BOGOTA
INTRODUCTION
Bogotá, anciennement appelée Santa Fe de Bogotá Distrito Capital, est la capitale de la Colombie ; fondée le 6 août 1538 par l’Espagnol Gonzalo Jiménez de Quesada. Elle est la métropole incontestée du pays aux points de vue administratif, économique et politique. Bogotá est une ville mondiale. Elle est souvent appelée « l’Athènes sud-américaine ».
Les thématiques à traiter concernant la Colombie, entre clichés et vérités, sont nombreuses : épicentre de violence, du kidnapping et du trafic de drogue, l’état désastreux du réseau de transports et donc le manque de mobilité urbaine, le règne des forces militaires révolutionnaires comme les FARC, …etc. Qu’en est-il alors de sa capitale… Malgré la crise économique profonde et la violence que la Colombie continue de connaître, la structure spatiale, sociale, politique, économique de sa capitale a subi des évolutions importantes.
Sur quels aspects la ville de Bogotá a-t-elle évolué au cours du temps et avec quels atouts ? Qu’en est-il alors de sa place dans la mondialisation de nos jours ?
I.Caractéristiques
1.Sa géographie et son climat
Bogota se trouve au centre de la Colombie, dans une zone naturelle appelée savane de Bogota et se trouve à une altitude de 2 640 m, dans la cordillère Orientale des montagnes du nord des Andes. C’est la troisième plus haute capitale du monde après la Paz et Quito. La capitale profite aussi de ressources fluviales puisque plusieurs petits cours d’eau, dont le río San Francisco, traversent la ville jusqu’à l’extrémité sud-ouest du plateau et rejoignent le río Bogotá (ou río Funza), qui plonge au bord du plateau, à Tequendama, dans l’une des plus importantes attractions touristiques de Bogota : une chute d’eau de 132 m appelé le Salto del Tequendama. Bogota est reliée par route aux côtes Pacifique et Atlantique de la Colombie, ainsi qu’aux deux autres villes majeures du pays : Medellín et Cali. Ceci la place donc au centre des intérêts économiques du pays, elle profite de sa géographie. La panaméricaine et l’autoroute Simón Bolívar (système de voies rapides et d’autoroutes reliant l’ensemble du continent américain) passent également par Bogotá.
De par sa haute altitude, la ville de Bogota bénéficie d’un climat dit « tempéré d’altitude ». La ville étant proche de l’équateur, la variation de température est faible au cours de l’année avec une moyenne annuelle de 14 °C. Les pluies sont très fréquentes entre mars et mai, ainsi qu’en octobre et novembre, ce qui rend la région très fertile. Le haut plateau où se situe la ville se consacre majoritairement à la production de lait ainsi qu’à la culture de fleurs pour l’exportation. À l’inverse, les saisons les plus sèches de l’année se situent entre janvier et février ainsi qu’en juillet et août. Durant une bonne partie de l’année, la ville de Bogota est dans la brume (220 jours par an). Les neiges éternelles, des páramos (zones élevées humides et froides), des forêts andines, des régions arides et d’autres marécageuses, forment une variété de niveaux thermiques et fertiles qui fournissent une grande diversité de produits alimentaires dans la région.
2.Les processus démographiques et urbains à Bogotá
A l’heure actuelle, la ville compte 7 363 782 habitants, ce qui en fait la trentième métropole la plus peuplée du monde. Ce chiffre est le fruit de plusieurs vagues d’immigrations :
Jusqu’en l’an 800, les Muiscas (la peuplade indigène la plus importante de la famille Chibcha) vivaient dans la zone, résultat d’une migration d’origine chibcha, provenant d’autres territoires (probablement d’Amérique centrale), qui s’était mélangée avec la population déjà présente. ll faut également souligner que, même s’il est possible d’identifier des traits indigènes dans la population bogotaine, comme la ville a longtemps reçu des migrants de tout le pays, on peut rencontrer des phénotypes d’une grande diversité.
La Colombie est ethniquement diverse. L’interaction entre les descendants des premiers habitants indigènes, les colons espagnols, les populations africaines déportées dans le pays comme esclaves et l’immigration du XXe siècle venue d’Europe et du Moyen-Orient, ont produit un patrimoine culturel varié.
Comme les autres grandes villes d’Amérique Latine, pendant la deuxième moitié du XXe siècle Bogotá vit un processus d’urbanisation intensifiée, associé à une croissance démographique importante. (cf. annexe n°3). Néanmoins, l’expansion urbaine atteint des rythmes encore plus élevés. En 1973, Bogotá est 12 fois plus grande qu’en 1938, tandis que pendant la même période, la population se multiplie par 9. Les classes supérieures se déplacent du centre vers le nord et les classes populaires suivent le parcours inverse. En 2005, on recense que le pourcentage des habitants de la ville qui étaient nés dans une autre commune était de 37%.
L’élément le plus original, c’est une forte augmentation des immigrants qui proviennent de la côte Atlantique du pays. Ces zones apportaient peu à l’immigration vers la capitale avant cette date. Elles correspondent aux régions les plus touchées par le conflit armé en Colombie pendant la dernière décennie.
3.Le passé historique comme reflet de la situation actuelle
Il en va de soi que l’histoire d’une région, d’une ville explique en partie sa situation actuelle. Revenons alors à la période coloniale; berceau de Bogotá :
Gonzalo Jiménez de Quesada après sa victoire sur les Muiscas et la conquête de la savane de Bogota annonça « la fondation de facto » de la cité. Le nom de la ville, initialement Nuestra Señora de la Esperanza, fut changé en Santa Fe lors de la fondation juridique et le Conseil municipal de Santa Fe fut établi. Gonzalo Jiménez de Quesada donna à Santa Fe et aux territoires alentours (l’Equateur actuel, une partie du Venezuela et de la Colombie) le nom de Royaume de Nouvelle-Grenade dont la ville fut, durant toute la période coloniale, la capitale. En 1717, la cité devint la capitale de la vice-royauté de Nouvelle-Grenade, créée par la couronne d’Espagne. Bien que le territoire eût été reconquis en 1816 par les Espagnols, Santa Fe obtint l’indépendance définitive en 1819. Bogota devint la capitale de la Grande Colombie jusqu’en 1830, quand la dissolution de cet État permit de générer ce qui représente aujourd’hui l’Équateur, le Venezuela et la Colombie (et du Panama qui faisait partie intégrante de la Colombie et qui ne prit son indépendance qu’en 1903 ). Grâce à cet ancien statut, Bogotá reste majoritairement une des villes les plus influentes de la zone Nord de l’Amérique Latine.
II.Evolution depuis les années 90
1.Modifications politiques et économiques majeures
Les revenus et les investissements publics ont augmenté au début des années 90. L’une des principales réussites de la gestion budgétaire et la réallocation des sources financières concernant le budget municipal vers la fin des années 1990, Bogota a doublé ses recettes fiscales. Le renforcement des recettes du secteur public a conduit Bogotá a continué ses efforts :
- La taxe sur l’essence a été augmentée (générant 20 millions de $)
- L’application d’une campagne de contrôle pour réduire l’évasion fiscale a généré 46 millions de $
- La mise à jour des informations sur les taxes foncières, la simplification des impôts, l’augmentation des cotisations fiscales pour l’immobilier et le réajustement des tarifs des services publics.
- En outre, si on fait le lien avec l’effort des investissements dans le secteur des transports, on se rend compte que le gouvernement national a payé 52% des coûts de construction et d’exploitation du système de bus électrique Transmilenio grâce aux recettes de la taxe sur l’essence.
Dans la sphère politique, les changements importants ont eu lieu dans le comportement des électeurs et les élus. Les électeurs ont montré leur impatience d’un renouvellement du type de candidats en votant pour les candidats alternatifs. Les équipes ont alors été constituées d’un pourcentage élevé de jeunes universitaires et de professionnels, dont beaucoup de femmes. Une ambiance de leadership plus éthique s’était alors installée. Cette réduction de la corruption, l’accroissement de l’efficacité du personnel, et l’amélioration de la qualité des contrats avec le secteur privé a fait largement évolué positivement la capitale.
2.Société et culture
Bogotá a connu des changements sociaux récents importants :
– La couverture des services publics nationaux (eau, électricité, téléphone, et gaz) a augmenté et des efforts ont été faits pour améliorer les conditions de vie dans les quartiers les plus pauvres grâce à un investissement de 800 millions de dollars dont ont bénéficié 650 000 personnes marginalisées.
– L’investissement pour l’éducation publique a doublé et le nombre de jeunes qui fréquentent l’école ont augmenté de 140 000 étudiants, soit une augmentation de 30%.
Depuis toujours, Bogota s’est caractérisée par son riche contexte socio-culturel, qui est le résultat de la convergence de toutes les cultures contemporaines et anciennes de Colombie. Bogota organise également des manifestations telles que le Festival Ibéro-américain de Théâtre, la plus grande fête mondiale du théâtre, Rock al Parque, Jazz al Parque, le Festival de Cinéma de Bogota, etc. La ville regorge aussi de musées tels le célèbre musée de l’or connu mondialement.
Culinairement parlant, Bogotá tente de refléter la cuisine colombienne et de par son statut de capital réunit toutes les traditions culinaires du pays. La Colombie est le premier producteur de haricots de la zone andine et c’est le premier produit de consommation nationale. La banane verte, le riz, le café, le haricot (frijoles), le maïs (très utilisé aussi en farine pour faire des Arrepas) sont des produits de consommation quotidienne. Bogotá est notamment connue pour ses quelques plats typiques comme l’Ajiaco (soupe de maïs, poulet, câpres), le Chiguiro (sorte de viande), etc.
3. L’insécurité
Selon un rapport officiel de la « surveillance de district de Bogota», la capitale est passée de 89,4 morts violentes pour 100 000 personnes en 1996 à 37,9 en 2005, ce qui représente une réduction de 57,6 % en tenant compte du fait que durant la même période la population a augmenté de plus de 25 %. Aussi, 62,8 % de ces morts violentes ont été causées par des homicides et 20,5 % par des accidents de la circulation (cf. annexe n°4). En février 2012, les autorités de Bogota décident d’interdire le port d’arme à feu des civils dans les espaces publics et les véhicules. Début mai 2012, le maire de Bogota, Gustavo Petro Urrego, annonce que la mesure a permis une diminution de 18 % des meurtres avec armes. A ce jour, en 2014, plus de 90% des habitants de la capitale se disent se sentir en insécurité, et pour cause : les vols récurrents, les agressions physiques dans la rue, la présence des groupes armés, le manque d’effectif de la police et sa corruption interne, le manque d’éclairage des rues (cf annexe n°4). D’autant plus que 81% des habitants de la ville se disent insatisfaits par la justice (post-victimisation).
Un autre problème récurrent est au cœur des débats en Colombie et dans sa capitale : les enlèvements par les FARCS. Les FARCS (Forces Armées Révolutionnaires de Colombie) est la principale guérilla communiste colombienne. Chaque année, les autorités colombiennes estiment que cette communauté rebelle coûte environ un à deux points de PIB au pays. (Réparation d’infrastructures, lutte contre les enlèvements et trafics de drogue). Les associations de défense des droits de l’homme avancent le chiffre de 30 000, chiffre qui prend en compte tous les otages enlevés depuis 40 ans, (8000 dont on est resté sans nouvelle). Les actions criminelles représenteraient chaque année 8 milliards de dollars soit quatre fois les revenus issus de l’exportation du café de la Colombie.
III.Les tensions actuelles de la ville et son rayonnement
1.Vers une multimodalité des réseaux de transports
Dès le 19° siècle, les réseaux de transports internes ou externes pour rejoindre la ville se multiplient. En 1884, fut inauguré le service de tramway, en 1889 la première ligne de chemin de fer (rejoignant la mer des caraïbes à Bogota), puis de 1910 à 1940, un système de tramways électriques, doté de nombreuses lignes, s’étendit autour de Bogota et de ses banlieues. Avec le train, ces moyens de transport ont été les piliers du développement de la ville. 1920 vit le premier aéroport d’Amérique latine. Ensuite se bâtirent l’autoroute du Nord, puis le nouvel aéroport El Dorado, principal aéroport de Bogota.
Le réseau de transport public lui, est encore bien loin de répondre à une demande croissante d’usagers. (cf annexe image et vidéo). Environ 15 millions de trajets sont effectués chaque jour dans la ville entre taxis, SITP (minibus), Bus, vélo, voitures, avec une moyenne de 70 minutes. (Ça représente 18 jours par an). Le problème actuel est essentiellement économique, l’Etat n’a plus les fonds pour développer massivement son réseau. Le projet du métro initié depuis 1991, n’arrive pas à voir le jour. La mise en œuvre de la ligne de bus Transmilenio (système de transport en commun rapide et écologique) et le projet «pico y placa » (qui vient limiter fortement l’utilisation de voitures privées aux heures de pointe) sont tous deux bénéfiques à l’amélioration du réseau. Il reste malgré tout, d’énormes progrès et investissements à faire.
Une des causes de l’embrouillage du réseau de transports public est le nombre de véhicules de transports en commun : par rapport à des villes similaires, a Bogotá, le nombre d’autobus par tête est de façon disproportionnée extrêmement élevée (3,6 autobus pour 1000 habitants comparés à 1,7 à Santiago, 1,0 à Quito, 0,7 Curitiba et 0,6 à Sao Paulo).
2. Son poids au niveau national
Bogotá est la capitale, par conséquent, elle absorbe la majorité des entreprises, c’est le centre économique incontesté du pays. La plupart des événements internationaux s’y déroulent.
Bogotá attire entres autres les populations : la ville s’est étendu massivement depuis les années 2000, et pour cause les grandes vagues de migrations des habitants des campagnes avoisinantes vers la capitale, après s’être fait soit expulsés, soit s’être enfuis pour échapper à la violence des zones rurales.
Bogotá attire aussi les investisseurs : en 2012 la capitale fut classée cinquième ville d’Amérique Latine la plus attractive en termes d’investissements et des affaires. 20% des entreprises dans la région sont des industries manufacturières. (production de produits métalliques, d’équipements, de machines, de matières d’imprimeries, des aliments, des produits chimiques, du tabac, des textiles et de bois). Auparavant, Bogota était attractive de par la quantité d’or qui se trouvait dans les environs.
3.Influence régionale et internationale
Bogota est idéalement située non bien loin de la côte Pacifique ou de la mer des caraïbes. Elle est centralisée, lui permettant un rayonnement national et international important. En outre, la Colombie possède plusieurs frontières terrestres avec le Venezuela, l’Equateur, le Pérou, le Brésil, le Panama. Grâce à ses deux façades maritimes et ses nombreuses frontières, les échanges commerciaux sont variés entre Bogota et les autres pays.
Bogota, est au centre des enjeux de la région. Récemment ses relations avec un de ses voisins s’est dégradé. En effet, les tensions entre le Venezuela et la Colombie ont atteint leur paroxysme. Bogota reproche au Venezuela d’abriter cinq hauts dirigeants des Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc) et de l’Armée de libération nationale (ELN, guévariste). De plus, en 2008, l’Equateur avait rompu ses liens avec Bogota après le bombardement colombien d’un campement de la guérilla marxiste des Forces armées révolutionnaires de Colombie (FARC) en Equateur , qui avait fait 25 morts, dont le numéro deux des FARC, Raul Reyes. Aujourd’hui, les relations sont de nouveau cordiales entre les deux pays.
Bogota est aussi connue pour être une des plateformes de la drogue. La Colombie rassemble plusieurs usines de raffinage de coca (en provenance des récoltes du Pérou et de la Bolivie par exemple). De fait, c’est par les aéroports de Bogota que s’en vont chaque année des milliers de tonnes de cocaïne. Entre le 9 et le 15 septembre 2013, les douaniers de l’aéroport de Roissy ont saisi plus de 100 kg de cocaïne à l’aéroport en provenance de Bogota.
Quant au tourisme, selon l’institut statistique de Colombie, la ville est la première destination touristique du pays. Elle attire principalement des états-uniens, des vénézuéliens, et des équatoriens.
CONCLUSION
Bogotá est une grande ville en Colombie depuis des siècles et situé sur un axe nord-sud avantageux. Mais surtout c’est une ville monde aux multiples facettes. Le gouvernement n’a pas conscience de cette échelle ; et les décisions urbanistiques ou politiques par manque de cohérence ou de fonds monétaires reflètent bien ce problème. C’est une métropole qui se transforme en mégalopole, où les interactions avec la région se démultiplient et ce, via un processus accéléré. Si Bogota continue d’améliorer les conditions de vie de ses habitants sans tenir compte de celle des voisins, le processus migratoire vers la capitale ne fera que croître. La ville essaye alors d’instaurer un programme urbanistique proportionnel à l’augmentation de la population. Mais le réseau de transports par exemple, malgré l’invention du système Transmilenio, reste inadapté. En outre, le gouvernement tente de régler le conflit interne avec les FARC pour stopper cette hémorragie démographique, lutter contre l’insécurité permanente dans la ville, et guérir la sclérose qui lui est infligée par ce violent conflit armée. Mais la corruption n’aide pas Bogotá à aller dans ce sens.
SOURCES
-http://hdr.undp.org/sites/default/files/idh_2008_bogota.pdf (informe del desarollo humano=rapport sur le développement humain à Bogotá)
–https://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/demo/documents/Parias-Ruiz.pdf (demographie)
–http://www.eltiempo.com/bogota/908-de-los-bogotanos-cree-que-la-inseguridad-empeoro-o-sigue-igual/14711017 (insécurité)
–https://www.dane.gov.co/files/investigaciones/poblacion/convivencia/2013/Bol_ecsc13.pdf (insécurité)
–http://www.indexmundi.com/colombia/demographics_profile.html (démographie)
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