Pourquoi le Brésil a-t-il raison d’investir à Cuba
L’investissement à Porto Mariel élarge la portée du commerce et de la zone d’influence du Brésil pour José Antonio Lima.
Causant une certaine indignation dans certains milieux de la société brésilienne à l’ouverture du port de Mariel, à Cuba, le lundi 27 Octobre 2014, avec la présence de Dilma Rousseff. L’étonnement est arrivé car ce travail a été construit grâce à un financement de la BNDES (Banque Nationale du Développement Économique et Social), datant dugouvernement Lula. L’investissement est né d’une alliance idéologique entre les gouvernements PT (Parti des Travailleurs) et de la famille Castro, responsables de la dictature sur l’île. C’est une erreur de voir le prêt de cette façon. C’est un acte pragmatique du Brésil.
Le port de Mariel est colossal. Il est considéré comme aussi sophistiqué que les plus grands terminaux des Caraïbes, Kingston (Jamaïque) et Freeport (Bahamas), et il est en mesure de recevoir des navires aussi massifs que des porte-conteneurs, allant traverser le canal de Panama lorsque l’expansion de cette partie sera terminée, l’année prochaine. Le travail, construit par l’entreprise brésilienneOdebrecht en partenariat avec l’entreprise cubaine Quality, a coûté 957 millions de dollars, avec 682 millions financé par la BNDES. En revanche, 802 millions de dollars investis dans le projet ont été dépensé par le Brésil, dans l’achat de matériaux et services brésiliens. Selon les calculs d’Odebrecht, cette valeur a généré 156 000 emplois directs et indirects dans le pays.
Le projet s’autofinance, mais l’intérêt du Brésil va au-delà. Il ya quatre aspects importants à analyser.
Le premier a été exposé pendant le discours de Dilma à Cuba. Le Brésil veut, dit-elle, devenir «partenaire économique de premier ordre” de Cuba. Les exportations brésiliennes vers l’île ont quadruplé dans la dernière décennie, arrivant à 450 millions de dollars. Le Brésil s’élève à la troisième place de la liste des partenaires de l’île de Cuba (derrière le Venezuela et la Chine). La tendance est en hausse si la population de Cuba (11 millions de personnes), exclue aujourd’hui de l’économie internationale, est considérée comme un marché potentiel pour les entreprises brésiliennes.
Ce marché sera possible seulement si l’économie cubaine ne fonctionne plus de façon rudimentaire comme aujourd’hui. Comme l’a déclaré le secrétaire général de l’Amérique du Sud du ministère des Affaires étrangères, l’Ambassadeur Antonio José Ferreira Simões, le modèle économique de Cuba a besoin “d’une mise à jour”. Le port de Mariel est essentiel pour cela, il sera accompagné par une zone spéciale de développement économique basée sur les modèles existants en Chine. Là bas, contrairement à ce qui se passe dans le reste du pays, les entreprises pourront bénéficier d’un capital étranger de 100%. Défenseur d’une relation favorable avec Cuba, le ministère des Affaires étrangères cherche à compléter ainsi l’une de ses principales fonctions: développer le marché pour les entreprises brésiliennes. Pas étonnant, donc, que le Brésil ait ouvert une nouvelle ligne de crédit de 290 millions de dollars pour la mise en œuvre de la zone spéciale de Mariel.
Voici le troisième point, l’emplacement de Mariel. Le port est à moins de 240kilomètres du plus grand marché du monde, les États-Unis. L’embargo américain sur Cuba est toujours en vigeur, mais il n’est pas viable à long terme. «L’embargo ne durera pas éternellement et quand Cuba sera autonome, Cuba sera stratégique pour les entreprises brésiliennes en raison de sa position géographique,” a déclaré à Reuters une source anonyme du gouvernement brésilien. Étant donné que la population cubaine se compose encore du travail pas cher pour les entreprises installées le potentiel commercial de Mariel est très fort.
Il y a un quatrième point. En faisant de Cuba un partenaire essentiel, le Brésil étend sa zone d’influence dans les Amériques à un point où les États-Unis n’ont pas d’entrée. L’administration de Barack Obama est en faveur de lever l’embargo, comme l’a démontré clairement le président américain en Novembre dernier, lorsqu’on lui a demandé de reconsidérer la relation avec Cuba. Le problème c’est qu’il s’avère que la Maison Blanche n’a aucun moyen de renverser l’embargo actuellement face à la pression intense du Congrès pour le moment. Face à l’absence des États-Unis, l’influence brésilienne augmente à Cuba.
Une grande partie des critiques de la relation entre le Brésil et Cuba s’attaque au gouvernement brésilienen dénonçant les échanges avec une dictature qui ne respecte pas les Droits de l’Homme. Cette critique limite l’analyse de la politique étrangère qu’aux aspects idéologiques, comme en témoigne le silence quand ils sont eux aussi dans des relations commerciales entre le Brésil et la Chine, par exemple. Il n’est pas possible, malheureusement, pour un état de gérer ses échanges économiques avec ses relations étrangères uniquement sur le critère du respect des Droits de l’Homme. Si cela était possible, le monde serait bien plus beau qu’aujourd’hui.
Ajouté à cela le fait que le maintien de bonnes relations avec Cuba n’est pas nouveau pour l’Etat brésilien, et pas seulement avec le gouvernement actuel. Les relations Brasilia-La Havane ont repris en 1985 et elles se sont développées depuis. En 1992, pendant le gouvernement de Fernando Collor, il y avait une tentative d’échanger des vœux aux élections pour des postes dans des organisations internationales. La pratique, comme le journal Folha de São Paulo a montré en 2011, a continué dans le gouvernement de Fernando Henrique Cardoso, en vertu de laquelle le Brésil a également construit des partenariats et des échanges avec Cuba.
En fait, en 1998, le chancelier du president Fernando Henrique Cardoso, Luiz Felipe Lampreia, a rencontré un dissident cubain important, Elizardo Sánchez, quelque chose que le gouvernement brésilien semble loin de faire. Vous pouvez et devez, critiquer le fait que le pouvoir éxecutif n’a pas condamné publiquement les violations de droits de l’homme pendant la dictature de Castro, mais on ne peut pas condamner l’investissement dans le port de Mariel. Dans ce cas, l’intérêt national brésilien a prévalu.
Source : http://www.cartacapital.com.br/internacional/por-que-o-brasil-esta-certo-ao-investir-em-cuba-1890.html
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