreux tracs sont distribués, des affiches placardées dans les rues louant le parti nazi, présentant Hitler comme le seul capable de diriger le pays, de redonner toute sa dignité au peuple allemand et pointant les juifs comme les responsables de la situation.
En parallèle, des affrontements opposant les communistes et les nazis (avec l’aide de la police) éclatent dans les rues de la capitale allemandes. Face à cette situation, la population allemande vote pour Hitler en juillet 1932. Quelques mois plus tard, en janvier 1933, le poste de chancelier lui est offert. Une fois en place, il usera de propagande afin de garder le soutien de la population et d’appuyer son pouvoir.
Conclusion :
La subversion désigne donc un processus ayant amenant à contrer ou renverser les valeurs et principes d’un système en place, l’ordre établi. Les moyens utilisés ont une place prépondérante dans la mise en place d’une subversion.
Dans cette étude nous nous sommes concentrés à la subversion au niveau politique et militaire, mais il semble important de souligner que cette dernière peut être appliquée dans de nombreux autres domaines.
Annexe :
Exemple de moyen psychologique qui accompagne la mise en place de la subversion :
Bibliographie :
Critique et subversion dans la pensée contemporaine américaine, sous la direction de Gabriel Rockhill et Alfredo Gomez-Muller
Guerre, subversion, révolution, Colonel Roger Trinquier
La désinformation arme de guerre, Vladimir Volkoff
Subversion, anti-subversion, contre-subversion, Francois Cochet et Oliver Dard
La guerre subversive en Algérie : Les Cahiers du Comité de Vincennes, n°3, décembre 1960
Guerre de l’information, terreur et subversion culturelle, Christoph Fringeli
Sources :
Wikipedia
Larousse.fr
Histoire-pour-tous.fr
Comment Hitler est arrivé au pouvoir ?, RTBF Info
[1] Mucchielli, voir Volkoff, 1986
[2] Mucchielli, voir Volkoff, 1986
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