énergie – Geolinks Observatoire en Géostratégie de Lyon Thu, 02 Jun 2016 13:00:02 +0000 fr-FR hourly 1 https://wordpress.org/?v=4.4.1 Les enjeux du port de Chabahar /geopolitique/les-enjeux-du-port-de-chabahar/ /geopolitique/les-enjeux-du-port-de-chabahar/#respond Mon, 18 Jan 2016 14:57:03 +0000 /?p=11921 Le port de Chabahar, porteur d’espoir et d’ambition… mais pour qui ?

iran-inde

Introduction
Exemption de taxe professionnelle pendant 20 ans, droits de douane réduits, garantie à 100% sur le capital investi et les bénéfices (AFP, 2015) .Voilà ce qu’offre la zone franche de Chabahar (CFZ), en Iran, pour attirer les investisseurs.

fd301f25-d6d2-41f2-b036-ea724fa58e9d

Source : PressTV, 2015

Cette zone franche se situe au sud de la province de Sistan-et-Balouchistan, proche de la frontière du Pakistan. Elle offre un port en eaux profondes ouvert sur l’océan indien via le golfe d’Oman. Son développement permettra d’une part, le désengorgement du détroit d’Ormuz et, d’autre part, de donner un accès à la mer au continent centrasiatique.

IRAN

Source : Visoterra, 2015

Bien qu’étant sur territoire iranien, c’est principalement l’Inde qui s’occupe du développement des infrastructures et qui en a la gestion. Le membre des BRICS a en effet rapidement saisi l’importance stratégique et commerciale qu’un tel projet pouvait représenter. L’Inde voit ici un accès aux ressources dont regorge la région. Déjà proche de l’Iran, dont elle est un des principaux partenaires commerciaux, elle entend bien là étendre son influence au-delà des seules frontières iraniennes.
L’Iran, qui semble peu à peu sortir du marasme économique résultant de l’embargo qui le frappait jusqu’alors, voit en les investissements indiens une aide au développement, à la sécurité de son territoire ainsi qu’un affranchissement du commerce de la région aux pays de la péninsule arabique.

La problématique sera ici de comprendre quels sont les intérêts portés par ce port pour l’Inde et l’Iran. Ainsi, dans une première partie, nous tâcherons d’analyser les enjeux qui poussent l’Inde à investir dans le port iranien. Dans une seconde partie, il sera question des motivations iraniennes à encourager la stratégie indienne.

I. La volonté indienne

L’Inde, 8e puissance mondiale, jouit aujourd’hui d’une croissance supérieure à celle de la Chine et cherche à être reconnue comme un acteur majeur. Le pays doit donc être en mesure d’alimenter sa croissance et de se prémunir d’une suprématie chinoise. Ce sont ces raisons qui poussent aujourd’hui l’Inde à étendre son influence au-delà de ses frontières.

A. Accès aux mines d’Afghanistan : quand un investissement en cache un autre

L’Afghanistan disposerait de ressources minières estimées à environ 3 000 milliards de dollars (ARNOULT, 2011). Naturellement, le pays suscite l’engouement de nombreuses nations. Parmi elles, l’Inde tente de faire la différence en apportant plus qu’un financement, un développement.

En 2011, l’Inde connaît sa première victoire en remportant son premier appel d’offres afghan (BOBIN, 2011). L’Afghanistan, jusque-là en guerre, entend se développer grâce à l’exploitation de ses ressources naturelles. Le pays ne cherche pas ici de simples investissements étrangers, mais également des partenaires susceptibles de développer des infrastructures aidant à son développement. C’est dans cette optique que l’Inde entreprend des projets routiers et ferroviaires. Cependant, l’Afghanistan ne possédant pas de frontière terrestre avec l’Inde et ne disposant pas d’ouverture sur la mer, il est difficile pour l’Inde de rapatrier les ressources exploitées. La voie terrestre lui étant bloquée par le Pakistan, avec lequel elle est toujours en conflit soixante-huit ans après leur séparation, le Cachemire cristallisant toujours de vives tensions entre les deux pays. Par contre, l’Iran, qui possède 936 km de frontière avec l’Afghanistan et qui donne sur l’océan Indien, et grand partenaire économique, semble être un point d’accès idéal. Cet accès est notamment facilité par une frontière se situant sur un plateau. Mais jusque-là, l’Iran ne possédait pas d’infrastructures suffisantes pour assurer le transit et le volume souhaité par l’Inde. C’est en grande partie pour cette raison que l’Inde a souhaité investir dans le développement du port de Chabahar. De plus, nous l’étudierons par la suite, par le contrôle de la gestion qui lui a été accordé par les autorités iraniennes sur le port et la levée de l’embargo, le port pourrait rapporter encore davantage.

À cela s’ajoute une volonté de désenclavement par l’ouest de l’Inde. En effet, le pays se retrouve pris en étau par les relations chinoises et pakistanaises. Le premier fait barrage sur le flanc ouest, soutenu par la Chine avec laquelle l’Inde partage une frontière au nord. La Chine entend profiter de la situation géographique du Pakistan et nouer des partenariats dans le but de désenclaver sa province du Xinjiang et, de ce fait, se doit de soutenir le Pakistan dans ses oppositions à l’Inde. À ce barrage s’ajoute le « collier de perles » chinois, présenté par Booz-Allen-Hamilton en 2004, qui enclave maritimement l’Inde.

Picture0001

Source : Conflits n°7, 2015

La principale issue pour accéder aux marchés centrasiatiques est alors d’adopter une stratégie tête de pont, à plus forte raison si l’un des principaux partenaires sur le marché centrasiatique cherche à se développer et à retrouver une place conséquente dans l’économie mondiale ; c’est le cas de l’Iran. Enfin, ce partenariat avec l’Iran assure un apport énergétique sécurisé à l’Inde, qui importe 70% de son énergie et dont l’Iran est le second fournisseur de pétrole (BAIXAS, 2010).

B. Rattraper son retard sur la Chine

La Chine semble mener les mêmes batailles que l’Inde. Alliée du Pakistan, elle est déjà établie dans le secteur minier afghan et sur le front de l’océan indien.
Tout d’abord, la Chine a elle aussi mesuré l’importance du littoral du sous-continent et le potentiel de celui-ci. Ainsi, en 2006, elle achève la construction du port de Gwadar, au Pakistan. Situé à moins de 180km (106 miles précisément) de celui de Chabahar, il offre des conditions géographiques similaires et, de ce fait, est en concurrence directe. Ainsi, en investissant dans le port de Chabahar, l’Inde compte bien concurrencer, voire s’approprier les intérêts économiques visés par la Chine. La zone du Baloutchistan, où se trouve le port de Gwadar, est instable et des milices prennent les armes et revendiquent leur indépendance. Aubaine pour le gouvernement indien qui, selon de nombreuses sources, mais sans reconnaissance officielle de l’Inde, leur fournit alors des armes pour maintenir l’instabilité quand, parallèlement, avec le soutien du gouvernement iranien, elle stabilise l’est de l’Iran et apporte un développement d’infrastructures portuaires, routières et ferroviaires. De la sorte, l’Inde amène l’Afghanistan à favoriser les négociations avec l’Iran et elle-même.
L’Inde doit aussi faire face à la Chine sur l’exploitation des mines afghanes. En effet, les firmes chinoises sont déjà solidement implantées avec des concessions de mines telles que celles d’Aynak (WINES, 2010), d’Amu Darya (SHALIZI, 2012) ou encore de Sanduqli et Mazer-e-Sharif (PETERSON, 2013). Une course aux appels d’offres a lieu entre les deux pays, mais la Chine semble avoir pris une avance certaine. C’est donc sur la pérennité des relations, sur la sécurité des exportations et sur la sécurisation du territoire que l’Inde compte faire la différence. L’Inde fait donc face à de nombreuses incitations qui la poussent à développer son influence hors de ses frontières. Nous allons à présent nous concentrer sur les intérêts de l’Iran qui, à première vue, semble passif dans ce processus.

II. Les intérêts iraniens

L’Iran est aujourd’hui un pays dont l’économie est fragilisée par des années de sanctions économiques.
Son développement nécessite des investissements étrangers ainsi que des alliances solides. C’est pour cette raison que le pays multiplie les accords avec l’Inde qui lui apporte un soutien essentiel.

A. Reprendre le contrôle de la zone et se préparer à une ouverture économique

Cette mutation, à la fois économique et géographique, a un intérêt certain pour l’Iran qui a du mal à contrôler la zone de Sistan-et-Baloutchistan, dans laquelle se situe le port de Chabahar.
Comme du côté pakistanais, il règne d’une part, une instabilité ethnique, et d’autre part, le développement d’un certain nombre de trafics que Téhéran a du mal à contrôler.

r13-6053

Source : CNRS, 2013 www.irancarto.cnrs.fr

Cette région de l’Iran est à dominance sunnite baloutche, alors que le reste du pays ainsi que le gouvernement est à majorité chiite perse. Les Baloutches se sentent délaissés et n’ayant pas les mêmes droits que les Perses (MINOUI, 2009). Ce terrain propice aux rébellions a notamment donné naissance à Jundollah, un groupement militaire revendiquant plusieurs attentats, notamment contre les Gardiens de la révolution en octobre 2009 (REUTERS et AFP, 2009).
Ce climat de tension sociale entraîne une hausse générale de la criminalité et des trafics, à commencer par celui de la drogue en provenance d’Afghanistan. Éloigné de Téhéran et frontalière avec l’Afghanistan et le Pakistan, cette région semble être difficilement contrôlable pour Téhéran. La situation est telle qu’en avril 2009, « le chef de la police iranienne a annoncé le retrait total de la police civile de la région » (EIFFLIN, 2011). Ce sont aujourd’hui les Gardiens de la Révolution qui sont chargés d’assurer la sécurité.

Or, la mise en place d’infrastructures et de projets de développement légitimerait un accroissement sécuritaire, qui servirait alors tant pour la sécurisation des transits que pour l’éradication des sources de tensions. Il ne s’agit pas là d’une volonté de contrôle par la force, mais d’instaurer un développement stable, notamment grâce aux investissements étrangers et aux infrastructures nécessairement liées. Avant l’embargo de 2006, les autorités déclaraient avoir totalement éradiqué le chômage dans la ville de Chabahar. Cependant, suite aux sanctions économiques, les investisseurs se sont raréfiés et l’instabilité s’est accrue. L’Iran compte alors renouveler l’exploit et l’étendre sur l’ensemble du front Est du pays avec cette fois le soutien de puissances telles que l’Inde.

Le rapprochement avec de nouveaux partenaires va aussi permettre à l’Iran de redynamiser ses exportations de pétrole et de gaz pour lesquelles le pays dispose respectivement de la 4e réserve mondiale et la 2e réserve mondiale (Le Moci, 2015). Jusqu’en 2012, l’Iran oscillait entre le 3e et 4e rang des exportations pétrolières en valeur. Mais depuis les sanctions qui frappent le pays sur ce secteur, l’Iran se hisse péniblement au 9e rang, ayant vu le montant de ses d’exportation pétrolière chuté presque de moitié (101.468 milliards de dollars en 2012, 53.652 milliards de dollars en 2015) (OPEC, 2015). Enfin, pour consolider sa balance extérieure, l’Iran pourrait aussi développer une industrie de raffinement de pétrole et d’essence afin de limiter ses importations. Le pays ne dispose pas actuellement des équipements nécessaires pour assurer la transformation de pétrole en essence et se retrouve à devoir en importer en grande quantité. Ainsi, par une dualité exportation de pétrole et limitation des importations d’essence, l’Iran pourrait voir sa balance commerciale redevenir positive. La moyenne de celle-ci entre 1974 et 2014 s’élevait tout de même à plus de 5 milliards de dollars (Trading economics, 2015).

B. Sortir de la dépendance vis-à-vis des Émirats arabes unis

Jusque-là, les Émirats arabes unis étaient la porte d’entrée du marché iranien. Du fait des nombreuses sanctions économiques que la théocratie perse a connues, l’alternative des Émirats arabes unis (EAU) s’est rapidement révélée être la favorite. Dès 1979, et les premières sanctions suivant la révolution islamique, des commerçants iraniens ont migré aux EAU et ont servi d’intermédiaire entre l’Iran et le reste du monde, faisant alors de Dubaï l’accès privilégié au marché iranien. L’Iran se trouve donc en partie dépendant des EAU.

De plus, jusque-là, le principal port iranien était celui de Bandar Abbas, par lequel transitait 85% du transit maritime à destination et en provenance d’Iran. Cependant, ce port est limité à des navires ne pouvant excéder 100 000 tonnes. Ainsi, la majeure partie des navires étrangers à destination de l’Iran doivent faire escale aux EAU, où les marchandises sont alors transférées sur des navires de taille modeste afin qu’ils puissent être accueillis à Bandar Abbas (RAMACHANDRAN, 2014). Le port de Chabahar, en eaux profondes, évite l’intermédiaire émirati et permettra l’accroissement des échanges. Cet accroissement des échanges et les investissements étrangers semblent déjà être au rendez-vous selon Hamed Ali Mobaraki, qui déclare que des compagnies sud-coréennes, européennes, émiraties… et chinoises, se seraient déjà implantées (PRESSTV, 2015). Par cette indépendance, l’Iran se protège de toute atteinte à son commerce. En cas de tension avec les autres pays du golfe persique, qui pourrait alors déboucher sur l’obstruction du détroit d’Ormuz, l’Iran verrait alors les principaux ports jusque-là, Busherh et Bandar-Abass, totalement bloqués. Ainsi, le port de Chabahar permet tout d’abord à l’Iran de se libérer des pressions que les autres nations du Moyen-Orient pourraient exercer sur elle. De plus, il va permettre au pays d’assurer une croissance saine à travers le développement de son commerce extérieur et de ses partenariats.

Conclusion

L’Inde et l’Iran coopèrent au développement d’infrastructures dans l’optique de satisfaire leurs propres intérêts. Pour l’Inde, la terre perse représente une opportunité d’accès à un marché qui lui est en partie fermé et une tête de pont permettant son désenclavement et une opposition à la domination chinoise. Elle cherche aussi à nouer des relations durables et stables avec l’Iran ; relations qui lui assurent une alimentation en hydrocarbures ainsi qu’un accès à l’Afghanistan. De son côté, l’Iran souhaite développer des infrastructures amenant un développement de son commerce extérieur. Elle souhaite aussi sortir de sa dépendance vis-à-vis des Émirats arabes unis et s’assurer un degré de liberté en cas de tensions. Enfin, ce développement permet aussi à l’État de « reprendre en main » une région jusqu’ici délaissée et sous tension.

Par souci de délimitation du sujet, cette analyse ne présente que brièvement le rôle de l’Afghanistan dans ces négociations. Cependant, les questions portant sur son avenir et son modèle de développement n’ont pas été abordées. Ces aspects pourraient avoir un impact fort sur les négociations futures et sur la gestion des relations diplomatiques du pays.

 

Bibliographie et sitographie
AFP (2015), « Iran: la zone franche de Chabahar attend la fin des sanctions », L’Expansion, 4 juin 2015
http://lexpansion.lexpress.fr/actualites/1/actualite-economique/iran-la-zone-franche-de-chabahar-de-l-iran-attend-la-fin-dessanctions_1686210.html

ALI ZOAIB M. (2015), « Chabahar or Gwadar, Which one is Suitable for Afghanistan? », Voice of
journalists, 11 juin 2015
http://www.voiceofjournalists.com/chabaharorgwadarwhichoneissuitableforafghanistan/

ARNOULT J. et MARUERITTE L. (2011), « Kaboul parie sur ses mines pour se développer », CARTO, n°

Kaboul parie sur ses mines pour se développer

BAIXAS L. (2010), « Chabahar vs. Gwadar », Outre-Terre, n°25/26, p. 215
https://www.cairn.info/revue-outre-terre1-2010-2-page-215.htm

BOBIN F. (2011), « En Afghanistan, l’Inde concurrence la Chine dans l’exploitation minière », Le Monde, édition du 29 novembre
http://www.lemonde.fr/economie/article/2011/11/29/en-afghanistan-l-inde-concurrence-la-chine-dans-l-exploitationminiere_1610697_3234.html
CNRS, 2013
www.irancarto.cnrs.fr

DE PREMONVILLE A.L. (2015), « Les fondements de la puissance iranienne », Conflits, n°6, p. 58-61

EIFFLIN V. (2011), « Le Grand Baloutchistan », Diplomatie, n°50, mai-juin 2011
http://www.diplomatie-presse.com/?page_id=4073

Le Moci (2015), Fiche pays – Iran
http://www.lemoci.com/fiche-pays/iran/

MACKENZIE J. (2015), « Le « collier de perle », menace ou fantasme ? », Conflits, n°7, p. 63

MINOUI D. (2009), « Iran : Un p’tit tour chez les Baloutches », le blog figaro, 20 octobre 2009
http://blog.lefigaro.fr/iran/2009/10/iran-un-ptit-tour-chez-les-bal.html

OPEC (2015), Annual Statistical Bulletin
http://www.opec.org/opec_web/static_files_project/media/downloads/publications/ASB2015.pdf

PETERSON A. (2013), « Afghanistan has what China wants », Foreign policy, 18 avril 2013
Afghanistan has what China wants

PRESSTV (2015), « Iran welcomes UAE investors to Chabahar Free Zone: Iran official », The Iranian project, 17 juin 2015

Iran welcomes UAE investors to Chabahar Free Zone: Iran official

RAMACHANDRAN S. (2014), « India to Invest in Iran’s Chabahar Port », The central asia-caucasus analyst, 26 novembre 2014
http://www.cacianalyst.org/publications/analytical-articles/item/13099-india-to-invest-in-irans-chabahar-port.html

REUTERS et AFP (2009), « Attentat suicide en Iran contre les Gardiens de la révolution », 18 Octobre 2009
http://www.lexpress.fr/actualite/monde/proche-moyen-orient/attentat-suicide-en-iran-contre-les-gardiens-de-la-revolution_795322.html

ROYER P. (2015), « Océan Indien, l’Inde de retour chez elle ? », Conflits, n°7, p. 61-62

SENEPART S. (2015), « Inde, Chine, Pakistan ; L’Inde prise à revers », Conflits, n°7, p. 58-60

SENEPART S. (2015), « Téhéran regarde aussi à l’Est, l’Iran en Afghanistan », Conflits, n°6, p. 69

SHALIZI H. (2012), « China’s CNPC begins oil production in Afghanistan », Reuters, 21 octobre 2012
http://www.reuters.com/article/2012/10/21/us-afghanistan-oil-idUSBRE89K08G20121021

Trading economics (2015), Iran-balance of trade
http://www.tradingeconomics.com/iran/balance-of-trade

Visoterra, 2015
http://cartes.visoterra.com/carte-plan/iran.html?utm_source=www.google.fr&utm_medium=Images&utm_term=undefined

WINES M. (2010), « Afghanistan. Offensive de charme pour le cuivre », Courrier international, 12 avril 2010
http://www.courrierinternational.com/article/2010/04/08/offensive-de-charme-pour-le-cuivre

]]>
/geopolitique/les-enjeux-du-port-de-chabahar/feed/ 0
Les « Blood Borders » au Moyen-Orient, vers une solution miracle à la problématique des frontières ? (2/6) /geopolitique/russie-caucase/les-blood-borders-au-moyen-orient-vers-une-solution-miracle-a-la-problematique-des-frontieres-26/ /geopolitique/russie-caucase/les-blood-borders-au-moyen-orient-vers-une-solution-miracle-a-la-problematique-des-frontieres-26/#respond Fri, 20 Nov 2015 15:29:34 +0000 /?p=11709
Info

Second article collectif d’une série de six, sur la problématique des frontières.
1er article ici
Focus sur le plateau anatolien et le sud-Caucase

x

 

L’Anatolie et le sud Caucase illustrent la complexité du fait politique. Des côtes méridionales de la Mer Noire aux côtes occidentales de la Caspienne, les puissances se sont toujours affrontées. D’Alexandre le Grand aux empires européens, en passant par Pompée et les califes, chacun a tenté d’influer sur ce verrou stratégique. Pourtant ce sont bien les conditions du règlement des effondrements ottoman et soviétique qui pèsent aujourd’hui sur les liens régionaux.

 

Peuples, nations et ethnies : une mosaïque ethnolinguistique

 

La diversité linguistique est l’une des caractéristiques fondamentales du Caucase et de l’Anatolie. Ainsi s’entrecroisent les langues indo-européennes, ouralo-altaïques et celles caucasiques. Du point de vue confessionnel, l’histoire du Caucase est marquée par la présence des trois grandes religions monothéistes, l’Islam étant le plus représenté. Le christianisme est la religion dominante en Arménie et en Géorgie. Le judaïsme a vu une baisse substantielle du nombre de ses fidèles dans le Caucase, notamment depuis la création de l’État d’Israël en 1947.

Parmi l’ensemble des États étudiés, l’Arménie est celle qui tend à une quasi-homogénéité ethnique. 96 % des ressortissants sont arméniens, les quatre pour cent restants étant Russes, Yézidis, Kurdes, Assyriens, Grecs, Ukrainiens et Juifs. Cette homogénéité s’explique d’abord par l’ancrage antique du peuple arménien sur l’axe Anatolie-Caucase. D’autre part, la nature montagneuse de l’Arménie rend son accès difficile et crée une frontière naturelle avec ses voisins. Enfin, l’afflux massif d’Arméniens victimes des persécutions ottomanes a contribué à l’homogénéisation de la République d’Arménie.

L’Azerbaïdjan compte une population de plus de neuf millions de personnes, principalement musulmane. L’Islam est implanté en Azerbaïdjan depuis le VIe siècle, mais c’est au XVIe siècle que la population s’est convertie au Chiisme duodécimain. Ainsi, sur 93 % de musulmans, 85 % sont chiites. Les autres ethnies présentent son russe orthodoxe et Arménienne apostolique. Le peuple azéri est à la croisée d’origines turcomanes et iraniennes. En effet si la langue fait partie de l’ensemble altaïque, il existe des similarités culturelles entre Persans et Azéris. L’Azerbaïdjan avant l’arrivée des Oghouz avait des liens forts avec le monde persan. Finalement, il est possible de dire que les Azéris sont des Caucasiens ayant intégré les rites et les traditions iraniennes et turques.

La Turquie compte près de 80 millions d’habitants. La population majoritairement musulmane (80 %) compte une minorité alévie issue du chiisme duodécimain. L’Alévisme n’est pas officiellement reconnu par les institutions turques. Les Kurdes constituent aussi une minorité importante, ils représentent en effet un cinquième de la population. Ils occupent essentiellement le sud-est du pays et leur langue indo-européenne entre dans la catégorie des langues iraniennes occidentales. Au même titre que la majorité turque, les Kurdes sont pour la plupart sunnites.

Un carrefour géostratégique de première importance

 

L’incidence du poids de l’histoire sur les relations régionales

 

La Turquie, à bien des égards, peut être considérée comme l’État dominant l’axe Bosphore-Caspienne. Fort de son appartenance aux organisations régionales et à l’OTAN, la Turquie est une interface de premier ordre. L’État moderne a émergé des cendres de l’Empire ottoman et a su s’imposer dans le concert des nations. Loin d’être anecdotique, la reconquête politique et militaire de la profondeur stratégique anatolienne par Atatürk est à la source de la diplomatie turque. Istanbul a su revenir sur le traité de Sèvres par le biais de celui de Lausanne, annihilant de fait les prétentions territoriales kurdes ou arméniennes.

Utilisant les enjeux de pouvoirs de la région, la Turquie a su s’accorder avec le monde soviétique, tout en ménageant sa politique occidentale. Le cas arménien reste pourtant symptomatique des maux entre la Turquie et ses voisins. Les pogroms et le génocide arménien prenant racine dans les idées pantouranistes et la vision turque de l’Arménie comme « cinquième colonne de la Russie » [1] ont attisé les tensions stratégiques. La Turquie a toujours tenté d’utiliser le jeu des puissances à son avantage, oscillant entre un national-neutralisme, un atlantisme modéré et une prétention régionale. Istanbul et Bakou ont des relations fortes occultant l’antagonisme religieux, au profit d’une communauté sémiologique.

L’axe Caspienne-Méditerranée, pivot stratégique entre Europe et Moyen-Orient

 

caucase-georgie

Depuis les années 2000, la politique occidentale turque semble s’infléchir dans ses moyens comme dans ses buts. Si depuis 1943 le partenariat entre Turcs et Américains reste structurant, les évolutions récentes ont modifié les relations turco-occidentales. D’un côté, le partenariat pour la paix a permis à Istanbul de renouer des relations privilégiées avec les Balkans. L’importance des forces nationales et sa position ont fait de l’Anatolie turcomane une plateforme pour les forces atlantiques. De l’autre, la doctrine Davutoglu portée par un courant néo-islamiste attire la Turquie vers ses frontières méridionales. En interne, l’armée semble perdre son rôle de régulateur au profit d’une démocratie viciée. En somme, la Turquie s’ancre plus à son identité musulmane qu’à son héritage kémaliste.

Les turbulences au sein des États panarabes sont source d’opportunités, mais aussi de menaces pour l’État turc. Si la mise au ban des nations de la Syrie ouvre un canal d’influence dans l’environnement turc, la contagion irrédentiste n’est pas à écarter. Finalement, la Turquie est actuellement à un carrefour de son histoire : les tensions internes et externes fragilisent son soft balance traditionnel. S’il est difficile de définir formellement le futur de la diplomatie turque, il y a fort à parier que l’ambivalence entre son identité musulmane, l’idéal turcoman et l’ancrage euro-méditerranéen finira de modifier durablement sa position dans la région.

L’Arménie et l’Azerbaïdjan ont un destin commun récent. Jouissant d’une indépendance nationale suite à la dislocation soviétique, leurs relations sont très liées. Ces États limitrophes doivent faire face aux conséquences géopolitiques de l’enclave. Ainsi la région azérie du Nakhitchevan est séparée de Bakou par le territoire arménien, les territoires azéris derrière la ligne de cessez-le-feu et l’enclave orpheline[2] arménienne du Nagorno-Karabakh. Ces deux enclaves ont conduit à une lutte armée au début des années 1990, dont les enjeux pèsent encore aujourd’hui dans la région.

La période fédérale communiste ne viendra que geler le contentieux qui finira par se déclencher, à la suite du référendum d’indépendance du Karabakh arménien et de heurts ethniques. Pour l’Arménie, fermeture frontalière et blocus turc entérineront un enclavement géographique et politique. Seuls l’Iran et la Russie resteront des partenaires. Avec le Nagorno-Karabakh, on assiste à l’apparition d’un quasi-État[3], enclave ethnopolitique née de la désintégration de l’URSS, possédant le soutien arménien, mais étant non reconnue par la communauté internationale.

Bien que ce quasi-État doive son existence à la persistance des tensions entre son État protecteur (Erevan) et l’État territorialement compétent (Bakou), son avenir ne laisse que peu d’opportunités. Ce territoire devra soit être réintégré ou absorbé. Un élément fait aujourd’hui consensus : les deux États pâtissent de leur opposition – leur proximité géographique et les interdépendances qui en découlent devraient signifier une coopération politique accrue.

 

L’énergie catalyseur des enjeux de pouvoirs

 

Objet géopolitique de premier ordre, l’énergie est à la source des rivalités territoriales. Le passage de la population turque entre 1950 et 2012 de 21,5 à 80 millions a augmenté les besoins agricoles. L’intensification induite par cette croissance nécessite un apport considérable en eau. Cette région constitue un « château d’eau » grâce au Tigre, à l’Euphrate, l’Araxe ou encore la Koura qui sont des fleuves partagés entre États. Ils s’inscrivent dans une géologie complexe, inexorablement structurante des systèmes hydriques.

Les ressources hydrauliques turques sont concentrées à l’Est alors que la population vit plutôt à l’Ouest. Le Tigre et l’Euphrate[4] alimentent la Turquie sud orientale, l’Irak et la Syrie. La Turquie contrôle dorénavant 86 % du débit de l’Euphrate[5] grâce aux aménagements du GAP. L’achèvement du projet du barrage d’Ilisu sur le Tigre prévu pour 2016 l’amputerait de 10 milliards de m³ d’eau, le quart de son débit à son entrée en Irak[6]. Toutefois, la crise d’approvisionnement de 2007 a mis en exergue les carences de la planification hydraulique alors que le pays s’est engagé à fournir de l’eau à Chypre et à Israël. Malgré de faibles ressources en hydrocarbures, la Turquie bénéficie d’un levier certain sur les pays en aval.

 

 

L’agriculture représente encore à ce jour plus de 20 % du PIB arménien. L’Arménie sillonnée de cours d’eau abrite l’immense lac Sevan. Le fleuve Araxe couvre le territoire, traverse la Géorgie et l’Azerbaïdjan pour se jeter dans la Koura. Des affluents de l’Araxe et de la Koura naissent dans le Karabakh. Le débit fort des cours d’eau du Haut-Karabakh assure un approvisionnement en énergie. Le point culminant de Karvachar fournit plus des trois quarts de ressources en eau du Haut-Karabakh[7].

67 % du débit des fleuves de l’Azerbaïdjan proviennent de l’extérieur. La Koura y représente jusqu’à 80 % de l’eau consommée[8]. Le canal allant jusqu’au réservoir de Djeiranbatan alimente l’agglomération de Bakou, où réside le tiers des Azéris. En outre, l’eau de la Koura et de l’Aras est polluée lors du passage en Arménie et en Géorgie. La gestion conjointe des eaux est peu probable au regard des tensions actuelles.

Carrefour naturel entre l’Europe et le bassin Caspien, l’Anatolie constitue une interface Nord-Sud entre Mer Noire et Méditerranée. Le rôle du corridor anatolien questionne la plateforme turque. Le territoire du pays est constitué d’une interface naturelle de transit entre les États orientaux et caucasiens, détenteurs des plus grandes réserves mondiales de ressources fossiles et le marché de consommation européen. La Turquie s’est imposée au fil des constructions d’oléoducs, comme un corridor « est-ouest » privilégié et est devenue, au début des années 1990, une pièce centrale du complexe puzzle des pipelines.

Grâce à l`oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan et celui Kirkouk-Yumurtalik, la Turquie assure environ 4 % du transit du pétrole mondial. À ce flux terrestre, il faut également ajouter les 3 millions de barils quotidiens de pétrole russe et kazakh qui transitent à travers les détroits maritimes turcs depuis le terminal de Novorossisk sur la mer Noire. Cette position est renforcée depuis l’exportation du pétrole « fédéral » du Kurdistan irakien – processus contesté par le gouvernement central irakien. Le complexe pétrochimique de Ceyhan s’affirme de plus en plus comme le véritable hub pétrolier de la Turquie.

 

 

L’ambition de la Turquie n’est pas de rester un simple pays de transit, mais de devenir une plaque tournante gazière, afin de sécuriser et diversifier ses approvisionnements. Le projet Southern Gas Corridor incluant le Trans-Anatolian Natural Gas Pipeline (TANAP), a pour but de diminuer l’influence régionale russe, en renforçant le rôle turc et azéri. La Russie a lancé un projet concurrent au TANAP le South Stream, mais il a été rejeté par les Européens, dont la Bulgarie. Face à cet échec, la Russie a entamé des discussions bilatérales avec la Turquie pour un éventuel Turkish stream répondant aux attentes des acteurs.

L’Azerbaïdjan, qui dispose des ressources d’hydrocarbures estimées à environ 0,9 milliard de mètres cubes[9] souhaite s’affranchir de l’influence russe sur ses ressources et réseaux de transport. Aujourd’hui, la construction du corridor sud-européen, dont le TANAP constitue la partie la plus importante, permet à l’Azerbaïdjan d’exporter son gaz par une ligne directe de plus de 2 500 kilomètres qui débouche directement à l’intérieur de l’Union européenne. Les ressources azéries ne suffissent pas à satisfaire la demande croissante de la Turquie et des pays européens, c’est pourquoi le développement du corridor sud-européen, via la construction du Trans-Caspian Pipeline (TCP) est essentiel. Il devrait relier les gisements turkmènes au réseau de transport azéri en traversant la Caspienne.

Le hub énergétique anatolien doit faire face à des luttes de pouvoirs. Comme le signale la possible création du TANAP, les États sont en concurrence pour la gestion des ressources. Le désaccord entre Azerbaïdjan et Turkménistan autour du Trans-caspian Gas Pipeline, les tumultes concernant l’extraction des réserves off-shore et la vulnérabilité accentuée des pipelines face aux sabotages du PKK, montrent que l’énergie est un facteur déterminant du fait géopolitique de dans cette région.

Mise en perspective d’une redéfinition moins arbitraire des tracés limitrophes

Une remise en cause des frontières, sources de déstabilisation pérenne des relations régionales

 

De nouvelles frontières telles que définies par Ralph Peters auraient plusieurs vertus dans le sud Caucase. Premièrement, elles régleraient l’impact des enclaves arméno-azéries. Ainsi, le Nagorno-Karabakh serait de facto intégré au territoire arménien de même qu’une partie du territoire sous contrôle d’Erevan au sud de la ligne du cessez-le-feu. L’Arménie gagnerait également sur son flanc ouest avec l’intégration plus ou moins partielle du Mont Ararat, lieu hautement symbolique pour la nation arménienne. Au nord comme au sud, les frontières resteraient inchangées. Même si les frontières ne coïncident pas avec la grande Arménie, les frontières du sang auraient le mérite de réduire les effets pervers de l’enclavement tel que le sentiment obsidional. Pourtant elle n’aurait toujours pas une façade maritime sur la Mer Morte comme convenu lors du traité de Sèvres. De son côté, l’Azerbaïdjan obtiendrait une continuité territoriale pour rattacher le Nakhitchevan, en obtenant des territoires jusqu’à la ville de Rasht au détriment de l’Iran.

Pourtant loin de résoudre les tensions ethno politiques, ces possibles tracés frontaliers laissent en suspend de nombreuses questions. L’exclave d’Erevan à Artsvachen et les ancrages azéris en Arménie resteraient dans leur territoire respectif. Ajoutons à cela que toute remise en cause des tracés est conditionnée aux accords de volonté de l’Iran et de la Turquie. Or, la Turquie comme l’Iran pâtiraient d’une quelconque modification de leurs frontières, d’autant que l’un comme l’autre souhaite avoir une influence régionale de premier ordre. L’ambivalence du droit international sur les tracés territoriaux s’ajouterait aux réticences politiques et conduirait à des tensions accrues.

Les interactions profondes entre tracé territorial et contrôle du devenir énergétique

 

La refonte des frontières selon Ralph Peters rebattrait les cartes dans la région en faveur du Kurdistan. Le Kurdistan disposerait d’une grande zone fertile, ancien sol syro-irakien ainsi que le lit du Tigre et de l’Euphrate, faisant de cet État un acteur puissant du Moyen-Orient.

Un redécoupage des frontières permettrait aux Kurdes turcs de jouir de l’autonomie kurde en Irak. En effet, les Kurdes irakiens ont l’opportunité de construire seuls un pipeline d’une capacité quotidienne d’un million de barils. Ce pétrole kurde serait contrôlé par et au profit des populations kurdes. Ces ressources étant transportées vers le hub turc.

En raison des sujets délicats du génocide arménien et du Haut-Karabakh, l’Arménie n’a pas de relations diplomatiques avec la Turquie ni l’Azerbaïdjan. Ainsi elle reste fortement isolée des grands projets énergétiques régionaux. Le pays est dépendant de la Russie à hauteur de 80 % de ses importations. Pourtant, le pays a commencé les négociations avec l’Iran pour la construction d’un pipeline de pétrole similaire à celui de gaz fonctionnant depuis 2007. Une refonte des frontières aurait sans nul doute des conséquences néfastes, car l’Arménie perdrait sa frontière avec l’Iran. Cela rendrait encore plus pressant le besoin d’une coopération entre Erevan et Bakou.

Quasi et proto-États aux sources d’une modification de facto des limites territoriales

 

L’accession de la communauté kurde à l’État est mise en avant par Peters. Dans les configurations actuelles, le Kurdistan irakien du fait de son autonomie est proche d’être un proto-État kurde. Obtenant une façade maritime en Mer Noire, il couperait définitivement l’Anatolie et le Caucase. La création du Kurdistan contribuerait donc à la poursuite de l’enclavement arménien puisqu’Erevan ne profiterait pas du retrait turc. Ces deux États pourraient tout de même faire front communs contre la Turquie. Un bloc pourrait ainsi se former contre Ankara, ce qui aurait pour conséquence une déstabilisation profonde de la région. Pour autant, la logique ethnique de Ralph Peters serait respectée dans le cas kurde, car ceux-ci constituent un bloc homogène au Moyen-Orient.

kurdistan-historique

L’horizon politique de la conciliation semble éloigné et l’activité de l’État Islamique pourrait jouer sur les limites des États. Si la pérennité de son contrôle territorial n’est pas actée, l’avancée rapide de l’État Islamique ces derniers mois a mis sous pression les États frontaliers. Tant la porosité des frontières que l’absence d’une réponse politique acceptée par tous nourrissent l’instabilité régionale. La campagne du groupe qui a mis à nu la frontière sud de la Turquie dans le Nord syrien, pourrait déboucher sur des incursions en territoire turc. Le franchissement des frontières et la lutte ouverte entre Kurdes et Daesh pourraient conduire, à la suite du conflit, à des frictions entre autorités compétentes et combattants peshmergas. Le contrôle d’un territoire politiquement turc, mais faisant partie intégrante du Kurdistan de Sèvres pourrait donner lieu à un nouveau tracé de facto.

Si ces pistes de réflexion restent hypothétiques, elles mettent tout de même en lumière la complexité des enjeux de pouvoirs dans une région où chaque État doit face à un environnement particulièrement instable. Plateau anatolien et Sud Caucase sont des interfaces essentielles au bloc eurasiatique, et la coopération est l’élément central qui permettra une véritable stabilisation de la région.


 

Alexia Tinant, Arthur Bachmann, Milen Zhelev, Quentin Voutier, Stéphane Hamalian

 

[1] MONGRENIER Jean-Sylvestre, « L’État turc, son armée et l’OTAN : ami, allié ou non aligné ? », Hérodote, La Découverte, n° 148, 2013, pp. 47 – 67.

[2] Enclaves sans appartenance clairement établie. NIES Susanne, « Les enclaves : “volcans” éteints ou en activité », Revue internationale et stratégique, Armand Colin/Dunod, n° 49, 2003, pp. 111 – 120.

[3] RYWKIN Michael, « Le phénomène des “quasi-États” », Diogène, PUF, n° 210, 2005, pp. 28 -33.

[4] ŞANVAR BOUCHER NurÁin, Fiche de synthèse, MINEFI-DREE, juillet 2001, p. 1.

[5] MUTIN George, Géopolitique du monde arabe, 3e édition, Carrefour, Ellipses, 2009, p. 113.

[6] LACHKAR Michel, « L’eau, l’autre facteur du conflit syrien », Geopolis, mars 2015 : http://geopolis.francetvinfo.fr/leau-lautre-facteur-du-conflit-syrien-55777.

[7] OHANYAN Karine, “Water complicates Karabakh peace talks”, Institute of War and Peace, 2010 : https://iwpr.net/global-voices/water-complicates-karabakh-peace-talks.

[8] THOREZ Pierre et THOREZ Julien, « Le partage des eaux dans les républiques d’Asie centrale, manifestation des tensions post-soviétiques », Cahiers d’Asie centrale, 13/04/2004, p. 10.

[9] Voir http://www.theoilandgasyear.com.

]]>
/geopolitique/russie-caucase/les-blood-borders-au-moyen-orient-vers-une-solution-miracle-a-la-problematique-des-frontieres-26/feed/ 0
De Brejnev à Barroso : aspects de la crise ukrainienne /geopolitique/de-brejnev-a-barroso-aspects-de-la-crise-ukrainienne/ /geopolitique/de-brejnev-a-barroso-aspects-de-la-crise-ukrainienne/#respond Wed, 05 Feb 2014 14:56:47 +0000 /?p=2199 « Le temps de la souveraineté limitée est révolu. » En réagissant par ces mots au refus ukrainien de signer l’accord d’association et de libre-échange avec l’Union européenne, José Manuel Barroso1 s’inscrit dans une logique de Guerre froide surannée. A Vilnius les 28 et 29 novembre le sommet du Partenariat oriental a rassemblé les chefs d’Etat de l’Union européenne et de six ex-républiques soviétiques en vue de préparer un nouvel élargissement de l’UE. Cette réaction polémique du président de la Commission européenne fait référence à la doctrine Brejnev de limitation de la souveraineté des Etats satellites de l’URSS énoncée en 1968. Peu de temps auparavant, le président du Conseil européen Herman Von Rumpuy évoquait une potentielle violation par Moscou des accords d’Helsinki de 1975 relatifs au respect des souverainetés nationales.2 L’anachronisme de tels propos illustre une perception de la Fédération de Russie comme une puissance qui n’aurait rien renié de son héritage soviétique. Ces réactions décalées pourraient augurer d’un antagonisme nouveau entre Moscou et l’UE, qui semble vouloir lui disputer ses zones d’influence traditionnelles.

L’Ukraine, deuxième pays le plus vaste d’Europe, avec ses 46 millions d’habitants et sa situation stratégique sur la mer Noire est au centre de ces marches orientales que l’Union européenne – et l’OTAN – veulent extraire de l’influence russe conformément à la doctrine Brzezinski3. Avec la « révolution orange » de 2004, les ingérences d’Organisations Non Gouvernementales et de réseaux militants financés par les Etats-Unis ont révélé l’enjeu central de l’Ukraine dans les plans de roll back de la puissance russe. Le sort de l’égérie de cette « révolution », l’ex-Premier ministre Ioulia Timochenko condamné pour abus de pouvoir en 2011, donne lieu aux mêmes ingérences politiques et judiciaires de l’UE, qui demande son extradition en Allemagne.4

L’actuelle crise politique qui secoue l’Ukraine depuis l’échec du sommet de Vilnius soulève la question de la souveraineté pratique des Etats européens confrontés aux pouvoirs étrangers, qu’ils soient supranationaux ou d’Etats voisins. Elle révèle par ces tensions la fragilité d’Etats culturellement hétérogènes au sein d’un même ensemble de civilisation.

La division partisane de l’Ukraine à propos de l’intégration européenne est-elle susceptible d’évoluer vers un dépassement des fractures culturelles ou risque-t-elle d’entrainer un délitement de l’Etat affectant durablement sa souveraineté ?

L’Ukraine est un Etat scindé entre deux principaux espaces historiques (I) et qui peine à trouver sa propre voie entre les tiraillements extérieurs (II).

 

 

I – De la genèse et de la querelle des deux Ukraine

 

Les manifestations autour des centres du pouvoir de la capitale et les violences qui les accompagnent réaniment des tensions historiques (A) ainsi que la contestation d’une opposition disparate (B).

 

A – De la Rus kiévienne au nationalisme ukrainien

 

La Russie et l’Ukraine partagent un même berceau historique sur le Dniepr qui leur vaut l’appellation de « nations sœurs ». Kiev est du IXème au XIIIème siècle la capitale d’un premier Etat russe, la Rus kiévienne.5 En adoptant le christianisme, le prince Vladimir Ier baptise la Rus dans les eaux du Dniepr en 988. Ce vaste Etat formé autour de l’actuelle capitale ukrainienne est proche de la civilisation byzantine et constitue la matrice de la future Russie. La prise de Kiev par les mongolo-tatars en 1240 marque la fin de la Rus kiévienne. Au XIVème siècle, tandis que la Russie blanche (Biélorussie) et l’Ukraine sont libérées par les Lituaniens, les territoires russes plus à l’est demeurent sous la domination mongole. En s’émancipant peu à peu de ce joug, Moscou s’impose comme le centre politique et religieux d’un Etat russe qui se développe à partir du XVIème siècle sous le règne du premier tsar Ivan le Terrible. Devenue impériale en 1721, la Russie s’affirme comme une puissance européenne incontournable et réintègre dans ses frontières les « nations sœurs » dont l’Ukraine et la Biélorussie, et ce dans une continuité jusqu’à la fin de l’URSS.

Cette grande séparation du monde slave, bien que dépassée un temps par l’Empire russe puis l’URSS structure profondément la géopolitique de l’Europe orientale. Elle imprègne même la politique interne des Etats de la région, comme c’est le cas pour l’Ukraine. De cet héritage historique l’Ukraine a gardé une division fondamentale dans sa composition géopolitique. La Galicie à l’ouest, autour de Lviv, a longtemps été territoire polonais ou autrichien et regarde vers l’Occident. Les régions orientales et méridionales, comme le Donbass et la Crimée, demeurent de par leur population très liées à la Russie.

Des conflits du XXème siècle, en particulier des terribles années de 1931-1933, où des millions d’Ukrainiens périrent de l’Holodomor, une grande famine planifiée par Staline, puis de la Seconde Guerre mondiale et du retour de l’occupant soviétique en 1945 est né un fort courant nationaliste ukrainien. Ce nationalisme particulièrement vivace en Galicie, demeure profondément anti-russe.

 

 

B – Les ressorts de la contestation politique actuelle

 

Le pouvoir ukrainien fait face à la plus importante contestation politique depuis la « révolution orange » de 2004, où le second tour de l’élection présidentielle avait été annulé pour fraude devant les manifestations et les pressions étrangères. L’organisation d’un troisième tour avait conduit Viktor Iouchtchenko, ancien Premier ministre et opposant au Président Koutchma, à la présidence face à Viktor Ianoukovitch.

En 2010, le palais présidentiel de Maryinski accueille le candidat malheureux du troisième tour de 2004, élu face à l’ancien Premier ministre Ioulia Timochenko. Le Président Ianoukovitch est un industriel russophone de l’est du pays, dont il défend les intérêts.6 Sa présidence conduit à l’invalidation de la réforme constitutionnelle de 2004, marquant une re-présidentialisation du système politique, et aux condamnations de Ioulia Timochenko et de ses anciens ministres à des peines de prison pour abus de pouvoir dans la signature des accords gaziers avec la Russie en janvier 2009.7 Ces décisions, couplées aux accusations de corruption, provoquent une emobilisation de l’opposition, à nouveau en mouvement depuis l’échec du Partenariat oriental.

La motivation européenne de la contestation ukrainienne s’accommode d’un sentiment anti-russe virulent et largement partagé par une grande partie de la population. Ce motif profond n’est pas à minorer au regard d’une « aspiration européenne » sublimée par les médias occidentaux.8 En effet, la contestation n’a pas d’avantage pour but de réclamer une intégration à marche forcée à l’Union européenne que de demander le départ du Président Ianoukovitch sur fond de revendications nationalistes. Ainsi, dans le ciel de Kiev flottent les couleurs de formations politiques très variées et même antagonistes. Les supporters de Ioulia Timochenko, les manifestants pro-UE libéraux semblent faire cause commune avec le Parti communiste et les nationalistes du mouvement Svoboda. Il semble évident que tous sont loin de souhaiter sacrifier la souveraineté ukrainienne à Bruxelles…

En se penchant sur l’héritage civilisationnel de l’Ukraine, nation-sœur de la Russie, ainsi que sur les souffrances du XXème siècle nouant les deux pays, il apparaît que la controverse relative à l’intégration dans l’UE exprime avant tout une tension interne à l’Etat ukrainien, en proie à des forces d’attraction extérieures, et qui n’a pas encore été dépassé par une identité nationale unificatrice.

 carte élection Viktor Ianoukovitch

Pourcentages obtenus par Viktor Ianoukovtich au deuxième tour de l’élection présidentielle le 7 février 2010.

II – Le dilemme kiévien : une souveraineté à l’épreuve de l’influence étrangère

 

Traditionnellement ancrée dans l’étranger proche de la Russie, l’Ukraine a fait le choix de la fidélité à Moscou (A), au grand dam d’une partie de l’opinion sensible aux sirènes de Bruxelles (B).

 

A – Des nations sœurs apparemment réunies

 

Principal leitmotiv de l’opposition ukrainienne, l’emprise russe sur l’Ukraine est une réalité. La dimension militaire de la coopération entre les deux Etats est essentielle, les côtes de Crimée étant le traditionnel point d’accès de la marine russe sur la mer Noire. Les deux marines coopèrent étroitement dans la région.9 En vertu des accords de Kharkiv du 21 avril 2010, le port de Sébastopol accueille la Flotte russe de la Mer Noire jusqu’en 2042 en contrepartie de tarifs préférentiels sur le gaz.10

Ainsi, les leviers d’influence russe en Ukraine sont principalement économiques. Premier partenaire, la Russie et son Union douanière eurasiatique sont les principaux débouchés des entreprises ukrainiennes. En effet, 35% de leur marché à l’export est russe.11 De plus, ces rapports économiques sont politisés, de nombreuses entreprises vivant des commandes publiques russes.12 La multiplication des fusions russo-ukrainiennes à la suite d’une visite de Vladimir Poutine à Kiev à travers des sociétés à capitaux mixtes dans des domaines stratégiques comme l’aéronautique, les chantiers navals, le nucléaire, l’aérospatiale renforce ces liens.

La fusion des compagnies russe Gazprom et ukrainienne Naftogaz souligne le poids des échanges gaziers entre les deux pays.13 L’Ukraine est en effet le point de passage des gazoducs reliant la Russie et la Caspienne à l’Europe occidentale, constituant un champ de bataille des « guerres du gaz ».

 

B – Une attraction occidentale à nuancer

 

La dépendance à la Russie est dénoncée par l’opposition ukrainienne comme étant une résultante de la collusion de l’oligarchie gravitant autour de Viktor Ianoukovitch et de la domination moscovite, au détriment de ses aspirations européennes.

En refusant de signer l’accord de libre-échange avec l’UE, Viktor Ianoukovitch a soulevé contre lui l’ire de l’opposition. L’Ukraine traverse une crise politique majeure. Des milliers d’Ukrainiens défilent dans les rues de Kiev et maintiennent la pression autour des centres du pouvoir, réclamant la démission du président et la tenue d’élections anticipées. La destruction de la statue de Lénine symbolise un rejet de la Russie comme héritière de l’URSS. Les affrontements avec les forces de sécurité dénotent une opposition frontale avec le gouvernement, qui demeure campé sur ses positions. L’UE promettait pourtant une enveloppe de 610 millions d’euros pour la signature de l’accord…14

Ce camouflet à une UE elle même en crise, bien que préservant les intérêts russes, sauve également l’économie ukrainienne d’un saut dans l’inconnu. Car la présidence, comme les oligarques, servent premièrement leurs intérêts liés à l’industrie ukrainienne. L’application d’un tel accord de libre-échange serait porteurs de risques, dont certains affectent effectivement les Etats membres de l’UE : « une hausse du chômage et de l’émigration de la population active, l’éviction des producteurs ukrainiens du marché national et naturellement la détérioration des relations économiques avec la Russie ».15

 

La décision de Viktor Ianoukovitch apparaît comme le résultat d’un calcul coût-avantage rationnel dans le choix de deux partenaires économiques, que l’opposition semble contester pour des raisons essentiellement idéologiques, soit d’adhésion au modèle de l’UE soit de nationalisme.

 carte population russe en Ukraine

 

Conclusion générale

 

Le crise politique ukrainienne autour de l’intégration européenne fait rejaillir les divisions historiques et culturelles profondes de l’Ukraine et remet en question son intime proximité avec la Russie. Il est piquant de constater que dans les manifestations dites « pro-européennes » les éléments nationalistes et radicaux sont légion et figurent parmi les plus virulents. Malgré le soutien de l’UE, l’hétérogénéité de l’opposition handicape sa crédibilité face à un pouvoir pouvant compter sur les régions russophones et leur poids économique. L’Ukraine a fait le choix de la défense de ses intérêts économiques et dans une autre mesure de la fidélité historique en résistance à l’unipolarité en donnant priorité à l’Union douanière eurasiatique.16 Elle a manifesté sa souveraineté en repoussant les avances d’une UE en crise structurelle et dont le rayonnement pâlissant ne touche plus que quelques Etats qui n’en ont jamais fait l’expérience.

 

Bibliographie

1« Ukraine, l’Europe blâme Poutine », Le Figaro, 29/11/2013. http://www.lefigaro.fr/international/2013/11/29/01003-20131129ARTFIG00508-ukraine-l-europe-blame-poutine.php

2Ibid.

3BRZEZINSKI, Zbigniew, The Grand Chessboard, 1997.

4« Association Ukraine-UE : possible report en raison de l’affaire Timochenko », RIA Novosti, 31/10/2013. http://fr.ria.ru/world/20131031/199684453.html

5M. ROSTOVTZEFF, « Les origines de la Russie kiévienne », in Revue d’études slaves, Tome 2, fascicule 1-2, 1922. pp. 5-18.

6« L’Ukraine en bleu pâle après l’élection présidentielle », Le Monde, 22/02/2010. http://www.lemonde.fr/idees/article/2010/02/22/l-ukraine-en-bleu-pale-apres-l-election-presidentielle-par-piotr-smolar_1309595_3232.html

7http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/pays-zones-geo_833/ukraine_466/presentation-ukraine_1342/index.html

8« A Kiev, le défi des pro-européens », Le Figaro, 01/12/2013 http://www.lefigaro.fr/international/2013/12/01/01003-20131201ARTFIG00062-ukraine-des-milliers-de-pro-europeens-defient-le-pouvoir-a-kiev.php

9« Jour de la Marine : Poutine et Ianoukovitch participent aux festivités », RIA Novosti, 28/07/2013 http://fr.ria.ru/world/20130728/198877867.html

10http://www.robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/0217-l-ukraine-en-proie-a-la-colonisation-economique-russe

11« Les acteurs de la crise ukrainienne », Realpolitik, 05/12/2013

http://www.realpolitik.tv/2013/12/les-acteurs-de-la-crise-ukrainienne/? utm_source=feedburner&utm_medium=feed&utm_campaign=Feed%3A+realpolitiktv+%28Realpolitik.tv+%3E+la+g%C3%A9opolitique+sur+le+net%29

12« L’étreinte de Moscou oppose les deux Ukraine », Le Figaro, 28/11/2013 http://www.lefigaro.fr/international/2013/11/28/01003-20131128ARTFIG00451-l-etreinte-de-moscou-oppose-les-deux-ukraine.php

13Op. Cit, http://www.robert-schuman.eu/fr/questions-d-europe/0217-l-ukraine-en-proie-a-la-colonisation-economique-russe

14« L’Europe refroidie par la niet de Kiev », Le Figaro, 28/11/2013 http://www.lefigaro.fr/international/2013/11/28/01003-20131128ARTFIG00479-l-europe-refroidie-par-le-niet-de-kiev.php

15« Association Ukraine-UE : avantages et risques », RIA Novosti http://fr.ria.ru/infographie/20131203/199933866.html

16« Aymeric Chauprade sur la situation en Ukraine », Realpolitik, 08/12/2013

http://www.realpolitik.tv/2013/12/entretien-accorde-a-nouvel-arbitre-sur-la-situation-en-ukraine/

 

 

]]>
/geopolitique/de-brejnev-a-barroso-aspects-de-la-crise-ukrainienne/feed/ 0
Fiche Pays – Biélorussie /geopolitique/fiche-risques-pays-bielorussie-2/ /geopolitique/fiche-risques-pays-bielorussie-2/#respond Fri, 31 Jan 2014 09:49:07 +0000 /?p=4717 bielorussie

Le Bélarus, ou aussi appelé Biélorussie, est un pays d’Europe orientale ayant pour principaux voisins frontaliers, à l’ouest, la Pologne et, à l’est, la Russie. C’est un pays enclavé ne disposant pas d’accès à la mer.

Le Bélarus est une République présidentielle de 9 577 552 habitants (données de 2011) sur une superficie de 207 600 km2.

La Capitale du pays est Minsk.

Sa densité est l’une des plus faibles du continent avec 46 hab./km2.

C’est un pays laïc (inscrit dans sa constitution de 1994) où les religions principales sont le christianisme orthodoxe (75 %) et le catholicisme (20 %).

Les langues officielles sont le biélorusse et le russe.

La monnaie du pays est le rouble biélorusse (BYR).

L’IDH était en 2012 de 0.756 (65e, classement PNUD), ce qui un niveau élevé. Le taux de fertilité est faible avec 1.5 naissance/femme alors que l’espérance de vie était de 70.3 années. La croissance démographique était en baisse de 0.4 % en 2012 (données Banque Mondiale).

 

Une évaluation du risque politique basé sur :

  • La stabilité du gouvernement et des institutions

Le pays est présidé par Alexandre Loukachenko depuis 1994 malgré les critiques du Conseil de l’Europe et de l’OSCE qui contestent le déroulement des élections. La majorité présidentielle s’appuie notamment sur le Parti communiste de Biélorussie. Il y a une grande stabilité du gouvernement et des institutions du fait de la personnalité du Président Alexandre Loukachenko qui gère d’une main de fer son pays. Ce dernier est qualifié par ses opposants d’autoritaire et contre la démocratie. On constate néanmoins que l’opposition est faible et peu audible auprès de la population.

 

  • Les conditions socio-économiques

La Biélorussie a une économie qui est encore qualifiée de transition du fait de son héritage de l’ex-bloc soviétique (économie fortement administrée). Néanmoins, c’est un pays qui a adopté après son indépendance en 1991 des réformes structurelles ambitieuses qui peuvent expliquer en partie aujourd’hui un taux de croissance positive. Les conditions de vie de la population se sont améliorées grâce notamment aux contrats signés avec la Russie qui lui permet de s’approvisionner en énergie à des tarifs très avantageux.

 

  • Les conflits internes

Le pouvoir en place fait face de manière régulière à des actions très médiatisées à l’étranger menées par l’opposition. Ces opposants réclament une transition démocratique et le départ du Président Alexandre Loukachenko, car ils désignent son régime comme la «dernière dictature d’Europe». Néanmoins, il faut noter que l’opposition au pouvoir en place n’est pas seulement menée par les opposants politiques, mais également par une partie de la société civile (associations prodémocratie).

 

  • Les conflits externes et pays voisins entrainant un risque potentiel

La Biélorussie est depuis 1991 et la chute de l’URSS tiraillée entre le monde occidental (Union Européenne et les États-Unis) et la Russie qui est un pays frontalier. Ces deux espaces n’ont de cesse d’essayer d’influencer/de rallier les autorités biélorusses à leur cause. Les aspects géopolitiques et géostratégiques sont très importants dans cette région du monde. Cette rivalité explique les tensions persistantes dans le pays. En effet, l’opposition au régime en place s’appuie sur des relais à l’étranger (les réfugiés politiques notamment) financés par les États-Unis principalement. Il existe à Vilnus en Lituanie, des camps de formation informatique créés pour les opposants qui ont pour but de former à l’organisation de l’action politique via internet et les réseaux sociaux. On peut souligner que malgré les pressions du monde occidental, la Biélorussie apparaît de plus en plus isolée et dépendante de la Russie. Cette dépendance est principalement énergétique puisque le pays s’approvisionne en pétrole et gaz exclusivement en Russie. De plus, les sanctions économiques imposées par l’Union européenne et les États-Unis renforcent la détermination du Président Loukachenko de se rapprocher de Moscou.

 

  • Le niveau de corruption

En 2012, la Biélorussie était au 123e rang sur 176 pays au niveau de la perception de la corruption. Cette évaluation réalisée par l’ONG de lutte contre la corruption Transparency International met le pays au même niveau que des pays africains tels que la Mauritanie ou le Mozambique.

Une évaluation des risques économiques et financiers basé sur :

  • Le PIB par habitant

Le PIB par habitant était en 2011 de 6 356 dollars par an (données FMI). Selon les prévisions du FMI, le PIB par habitant sera de 7 414 dollars en 2013.

 

  • Le taux de croissance du PIB

Le taux de croissance a fortement ralenti en 2012 après plusieurs années de fortes hausses (7.6 % en 2010 et 5.3 % en 2011). Il était de 1.5 % en 2012 à cause des effets de la contraction économique dans la zone euro, mais aussi d’une croissance en baisse en Russie. Cependant, d’après le FMI, la croissance devrait repartir en 2013 avec une prévision de croissance de 2.1 % grâce à une augmentation de la consommation privée encouragée par des hausses de salaire et une reprise de l’investissement.

 

  • Le taux d’inflation annuel

L’inflation dans le pays est très élevée et a fortement augmenté depuis 2010. En effet, le taux d’inflation était de 22 % en 2012 alors qu’il n’était que de 7.7 % en 2010. Cette inflation s’explique notamment par la hausse des tarifs administrés (électricité) et des prix des biens alimentaires importés de l’étranger. Cette tendance semble néanmoins s’inverser puisque les prévisions pour 2013 font état d’un taux d’inflation de 17.5 %. L’inflation en Biélorussie est très importante au regard de celui de l’Union européenne qui était en 2012 de 2.3 %.

 

  • Le solde budgétaire (en % du PIB)

Le solde budgétaire du pays était de -1 % en 2012 c’est-à-dire que les recettes de l’État (hors remboursement d’emprunt) étaient inférieures à ses dépenses (hors emprunt). Cette tendance devrait se confirmer en 2013 avec une prévision de -0.8 % (en léger recul). Il est intéressant de constater qu’en 2011, le solde budgétaire était positif de 3.1 %.

 

  • Le solde courant (en % du PIB)

Le solde courant était en 2012 également négatif avec -6.1 %. Néanmoins, on peut noter qu’il a fortement diminué par rapport à 2010 et 2011 (respectivement -15% et -10.4 %). Ce déficit s’explique par l’importation importante de la Biélorussie du pétrole et du gaz russe dont les prix augmentent de manière importante (12 % en 2013).

 

  • La dette externe (en % du PIB)

La dette externe de la Biélorussie était de 12.1 milliards de dollars au 1er septembre 2012 soit une augmentation de près de 290 millions de dollars en un an. Cette augmentation est principalement due à des emprunts accordés par la Banque internationale pour l’eurasiatique (CEEA) et par des banques chinoises.

 

  • Le solde commercial

Le solde commercial était en déficit de 413 millions de dollars en 2012.

 

  • La stabilité du taux de change

Le rouble biélorusse connaît depuis le début de la crise en 2008 de très importantes fluctuations. En effet, la monnaie a ainsi perdu plus de 50% dans sa valeur sur le marché monétaire officiel. Sur le marché noir monétaire, qui est apparu avec le début de la crise, ces chiffres montent jusqu’à 70-80%.

Une évaluation des risques géographiques et environnementaux :

  • Les risques sismiques et géologiques

Les risques sismiques et géologiques sont très faibles.

 

  • Les risques sanitaires et épidémiques

Les risques sanitaires et épidémiques sont faibles du fait de l’existence d’un système de protection sociale et de professionnels qualifiés.

Une évaluation  du Hard power du pays :

  • Pouvoir militaire réel

Les forces armées biélorusses avaient un effectif de 79 800 personnels actifs et 289 500 réservistes en 2002. L’État a consacré, en 2012, un budget de 797 millions de dollars pour les dépenses militaires soit environ 1.4 % du PIB. Le matériel biélorusse est ancien dont certains armements datent de l’ère soviétique. Le pays étant enclavé, c’est à dire ne disposant pas d’accès à la mer, ne possède pas de marine. Le pays dispose que d’une armée de terre et d’une armée de l’air. Le pouvoir militaire réel est faible puisque les différents accords militaires signés (système de défense antiaérienne est intégré dans le réseau de défense russe) avec la Russie mettent de fait la Biélorussie dans une situation de dépendance.

 

  • Poids du pays dans les institutions internationales

Le poids du pays dans les institutions internationales est très faible à cause notamment de la série de sanctions décidée en 2011 par la communauté internationale qui a isolé encore plus le pays. En effet, pour protester contre les arrestations d’opposants au régime en place, la communauté internationale a décidé outre le gel d’importants avoirs financiers et économiques, l’interdiction de visa européen et nord-américain pour le Président Loukachenko et 157 de ses plus proches collaborateurs. Ces interdictions de visa empêchent la Biélorussie d’être représentée dans de nombreuses institutions internationales. L’Union européenne a aussi interrompu tout dialogue avec ce pays et l’OSCE a quitté le pays en mars 2011.

 

  • Technologie et innovation

D’après des données du CNUCED, la Biélorussie consacre peu d’efforts financiers en termes de dépenses en recherche et développement (R&D). En 2009, ces dépenses représentaient seulement 0.60 % du PIB.

Une évaluation  du soft power du pays :

  • Reconnaissance médiatique et culturelle

La Biélorussie s’illustre sur le terrain sportif notamment dans des sports tels que le handball et l’athlétisme (lancer de marteau et du poids). Ces performances permettent au pays d’avoir une visibilité internationale importante lors des compétitions internationales. La Biélorussie était considérée encore peu comme une nation du tennis avec des joueurs comme Victoria Azarenka et Max Mirnyi.
Vecteurs d’influences (cinéma, médias, diasporas…)

La diaspora biélorusse est concentrée principalement en Russie et en Pologne. D’après les chiffres du Ministère des affaires étrangères français, la communauté biélorusse est estimée à 350 personnes en France. Le pays est peu présent sur la scène cinématographique et littéraire.

 

  • ONG

Les ONG sont peu nombreuses dans le pays et étroitement surveillées par les autorités politiques. Ce sont surtout des mouvements citoyens plus ou moins organisés qui s’opposent au régime en place et demandent la mise en place d’une réelle démocratie.

Conclusion générale

La Biélorussie est un pays au centre d’enjeux internationaux importants opposant, d’une part, les États-Unis et l’Union européenne et, d’autre part, la Russie. La personnalité et le charisme du Président Alexandre Loukachenka expliquent grandement sa longévité au pouvoir et le statu quo dans le pays. LA Biélorussie a été, comme la plupart des pays dans le monde, impacté par la crise de 2008, ce qui l’a poussé à se rapprocher de Moscou en signant de nombreux accords économiques et stratégiques qui lui permettent de bénéficier notamment de tarifs de l’énergie très préférentiels. Les sanctions de la communauté internationale suite aux répressions de l’opposition ont eu pour conséquence de renforcer les liens entre la Russie et la Biélorussie. Cette évolution des relations rendant la Biélorussie toujours plus dépendante de la Russie.

 

Forces/opportunités:

Main d’œuvre qualifiée et infrastructures de qualité
Taux de pauvreté le plus bas parmi les pays de la CEI
Position stratégique entre l’Europe et la Russie
Croissance économique qui reprend

Faiblesses/menaces:

Economie très administrée par l’Etat (plus de 70 % du PIB)
Faible avancée des réformes structurelles
Déficits courants structurellement élevés
Inflation à un niveau préoccupant
Risque de crise de liquidité (fortes fluctuations du taux de change)
Forte dépendance économique et financière à l’égard de la Russie (30% des exportations, 60% des importations)
Corruption élevée

 

BIBLIOGRAPHIE

http://www.coface.ma/Etudes-economiques/Bielorussie
http://www.lemoci.com/011-47244-Presentation-generale-Bielorussie.html
http://data.lesechos.fr/pays/bielorussie.html
http://www.diplomatie.gouv.fr/fr/dossiers-pays/bielorussie/presentation-de-la-bielorussie/

]]>
/geopolitique/fiche-risques-pays-bielorussie-2/feed/ 0
Une Ecosse indépendante doit posséder ses propres sources d’énergie /geopolitique/une-ecosse-independante-doit-posseder-ses-propres-sources-denergie/ /geopolitique/une-ecosse-independante-doit-posseder-ses-propres-sources-denergie/#respond Mon, 27 Jan 2014 14:50:02 +0000 /?p=2285 Kevin McKenna – The Guardian – 26/10/2013

Présentation du journal :

The Guardian, fondé en 1821, est un quotidien d’information britannique, faisant partie de la presse dite de « qualité » et dont la ligne éditoriale est de centre gauche. En effet, il fut pendant longtemps présenté comme le journal de référence de l’intelligentsia, des enseignants et des syndicalistes, surtout dans Londres, au point que lorsque les conservateurs veulent qualifier quelqu’un d’« intellectuel de gauche », ils disent que c’est un « lecteur du Guardian ».

Depuis sa création, les différents propriétaires qui se sont succédés à la tête du Guardian ont tous voulu respecter les principes dictés par John Edward Taylor, le fondateur, et pouvant être résumé par la phrase suivante : « Comment is free, but facts are sacred … The voice of opponents no less than that of friends has a right to be heard ». Ce qui signifie, les commentaires sont libres, mais les faits sont sacrés … La voix des opposants, non moins que celle des amis, a le droit d’être entendue.

Encore aujourd’hui, le Guardian se caractérise principalement par une volonté de liberté et d’indépendance, au risque de heurter son lectorat. Le tirage du quotidien britannique se monte à 400 000 exemplaires.

De plus, la version hebdomadaire du Guardian diffuse une version anglophone du mensuel français Le Monde diplomatique, et ce depuis 1999.

Présentation de l’article original : contexte et auteur

L’article intitulé « An independent Scotland must own its energy sources » renvoie à la fermeture annoncée de l’usine pétrochimique de Grangemouth en Écosse par le groupe suisse Ineos. M. Ratcliffe, entrepreneur milliardaire et fondateur du groupe Ineos, avait surpris syndicats et opinion en mettant fin à l’exploitation de l’usine, employant 800 personnes.

Une fermeture jugée « catastrophique » d’après le premier ministre écossais, Alex Salmond. En effet, le site, qui comprend également une raffinerie de pétrole fournissant 80% des besoins en fioul de l’Écosse, est l’une des plus grandes en son genre en Europe.

Ineos, qui demandait à ses salariés d’accepter un nouvel accord social en échange du maintien de l’activité sur le site, va toucher 800 salariés travaillant dans le complexe pétrochimique avec cette fermeture. Cet accord prévoyait notamment un gel des salaires de 2014 à 2016, un report des primes jusqu’en 2016 ainsi qu’une baisse du niveau des pensions. Le groupe avait été accusé de jouer l’avenir du site à la roulette russe.

Aujourd’hui, le complexe de Grangemouth est trop important pour l’économie écossaise pour être fermé en raison du caprice d’un milliardaire.

C’est dans ce contexte d’incertitudes et de tensions  entre un milliardaire capricieux, M. Ratcliffe, et les partisans écossais que  Kevin McKenna, correspondant en Écosse pour le journal britannique The Guardian, a rédigé cet article publié le 26/10/2013.

Traduction :

Dans une des hautes chambres de St Andrew’s House, un escadron d’élite de fonctionnaires fait ce qu’ils font de mieux : effacer les derniers vestiges négatifs persistants du texte de l’indépendance. Il ne reste plus que 30 jours avant que le SNP (Parti National Ecossais) ne publie le document qu’il espère influencera la campagne du référendum vers un vote favorable, mais il y a surement encore  de la place pour un autre chapitre en rapport avec les événements de Grangemouth.

Celui-ci n’aurait pas besoin d’être très long et aurait simplement pour titre : la Renationalisation ». Le sous-titre indiquerait quelque chose comme: « Pourquoi, dans une Écosse indépendante, toutes les sources de chaleur, lumière et d’énergie doivent toujours rester la propriété du peuple Écossais ».

Le drame, de la semaine dernière, de la raffinerie de pétrole de Grangemouth ressemble aux leçons de l’histoire en marche où les acteurs font renaitre des personnages et des drames anciens et rendent ainsi un sujet ennuyeux plus vif et intéressant.

Regarder les enfants, voilà comment fonctionnaient les relations industrielles au 18e siècle. D’abord, les patrons s’en prennent à un fauteur de troubles, qu’ils accusent de propager des idées de sédition parmi les ouvriers et ils trouvent la preuve dans sa boîte à outils. Alors les ouvriers se liguent pour protéger l’ouvrier et sa famille, en menaçant de retirer leur force de travail.

Ensuite le propriétaire multimilliardaire, M. Rat, ferme l’usine et dit aux ouvriers qu’ils doivent perdre toutes les primes pour lesquels ils ont travaillé, l’argent qu’ils ont économisé pour leurs retraites sinon il supprimera leurs emplois. Alors les politiciens locaux et les ouvriers s’inclinent en avançant qu’ils n’ont pas eu l’intention de l’offenser et qu’ils accepteront gaiement toutes ses demandes s’il rouvre l’usine. Celui-ci déclare dédaigneusement qu’il y pensera alors qu’une lueur malfaisante habite ses yeux au moment où son pouce se lève et qu’il rassemble 130M£ provenant de fonds publics. Ainsi tous les autres patrons jettent leurs chapeaux en l’air et portent un toast à M. Rat, car il leur a montré comment négocier à sens unique avec des ouvriers vindicatifs.

La seule fin heureuse pour ce conte, même si M. Ratcliffe a vraiment voulu accorder à Grangemouth un sursis d’exécution, serait que, dans une Écosse indépendante, l’usine soit nationalisée.

À présent, nous ne savons pas vraiment combien Grangemouth perd chaque année parce qu’Ineos lui-même, ayant fourni plusieurs chiffres différents, ne semble pas savoir. Certains employés séniors d’Ineos prétendent même que Grangemouth est rentable. En effet John Swinney, le secrétaire financier du gouvernement écossais, et Alistair Carmichael, du ministère des Affaires écossaises à Westminster, ont prétendu que Grangemouth avait « un avenir brillant ».

Ce qui est clair est que l’on a laissé le raffinage et à la distribution d’une part significative de la provision pétrolière de l’Écosse devenir le jouet d’un seul individu. La menace d’éliminer Grangemouth et plusieurs milliers d’emplois peut être levée pour cette fois, cependant elle ne partira pas et restera au lieu de cela jusqu’à ce que les forces du marché ne jugent pas nécessaire de la remettre en jeu de nouveau. L’usine est l’esclave d’un capitalisme particulièrement toxique et sans entrave. Ceci met en danger le concept de durabilité graduelle, soit le cas où le travail d’une main-d’œuvre entretient l’usine et la population locale.

Le mot « nationalisation » a été déformé en quelque chose de laid par les forces de droite de ce pays, qui incluent désormais le Parti travailliste britannique et son projet écossais équivalent. Il véhicule l’image de patrons de syndicat militant et prenant en otage les gouvernements avec des grèves infinies dans le but d’obtenir d’énormes augmentations de salaire.

Diamétralement opposée à la Nationalisation – la vente en gros, privatisation du libre échange – a été, ne l’oublions pas, catastrophiques pour la majorité des habitants dans ce pays. Dennis Healey a initié le cycle de privatisation en 1977, quand le gouvernement travailliste minoritaire a bradé des actions de BP après que le Fonds Monétaire International ait mis la Grande-Bretagne face à ses problèmes de déficit. Quand Margaret Thatcher est arrivée au pouvoir deux ans plus tard, Healey, son allié inconscient, avait fait le sale travail d’adoucissement des Britanniques ; après quoi elle s’embarqua dans une orgie de privatisation pour équilibrer les déficits budgétaires. Au même moment elle a commencé secrètement à siphonner les réserves de pétrole de la mer du Nord afin de rembourser la dette nationale. Ainsi, elle a pu revendiquer les lauriers d’un miracle économique qui aura duré environ 20 ans et aura rendu un groupe de conservateurs riches, très riches. Un certain miracle.

Des atouts nationaux comme l’acier et le charbon ont aussi été sacrifiés sur le compte d’une épouvantable absence de leadership stratégique au sein du parti travailliste britannique et du mouvement syndical britannique. On nous faisait croire que le Roi Charbon était vieux, gris et endormi et que l’Acier britannique était contaminé. Le maintien de ces atouts nationaux dans la propriété publique aurait permis au pays d’avoir une estimation à plus long terme de leur durabilité dans le marché mondial. La Nation aurait pu profiter des augmentations futures des prix de ces marchandises, plutôt que de  les laisser, elles et les communautés sur lesquelles elles reposaient, se faire dévorer par l’avidité du Commerçant et de ses acolytes.

Mme Thatcher a en effet réellement réparé l’économie – mais seulement pour les plus riches en Grande-Bretagne. On a économiquement nettoyé des centaines de milliers de gens ordinaires, des douzaines de communautés et plusieurs industries prospères pour faire que cela arrive. Le Charbon aide toujours à faire fonctionner notre monde moderne qui est toujours inondé de bateaux, tant paisibles que belliqueux. Très peu de ceci est britannique parce que la Nation s’est fait vendre un mensonge.

Alex Salmond nous a promis qu’une Écosse indépendante renationalisera le Courrier Royal, un autre atout national rentable vendu au profit de Torries avide. Il doit aussi promettre qu’une Écosse indépendante garantira la nationalisation de toutes nos sources d’énergie. Le seul gagnant a été M. Ratcliffe. Il a réussi à faire payer tant Westminster que Holyrood pour son yacht à 130M£. Je crois d’ailleurs qu’il offrira à messieurs Cameron et Salmond une semaine gratuite l’été prochain. En attendant, faites attention aux hommes très riches, qui possèdent des yachts aux armatures de chêne, qui vous prédisent le pire et notamment que cette année Noël a été annulé. Creusez plus profond si vous voulez la vérité.

Commentaire : 

Appelé à s’exprimer devant le Parlement, le ministre de l’Énergie britannique du gouvernement Cameron, Edward Davey, a assuré que le gouvernement était attristé par la décision d’Ineos et a jugé regrettable que l’entreprise et les syndicats ne soient pas parvenus à un accord juste et équitable. Le ministre a donc appelé à la poursuite du dialogue et a proposé l’aide du gouvernement britannique, en insistant sur le fait qu’il souhaite que l’usine reste ouverte.

M. Davey a assuré qu’il travaillait, avec l’ensemble du gouvernement écossais, afin que carburants et fioul de chauffage soient acheminés en Écosse.

Cependant, regrettant une annonce très décevante, le premier ministre écossais, Alex Salmond, a souligné que son gouvernement allait examiner l’option d’une vente de façon urgente. Ainsi, le gouvernement écossais croit fermement que le site a un avenir et va travailler avec le gouvernement britannique et toutes les parties concernées afin de trouver une solution qui soutiennent les salariés touchés et l’ensemble de l’économie écossaise.

L’heure est encore aux négociations du côté de Grangemouth, où les syndicats devraient faire d’importantes concessions financières, afin d’éviter la fermeture définitive de l’usine.

De plus, Ineos se prépare à exploiter, d’ici 2015, de l’éthane issu du gaz de schiste sur le site de Grangemouth en fermant définitivement des unités sur son complexe écossais. De quoi soulever la colère des écologistes à présent

 

Maxime Achard

Article original :

http://www.theguardian.com/commentisfree/2013/oct/26/independent-scotland-must-own-energy

]]> /geopolitique/une-ecosse-independante-doit-posseder-ses-propres-sources-denergie/feed/ 0 A qui appartient l’Arctique ? /geopolitique/arctique/a-qui-appartient-larctique/ /geopolitique/arctique/a-qui-appartient-larctique/#comments Tue, 26 Nov 2013 15:57:53 +0000 /?p=961 Introduction

 

On attribue au cercle polaire arctique de nombreuses expressions comme « le soleil du minuit » ou « la nuit polaire ». Cela signifie que pendant les solstices il fait jour ou nuit pendant 24 heures. Il est difficile de la délimiter, mais pendant un siècle la question de l’appartenance de l’Arctique ne s’était pas posée puisqu’il était envahi par les glaces. Aujourd’hui c’est donc plus d’un million de kilomètres carrés qui n’est pas légalement attribué (un peu moins du double de la France : 674 108 km²). Ces dernières années, le réchauffement climatique de la planète a entrainé une forte fonte des glaces au pôle Nord. Cela permet d’avoir un nouvel accès à de nombreuses routes maritimes et de nouvelles ressources en pétrole. Selon les calculs du United States Geological Survey (Institut d’études géologiques des États-Unis), le plateau arctique pourrait cacher plus d’un quart des réserves mondiales de pétrole et de gaz qui n’ont pas encore été découvertes.

Ces changements climatiques attirent toutes les convoitises internationales. Il faut donc s’attendre à des changements dans les relations entre les pays disposant d’un accès à l’arctique, à une nouvelle répartition des frontières et du plateau continentale.

En effet, le 1er juillet 1909, l’explorateur canadien Joseph-Elzear Bernier prit possession de l’Arctique au nom du Canada, dans l’indifférence générale. Aujourd’hui comme l’arctique devient un territoire en mouvement qui est en changement constant dut au réchauffement climatique et la fonte des glaces, beaucoup plus de pays s’y intéressent et ils veulent tous leurs parts du gâteau. Avec cette fonte des glaces de nouveaux horizons semblent apparaitre, et peut-être que ce territoire peu devenir un nouvel eldorado humain pour le futur.

Mais pourquoi cette zone anciennement gelé, que dans la conscience commune on attribut seulement aux ours polaires, attire tant l’attention de grandes puissances?

Quels sont les enjeux de l’arctique ? A qui appartient l’arctique ?

Nous verrons dans un premier temps les acteurs présents au pôle Nord. Dans un second temps nous étudierons les causes du conflit, puis nous émettrons une hypothèse du dénouement.

 

 I.                   Les acteurs dans l’arctique

A)    Les pays

Il y a  un intérêt direct dans le cercle Arctique. En effet, il existe 8 prétendants qui désirent avoir un territoire Arctique : Les États-Unis, le Canada, la Russie, le Danemark, la Norvège, l’Islande, la Suède et la Finlande.

Ces huit pays font partis du Conseil Arctique qui comprend aussi les représentants des populations indigènes de la région. Ce conseil est une des plus importantes organisations intergouvernementales dans la région, devenu une instance de décision avec un secrétariat et un budget permanent. Il a été formé en 1996, les discussions concernent principalement le développement durable et la protection de l’environnement dans la région.

Les autochtones et les populations indigènes

Il y a deux millions d’habitants autour de la banquise Arctique. En effet, les hommes, les plantes et les animaux vivent toujours sur ces terres malgré la rudesse du climat. Ces personnes vivent en permanence au-delà du cercle polaire, où la présence humaine remonte à la préhistoire.

Le Canada

Dès les années 1950, le canada avait proclamé sa souveraineté sur le pôle Nord. Cette requête pourrait être satisfaite si dans les cent ans à venir à compter de cette date, aucun pays n’arrivait à prouver qu’il est le propriétaire du fond de l’océan Glacial Arctique. C’est donc le Canada qui a provoqué cette « course au Nord ».

Suite au passage controversé du brise-glace américain CGS Polar Sea en 1984 en territoire canadien, un décret fut proclamé, fixant des « lignes de base droites » autour de l’archipel arctique. Celui-ci prit effet le 1er janvier 1986 et décréta que les eaux à l’intérieur de ce tracé devinrent  une partie intégrante de la mer intérieure canadienne. Toujours selon cette Convention, un État côtier détient un contrôle exclusif et absolu sur ses eaux intérieures.

Cependant, la Russie semble remettre en question la souveraineté canadienne sur ces eaux. Elle tente en effet de prouver que la dorsale de Lomonosov, une chaine de montagne sous-marine de 200 kilomètres, est l’extension du territoire Russe. En droit maritime international, faire preuve de cette affirmation permettrait à la Russie de faire valoir ses droits sur un territoire sous-marin allant au-delà des 200 miles marins reconnues normalement.

Il existe également un litige entre le Canada et le Danemark qui tentent de prouver respectivement leur appartenance à la continuité de l’île d’Ellesmere et du Groenland pour établir la délimitation latérale les séparant. De plus, en mer de Beaufort il existe une opposition entre le Canada et les États-Unis.

Enfin, en 2009, le gouvernement prévoit d’investir 1,9 milliard de dollars canadiens dans cette région pour doper l’économie de l’Arctique.

Les États-Unis

Les États-Unis se sentent concerné dans ces « courses à l’arctique » car l’Alaska touche le cercle polaire arctique. De plus, l’Arctique présente un intérêt économique et pétrolier. En effet, c’est une région riche en ressources naturelles et elle permet d’avoir des lignes maritimes de communication entre les océans Pacifiques et Atlantique.

C’est depuis l’installation du Drapeau Russe au pôle Nord par l’expédition Russe en eaux profondes en 2007 que la directive de Georges W. Bush fût elle aussi en 2007 pour l’élaboration d’une stratégie en Arctique des États-Unis.

La politique des États-Unis en Arctique vise la protection environnementale, le développement durable. Les États-Unis cherchent à promouvoir la viabilité et le bien-être socio-économique des communautés de l’Arctique en soutenant la recherche scientifique et la coopération internationale.

Ils ont consacré un site web : « National Oceanic and Atmospheric Administration » (NOOA) qui se consacre aux questions reliées à l’Arctique.

La Russie

En 2007,  des explorateurs ont planté un drapeau russe au fond de l’océan Arctique, à plus de 4 000 mètres sous le pôle Nord, une mission symbolisant les revendications territoriales de Moscou. Puis la publication en 2009 de la nouvelle stratégie Russe de la sécurité nationale jusqu’en 2020. Ce « chapitre arctique » de la stratégie Russe explique que l’évaluation stratégique du rôle et de la place de la Russie dans le monde et des menaces éventuelles, où il est dit qu’à l’avenir les conflits pourraient survenir près des frontières russes en raison des ressources de matière premières. Et que le règlement de ces conflits n’excluait pas le recours à la force militaire à l’Occident, beaucoup ont été choqués.

La Russie revendique la dorsale de Lomonossov, qui est une chaine de montagne sous-marine qui s’étend du Groenland à la Sibérie. Cependant, le Groenland et le Canada affirment que cette dorsale est le prolongement naturel de leurs plateaux respectifs.

Enfin, le gouvernement russe a adopté un programme de nettoyage de l’Arctique qui coûtera 140 millions de dollars d’ici 2014.

La Norvège

La Norvège projette d’ouvrir 86 blocs offshores à l’exploration pétrolière dans l’Arctique qui est la nouvelle terre promise des compagnies pétrolières. En effet, la Norvège souhaite ouvrir 72 blocs en mer de Barents et 14 autres en mer de Norvège, intégralement ou partiellement situé au Nord du cercle Polaire arctique.

Cet engouement pour l’arctique s’est fait à la suite d’une découverte par le groupe norvégien Statoil, de deux gros gisements pétroliers jumeaux, Skrugard et Havis, susceptibles de contenir entre 400 et 600 millions de barils équivalent-pétrole.

Il existe un litige opposant la Norvège et la Russie aux îles Spitzberg.

Le Danemark

En août 2012, une équipe d’une vingtaine de chercheurs danois est partie à destination du Pôle Nord, à bord du brise-glace suédois Oden. Ils ont pour but de prouver que 155 000 kilomètres carrés du fond de l’océan Glacial arctique font partie du plateau continental groenlandais et doivent donc être intégrés au Royaume, qui comprend, le Groenland et les Iles Féroé.

Le Danemark revendique donc la dorsale de Lomonosov et le bassin d’Amundsen à l’est du Pôle Nord, tout comme la Russie. Lors de cette expédition, ils devaient donc relever des données qui permettraient de revendiquer auprès de l’ONU en 2014 cette partie du fond de l’océan.

La Finlande

Elle ne possède pas de côtes maritimes arctiques, tout comme la Suède.

L’Islande

La Russie et l’Islande ont signé en septembre 2011, une déclaration de coopération en Arctique. Les deux pays ont en effet étudié des projets à réaliser dans le cadre du Conseil Arctique,  une politique qui fixe la déclaration de coopération signé entre eux. Ils veulent que le Conseil intensifie ses activités et que les moyens mis en place soient modernisés.

De plus en 2012, la Chine souhaite également signer des traités avec l’Islande (celle-ci faisant partis du Conseil Arctique et pas la Chine).

La Suède

La Suède souhaite la coopération militaire avec la Russie.

La collaboration franco-suédoise dans le domaine polaire est en train de se développer. Le service scientifique de l’ambassade de France a organisé une école d’été franco-suédoise interdisciplinaire pour les deux instituts polaires en juin 2010 sur le thème des environnements subpolaire suivie d’une conférence à destination d’un public majoritairement scientifique sur l’Union européenne et l’Arctique en mai 2011.

La Chine et la France

La Chine souhaite une place au Conseil de l’Arctique. En effet, depuis la découverte de ressources d’hydrocarbures, la région Arctique suscite un regain d’intérêt de la part de nombreuses nations. En particulier la Chine, qui aimerait à terme siéger au Conseil de l’Arctique, et y devenir un membre influent.

A cause de la hausse des températures qui fait fondre les calottes glaciaires et qui permet de découvrir des ressources jusque-là inaccessibles, et de nouvelles routes maritimes, l’Arctique attire donc aussi l’attention de la deuxième puissance économique : la Chine.

La France quant à elle, se mobilise sur un double front : celui de la préservation environnementale du Grand Nord d’un côté, et celui, plus prévoyant, de la préparation énergétique, commerciale et militaire à la disparition du continent. La France détient un statut d’observateur permanent au Conseil de l’Arctique depuis les années 2000 (celui-ci très convoité par la Chine).

L’implication française c’est accéléré en 2009, lorsque Michel Rocard (ancien premier ministre socialiste) fût désigné  comme ambassadeur des pôles Arctique et Antarctique.

 

B)    Les sociétés du secteur de l’énergie

Les groupes pétroliers qui vont jouer un rôle dans la conquête de l’Arctique sont             les norvégiens Statoïl et Norsk Hydro, les russes Gazprom et Rosneft ainsi que les anglo-saxons, BP, Shell et surtout Exxon Mobil.

Norsk Hydro est un groupe énergétique norvégien, également présent dans l’aluminium et anciennement dans les hydrocarbures.

Statoil a une installation, The Snøhvit field, qui permet par un gazoduc de 143 kilomètres de long, d’aller chercher le gaz, à Melkøya. Puis le gaz est traité avant d’être refroidi sous forme liquide et expédié sur des navires spéciaux aux clients du monde entier.

Rosneft est une société d’État russe spécialisée dans l’extraction, la transformation et la distribution de pétrole. C’est la première entreprise pétrolière du monde, le deuxième plus grand producteur de pétrole russe. Rosneft opère également des entreprises maritimes de transport et de pipelines.

Gazprom est le leader russe du gaz. Les principaux secteurs d’activité de Gazprom sont l’exploration géologique, la production, le transport, le stockage, la transformation et la vente de gaz, de condensat de gaz.

Du coté Anglo-saxon Exxon Mobil est le principal acteur qui est le plus grand producteur de gaz et de pétrole  non gouvernementale. La société BP est une compagnie britannique de recherche, d’extraction, de raffinage et de vente de pétrole, tout comme Shell.

Tous ces groupes qui veulent conquérir l’Arctique se livrent une bataille technologique et forment des accords pour unir leurs forces. Notamment Gazprom et Rosneft qui ont conclu un accord depuis 2006 pour leur expansion, ce qui permettra d’avoir un avantage sur la conquête des ressources pétrolières et gazières de l’Arctique. . En juin 2012, Shell a annoncé qu’il forerait, après l’autorisation des États-Unis.

La principale lutte se fait sur les moyens d’extraction de matière et d’accessibilité. Pour cela les gros groupes pétroliers investissent dans des navires brises glaces ou des moyen d’extraction off-shore ou encore des pipelines.

C)    Les ONG

Une ONG, Organisation Non Gouvernementale est une organisation d’intérêt public qui ne dépend ni d’un État, ni d’une institution internationale. C’est une organisation à but non lucratif, qui réunit des bénévoles sous forme d’association. Ses financements proviennent de fonds publics ou privés.

La forme de ses actions peut être différente. Il peut s’agir d’aider des populations en danger lors de catastrophes naturelles, d’épidémies, l’environnement mais également des projets sur le long terme visant à développer les populations.

Une ONGE, Organisation non gouvernementale environnementale, est idem à une ONG mais concerne seulement la question environnementale. Comme il est question pour l’Arctique.

En ce qui concerne l’Arctique, nous pouvons parler plutôt d’organisations comme Greenpeace. Greenpeace est une organisation à but non-lucratif présente dans 40 pays, en Europe, en Amérique du Sud et du Nord, en Asie et dans le Pacifique. Elle compte aujourd’hui près de 3 000 000 d’adhérents répartis à travers le monde. Pour garder son indépendance, Greenpeace refuse les dons des gouvernements et des entreprises. Elle n’accepte que ceux de ses adhérents.

Greenpeace a notamment fait une campagne anti-Shell, visant à discréditer l’intérêt de la compagnie pour l’environnement dans son intervention en Arctique.

Après le sommet de la Terre à Rio, qui a eu lieu entre le 20 et le 22 juin 2012, Greenpeace a décidé de créer le mouvement « Save the Artic ».

Shell est le 1er ennemi de Greenpeace notamment parce que la société a été la première à être autorisé par les États-Unis à forer en eaux profondes, en mer de Beaufort, à titre exploratoire.

Cependant Greenpeace a aussi attaqué Gazprom en août dernier, en escaladant une plateforme pétrolière off-shore.

Le but de Greenpeace est de faire de l’Arctique une zone sans production industrielle et sans pêche intensive pour permettre de préserver la faune et la flore. Greenpeace dénonce aussi le fait que la zone est trop hostile pour le forage et l’activité industrielle. Ce qui pourrait entrainer une catastrophe écologique sans précédent en cas de collision avec un iceberg par exemple.

WWF, qui est une ONGE, est également engagé pour préserver l’Arctique. L’ONGE met notamment en ligne, sur son site, des listes de Tour operators qui visent à protéger la vie sauvage et l’écosystème tout autour de l’Arctique

II.                Les causes du conflit

A)    Les ressources

La région de l’arctique est un coin assez difficile et dangereux d’accès.

Cependant, selon deux chercheurs et consultants en énergie, Wood Mackenzie et Fugro Robertson, l’arctique contiendrait respectivement 29 % et 10 % des ressources mondiales en gaz et en pétrole non découvertes. Tandis que l’Institut américain de surveillance géologique (United States Geological Survey, USGS) et la Compagnie norvégienne Statoil Hydro estiment concurremment que l’océan abriterait un quart des réserves non-découvertes en hydrocarbure. La Russie disposerait de 69% des ressources d’hydrocarbure de la région. Le Ministère Russe a estimé sans le prouvé, que le territoire qu’il revendique abriterait  586 milliards de barils de pétrole. Pour avoir un ordre d’idée, les réserves de l’Arabie Saoudite s’élèvent seulement à 260 milliards de barils.

De même le Danemark et les États-Unis ont une part des hydrocarbures. Le coté de l’Arctique Groenland renfermeraient l’équivalent de 9 milliards de barils de pétrole et 26,2128 trillons de mètre carré de gaz. Quant à la partie américaine, la côte arctique de l’Alaska permettrait de produire au moins 27 milliards de barils.

A l’époque, le gouvernement Bush avait annoncé son souhait d’explorer puis de produire vers 2014 en Arctique pour compenser le déclin des réserves de pétrole en Alaska.

Globalement, les prévisions avancent que, d’ici 2030, la production d’hydrocarbure en Arctique atteindra 10 millions de barils par jour. Notamment grâce à la fonte des glaces qui créé de plus grands axes pour explorer le sous-sol.

Néanmoins, pour explorer et bénéficier des ressources de ses fonds il faut des moyens techniques pointus. C’est pour cela que depuis 2002 la Russie et la Norvège sont en coopération en matière d’hydrocarbure nordique. Ce qui permettra aux sociétés russes Gazprom et Rosnef de bénéficier de l’expérience de la société norvégienne StatoilHydro. Cependant les groupes anglo-saxons BP, Shell et surtout ExxonMobil sont aussi compétent pour intervenir dans ce type de milieu.

Les gisements de pétroles de cette zone risquent d’être un atout important car le prix du pétrole ne cessera pas de croitre à cause de sa rareté.

Il existe également de grandes zones de pêche potentielles. Selon l’Université de Colombie Britannique, l’Arctique recueillerai 70% des réserves de poissons. Ces chercheurs ont comparé les données qu’ils ont trouvéés sur la pêche avec celle publiées par la FAO (l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture). Ceci est dû au fait que la zone n’était pas attractive avant la fonte progressive des glaces. La Convention de Montego Bay signée en 1982 règlemente la pêche mondiale mais n’a pas été ratifié par les États-Unis.

 

B)    Les intérêts militaires

Dans le contexte de la concurrence géopolitique en Afrique, en Asie et au Moyen-Orient, le début d’une nouvelle phase de lutte pour l’Arctique est passé inaperçu. Tout le monde s’est habitué au fait que tous les principaux événements tournent autour du Conseil arctique créé en 1996 afin de régler les litiges territoriaux entre les pays du Nord, dont la Russie, le Canada, le Danemark, la Finlande, la Norvège, la Suède, les États-Unis et l’Islande. Cette approche est rejetée par beaucoup d’États qui souhaitent également prendre part au partage du gâteau arctique. A l’instar de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne, de la France, de l’Espagne et de la Pologne, l’Inde, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie, le Brésil et la Chine ont commencé à frapper à la porte du Conseil arctique avec le mot d’ordre « l’Arctique appartient à tout le monde ! ».

Mais militairement des forces sont déjà en place, tous simplement car certains pays veulent montrer leurs présences et aussi protéger leurs chercheurs et scientifiques.

Déjà en 1950 le Canada revendiquait se territoire et avait envoyé des patrouilleurs sur le côté ouest. Ensuite, le Danemark a manifesté sa présence militaire dans la région, (or ce pays est depuis un demi-siècle en litige avec le Canada à cause de l’île Hans Tartupaluk). Bien sûr cela n’a pas été apprécié du gouvernement canadien. Alors que le Danemark préparait le dossier justifiant ses revendications, le Canada a alloué des fonds à la construction d’un port en eau profonde et d’une base de l’armée de mer à Nanisivik, ancien site minier abandonné. Les Canadiens ont ensuite procédé à la rénovation et à l’agrandissement de la base militaire d’entraînement Resolute et à la construction de patrouilleurs arctiques. Par ailleurs, les effectifs du contingent militaire stationné dans la zone arctique ont été multipliés par dix. Chaque été, le Canada s’est mis à organiser des exercices militaires en Arctique. La Grande-Bretagne avait proposé de partager l’Arctique entre le Canada et la Russie. Ainsi, le Canada s’est vu en quelque sorte attribuer un statut spécial de défenseur des intérêts de l’OTAN en Arctique et du principal adversaire de la Russie. Dans le cadre de cette stratégie, les États-Unis et le Danemark participent aux exercices militaires de la marine canadienne en Arctique dont l’envergure va croissant d’année en année. En été 2011 les exercices se sont déroulés avec une participation active de l’armée de l’air avec ses chasseurs et ses avions de reconnaissance et de transport. De plus la Russie a aussi renforcé son arsenal militaire sur ce territoire, pour montrer qu’elle est bien présente notamment au Canada et à l’OTAN car elle ne veut pas que ce dernier ait la main mise sur la région. Les États-Unis, eux, concentrent leurs forces sur le cercle polaire mais restent le pays le plus présent militairement.

C)    Les ouvertures maritimes

Avec la fonte des glaces, l’arctique semble pouvoir ouvrir de nouvelles voies maritimes : une au nord-est (côté russe) et l’autre au nord-ouest (coté États-Unis). Ces nouvelles routes permettraient des gains de temps considérables et donc de réduire  les coûts de transport des marchandises. En effet si on prend l’exemple Rotterdam/Tokyo le passage du nord-est équivaut à 14 100km et le passage du nord-ouest a 15 500 km, alors qu’en empruntant l’Océan Atlantique il faudrait faire 23 300 km et en passant par la méditerranée, le canal de suez puis les océans Indien et Pacifique il faudrait y faire 21 100 km. Donc en empruntant les routes du grand nord on peut considérablement diminuer les coûts du transport vu que celui-ci sera moins long et que par conséquent les entreprises débourseront moins pour  louer les bateaux, donc leurs produits pourront très certainement coûter moins cher à l’exportation. De ce point de vue-là on peut dire que tout le monde y gagnerait.

Mais pour le moment ces routes sont encore bien gelés et il faut donc des bateaux adaptés à la traversé de ces eaux glaciales. Le seul pays qui semblent pouvoir y parvenir est la Russie qui est adapté à ces eaux et qui ce réjouie de pourvoir louer ces brise-glaces à propulsion nucléaire (même si cela ne durera peut être pas si la fonte des glaces continue) car les brise-glaces à moteur diesel ne sont pas assez puissant pour ces mers-là. La Chine vient de rentrer aussi dans la course avec l’acquisition récente d’un brise-glace,  mais les pays comme le Canada, les États-Unis, la Finlande, l’Islande  ou même la Suède en possèdent mais ils ne sont pas forcément assez puissants. De plus casser la glace comme cela, en période de fort réchauffement climatique aura très certainement des répercussions au niveau écologique. Et de toute façon même les navires a propulsions nucléaire ne règlent pas ce problème, donc pour vraiment voir ces routes maritimes exploitées il faudra certainement encore attendre au moins une dizaine d’années.

 

 

Conclusion

Selon nous, la solution qui pourrait mettre un terme aux conflits qui perdurent en Arctique est la coopération. La région ne fait pas historiquement l’objet d’une coopération multilatérale, mais il serait possible à l’avenir d’établir une forme de coopération dans cette région du monde.

En effet, au moment où le traité sur l’Antarctique entrait en vigueur en 1961, la Guerre Froide régnait au pôle Nord, l’empêchant du coup d’établir un traité similaire. L’Arctique n’est donc soumis à aucun système de normes internationales précises et ordonnées.

La conclusion d’un traité constituerait une solution appropriée pour répondre à la vulnérabilité de la région polaire. L’avantage d’un traité est qu’il oblige les parties à prendre des mesures et à les respecter. Pour l’Arctique, il serait nécessaire d’établir des institutions et des règles peut-être semblables à celles appliquées en Antarctique, pour s’assurer que les obligations sont respectées et mises en œuvre.

L’accord de 1959 régissant le pôle Sud a donné progressivement naissance à un régime régional multilatéral nommé Système du Traité sur l’Antarctique. Jusqu’à présent, le traité est un succès. Pourquoi ne pas profiter de cette expérience pour trouver une solution similaire au cas de l’Arctique ?

Tout d’abord, le contexte politique est nettement plus favorable aujourd’hui qu’en 1961, au cœur de la Guerre Froide. Or, le traité sur l’Antarctique réunit dès l’origine les États-Unis et l’URSS ainsi que les puissances britannique, française et japonaise, plus la Norvège. Le Canada y a adhéré en 1988 et a ratifié toutes les ententes du système mises en place. Ainsi, tous les États circumpolaires, excepté l’Islande, sont liés par ce traité. Ils disposent donc d’un modèle prédéfini, auquel ils sont habitués et qu’ils pourraient facilement transposer au pôle Nord. Un tel accord permettrait d’établir les fondements d’une coopération arctique, sans mettre un terme aux revendications territoriales. Chaque acteur pourrait trouver une satisfaction car les défenseurs du caractère international des eaux et terres arctiques apprécieront qu’aucune souveraineté ne soit officiellement reconnue, alors que les acteurs revendiquant certaines régions polaires comme étant à eux estimeront concéder une limitation à l’exercice de leur souveraineté.

Pour se réaliser, un espace démilitarisé est une condition essentielle à toute forme de coopération. Scientifiquement, l’ensemble des études serait alors mené dans des domaines plus larges que les travaux nationaux et géographiquement ciblés, en place actuellement.

Toutefois, un traité Arctique ne pourrait être totalement similaire au Système du Traité sur l’Antarctique, puisqu’un continent et un océan ne peuvent pas être régis de la même façon. La mise en œuvre du Système du Traité sur l’Antarctique fut rendue possible par l’absence de populations autochtones et l’incapacité d’exploiter ses éventuelles ressources. L’intérêt économique des parties était donc réduit et seules des activités scientifiques y sont menées jusqu’à présent. Au contraire, la région arctique est historiquement habitée et son sol est riche en matières diverses. De plus, démilitariser la région semble particulièrement difficile, du fait que l’Arctique fait partie des systèmes de sécurité et de dissuasion russe et américain.

 

Le traité sur l’Arctique doit donc prendre appui sur l’exemple du régime du pôle Sud, tout en respectant les spécificités de la région. Il s’agit de mettre en place une nouvelle organisation internationale dotée d’une structure et de compétences propres, capable d’assurer le développement durable du cercle polaire.

Toutefois, en l’état actuel du droit international, aucun pays ne possède le Pôle Nord ou la région de l’Océan Arctique qui l’environne. Les cinq États entourant la zone (la Russie, les États-Unis, le Canada, la Norvège et le Danemark) voient leur souveraineté limitée par la limite des 200 milles marins. Mais jusqu’à quand ?

 

]]>
/geopolitique/arctique/a-qui-appartient-larctique/feed/ 2