Le commerce maritime représente aujourd’hui 75% du commerce mondial en poids, et 60% en valeur. 25 000 milliards de tonnes-km de fret parcourent les océans annuellement comparées à 7 000 pour le rail et 3 000 pour la route. Il s’agit de pas moins de 71% de tout le fret mondial transporté. Des évolutions technologiques majeures ont permis ce déploiement. Aujourd’hui les pétroliers mesurent jusqu’à 450 mètres de longueur et peuvent contenir jusqu’à 300 000 tonnes de pétroles alors que notre unique porte avion mesure 260 mètres. Assurément, la contrôle maritime offre une position confortable et permet à un pays de rayonner.
La France et son poids contesté dans le commerce maritime mondial
Le rôle stratégique des ports est méconnu des Français. Il n’est pas un grand sujet à débat alors que son poids dans l’économie de notre pays n’est pas négligeable. Le trafic maritime représentait en 2003 une valeur ajoutée de près de 19 milliards d’euros et un effectif d’environ 500 000 emplois équivalents-temps plein (dont 320 000 emplois directs). Pourtant, la France n’est pas aussi puissante qu’elle pourrait l’être. La flotte de commerce sous pavillon français n’est que la 27e mondiale soit 200 navires en 2006 en capacité, chiffre réduit de moitié si on prend en compte les navires appartenant aux groupes français mais battant pavillon étranger. Cette situation, due à la forte fiscalité hexagonale, est des plus inconvéniente puisque le poids politique et décisionnel d’un État à l’OMI se mesure à l’aune du tonnage de la flotte plutôt qu’à la réalité économique liée au maritime. Nous verrons plus tard comment l’Etat souhaite remédier à la situation. De même, la marine marchande française a vu fondre ses emplois. Certes, la diminution de l’emploi dans ce secteur est un phénomène international (ce chiffre est également a nuancer puisque les ports se sont mécanisés, nécessitant moins de main d’œuvre). Le bilan n’est pas fini puisque la part des chantiers navals français dans la construction des navires standards (porte-conteneurs, vraquiers, pétroliers, méthaniers) est aujourd’hui faible, dans un marché mondial pourtant dynamique. Le secteur des méthaniers, dans lequel les chantiers français ont été des pionniers et disposaient d’un savoir-faire reconnu, est exemplaire. Les grands ports français ne sont que des ports de seconde catégorie face aux ports de Rotterdam et d’Anvers, leaders européens. Le port phocéen, fleuron national, représentait 92,5 millions de tonnes de marchandises, soit 4,2 fois moins que celui de Rotterdam en 2009. Ce chiffre n’est pas favorable et ne risque pas de le devenir dans le futur. Les ports français ont perdu 42% de parts de marché en Europe depuis le début des années 90 selon un rapport de 2008 émanant de la Cour des Comptes. Ce problème s’explique par le fait qu’ils sont moins compétitifs que leurs voisins du nord. Certains imputent ce manque de compétitivité aux grèves à répétition des dockers et aux faibles temps de travail (14h par semaine pour les grutiers pour un salaire compris entre 3500 et 4000 euros par mois). De plus, la France a un système compliqué mettant en relation des opérateurs portuaires privés et une administration publique bureaucratique encore pesante nuisant à l’efficacité et la compétitivité. Pourtant, la France dispose d’une géographie favorable puisqu’à la pointe du continent eurasiatique : Trois façades maritimes, l’une des principales portes d’entrée en Europe des marchandises transportées par les lignes régulières des grands armements maritimes. De plus, grâce à l’Outre-mer (Annexe 2), avec onze millions de kilomètres carrés de zone économique exclusive (ZEE), la France dispose du deuxième espace maritime mondial, après celui des États-Unis.
La France a toutefois une place à ne pas négliger
Le tableau n’est pas tout à fait noir. L’armateur français CMA CGM est depuis 2005 le troisième groupe maritime mondial de transport par conteneurs (300 navires contrôlés), secteur qui est en croissance et le groupe Bourbon présent sur le remorquage et le secteur offshore n’est pas négligeable non plus (248 navires contrôlés).L’industrie française du naval militaire occupe la première place en Europe (DCN est en particulier le premier intégrateur de systèmes navals au plan européen). De son côté, l’industrie nautique de plaisance a triplé son chiffre d’affaire en huit ans avec une production exportée pour plus de 60 % et un leader mondial, le groupe Bénéteau. Le parapétrolier (à forte productivité) français est le deuxième exportateur mondial après le secteur américain et, à titre d’exemple, la Compagnie générale de géophysique, avec l’acquisition récente de VERITAS, peut compter sur la première flotte sismique mondiale. La recherche française occupe des positions fortes sur certains créneaux scientifiques, en particulier dans certains domaines de la recherche marine et en matière d’océanographie opérationnelle.
La prise de conscience devient une réalité
Pourtant l’effort est bien présent. Le gouvernement a engagé une réforme en 2008 permettant ainsi la modernisation des aménagements portuaires. L’État va doubler sa participation dans le secteur pour la période 2009-2013. Au total, les investissements pour 2007-2013 atteindront 2,69 milliards d’euros dont 445 millions à la charge de l’État. Conscient que le problème n’est pas qu’une question d’investissement, l’Etat cherche à crée des conditions favorables à l’essor économique. Il s’agit pour l’essentiel de compenser le différentiel de compétitivité observé en s’efforçant de supprimer les surcoûts dont l’origine est proprement nationale (fiscalité, charges sociales), avec le cas échéant des mesures d’accompagnement dans le domaine de l’environnement, la sécurité ou la sûreté. L’objectif est de réduire et d’annuler les charges sociales et fiscales pesant sur les marins pour se rapprocher ainsi des régimes dits de net-wage en vigueur dans certains pays européens comme le Danemark où l’Italie. Cette mesure est nécessaire puisque le France n’a qu’un faible poids au niveau institutionnel (OMI) alors qu’elle a un véritable poids économique. D’autre part, le problème de l’hinterland : ces structures terrestres (principalement des routes et des rails) permettant de dégager les ports sont en surcapacité. Elles ne permettent pas de dégager assez rapidement les marchandises des ports, ce qui peut créer des « bouchons » et nuit à l’efficacité des opérateurs portuaires. L’Etat la aussi à réagi avec son projet Grand Paris. Il souhaite aménager les berges de la scène pour augmenter la capacité de l’hinterland et désengorger le port du Havre. La marine marchande française a des atouts mais a encore du chemin à faire pour rayonner sur la scène internationale.
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