I. Citation emblématique annonçant la problématique traitée
« Ce que j’apprécie tout particulièrement, et qui distingue le travail d’ICG par rapport à la plupart des autres analystes, est l’importance accordée à la formulation de solutions politiques. Dans certains cas, j’ai appris l’existence de nouvelles possibilités grâce à vos rapports ; dans d’autres, votre analyse a confirmé les différentes options qui existaient déjà, en précisant le soutien que chacune d’entre elles recevrait. Étant donné l’incertitude qui caractérise les affaires politiques et militaires, une telle analyse indépendante vaut son pesant d’or »[1] – M. Gerard Lucius, directeur adjoint de mission, ambassade des Pays-Bas en Irak
II. L’International Crisis Group : Présentation
L’International Crisis Group est une organisation non gouvernementale à but non lucratif, elle est reconnue, notamment par l’Organisation des Nations Unis et est présente sur les 5 continents. Son siège social se situe à Bruxelles.
L’organisation a pour but de prévenir, gérer et résoudre des conflits dans le monde entier, en alertant les gouvernements politiques internationaux, en conseillant, en établissant des études, en suggérant des stratégies et en communiquant grâce aux médias.
Le travail de terrain réalisé par les équipes d’analystes permet d’établir des rapports, ainsi que des recommandations politiques à destination des dirigeants et institutions politiques.
Thomas Pickering, ancien ambassadeur américain, est à la tête du Conseil d’Administration. Depuis juillet 2009, Louise Arbour, ancienne haut-commissaire des Nations Unies aux droits de l’Homme et ancienne procureure générale des tribunaux pénaux internationaux pour le Rwanda et l’ex-Yougoslavie, est la présidente et directrice de cette organisation.
L’International Crisis Group a été créée en 1995 par des personnalités d’Europe et d’Amérique car selon elles, la communauté internationale ne parvenait pas à résoudre convenablement les conflits, surtout au Rwanda, en Somalie et en Bosnie. Au départ l’organisation, située à Londres, comptait un bureau de 2 employés pendant que quelques analystes se trouvaient en Afrique de l’Ouest et dans les Balkans.
L’International Crisis Group aujourd’hui c’est :
– 154 employés dans le monde, originaires de 53 pays différents, 50 langues
– Plus de 66 conflits actuels ou probables étudiés
– Plus de 1000 rapports depuis sa création
– Un budget annuel de 20,5 millions de dollars (2012)
– Environ 2 millions de visiteurs sur le site Internet
– Une forte présence dans la presse, puisque citée plus de 5000 fois.
III. Problématique traitée par le Think Tank
Les recommandations faites par l’International Crisis Group aux acteurs internationaux pour la résolution de conflits sont-elles vraiment écoutées et efficaces?
IV. Présentation de cette problématique et illustration
Le 11 avril 2013, Crisis Group publiait un rapport concernant la situation au Mali après l’intervention militaire française. Au moment de l’écriture de ce document, le déploiement et le mandat d’une mission de stabilisation des Nations unies étaient à l’étude au Conseil de sécurité. L’élection présidentielle prévue au Mali pour Juillet 2013 est très attendue, mais représente également un grand défi. Le Think Tank suggère dans ce rapport de nombreuses recommandations au gouvernement d’Union Nationale du Mali, au conseil de Sécurité de l’ONU, aux acteurs régionaux et internationaux concernés (Mauritanie, Algérie, Niger, France, l’Union Africaine, l’Union Européenne…)
Les conclusions et recommandations principales proposées par l’International Crisis Group sont :
– Les dirigeants du Mali doivent afficher publiquement l’envie d’une politique de réconciliation nationale et s’engager à maintenir la paix. Ainsi, la campagne électorale pourra bien se dérouler, sans attiser les tensions.
– Les médias à grande audience doivent promouvoir les élections et favoriser la participation et l’implication politique du peuple malien.
– Les acteurs internationaux et régionaux doivent adopter une position commune vis-à-vis du MNLA (Mouvement National de la Libération de l’Azawad). Le mouvement Touareg doit comprendre qu’il est très important pour lui de renoncer à la violence et de participer activement à la reconstruction du pays. A Bamako, les dirigeants politiques doivent rester ouverts au dialogue afin de donner une chance à la population du Nord du Mali de participer au processus politique, ce qui éviterait à cette partie du territoire de continuer à être le foyer de nombreuses rébellions.
– Il faut distinguer la protection des civils et la lutte contre le terrorisme.
– Il faut favoriser les financements qui vont permettre les opérations réalisées par les forces maliennes soutenues par la Misma (Mouvement International de Soutien au Mali)
– Les acteurs régionaux doivent trouver un moyen de préserver les intérêts sécuritaires régionaux.
Depuis la rédaction du rapport, quelles sont les recommandations qui ont été suivies ?
– Bamako s’est décidé à négocier avec les représentants du MNLA mais les discussions sont tendues à l’égard du sort de l’Azawad comme en témoigne cette déclaration d’un membre du MNLA : «Un statut précis pour l’Azawad, comme une autonomie est le minimum»[2]
– Décision du déploiement d’une force spéciale de l’ONU : La Minusma.
« Elle n’aura pas pour mission la lutte antiterroriste, mais devra “stabiliser les centres urbains essentiels, particulièrement dans le Nord” et “empêcher un retour d’éléments armés dans ces zones”. Les casques bleus devront aussi protéger les civils et le patrimoine culturel et contrôler le respect des droits de l’homme. »[3]
– Décision des partenaires internationaux de débloquer des fonds pour le Mali : « Réunis au chevet du Mali, le 15 mai 2013 à Bruxelles, une centaine de pays et d’organisations internationales ont mis 3,25 milliards d’euros sur la table pour remettre le pays sur pied après la guerre »[4]
On peut donc voir que, globalement, de nombreuses recommandations ont été suivies. L’International Crisis Group a donc surement une réelle influence.
V. Critique personnelle et argumentée
Suite à notre étude du rapport de Crisis Group traitant de la situation actuelle au Mali après l’intervention militaire française de janvier 2013, nous comprenons leur analyse sur de nombreux points.
Le Mali, à travers ses élites doit instaurer une gouvernance forte, avec un système politique et judiciaire incorruptible. Le nouveau gouvernement malien devra savoir dialoguer, réaliser des compromis pour ainsi rétablir le lien entre les communautés et pour définitivement garantir la sécurité de la population civile.
Un effort national doit être réalisé, toutes ethnies et toutes communautés confondues, afin de créer un nouveau Mali sur des bases saines et sans l’intervention des partenaires internationaux. L’ancien Mali étant en train de se désagréger, reconstruit par le peuple malien lui-même.
« C’est pendant que le vieux seau est encore là qu’il faut en fabriquer un neuf »[5]
Néanmoins de nombreux problèmes persistent :
– Les forces militaires françaises et la Minusma (Mission intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali) de l’ONU (11200 casques bleus) sont présents sur le territoire. Laurent Fabius s’est félicité le 25 avril dernier de cette décision adoptée à l’unanimité par l’ONU : « L’adoption de cette résolution est un succès. Elle confirme le soutien unanime de la communauté internationale à la stabilisation du Mali ainsi qu’à l’intervention de la France et des États de la région pour venir en aide à ce pays. »[6] Mais, tout cela est provisoire. Ils tentent d’assurer la sécurité, et la stabilité du pays. Cependant, après le départ de ces forces, le Mali ne va-t-il pas retomber dans la violence ?
– L’intervention française Serval visait à protéger les civils, mais surtout à lutter contre les djihadistes. Au-delà de ses problèmes communautaires, comment le Mali peut-il régler l’invasion des extrémistes religieux ?
– Les sommes débloquées le 15 mai 2013 à Bruxelles (3,25 milliards d’euros) vont aider au rétablissement de l’eau et de l’électricité, à la construction de nouvelles infrastructures pour l’éducation et la santé etc. Dans un pays longtemps mené par la corruption, comment peut-on savoir que l’argent envoyé va être utilisé à bon escient ? La proposition avancée par le quai d’Orsay d’un site Internet qui permettra de «savoir où va chaque euro» est-elle vraiment réalisable ?
– Par ailleurs, le gouvernement malien pourra-t-il réellement trouver une solution aux revendications du MNLA ou trouver un statut particulier pour le peuple Touareg en contrepartie de l’abandon de leur demande d’indépendance de l’Azawad ? Le gouvernement peut-il vraiment négocier avec les membres du MNLA ? Ils sont accusés de « terrorisme, sédition, crimes portant atteinte à la sécurité intérieure de l’État, à l’intégrité du territoire national par la guerre, l’emploi illégal de la force armée, la dévastation et le pillage publics, crimes et délits à caractère racial, régionaliste et religieux, trafic international de drogue »[7].
– En juillet 2013, l’élection du nouveau président malien est programmée. C’est un premier marqueur d’un retour à l’État de droit : 225 millions d’euros sont prévus pour son organisation. Toutefois, l’intérêt du Mali et de la communauté internationale est que toute la population participe au scrutin. Or, le MNLA ne se sent pas impliqué. En effet, le communiqué du secrétaire général du MNLA déclare : « Rappelant que sa revendication concerne le statut juridique de l’Azawad et que les équilibres politiques internes au Mali ne lui font rien attendre de positif d’une élection dont les enjeux ne sont malheureusement qu’essentiellement sudistes »[8], il précise de plus que de nombreuses populations du Nord sont réfugiées et déplacées, ce qui rend difficile leur participation au scrutin.
Nous pensons donc que le Mali doit donner la priorité à la stabilité du pays et à la résolution de ses affrontements communautaires avant de pouvoir se reconstruire durablement.
VI. Les cinq mots clés
« dialogue », « compromis », « stabilité », « reconstruction », « diversité »
VII. Schéma synthétique
Annexe 1 : Cartes et images du Mali
Schéma expliquant l’intervention militaire de janvier 2013
Documents écrits
– Cours de Géopolitique sur le Mali (1ère année ESCE) de Monsieur Patrick LOUIS
– Power Point sur le Mali de Monsieur Patrick Louis
– Rapport de l’International Crisis Group du 18 juillet 2012 → Mali : Eviter l’escalade
– Rapport de l’International Crisis Group du 11 avril 2013 : Mali → Sécuriser, dialoguer et réformer en profondeur
(Les rapports sont disponibles en téléchargement PDF sur le site de l’International Crisis Group)
Articles
– Le Figaro, « Bamako se résout à négocier avec les Touaregs », 17 mai 2013
– Le Figaro, « Mali : 3 milliards d’euros pour « réussir la paix », 16 mai 2013
http://www.lefigaro.fr/international/2013/05/16/01003-20130516ARTFIG00392-mali-trois-milliards-d-euros-pour-reussir-la-paix.php
– Le Monde, « Le Mali reste au cœur des préoccupations de l’Elysée », 15 mai 2013
http://www.lemonde.fr/politique/article/2013/05/15/le-mali-reste-au-c-ur-des-preoccupations-de-l-elysee_3229905_823448.html
– Le Monde, « Mali : l’ONU approuve le déploiement de 12600 casques bleus », 25 avril 2013
– Le Figaro, Interview de Gilles Yabi « Au Mali, privilégier la restauration de l’État », 31 janvier 2013
http://www.lemonde.fr/afrique/article/2013/04/25/mali-l-onu-approuve-le-deploiement-de-12-600-casques-bleus_3166843_3212.html
Sites Internet
– LeMonde.fr : Idées → Mali : Victoire ou enlisement ?
http://www.lemonde.fr/idees/visuel/2013/04/22/mali-victoire-ou-enlisement-programme_3164058_3232.html
– Site du Ministère de la Défense
http://www.defense.gouv.fr/operations/mali/dossier/presentation-de-l-operation
– Site Internet du MNLA
http://www.mnlamov.net/
– Wikipédia : MNLA
http://fr.wikipedia.org/wiki/Mouvement_national_pour_la_lib%C3%A9ration_de_l’Azawad
Interview audio
– Interview de Fabienne Hara, membre de l’International Crisis Group réalisé par la West Africa Democracy Radio, Avril 2013
http://wadr.org/fr/site/news_fr/4620/Personne-ne-fera-le-travail-%C3%A0-la-place-des-maliens-(ICG).htm
[1] Déclaration tirée du site de l’International Crisis Group
[2] Déclaration de Moussa Ag Acharatoumane, un proche de Bilal Ag Achérif, chef du MNLA Malien, extrait de l’article du Figaro « Bamako se résout à négocier avec les Touaregs » du 17 mai 2013
[3] Extrait de l’article du Journal le Monde du 25 avril 2013: « Mali : l’ONU approuve le déploiement d’une force de sécurité »
[4] Extrait de l’article du Figaro « Mali : 3 milliards d’euros pour « réussir la paix » du 16 mai 2013
[5] Proverbe Touareg
[6] Déclaration de Laurent Fabius, Ministre Français des Affaires Étrangères, le 25 avril 2013
[7] Liste des accusations donnée par le procureur de la république du Mali, Daniel Tessogué le 8 février 2013
[8] Extrait du Communiqué du Secrétaire Général du MNLA du 17 mai 2013
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