Depuis 2014 et un plan présenté par Laurent Fabius et Valérie Fourneyron, la France élabore une nouvelle diplomatie sportive[1]. Elle renforce l’influence de la France, de ses clubs, de ses sportifs et de ses institutions sportives dans le monde, et accroît la compétitivité des entreprises françaises dans le marché sportif. Une telle stratégie permet de comprendre que la France se sert du sport comme outil de son soft-power. Elle incite donc une multitude d’actions afin de valoriser ce secteur en France. Les clubs de football professionnels en sont une vitrine majeure et l’Olympique Lyonnais en est un parfait exemple.
Le président de l’Olympique Lyonnais, Jean-Michel Aulas, ici présent à l’Elysée, est une figure emblématique du club et du sport français. ©Maxppp
Le 20 décembre 2017 tombait la liste des meilleures équipes de tous les temps en Coupe des Champions ou Ligue des Champions, réalisé par l’UEFA[2], l’institution qui gère le football européen. Au sein de ce classement, l’Olympique Lyonnais figure en 22e position et surtout, apparait comme étant le premier club français. Soit, le club français le plus emblématique de la coupe d’Europe.
Comparable à la diplomatie sportive de la France, la politique d’internationalisation de l’OL et ses bons résultats sur la scène européenne permettent à la fois de coordonner une stratégie marketing et de situer Lyon sur la carte du Monde. La Ville en fait d’ailleurs la promotion sur son site internet en expliquant que ses différents clubs de sport ont un « rôle primordial dans rayonnement de la ville » à l’étranger. Alors comment l’Olympique Lyonnais participe-t-il du soft-power sportif de la ville de Lyon et de la France ?
De très bons résultats historiques qui restent réguliers sur la scène européenne
L’OL est un club historique en France et en Europe. Le club phare de la ville de Lyon affiche l’un des plus beaux palmarès de France. Les Lyonnais ont remporté le Championnat de France pendant sept saisons, de 2002 à 2008. C’est notamment à cette époque qu’ils ont construit leur renommée européenne en se qualifiant régulièrement pour les coupes d’Europe et en y jouant les phases finales, avec une demi-finale de Champions League à la clé en 2010. De tels résultats permettent au club de s’afficher et de se faire reconnaitre partout en Europe. Chrystalla Agathocléous, jeune chypriote de 25 ans, étudiante à Lyon depuis 2 ans, déclare ainsi qu’elle connaissait le passé de l’Olympique Lyonnais avant de venir étudier dans cette ville. Elle va même jusqu’à avouer que les connaissances sur ce club et ses anciens joueurs ont été un facteur dans sa prise de décision d’étudier en France. Aussi, l’OL est devenu une référence en Europe en réussissant à placer au fil du temps ses meilleurs éléments, issus de son centre de formation, dans les plus grandes équipes du monde. Ainsi, le club rhodanien est classé premier centre de formation français depuis plusieurs années et monte sur le podium mondial des clubs ayant le meilleur centre de formation[3]. Ses jeunes stars partent ainsi représenter le club loin de ses bases comme Karim Benzema, transféré au Réal Madrid en 2009, ou encore Samuel Umtiti parti au FC Barcelone en 2016.
Les Lyonnais affichent actuellement deux équipes compétitives au plus haut niveau national et international. Si l’équipe masculine est sans cesse à la lutte pour le podium en championnat de France et affichent de bons résultats en coupe d’Europe avec une demie finale la saison passée, les féminines ont déjà remporté la League des Champions à quatre reprises, en 2011, 2012, 2016 et 2017. Une hégémonie sur la scène européenne qui ne laisse pas les amateurs de football européen indifférents et qui permet à Lyon de rayonner dans les pays européens.
L’importance accordée à l’équipe féminine par Jean-Michel Aulas, le président du club, permet de se poser en initiateur du mouvement footballistique féminin en France et en grand artisan de son développement en Europe. Face à l’équipe créée par Jean-Michel Aulas et ses bienfaits sur la réputation du club et son rayonnement, plusieurs équipes à dimension internationale, comme le Paris Saint-Germain ou le Bayern Munich, ont décidé de miser sur le développement de leur filière féminine. Ainsi, la France sort grandie de cette stratégie en alignant en 2017 une finale de Champions League féminine, 100% française entre le Paris Saint-Germain et l’Olympique Lyonnais et apparait plus que jamais comme grande nation du football féminin en s’attribuant Lyon comme capitale.
Une stratégie d’ouverture à l’international
Le football féminin se développe de manière exponentielle depuis ces dix dernières années et l’Olympique Lyonnais mise donc sur ce développement pour établir une partie de sa stratégie internationale. Ainsi, en plus de truster les premières places européennes permettant aux amateurs de football européens de situer Lyon sur une carte, le club français place toutes les joueuses de son effectif au sein des équipes nationales, représentant Lyon dans leur pays. C’est une stratégie similaire chez l’équipe masculine qui fournit plus d’une dizaine de sélections différentes.
Une des stratégies du mercato de Jean-Michel Aulas est d’acheter des joueurs étrangers confirmés dans leur pays afin de faire rayonner l’Olympique Lyonnais à l’étranger et de s’étendre sur des marchés de consommateurs encore trop peu exploités par le club. Ainsi, Alex Morgan, joueuse de football la plus populaire au monde est venue jouer pendant six mois pour le club Rhodanien, en provenance des Etats-Unis. L’ambition était simple : contracter la joueuse la plus médiatique du monde afin de toucher un public de connaisseurs aux Etats-Unis, augmenter les parts de marché de l’OL sur le continent, et favoriser la reconnaissance internationale de Lyon. Le club a même réalisé une série de reportages vidéo pour ses fans dans lesquels il met en lumière la star américaine. Dans ce sens, les relations entre l’OL et le Brésil sont grandes. Le club français a auparavant accueilli de nombreux joueurs brésiliens, Juninho, Fred ou encore Sonny Anderson, populaires dans leur pays, et qui sont devenus des icônes dans l’histoire de l’Olympique Lyonnais. Ce lien est toujours maintenu aujourd’hui et entre dans la stratégie lyonnaise d’ouverture à l’international.
Dans cette politique d’ouverture, l’Olympique Lyonnais contracte plusieurs partenariats avec des clubs de pays étrangers. Le but étant d’échanger le savoir-faire lyonnais contre les bons éléments futurs, qui seront formés dans ces nouveaux pôles, et d’étendre la renommée du club au-delà des frontières. En jugent les partenariats avec les clubs de Yokohama F. Marinos au Japon, l’Athletico SC au Liban, le Club africain en Tunisie, l’AS Dakar Sacré-Cœur au Sénégal ou encore en Corée du Sud. Certaines équipes de jeunes sont sponsorisées par l’OL, notamment aux Etats-Unis. Par exemple, le club français a donné des équipements officiels à une équipe de jeunes new-yorkais qui représentaient le club dans un tournoi local[4]. Cette ouverture vers de nouveaux marchés est une stratégie également privilégiée par les plus grands clubs de football européens et par les institutions promouvant le football.
En plus de partenariats avec des clubs étrangers, l’OL coopère pleinement avec l’UEFA. Par exemple, le Groupama Stadium, le nouveau stade lyonnais, accueillera la finale de l’Europa League en mai prochain et offre donc une vitrine gratuite au club Rhodanien.
Un président investi dans le monde du football européen
L’Olympique Lyonnais est un club de football très bien géré. Un exemple en France et en Europe, encensé par Karl-Heinz Rummenigge, le président du Bayern Munich et ancien président de l’Association Européenne des Clubs[5]. L’organisation du club génère de nouveau des profits depuis deux ans, avec des recettes augmentant de 142% après six exercices de pertes, entachés par la construction du nouveau stade. Le club Rhodanien est le premier club français et fait partie du cercle très fermé des clubs européens qui se sont positionnés en bourse, via sa holding OL Groupe, en 2007.
Une partie de ces recettes sont notamment à mettre au crédit du nouveau stade, le Parc OL récemment renommé en Groupama Stadium, remplaçant le vieux Stade Gerland. Un stade privé, appartenant au groupe et non plus à la municipalité, comme dans la plupart des clubs européens. Cette construction permet à l’OL Groupe de gérer soit même son budget et ses recettes, ainsi que d’augmenter la source de ses revenus. Jean-Michel Aulas loue son stade futuriste, avec des infrastructures modernes pour des activités extérieures comme des matchs de rugby, des matchs internationaux, comme pendant l’Euro 2016, ou encore des concerts avec les prestations de Rihanna et Céline Dion dans cette nouvelle enceinte. Ce stade permet de rendre visible le savoir-faire lyonnais et français et surtout agit comme une vitrine internationale aux yeux des néophytes du football. Le club propose un cadre favorable aux investisseurs étrangers. Un fonds chinois est entré au capital de la holding lyonnaise à hauteur d’un capital de 100 millions d’euros. Cet investissement va permettre à l’OL de se développer en Chine et de s’insérer dans un marché en pleine expansion.
Le président du club, Jean-Michel Aulas est une figure du paysage du football français depuis plus de 30 ans. Personnalité emblématique de l’OL, il a mené son club aux sommets et le gère selon lui « comme une holding de divertissement », à laquelle « il faut appliquer les mêmes méthodes que dans l’industrie ou les services informatiques »[6]. Son implication pour son club dans les instances françaises, comme pour la promotion du football français aux instances européennes, lui permet d’avoir une renommée et une considération qui lui confèrent un pouvoir dans toutes les institutions européennes dirigeantes du football. Cette autorité permet de positionner l’OL et le football français comme influents en Europe. Jean-Michel Aulas est d’ailleurs le fondateur de l’Association Européenne des Clubs, qui regroupe 230 clubs européens dans leur envie de porter le football européen et d’aligner leurs revendications lors d’entretiens avec l’UEFA, la FIFA ou encore l’Union Européenne. Anciennement président général de l’Association, il est désormais président de plusieurs comités internes. A l’international, Jean-Michel Aulas porte la voix de l’Olympique Lyonnais et lui permet de s’assurer d’une notoriété institutionnelle grandissante bénéfique pour le club, pour la France et la ville de Lyon.
Le cas de l’OL est une référence pour illustrer le soft-power de la France. Toutes les différentes stratégies d’internationalisation mises en place par le club et dirigées par son président Jean-Michel Aulas, lui permettent de sortir grandi et de se développer à l’international. En parallèle de son développement, le club entraine sa ville et son pays avec lui. Tout cela fait que le club de l’Olympique Lyonnais représente la France et plus particulièrement Lyon à l’international. Ainsi la France est reconnue comme une nation puissante et influente dans le football européen grâce notamment à son implication auprès des instances dirigeantes et la ville de Lyon de s’y imposer comme une place forte.
Auteur : Guillaume Savary
Bibliographie :
Articles :
ALYCE Anthony. « Comment l’OL compte internationaliser ses activités ? » ECOFOOT.FR (blog), 9 août 2016. https://www.ecofoot.fr/olympique-lyonnais-internationalisation-activites-1182/.
Site internet de la ville de Lyon, rubrique « sports », https://www.lyon.fr/sport/la-vie-des-clubs-sportifs
Site internet de l’Association Européenne des Clubs, http://www.ecaeurope.com/
« Football : l’Olympique lyonnais s’ouvre à son tour aux capitaux chinois ». Lemonde.fr. Consulté le 10 janvier 2018. En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/football/article/2016/12/13/football-l-olympique-lyonnais-s-ouvre-a-son-tour-aux-capitaux-chinois_5048250_1616938.html#aY1bf2D8MMgs9TRy.99
Ouvrage :
Guégan, Jean-Baptiste. Géopolitique du sport. BREAL, 2017.
- Ministère des Affaires étrangères, Présentation des grands axes de la diplomatie sportive, Paris, 15/01/2014, 7 pages. ↑
- Union des Associations Européennes de Football ↑
- « Lettre hebdomadaire ». Consulté le 10 janvier 2018. http://www.football-observatory.com/IMG/sites/b5wp/2017/200/fr/. ↑
- « Partenariat : l’OL soutient une équipe de New-York ». Olweb.fr. Consulté le 10 janvier 2018. http://www.olweb.fr/fr/article/partenariat-la-ol-soutient-une-equipe-de-new-york-32354.html ↑
- « Karl-Heinz Rummenigge : “Je pense que Lyon va se développer grâce au Parc OL” | OLWeb.fr ». Consulté le 10 janvier 2018. http://www.olweb.fr/fr/article/karl-heinz-rummenigge-je-pense-que-lyon-va-se-developper-grace-au-parc-ol-72635.html. ↑
- « L’Olympique Lyonnais, une OL’ding comme une autre ? ». Le Libéro Lyon. Consulté le 10 janvier 2018. http://www.leliberolyon.fr/lolympique-lyonnais-olding-autre/78214 ↑
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