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Port :

Abri naturel ou artificiel pour les bâtiments de navigation, muni des installations nécessaires à l’embarquement et au débarquement du fret et des passagers.” Larousse

“La puissance maritime tient en premier lieu au commerce et celui-ci suit les routes les plus avantageuses; la puissance militaire a toujours suivi le commerce pour l’aider à progresser et pour le protéger.” CapitaineAlfred T. Mahan, 1890

auteur de :The influence of sea power upon history, 1660-1783

Pour cet auteur, et stratège naval américain, les grandes puissances terrestres à travers les époques ont toujours été de grandes puissances maritimes.

Le port au fil des époques :

Les ports ont pris bien des formes au cours des époques, allant du port de pêcheur sommaire, bâtit dans une crique pour accueillir un à deux bateaux, aux ports en eaux profondes avec ses polders et ses énormes porte-containers. Ils n’ont pas, non plus, toujours eu les mêmes vocations, mais les ports ont toujours été source de vie et d’enjeux géostratégique. C’est pourquoi nous allons aborder le rôle des ports au travers de l’histoire et les concepts clefs qui ont influencé les ports de l’antiquité à nos jours.

Retournons en antiquité, deux civilisations se sont principalement démarquées par leur extension au travers des ports, ce sont les grecs et les phéniciens, et déjà ici on peut voir des facteurs initiaux plutôt différents. En effet pour les grecs, leur regroupement en cités, leur position en grande partie insulaire et le fait que leurs terres soient pauvres ont été des facteurs favorisant leur extension par la mer. Alors que les phéniciens, la Phénicie se trouvant, géographiquement, sur le Liban actuel, eux se trouvaient sur des terres sûrement plus riches, mais la chaîne de montagne Liban ne leur permettait pas de s’étendre vers les terres, c’est ainsi qu’ils se sont naturellement dirigés vers la mer.

Ainsi rapidement des routes commerciales se sont construites sur la Méditerranée, ces routes permettant de contourner ce qui jusqu’ici séparaient les hommes : les montagnes, les mers, les déserts et même les nations. Ces routes permettant aux grecs et phéniciens d’assurer le transport des marchandises et des hommes entre leurs cités et leurs colonies/comptoirs commerciaux. Ainsi très vite le contrôle de ces routes commerciales fut l’un des enjeux majeurs de ces populations, et les ports prenant ainsi toute leur importance, étant à la fois des abris, des têtes de pont des empires, des places commerciales, et des moteurs dans la recherche de nouvelles technologies, car :

  • Les bateaux, à cette époque sont plus ou moins similaire entre les Grecs et les Phéniciens, basée sur une pratique de la voile légère et de l’aviron. Le navire emblématique des phéniciens est le Birème et celui des grecs la Trière, les deux ne se différenciant réellement que par leur nombre d’étages de rameurs (2 contre 3). Il est important de rappeler, dans ce besoin d’innovations technologiques, qu’à cette époque, d’une part les navires étaient très lents, et d’autre part, on ne savait naviguer que sous le vent ! “subir des vents contraires”, “attendre les vents favorables”, étaient donc vraiment des problèmes liés à cette technologie.

  • L’eau, est un aussi un des problèmes majeurs de l’époque. Celle-ci devient vite frelatée et on ne connait pas encore les moyens pour en transporter et la conserver sur de longues distances.

On voit donc que ces technologies ont vraiment conditionné la navigation à cette époque, car elles imposaient aux navigateurs de naviguer sur de petits distances et de faire du cabotage. Ces contraintes rendaient bien évidemment d’autant plus stratégique la position physique des ports. Ce illustré notamment par les guerres puniques en Sicile où grecs et phéniciens étaient implantés ; les phéniciens se sont confrontés aux grecs lorsque ceux-ci ont cherché à prendre le contrôle de la zone où étaient implantés leurs comptoirs commerciaux.

C’est dans la même dynamique, de contournement des obstacles pour aller aux Indes chercher les épices, que vont s’inscrire les grandes explorations maritimes du XVième et XVIième siècle. En effet pour contourner les voies terrestres dominées par les puissances orientales, les portugais [nation qui a dominé sur le XVième siècle] cherchant la route des indes fondèrent des comptoirs sur toute la façade africaine pour servir d’antennes à leurs navires et arriver en Inde.

Et c’est dans la dynamique, de contourner les voies maritimes portugaises pour aller en Inde, que Christophe Colomb découvrit les amériques et que Magellan fit (faire, vu qu’il mourut en chemin) le tour du monde [l’Espagne a dominé sur le XVIième siècle].

Et toutes ces explorations furent possibles grâce au développement des technologies navales, et une évolution de l’utilisation des consommables, les bateaux avaient plus de voilure, l’eau était dessalée, etc ; ce qui a permis la navigation hauturière. Mais les ports restaient clef dans ces commerces, pour l’exemple : ce qui tua la majorité des hommes de Magellan fut le scorbut, s’ils avaient pu s’arrêter dans un port ils auraient sûrement pu se ravitailler en nourriture et (d’avantage) survivre au voyage.

La nation qui domina son époque, au XVIII/XIXième, fût la France. Et ce fût encore grâce à sa puissance maritime et grâce au commerce triangulaire, il est donc très facile de retrouver des marques de celui-ci dans notre paysage. Notons par ailleurs que l’avancée technologique est encore un point capital de cette domination. Prenons l’exemple de la ville de Nantes ; cette ville a été une des principales actrices du commerce triangulaire. Ce commerce a été possible par des dynamiques des armateurs locaux qui ont fait désensabler la loire pour permettre à de plus en plus gros navires de remonter jusqu’à Nantes. Ces navires pouvaient ainsi venir décharger leurs marchandises, et apporter leurs richesses à la ville. C’est ainsi que sont apparues sur place de nombreuses entreprises, dans les plus connues il y a BN (Biscuiterie Nantaise) et LU, qui ont prospérées dans la zone grâce au sucre (et autres) qui était débarqué des quais.

J’ai donc essayé de vous montrer, à travers ces brefs exemple que le port était vraiment multi-facettes. Il peut être à la fois : moteur d’extensions, moteur d’avancées technologiques, moteur de découvertes, moteur de commerce, et moteur de dominations et dynamiques territoriales. Mais, bien qu’il ressorte clairement que le port était moteur, la stratégie navale est bien plus complexe que ça.

port schéma atome

Autour du port gravitent de nombreux autres facteurs qui donnent la vraie valeur du port, qui ne serait rien s’il n’y avait pas tous ces éléments autour, exemple un port situé en mer Caspienne, comme Bakou, ne serait pas forcément intéressant s’il n’y avait pas cet accès au gaz… D’où l’importance de ces facteurs tiers.

Mais, nous devons le constater, les ports avaient, et ont toujours, une place clef dans les stratégies et enjeux des époques, et comme pointé précédemment, on ne peut que remarquer que beaucoup des empires qui ont marqué leur époque étaient orientés vers la mer et se basaient sur ses ports pour rayonner.

Cependant, dans cette partie je ne vous ai presque pas parlé des ports comme arsenal militaire. Ceci est normal, parce qu’un port est principalement un atout géostratégique plutôt qu’un pion armé. Vauban, ou les romains bien avant lui, l’avaient bien compris fortifiant des ports comme Brest ou Saint Malo. Le port ne vous permettra pas d’attaquer votre ennemi, mais il vous permettra d’asseoir votre domination sur une zone permettant à vos troupes de se réfugier, d’attaquer et de ravitailler tout ce qui se trouve sur sa zone d’intervention. Dans cette optique militaire, nous ne pouvons que penser au port flottant d’Arromanche qui a permis l’arrivée et l’approvisionnement des troupes lors de la seconde guerre mondiale.

Les nouvelles problématiques du port :

A l’heure actuelle, nous sommes dans un monde globalisé dont l’un des principaux acteurs est le port, 80% des échanges commerciaux s’effectuent par la voie maritime. Mais les échanges commerciaux internationaux étant de plus en plus nombreux les ports doivent s’adapter, comme la technologie l’a fait : les porte-containers sont de plus en plus gros et transportent de plus en plus de marchandises. Les ports s’installent ainsi sur des eaux profondes, ou draguent, et s’étendent sur la mer avec des polders, se garnissant de toute une infrastructure très lourde pour décharger et accueillir les marchandises. Le parfait exemple est le port de Shanghai, 1er port au monde, qui historiquement était basé sur la terre, mais pour les besoins s’est redéveloppé sur un îlot + polders. Le tout a été relié par le pont de Donghai, plus long pont maritime au monde (: influence de la technologie sur le développement du port, le port n’a pu se faire qu’après la réalisation du pont), qui sera bientôt jumelé par un autre pont combinant route et rail.

port shangai

En parlant de route et rail, parlons de l’impact qu’a eu l’arrivé de ces technologies (+aviation). Car en effet de prime abord on peut se dire que ces supports ont nui à la navigation. Ce qui a été en parti vrai aux débuts de la révolution industrielle, étant donné que les lignes maritimes classiques étaient court-circuitées le train, etc, afin de gagner du temps. D’ailleurs cela est toujours présent, et même pour le transport de passagers c’est encore plus visible car l’aviation, le train et les transports routiers ont pratiquement fait disparaître, j’exagère un peu le trait, le transport maritime de passagers ; pour l’exemple en France si vous souhaitez prendre le bateau il faut aller à Cherbourg/Calais/Sète/Marseille, et vous n’aurez pas forcément un choix immense de destinations, alors que vous allez à Saint-Exupéry, c’est à 25 minutes de Lyon et vous pouvez plus ou moins aller partout dans le monde et beaucoup plus rapidement.

Et justement c’est cette notion d’aller beaucoup plus rapidement dans le monde qui a finalement été favorable aux ports ! Car cette notion est en partie vectrice de la globalisation, globalisation qui a justement permis au commerce maritime d’exploser.

D’ailleurs d’autres facteurs sont favorables au commerce maritime et donc aux ports : les lois vis à vis du développement durable, l’augmentation du prix des énergies fossiles et la raréfaction de celles-ci [le contexte actuel du pétrole de schiste et de prix du pétrole très bas n’est donc pas favorable], des routes maritimes de plus en plus courtes [projet Nicaragua + fonte des glaces], la fin des embargos [port de Mariel, Cuba].

Cependant des facteurs sont à nuancer, notamment vis à vis des énergies fossiles, car celles-ci représentent une grosse part des trafics maritimes internationaux, et comme l’a dit un ancien ministre du pétrole Saoudien : “l’âge de Pierre n’a pas pris fin par manque de pierres”

Mais arrêtons nous sur le cas de la Chine qui a des besoins énergétiques extrêmement importants : 15millions de barils de pétrole sont passés par le détroit de Malacca à destination principalement de la Chine et du Japon (source Dessous des cartes: SINGAPOUR : LA MONDIALISATION, À QUEL PRIX ?).

Chine empire portuaire ?

La stratégie chinoise en matière portuaire est réellement intéressante, ils achètent des parts dans de nombreux ports, et simili colonise la zone, exemple du Pirée (source Le Point) : “Sur cet embarcadère n° 2, à quelques mètres de là, le ballet des grues est cinq fois plus important. La gestion de cette plate-forme a été cédée en 2008 à l’entreprise chinoise Cosco pour 35 ans et un montant de 3,4 milliards d’euros. […] Depuis, l’accès à l’embarcadère n° 2 est restreint. […] Ils travaillent les dimanches, fêtes et jours fériés et ne respectent plus le droit du travail grec. Pour la première fois, c’est la loi chinoise qui s’impose.

Mais ils pensent aussi à protéger leur économie, avoir ces ports pourrait permettre de créer une dépendance à un réseau maritime purement chinois, et avoir certains autres ports leur permet aussi de protéger leurs ressources.

En effet, comme je disais, la Chine importe de grosses quantités de pétrole du Moyen Orient (et du Soudan), et le trajet pour rapporter celui-ci jusqu’en Chine est mis en danger par plusieurs acteurs, les pirates du détroit de Malacca, l’Inde et les USA.

La Chine a donc développé : le collier de perles, un réseau de ports pour traverser la zone, qui se base sur des pays ayant des rivalités avec l’Inde : Pakistan, Sri Lanka, Bangladesh, Birmanie/Myanmar pour se protéger de la 5ième et 7ième flottes américaines, et de l’Indian Navy.

Et pour se protéger des pirates de Malacca, elle construit actuellement des “corridors énergétiques”, c-a-d gazoducs, oléoducs, à partir du port Pakistanais de Gwadar, et du port Birman de Sittwe.

La boucle est bouclée, la stratégie chinoise permettra ainsi de défendre ses ressources tout en favorisant son exportation, il ne manque plus qu’à l’empire du milieu de renforcer sa puissance navale et nous ne pourrons sûrement que constater que la Chine est l’empire qui domine le XXIième siècle.

“La puissance maritime tient en premier lieu au commerce et celui-ci suit les routes les plus avantageuses; la puissance militaire a toujours suivi le commerce pour l’aider à progresser et pour le protéger.” CapitaineAlfred T. Mahan, 1890

Hippolyte Le Meur

J’ai essayé de reconstituer l’histoire des grands empires de navigateurs à partir de nombreuses recherches internet et pour le reste je me suis très largement informé auprès des émissions du Dessous des cartes et de leur site internet cherchant à coupler l’information avec des sources tierces lorsque le sujet m’intéressait.

Voici le lien vers le site du Point que je cite ici :

http://www.lepoint.fr/monde/grece-le-piree-port-chinois-sur-la-mediterranee-20-02-2012-1433069_24.php

Dans d’autres articles de presse nous pouvions voir des rachats dans d’autres ports que celui du Pirée : Havre, Marseille, Lomé (Togo), Lagos (Nigéria), Djibouti (Djibouti) […], mais leur contenu était bien moins percutant.


Catégorie : Dictionnaire de Géopolitique