Présentation « Die Welt »
« Die Welt » est un journal quotidien allemand, créé en 1946 à Hambourg par les puissances victorieuses de la Seconde Guerre mondiale dans la zone d’occupation britannique. Le journal fait partie des plus grands journaux nationaux en Allemagne. Son courant de pensée politique pourrait correspondre au centre droit et à une tendance libérale en matière d’économie.
Rob Savelbery a écrit l’article suivant, qui a été publié le 13 novembre 2013 sur le site web du journal. C’est un journaliste néerlandais travaillant pour « De Telegraaf » à Berlin ainsi que pour plusieurs journaux allemands. Il évoque dans cet article la formation d’une alliance populiste de droite entre le parti « Partij voor de Vrijheid », un parti populiste de droite néerlandais, et le « Front national », un parti d’extrême droite français. Les deux chefs des partis se sont rejoints à La Haye aux Pays-Bas pour discuter de cette alliance. Une alliance entre les partis de droite pourrait les aider à former un groupe parlementaire au Parlement européen afin d’avoir plus de poids dans les votes. L’annonce d’une telle alliance est en fait intéressante en prévision des élections européennes de l’année prochaine, car le Front national est actuellement le plus grand parti dans les sondages actuels en France.
„Libérer l’Europe du monstre de Bruxelles“
Les deux ont des cheveux blonds et n’aiment pas l’Union européenne. Voilà les seuls points communs des populistes de droite Geert Wilders et Marine Le Pen. Malgré tout, les deux conclurent une alliance. Est-ce que l’Europe doit avoir peur ?
Geert Wilders a accueilli son invitée française Marine Le Pen lorsqu’il était le premier ministre des Pays-Bas. Son arrivée devant le siège du parlement à La Haye ressemblait à une visite officielle : avec des policiers, qui ont retenu des spectateurs derrière des barrières, deux stars politiques blondes, souriantes et portant des vestes bleues fines et enfin des photographes, qui ont capturé sans arrêt les moindres gestes de cette amitié.
La rencontre des populistes de droite les plus populaires d’Europe pourrait vraiment entrer dans l’Histoire. Geert Wilders poursuit une mission et Marine Le Pen le soutient. Les deux veulent créer une alliance contre l’Union européenne pour marquer un point dans les élections européennes au printemps prochain.
Mercredi, les chefs de partis Marine Le Pen et Geert Wilders ont appelé d’autres partis eurosceptiques et nationalistes de toute l’Europe à adhérer à leur alliance contre l’Union européenne. Ils ambitionnent la création d’un groupe parlementaire après les élections européennes en mai.
Le système puissant plongerait des citoyens dans « l’esclavage »
« Nous travaillons contre le fait que Bruxelles décide tout ”, a dit Wilders à La Haye. « Nous libérerons l’Europe du monstre de Bruxelles ». Le Pen a qualifié l’Union européenne de « système puissant, qui a plongé les citoyens dans l’esclavage ».
Devant des douzaines d’équipes de tournage et de journalistes de toute l’Europe, Wilders et Le Pen ont exposé leur plan. Leur but est la dissolution de l’Union européenne et le retour aux États nations souverains et puissants. « Nous voulons rendre la liberté à nos peuples », a dit Le Pen.
Wilders et son parti de la liberté PVV sont déjà représentés au parlement européen avec quatre députés – mais il désire son propre groupe parlementaire. Actuellement le groupe des populistes est en tête dans les sondages nationaux. Wilders voudrait aussi pouvoir représenter ses idées sur la scène internationale.
Il l’a essayé en Allemagne
Il ne peut pas le faire tout seul, c’est bien clair pour le Hollandais. Il y a quelque temps, il l’a déjà essayé en Allemagne. Dans un hôtel berlinois, il était la personne la plus importante pendant la création du petit parti le « Freiheit » (la Liberté) autour de l’ancien député chrétien-démocrate René Stadtkewitz. Mais la combine de Wilders – un parti dirigé autoritaire et des passages démagogiques – n’a pas eu du succès dans ce pays. « Die Freiheit » ne pouvait pas marquer des points pendant des élections et s’est dissous il n’y a pas longtemps.
Wilders ne peut pas non plus compter sur le soutien du parti « Alternative für Deutschland », qui a connu un certain succès pendant les dernières élections au Bundestag. Le chef du parti Bernd Lucke a déjà fait un geste de négation en faisant référence à la radicalité de Wilders.
De la même façon, les tentatives de copinage du populiste de droite hollandais avec Thilo Sarrazin ont échoué. Wilders a souligné des points de vue communs anti-islamiques lors de sa visite à Berlin pour promouvoir le livre de Sarrazin « Deutschland schafft sich ab » (L’Allemagne se détruit). Mais cette aide n’est pas parue très nette à l’auteur, qui a qualifié Wilders de raciste, et qui ne voulait pas le rencontrer.
Donc, Wilders n’a pas réussi à s’implanter dans le plus grand pays du groupe Euro. Néanmoins, il a déjà cherché dans les pays voisins. Il a rencontré l’ancien président tchèque Vaclav Klaus, qui est un sceptique convaincu de l’Union européenne justement comme lui. En Belgique, Wilders a trouvé un partenaire avec Filip Dewinter du parti d’extrême droite et séparatiste « Vlaams Belang ».
L’éloignement de la stratégie actuelle
La recherche d’attention de Geert Wilders aux autres partis populistes de droite est un éloignement clair de sa stratégie à ce jour, affirment des observateurs à La Haye.
Dans le passé le Néerlandais n’avait rien à voir avec le Front national français ou les nationalistes flamands. Il s’est vu comme un combattant solidaire dans l’Europe, qui n’est pas prêt à conclure d’éventuels compromis. Le seul allié international était un groupe américain de bailleurs de fonds et quelques Israéliens orthodoxes, que Wilders a rencontrés dans son Kibboutz quand il était jeune.
L’alliance avec le Front national n’est visiblement pas un mariage d’amour, mais elle repose sur la révélation pragmatique que les deux tout seuls ne peuvent rien obtenir. Pourtant en 2009, Wilders ne voulait pas être en contact avec Le Pen, et encore moins poser avec elle devant des caméras.
Sa transformation insolite a sûrement à voir avec le fait que sa nouvelle « bonne amie » a mis de l’ordre dans son parti. Marine Le Pen a en effet réalisé des efforts pour présenter une image plus modérée. Pour rappel, le fondateur du parti et président d’honneur Jean Marie Le Pen avait indiqué que les chambres à gaz étaient « un détail de l’Histoire » et a plusieurs fois incité à la xénophobie. La patronne du Front national a réussi à imposer une nouvelle image en France.
« J’ai douté pendant longtemps »
Maintenant, elle espère être considérée comme la patronne d’un mouvement européen. « J’ai douté pendant longtemps et je me suis posé la question de savoir si c’était raisonnable de collaborer avec eux » disait Wilders hier à La Haye. « Mais je me concentre sur Marine Le Pen, pas sur son père. » Wilders s’est déjà rendu chez elle à Paris cet été.
Wilders a aussi rejeté ses anciens doutes contre le FPÖ autrichien. Il s’est très bien entendu avec le chef du parti Heinz-Christian Strache pendant sa visite au Conseil national à Vienne. Lorsque c’est contre Bruxelles, les acteurs voient également au-delà les fossés idéologiques.
Wilders, qui est fidèle à Israël, n’a pu ignorer que Stracke a fréquenté des milieux néonazis comme la « Wikingjugend » (jeunesse de viking) durant sa jeunesse et qu’il est toujours ami avec des négationnistes. Le but supérieur reste la lutte contre l’Union européenne impérialiste, l’Euro et l’Islam.
Pour son combat de valeurs, Wilders a trouvé entre temps des alliés presque partout en Europe. Avec ses idées, il a gagné le Lega Nord, le mouvement séparatiste italien, il a parlé avec les démocrates suédois nationalistes. D’ailleurs, il veut aussi convaincre les « Vrais Finlandais ». Le but principal est de créer un groupe européen autonome.
Une alliance fragile
Actuellement, les quatre députés de Wilders s’occupent notamment de dénoncer la prodigalité des eurocrates. Mais le chef du parti veut plus que cela : limiter le pouvoir de Bruxelles et récupérer les compétences des États membres.
Pour cela, il a besoin de camarades de combat, parce qu’avec la présence d’au moins 25 députés, qui viennent au moins pour un quart des 28 pays membres de l’Union européenne, il aurait accès aux pots de groupes parlementaires. De plus, un groupe parlementaire a le droit de faire la demande d’amender le règlement intérieur.
Beaucoup de personnes doutent qu’un groupe parlementaire interpays populiste de droite puisse se rendre à Bruxelles. « Marine Le Pen et Geert Wilders font un grand théâtre d’illusion », dit Alexander Graf Lambsdorff du FDP, chargé de la politique étrangère. Il s’agit « des histoires de la campagne électorale, parce que les deux partis ont depuis longtemps des députés européens, mais ceux-ci ne sont pas capables d’organiser une coopération sure du long terme à cause de leur nationalisme fanatique ».
Au moins, cela ne va pas arriver avec l’eurosceptique le plus connu au parlement européen. « Wilders est à la fois pour la liberté de parole et veut interdire le Coran, c’est une la contradiction même » a indiqué Nigel Farage du parti britannique Ukip, qui est reconnu pour sa franchise.
Commentaire :
La formation d’une alliance des partis eurosceptiques est surtout vue en Allemagne avec prudence. Les partis comme le Front national ou le PVV de Wilders ne représentent que 5% aux élections, soient locaux, soit au Bundestag, soit pour le parlement européen. Mais, le ras-le-bol de la politique surtout concernant les institutions européennes se répand en Allemagne. Le résultat était que même le parti « Alternative für Deutschland », qui est aussi considéré comme eurosceptique, a également eu en dessous de 5% dans les élections au Bundestag en septembre 2013. Pour beaucoup de gens, Bruxelles est loin et ils ne voient pas comment influencer la politique européenne ou alors ils voient que les initiatives de Bruxelles contrôlent trop la vie quotidienne et que Bruxelles empiète également sur la souveraineté nationale. Néanmoins, un succès comme les partis de Le Pen ou Wilders ont connu n’est pas encore envisageable en Allemagne. C’est aussi pourquoi la presse allemande est plutôt critique par rapport à ce sujet. Malgré tout, un développement de la politique européenne vers le populisme de droite reste quand même un sujet d’inquiétude pour toute l’Europe.
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